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Les billets hebdos de l'actualité du GrandTerrier

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Sommaire

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Modifications au jour le jour : [Journal des MàJs]
Anciennes pages de bienvenue : [Affiches]
Anciens billets : [Actualité, archives]

1 Binious et bombardes en 1908

Billet du 14.02.2016 - « Bien sûr, nous sommes résolument cosmopolites. Bien sûr, tout ce qui est terroir, béret, bourrées, binious, bref, franchouillard ou cocardier, nous est étranger, voire odieux. », Bernard-Henri Lévy, 1985, Edito dans Globe.

La petite histoire est celle-ci : sur le site delcampe.net, une carte postale au titre complet « En Bretagne - Concours de binious - Sonneurs d'Ergué-Gabéric » a été mise aux enchères début janvier pour un mois.

À la réception de cette carte ayant circulé le 11.09.1909 de Guingamp vers l'Oise, on peut y voir sur la gauche un monument à la mémoire de La Tour d'Auvergne (1743-1800), le premier grenadier des Armées Françaises après la Révolution.

Et là commence l’enquête par la consultation des journaux de l'année 1908 : on y apprend que la statue en bronze (fondue par l'armée Allemande dans les années 1940) avait été inaugurée à Quimper et fait l'objet d"une fête bretonne les 11 et 12 octobre 1908.

Un concours des meilleurs couples de sonneurs bretons de biniou et bombarde y avait été organisé, et les journaux Le Finistère et Le Courrier précisent que le 6e prix a été attribué à « Hémidy, père et fils, d'Ergué-Gabéric ». Après consultation de la liste électorale de 1910 indiquant des Hémidy à Garsalec, René Le Reste, né dans ce village en 1936, est consulté.

Et il confirme : « J'ai souvent entendu par mes parents parler d'eux. Ils étaient des sonneurs professionnels père et fils. Par contre j'ai connu leur fille et soeur Catherine Hémidy, née en 1899. J'ai entendu aussi par d'autres sonneurs qu'ils avaient une certaine notoriété. À cette époque il habitaient à 100m de ma maison natale, à Garsalec donc. C'était encore une vraie chaumière, toit en chaume et porte d'entrée à deux battants. »

En savoir plus : « Les deux sonneurs gabéricois au concours de binious de Quimper en 1908 ».

 

Pour montrer à BHL que les traditions populaires peuvent prétendre à une certaine universalité, une belle video « Coiffes et costumes de Bretagne » vient d'être produite et diffusée en prime-time sur Tébéo, TébéSud et TVR, avec une rétrospective des croquis de Lalaisse et bien sûr la présentation des richesses locales : « Kant bro, kant giz » (100 pays, 100 guises).

 

Aux manettes de cette video il y avait André Espern (réalisation, images) et Ronan Le Gall (images, textes, voix off), et bien sûr pour présenter le pays glazik, Raymond Le Lann qui porte lui-même un très beau costume azuré. Lorsque la période de replay des chaines de TV sera passée, le DVD sera disponible depuis le site Internet des films du baladin

2 Une paroisse dans la paroisse

Billet du 07.02.2016 - Où le recteur de la paroisse d'Ergué-Gabéric s'adresse à son évêque et vicaire général pour être autorisé à réviser à la baisse le nombre de messes et de confessions à assurer pour le compte des Bolloré dans leur chapelle privée de la papeterie d'Odet.

Louis Lein est nommé recteur d'Ergué-Gabéric en 1909 après avoir exercé le même ministère à Landeleau et Plounéour-Ménez. À Landeleau il a connu la lutte contre la loi de la Séparation des Eglises et de l'Etat, ce qui lui a valu un procès en 1906 à Chateaulin, rejugé à Rennes suite à appel du ministère public.

À Ergué-Gabéric, le conflit de l'église et des paroissiens contre la loi républicaine fut gérée par le recteur Jean Hascoët dont Louis Lein parle en ces termes dans sa première lettre à son évêque en août 1912 : « Cette messe est-elle seulement pour la famille Bolloré et les ouvriers qui ne pourraient aller à la messe ailleurs ? Je crois que c'est ainsi que l'entendait Mr Hascoët, un de mes prédécesseurs qui eut lui-même quelques difficultés provenant d'Odet ».

Nous avons au total quatre lettres écrites par le recteur, conservées aux archives diocésaines, où l'on découvre la charge et la complexité du services paroissial d'Ergué-Gabéric avec ses grand' messes, ses basses messes de chapelles, le catéchisme, les prédications, les confessions, le service aux malades ... et ce qui n'arrange pas les choses : les exigences religieuses supplémentaires de la famille Bolloré qui met à disposition sa chapelle privée St-René à Odet.

Cette dernière est exigüe en 1912-1913 : « la chapelle est beaucoup trop petite. Et si elle était agrandie (ce qui va arriver dans quelques temps), les difficultés deviendraient encore plus fortes et l'on finirait par faire une autre paroisse dans la paroisse. » L'architecte nantais René Ménard, ami des Bolloré, est chargé de l'agrandissement et les travaux de rénovation seront achevés en 1921.

En 1912, René Bolloré et son épouse demandent « à l'administration diocésaine » une messe supplémentaire « tous les premiers vendredis du mois à Odet », ce en plus de la messe, confession et bénédiction du dimanche. Les trois vicaires ont du mal à assurer toutes les messes et confessions au bourg et dans les trois autres chapelles de la paroisse.

 
Chapelle St-René d'Odet agrandie par René Ménard en 1921

Il est question aussi de décaler d'une demi-heure la messe du dimanche : « Jusqu'ici la messe de la papeterie était dite à 8 heures les dimanches et jours de fêtes, les parents de ceux qui assistaient à cette messe, pouvaient encore être remplacés par eux, et venir pour 10 heures à la grand' messe du bourg ».

Pour diminuer la charge de travail des prêtres, le recteur suggère de réduire les confessions à Odet à un samedi par mois, avec ajustement pendants les grandes fêtes religieuses. Et il charge son évêque, le célèbre Adophe Duparc, d'annoncer la mauvaise nouvelle à Monsieur Bolloré ...

À partir des années 1930, un des vicaires de la paroisse sera affecté au service d'Odet, le premier étant l'abbé Le Goff, puis l'abbé Vourc'h. Les suivants, notamment Jean Corre et Jean-Marie Breton, prendront le titre d'aumônier et logeront dans une bâtisse attenant à la papeterie.

En savoir plus : « 1912-1913 - La question de la réorganisation du service paroissial à la papeterie d'Odet ».

3 La légende bretonne de l'Ankou

Billet du 30.01.2016 -« Vienne enfin, un jour, par la faux de l'Ankou / Me jeter au tombeau, en me tranchant le cou. / Alors je pourrai dire en tombant sous la faux / Benedictus te Ankou, tu as fini mes maux. », JM Déguignet (1834-1905), "Rimes et Révoltes", 1999, Blanc Silex.

Grâce à « La légende de la mort » d'Anatole Le Braz publiée en 1893, tout le monde connaît aujourd'hui l'Ankou (bretonnisme traduit du breton « an Ankoù » [1*]) qui récupére dans sa charrette grinçante les âmes des défunts récents. On le représente comme un squelette revêtu d'un linceul, ou un homme grand caché sous un large feutre et tenant une faux au tranchant tourné en dehors.

Mais on connait moins les mémoires ou les poèmes de Jean-Marie Déguignet qui évoque aussi cette légende, avec une explication critique de la vision folkloriste d'Anatole Le Braz. On peut compter une dizaine de passages où le paysan bas-breton décrit les croyances rurales autour de la mort qu'il a lui-même observées et explique les origines d'une invention "chrétienne".

Sur le thème de « notre Ankou breton », Déguignet en fait d'abord ce portrait conventionnel : « il voyage jour et nuit, semant sur son chemin une espèce de terreur panique, le jour donnant des frissons et la nuit faisant entendre le wig-wig de la charrette des morts ».

Jeune enfant à Ergué-Gabéric, un jour où il avait une forte fièvre qui devait l'emporter, il croit même voir la faux de l'Ankou : « tout le monde avait entendu quelque chose annoncer que j'allais bientôt partir au bourg sur le dos et les pieds en avant ... la nuit venue, je vis tout ce dont elles avaient parlé, je vis le spectre de l'Ankou, le spectre d'un spectre avec sa faux me faisant des grimaces au pied de mon grabat ».

Mais bien sûr personne en réalité ne peut attester avoir vu le messager dans sa ronde macabre sur les chemin de campagne bretonne : « l'Ankou, ni sa prétendue charrette n’ont jamais été vus par personne, attendu que l'Ankou n'est qu'un signe ou intersigne de la mort mais toujours invisible ».

Déguignet s'amuse de la naïveté des folkloristes, Anatole Le Bras le premier, qui ont cru sur parole toutes ces légendes bretonnes : « Anatol mest an Ankou » (Anatole, le maître de l'Ankou) ; « un de ces savants chercheurs de légendes » ; « c'est ainsi qu'ils en content à ces messieurs savants quand ceux-ci les forcent à parler » ; « Ah se dit ce malin quemener ... je vais te dire comment il est fait puisqu'il y aura la goutte à boire  ».

 
Quevilly, "JMD, Contes et légendes de Basse-Cornouaille", An Here, 1998

Et il donne enfin les seules explications sociologiques et religieuses auxquelles il croit :

  • « la légende de l'Ankou vient de la même source que toutes les légendes bretonnes, c'est à dire des missionnaires chrétiens et des prêtres catholiques, leurs successeurs. »
  • « Toutes ces légendes et celle de l'Ankou plus que les autres, portent la marque irrécusable du christianisme. »
  • « Ankou vient du mot anken, ankenius, ankrez, qui veut dire inquiétude, peur, frayeur, mot qui caractérise fort bien l'exécuteur des hautes œuvres divines. »
  • « Il faut à chaque curé son Ankou comme il lui faut un saint patron de la paroisse »
Ceci dit, vieux et à l'article de la mort, Déguignet se met encore lui-même en scène face au personnage de légende :

« Ce vieux ... est toujours dans son trou,
Pensant et écrivant en attendant l'Ankou,
Ce faucheur acharné qui fauche les braves,
Les pauvres, les honnêtes, les gueux, les esclaves.
 »

En savoir plus : « L'invention des légendes de l'Ankou selon Jean-Marie Déguignet ».


Nota [1*] : Le mot est masculin en breton ; selon Dom Le Pelletier il serait à l'origine le pluriel de « anken » qui désigne l'angoisse, la peine. Arzel Even (revue Ogam, 1950-53) propose une autre étymologie : « nk » représente l'état réduit de la racine « nek » (périr) (nekros en grec, et nec, necare en latin).

4 Photos sur carton de 1875-1880

Billet du 23.01.2016 - « Venez-y tous, bons pardonneurs, Qui sçavez faire les honneurs, Aux villages, de bons pastez, Avecques ces gras curatez, Qui ayment bien vostre venue Pour avoir la franche repeue », François Villon (1431-1463).

On aurait tendance à affirmer que le mot « Pardonneurs » est un bretonnisme pour nommer les personnes assistant à un pardon breton, car en français classique le pardonneur est normalement l'ecclésiastique de haut rang qui conduit la procession avec croix et bannières. À notre surprise le grand poète François Villon utilisait aussi cette même expression dans son poème « Les Repeues franches » pour désigner l'ensemble des pèlerins venus sur le lieu du pardon.

Toujours est-il qu'il y a des pardonneurs sur le cliché historique ci-contre diffusé sous forme de photo collée sur carton, préfiguration des cartes postales, signé « E.Bernier », soit Eugène Bernier (1841,~1906), photographe installé à Paris, puis à Dinan, connu pour ses portraits de célébrités françaises et étrangères, et ses « Vues de la Bretagne ».

Les pardonneurs costumés de Kerdévot, hommes et femmes, posent sur l'herbe de l'enclos près du calvaire, face à l'objectif et au soleil éblouissant. Les petites filles et une femme en habit de ville, se protègent sous leurs parapluies-ombrelles.

Grand merci à Christophe Rochet, un quimpérois-crozonais passionné des cartes postales et photos anciennes et très grand connaisseur des costumes bretons, qui nous a communiqué cette trouvaille inédite, ainsi qu'une autre photo contrecollée de la même époque.

L'auteur de cette dernière est Ferdinand Carlier (1829-1893), photographe né à Versailles et installé à Vannes, connu pour ses clichés de monuments et de villes bretonnes, et ses portraits de militaires et de bretons/bretonnes en costume.

La photo numérotée n° 25 représente une jeune fille gabéricoise en coiffe et bel habit brodé. La coiffe n'est plus le bonnet à huppe des années 1840 avec ses grandes ailes encadrant les côtés du visage. Ici, les ailes sont coupées et la coiffe est rehaussée, bien plus imposante que la « borledenn » actuelle. Le tablier (de soie ?) est de couleur claire et joliment brodé. La grande jupe et le corset sont noirs, et un « scapulaire de dévotion » est porté et joint à l'arrière du cou.

 

En savoir plus sur les deux photos : « La photo sur carton des pardonneurs ... » et « Photo contrecollée d'une jeune gabéricoise ... ».


« IIIe République et Taolennoù - Cléricaux contre laïcs en Basse-Bretagne - Ière époque : 1880-1905 » est un livre très attendu, concocté par le sympathique Pierrick Chuto, qui va paraître début mars prochain - préfacé par Christian De la Hubaudière -, sur LE SUJET LOCAL incontournable du début du 20e siècle : les tensions autour de Quimper sur la Loi de séparation des Eglises et de l'Etat. Cela touchera les gabéricois que nous sommes, car, outre le personnage central du prédicateur bretonnant Auguste Chuto (d'où les Taolennoù), on trouve aussi dans ce premier tome des personnalités de notre commune comme Corentin Signour (celui de la bannière du Tonkin) et le recteur Jean Hascoët, sans oublier bien sûr le pardon de Kerdévot : « Ce même dimanche, sous un soleil radieux, les deux promis assistent au pardon de Kerdévot en Ergué-Gabéric ... ». Si vous voulez être sûr d'avoir votre exemplaire, vous pouvez d'ores et déjà le réserver à un prix préférentiel sur le site http://chuto.fr

5 Matières féodales aux XVII/XVIIIe

Billet du 16.01.2016 - « Pour l'(es) infatigable(s) collecteur(s) de l'histoire et du patrimoine d'Ergué-Gabéric qui retrouvera(ont) dans cette plaquette l'écho des nombreuses recherches publiées sur Grandterrier, avec le même désir de rendre proches ceux qui ont vécu avant nous », Daniel Collet.

Quel est le point commun entre le dossier de Daniel Collet « Les Gabéricois aux XVIIe et XVIIIe siècles. Population, économie, société » éditée par l'association Arkae en décembre 2015, et la plaidoirie du jurisconsulte Pierre Hévin le 15 décembre 1693 au Parlement de Bretagne ?

Cette phrase du géographe Jean-Baptiste Ogée : « La paroisse relève du roi, à l'exception des trois à l'exception des trois villages de Kermorvan, de Kernechiron et Kerougan qui se trouvent sous le fief de l'évêque de Quimper ».

Les 31 pages inédites de Daniel Collet constituent une analyse contextuelle très intéressante des inventaires, registres et documents d'archives des deux siècles se terminant par la Révolution. L'inventaire de la population de 1790 y tient une place importante, mais aussi de nombreux documents de succession et autres aveux ou dénombrements, sans oublier le rôle de capitation du tiers-état de 1720.

À noter aussi qu'en pages intérieures et en annexe un lexique propose une définition des principaux termes anciens utilisés (notamment les types d’impôts et charges). Et, outre l'existence des familles nobles et le clergé paroissial, c'est surtout la diversité du tiers-état majoritaire, les « sans-voix », qui est analysée grâce aux archives.

Le sujet du deuxième ouvrage porte sur la ville de Quimper et la question de savoir si la cité peut être considérée dans sa globalité comme le fief de l'évêque et non du roi. Et dans les arguments épiscopaux défendus par Perre Hévin il y a le fait qu'au moins trois villages d'Ergué-Gabéric constituent une mouvance ancestrale du fief de l’Évêque, et que donc cette paroisse voisine de Quimper n'est pas assimilable à un simple « proche Fief du Roy ».

Dans ce jugement qui se conclut par un constat d'universalité du fief de l'évêque dans sa ville close de Quimper et ses remparts (par opposition au quartier extérieur de la « Terre-au-duc »), on peut noter les points suivants :

 
  • Le jurisconsulte Pierre Hévin peut être désinvolte, voir cinglant, vis-à-vis du sieur réformateur : « On lui répond qu'il debite sur ce point avec une hardiesse extrême, une fausseté manifeste et convaincuë par les titres mêmes du Roi  ».
  • Les trois villages gabéricois cités par le célèbre avocat sont Kermorvan, Kerougan (probablement Keranguéau) & Kernechriou ou Kernerpiriou (ou Coat-Piriou).
  • D'autres villages d'Ergué-Gabéric étaient détenus par l’évêque : « trois anciens comptes du revenu de l'Evêché des années 1459, 1509 et 1533 dans lesquels le Receveur se charge des rentes dûës dans cette Paroisse d'Ergué-Gabéric, et entr'autres sur ces mêmes Villages », ce qui est confirmé par la cartographie et analyses de Norbert Bernard en 1997.

En savoir plus  : « COLLET Daniel - Les Gabéricois aux XVIIe et XVIIIe siècles », « HÉVIN Pierre - Matières féodales et coustume de Bretagne » et « BERNARD Norbert - Etude topographique et historique des chemins d'Ergué-Gabéric au 16e siècle ».

6 Bulletin du renouveau hivernal

Billet du 08.01.2016 - « Le renouveau a toujours été d'abord un retour aux sources », Romain Gary (1914-1980), La Danse de Gengis Cohn.

Au menu de ce 32eme bulletin, tous les articles et billets du trimestre naturellement, avec ses quelques photos et facsimilés de documents d'archives :
1. Navigation sur les grandes cartes communales,
2. Succession et ribot de pierre du village de Kerveady,
3. Un Diogène bas-breton et philosophe stoïcien,
4. Epidémie de teigne aux écoles laïque et libre,
5. Enfance bafouée et abus sexuel à la Croix-Rouge,
6. Esquisses au crayon d’un artiste prolixe et fantasque,
7. Beauté et majesté de certains arbres historiques,
8. Guerre des mouteaux du moulin de Pennarun en 1749,
9. Transactions foncières de Nicolas Le Marié à Odet,
10. L’emprise des chasseurs du rallye de Saint-Guénolé,
11. Sommier de la Légion d’honneur du moulin du Faou,
12. Les deux renables et la loi du 28 ventôse de l’an 4.
13. Le conte de Noël du Korrigan du retable de Kerdévot.

Ce bulletin est bien fourni en cartes historiques, à l’occasion de la publication d’une carte I.G.N. au grand format et de la collection complète des 20 feuilles du cadastre napoléonien de 1834. Et la quatrième de couverture avec les personnages de la scène de nativité du retable de Kerdévot est un prétexte pour reprendre un joli conte de Noël avec comme personnage un sympathique korrigan.

Recevez aussi nos vœux renouvelés de « Bonne année » en breton grâce au tableau noir de l'instituteur Loïc Jadé : « BLOAVEZH MAT 2016 DAOU VIL HA C'HWEZEG » avec son H muet et T bref, sa mutation adoucissante sur MIL et un C'H grave, présent, citoyen et déterminé tout à la fois.

Enfin, il y a 2 ans, on avait évoqué un projet de publication d’un livre sur le village papetier d’Odet en partenariat avec l’association Arkae. Cela ne s’est pas fait, mais le projet entamé est à ce jour bien plus qu’une maquette inachevée.

 

Et en tablant désormais sur la perspective de plus de temps libre et moins de contrainte professionnelle, l’édition indépendante grandterrienne verra le jour en 2016-17, c’est promis !


Visionner et/ou télécharger le bulletin  : « Kannadig n° 32 Janvier 2016 ». Ce présent week-end, le bulletin sera imprimé, agrafé, plié, enveloppé, adressé, oblitéré et déposé dans la boite-à-lettres de quartier, et vous le recevrez mardi ou mercredi prochain.

7 Renables et loi du 28 ventôse

Billet du 31.12.2015 - « Dans les romans de Jane Austen et de Balzac, le fait que la rente annuelle apportée par un capital terrien soit égale à environ 5 % de la valeur de ce capital, ou bien encore que la valeur d’un capital corresponde à environ 20 années de rente, est une évidence » Thomas Piquetty

Thomas Piquetty, dans sa rétrospective historique « Le Capital du XXIe siècle », aurait pu également citer l'article 5 de la loi du 28 ventôse de l'an 4 : «  la valeur des biens sera fixée à raison de 22 fois le revenu, pour les terres labourables, prés, bois, vignes et dépendances, d'après les baux existants en 1790 ».

C'est en effet la règle qui a été appliquée dans l'acte d'estimation de certains biens fonciers confisqués à leurs propriétaires ecclésiastiques ou nobles, comme le moulin du Cleuziou/Cleuyou en 1796 :
Image:Right.gif « Total (des revenus annuels) : deux cent cinquante deux livres deux sols ci . . . . 252 lv 2 s»
Image:Right.gif « qui multiplié par 22 (comme la loy du vingt huit ventose dit ainsy) donne un capital de la somme de cinq mille cinq cent quarante six livres ci . . . . 5546 lv  »

Si l'on remonte dans le temps, soit cinq ans auparavant, on retrouve le nouveau meunier François Kerhoas prenant la suite de Sébastien Jézégabel aux conditions suivantes :

Image:Right.gif Il doit règler le prix de 1500 livres pour tous les équipements intérieurs (le grand fer, la meule dormante et la meule courante, la roue ou la pirouette, les cordes) ou extérieurs (les vannes d'amenée ou de fuite, les rigoles ou biefs, les chaussées), à savoir les « petit et grand renables »

  • à noter que « renabl » (plur. -où) est à l'origine un terme breton signifiant « inventaire ».

Image:Right.gif De même il accepte de payer la rente aux propriétaires nobles du moulin : « clauses, points et conditions auxquels il soit engagé envers Monsieur et Madame de Tinténiac », « le prix de chaque année est de deux cent quarante livres ».
Image:Right.gif Enfin le meunier du Cleuziou accepte aussi la contrainte de dépendre également d'une seigneurie supérieure, à savoir « les Régaires », l'administration temporelle du domaine foncier de l’évêque de Quimper.

 

On note aussi dans le rapport de 1796 l'état de l'amorce du bief, dite "chaussée" : « Inspection par nous fait égallement de la chossé du moulin en son côté du midy l'avons trouvé en très mauvais état et susceptible d'une réparation indispensable que nous estimons être de deux cens livres valeur fixe ».

Un peu ce qui s'est passé avant l'été 2015 : une rupture sur le barrage du Jet avait asséché le bief du moulin. Heureusement, pour une dépense équivalente aux 200 livres de 1796 (!), les services communaux ont pu réparer la brèche courant septembre.


En savoir plus : « 1791 - Subrogation du petit et grand renable du moulin du Cleuziou », « 1796 - Vente et procès verbal d'estimation du moulin du Cleuziou » et « La chaussée, le bief et l'eau du moulin du Cleuyou en 2015 »

Comment doit-on écrire « Bonne année » en breton ? Sur son tableau noir, Loïc Jadé instituteur à Plomeur, défend l'orthographe sur-unifiée « BLOAVEZH MAT » avec un H muet et un T bref. Et comment prononcer l'année 2016 avec le bon accent : une mutation adoucissante sur MIL et un C'H grave et déterminé à la fois, « DAOU VIL HA C'HWEZEG ! ».

8 Nedeleg laouen d'an holl !

Billet du 25.12.2015 - « Gant Nedeleg, 'hast an deiz paz ur c'hefeleg ; Gant deiz kentañ ar bloaz, paz ur was. » (Avec Noël le jour se rallonge d'un pas de bécasse ; Avec le premier jour de l'an c'est d'un pas d'oie)

À l'issue de l'atelier d'écriture de Dominique Lemaire en 2002 à Ergué-Gabéric, le texte produit commençait ainsi : « Au temps où la forêt n’était encore qu’une forêt, noire en novembre et claire en mai, vivait à Keranguéo, au lieu dit La Grotte aux Nains, un korrigan de bonne famille et d’excellente éducation. »

Et s'en suit une belle balade du petit korrigan au pays des chiffons et des paotred, puis en pleine féerie de Noël dans le supermarché du quartier du Rouillen, pour finir du côté de Kerdévot parmi les personnages de la Nativité de son retable flamand du 15e siècle :

« ... Il suivit la route qu’indiquait l'étoile qui brillait le plus fort et arriva bientôt à la chapelle de Kerdevot.

— Je crois que je touche au but, murmura-t-il dans la nuit. Deux grands boeufs blancs qui paissaient dans le pré acquiescèrent gravement en hochant la tête. Le Korrigan entra dans la chapelle, salua respectueusement les dames patronnes et vint prendre sa place dans le retable auprès de deux autres bergers.

— Bonsoir, dit-il

— Bonsoir, répondirent les deux autres. Comment tu es arrivé ici ?

—Je ne sais pas, dit le nouveau korrigan du retable, c’est une longue histoire, mais je ne suis pas certain d’avoir tout compris.

— Comme nous, dit un berger. Tu verras, on est bien ici. On a des fleurs et des fêtes. Les humains s’occupent bien de nous. Un jour, ils nous ont même amené la reine d’Angleterre pour qu’on la voie. Tu sais ce qu’elle a dit en entrant ?

— Splendid, but where is the castle ? fit le second berger en essayant de prendre l'accent british. Les trois éclatèrent de rire, mais une voix gronda au-dessus de leur tête.

— Taisez-vous les bergers, si vous nous faites repérer, on finira tous dans un musée.

— C’est qui ? souffla le korrigan.

— Lui, c’est Dieu le Père. Il habite au troisième. Il connaît bien les hommes, il a toujours peur qu’il y ait des problèmes avec eux. »

 

« — et Marie, Joseph, le petit Jésus, ils sont où ?

— Chut, firent ensemble les deux bergers. Maintenant, tu es une œuvre d’art.

— D’accord, chuchota le Korrigan de Keranguéo. Ce fut son dernier mot. »

En savoir plus sur cette belle histoire : « Le conte de Noël du Korrigan et du retable de Kerdévot »


Nota : Le prochain bulletin trimestriel Kannadig, le numéro 32, est en cours de préparation, et sera diffusé par les voies habituelles dans la première quinzaine de janvier 2016.

9 L'honneur du Moulin du Fou

Billet du 19.12.2015 - « Le 3 novembre 1806, je me suis transporté au moulin du Faou, situé commune d'Ergué-Gabéric affermé par bail ... sur la montrée dudit Evin fermier j'ai procédé comme suit l'évaluation en capital du dit moulin et dépendances n° 12 du sommier de la légion d'honneur. »

Voici l'histoire d'un moulin dont le nom a conservé le patronyme « du Fou » de ses détenteurs nobles du 15e siècle, été possédé par des Rohan-Guéméné et des Rohan-Chabot et accaparé par Napoléon dans le domaine de l'Ordre national de la Légion d'honneur.

En effet, le moulin dit « Meil-Faou » tient son nom des propriétaires historiques du fief de Kerjestin, la famille du Fou issue en juveigneurie des vicomtes du Faou et constituée des seigneurs de Rustéphan en Nizon. Le blason des du Fou, « d’azur à la fleur de lys d’or, sommée de deux éperviers affrontés d’argent becquetés et membrés d’or » est visible à la chapelle voisine de Kerdévot.

Avec le décès de Jean du Fou, en juin 1492, le domaine de Kerjestin passe dans les mains de sa fille Renée qui, mariée à Louis de Rohan, seigneur de Guéméné, transfére le bien à la famille de Rohan-Guéméné. Et la succession finira dans la branche des Guéméné-Chabot, princes de Léon, vicomtes de Porhoët, comtes de Jarnac et propriétaires du château de Josselin.

Dans le rentier de Kerjestin au 18e, on peut lire que le moulin est mis en bail de fermage en 1757 à un meunier et qu'il est décrit en 1775 par cette phrase « c'est une simple ferme ». En 1790 c'est un autre meunier, Louis Rospape (meunier à Briec et à Elliant) qui prend la relève du bail de Meil-Faou et on note dans les renables du moulin qu'il est fait mention de travaux à entreprendre : « la chaussée demande réparation ».

Les nouveaux documents publiés cette semaine donnent l'état des lieux, ainsi que les autres tenues du domaine de Kergestin ou Kerjestin (aujourd'hui Keristin), au moment où elles ont été intégrées dans le domaine agricole de l'Ordre de la Légion d'honneur. En effet à la Révolution, le seigneur noble Rohan-Chabot ayant émigré, ses biens sont acquis à la nation et intégrés dans le domaine créé par Napoléon Bonaparte en 1802. Cela veut dire que, de 1802 à 1807, les détenteurs-exploitants des lieux devaient payer une rente aux administrateurs de la cohorte régionale n° 13 pour financer cette institution impériale.

Le clos de "Meilh Faou" en 2013
Le clos de "Meilh Faou" en 2013

Le moulin sur la feuille du cadastre Napoléonien (1834)

En savoir plus : « 1806-1808 - Evaluation et vente du moulin du Faou », « 1802-1807 Le domaine gabéricois de l'Ordre national de la Légion d'honneur », « 1758-1791 - Rentier de la Seigneurie de Kerjestin des Rohan-Guéméné »

Nota: comme promis, presque toutes les feuilles cadastrales napoléoniennes ont été mises en ligne sur le site, il ne reste plus que 3 sur 20 à publier. La prochaine étape consistera à positionner sur ces cartes les villages en coordonnées x,y.

10 Emprise d'un rallye cynégétique

Billet du 12 décembre 2015 - « Serment - Le sieur Youinou, Corentin, a prêté serment à l'audience civile de mercredi dernier en qualité de garde particulier des propriétés louées par la société de chasse Rallye Saint-Guénolé ou lui appartenant et situées dans la commune d'Ergué-Gabéric.  »

En cours d'été 2015, Pierrick Chuto (*), l'infatigable « fureteur » de documents d'archives finistériennes, nous signale un petit encart dans le journal « L'action Libérale de Quimper » d'août 1905 sur la prestation de serment du garde particulier de la société « Rallye Saint-Guénolé ». On connaissait l'existence de cette société de chasse fondée en 1897, connue sous le nom « La Saint-Guénolé » et disposant de terres de chasse réservées autour de la chapelle St-Guénolé en Ergué-Gabéric.

Le terme « rallye » nous a intrigué dans un premier temps. On connaît aujourd'hui le mot sous la forme de rallye automobile. Mais auparavant on parlait de « rallye-papier » qui était un jeu équestre issu des chasses à courre. Mais le terme était utilisé aussi dans les années 1900 pour désigner tout simplement les sociétés de chasse dont les adhérents se regroupaient pour louer des terres et organiser leur sport favori.

En recherchant plus précisément dans les autres journaux d'époque, « Le Finistère » et « L'union Agricole », on découvre l'importance de cette société qui générait néanmoins quelques contestations :

  • en décembre 1902, deux chasseurs se font prendre par le garde sur des terres de ferme prétendues réservées aux sociétaires du rallye. La défense invoque la non inscription de cette ferme dans le giron de la société en se basant sur les « baux de chasse » et les publications dans les journaux.
  • en 1899, les « tenues » (terme à connotation médiévale) louées par le rallye sont extrêmement nombreuses sur le territoire gabéricois : 40 exploitations agricoles, le moulin de Pennarun et « la papeterie de l'Odet », toutes ces propriétés étant listées dans un encart avec une précision pour Squividan (parcelle Poher) et pour Sulvintin (parcelles Le Goff et Hostiou seulement).
  • avant 1898 c'est un gabéricois décédé en juillet à Keranroux qui était le président de la société sous sa forme d'origine : « M. Signour, ancien président de la société. M. Signour étant mort avant la formation légale de ladite société. »
  • en 1905 des républicains se rebellent contre l'emprise de la société de chasse par cet avertissement : « Chasse et Passage Interdits aux sociétaires du Rallye St-Guénolé sur les deux propriétés ... ». L'avis est signé par Louis Guyader (1842-1920), agriculteur au village du Squividan, et son voisin René Poher. Le combat de Louis Guyader contre les membres du Rallye Saint-Guénolé s'inscrit manifestement dans son combat contre les forces conservatrices de Quimper et ses environs.

En savoir plus : « Emprise communale du Rallye Saint-Guénolé, Le Finistère, Action Libérale et autres 1902-05 » et « 1897 - Homologation de la Société de chasse "La Saint-Guénolé" »


(*) : à noter sur vos tablettes, dimanche prochain 13 décembre à 16 heures à la MPT de Penhars (Le terrain blanc), Pierrick Chuto propose une conférence sur les enfants trouvés de l'hospice de Quimper.

11 Les grandes cartes communales

Billet du 6 décembre 2015 - « JavaScript est un langage de programmation de scripts principalement employé dans les pages web interactives mais aussi pour les serveurs. C’est un langage orienté objet à prototype et compatible avec la plupart des navigateurs web, y compris sur les mobiles. »

En 2010 on avait introduit une facilité de navigation sur les cartes gabéricoises de grand format, une possibilité à la « Google Maps » qui permet de zoomer et de se déplacer facilement dans toutes les directions.

On avait adopté le logiciel Zoomify qui n'avait que le seul défaut de ne fonctionner que sur les ordinateurs et d'afficher un message « logiciel Flash indisponible » sur les tablettes et les smartphones. Depuis, ces derniers, sous Android ou IOS, ont foisonné et rendent de plus en plus visite au site Grandterrier.

Il était temps de faire quelque chose, c'est-à-dire migrer nos fonds de carte sur la nouvelle version de Zoomify qui fonctionne désormais en environnement JavaScript :

  • Les boutons du Bandeau Z permettent de naviguer à l'intérieur de la carte.
  • Un simple glissement ou un clic dans la carte ou sur la vignette supérieure gauche sont aussi possibles.
  • Le mode plein écran permet de n'afficher que la carte en dehors de la page de l'article grandterrien.

Vous disposez notamment de ces facilités pour :

  • La toute première carte d'état-major,
  • Les deux très grandes photos aériennes de 1948 (avec positionnement des villages en hotspots)
  • Les sections scannées du parcellaire du cadastre Napoléonien de 1834.

Pour ces dernières, on disposait à ce jour de 7 « grandes feuilles » de section. Ce week-end on a mis en ligne 3 nouvelles feuilles et les 10 feuilles restantes seront publiées d'ici les fêtes de Noël.

Et enfin, on a ajouté le fond de carte IGN au 25.000 ci-contre, lequel permet de suivre l'évolution actuelle du paysage et de l'habitat par rapport aux plans cadastraux et aux clichés historiques.

On peut aussi consulter le Système d'Information Géographique de « Quimper communauté », mais par contre le S.I.G. quimpérois n'a pas encore migré son logiciel ArcGIS pour les tablettes et smartphones !

En savoir plus : « Cartes communales avec zoom et navigation assistée » et 3 nouvelles feuilles cadastrales « Cadastre 1834 - Section de Sulvintin - Feuille 2 », « Cadastre 1834 - Section du Squividan - Feuille 4 », « Cadastre 1834 - Section de St-André - Feuille 1 »

12 1822-52 création du site d'Odet

Billet du 29 novembre 2015 - Le site technologique actuel de l'entreprise Bolloré est au centre de la commune d'Ergué-Gabéric, rue Nicolas Le Marié, tout un symbole quand on sait que ce dernier est le fondateur historique en 1822 de l'entreprise familiale locale.

Un siècle après l'arrivée de Nicolas Le Marié sur le site d'Odet, l'abbé André-Fouet démarrait son discours commémoratif par cette évocation  : « ce printemps de l'année 1821, où un cavalier de vingt-quatre ans parcourait cette région plus déserte, plus chaotique, plus désolée alors que le Stangala ... Ce cavalier, c'était Nicolas Le Marié, à la recherche de l'emplacement propice pour s'établir. »

Mais les circonstances furent certainement moins poétiques et plus prosaïques, car il fallut procéder à l'acquisition du domaine foncier et de ses alentours.

En août 1821 Nicolas Le Marié habite Quimper dans la maison parentale « place Mauberc » (il y est né) et procède déjà à une transaction en tant que « marchand » et « Le Marié fils » (son père était marchand "fayencier") : il prête 384 francs et 60 centimes à un boucher contre droits à hypothèque sur plusieurs maisons quimpéroises.

En janvier 1822, il habite toujours Quimper et à proximité de son futur moulin à papier d'Odet il achète : « la moitié du lieu de Kerouguéau consistant dans tous les droits, maisons, terres, circonstances et dépendances en général, garnies de leurs issues, fonds, pailles et engrais de toutes espèces ». Ce domaine de Keronguéo passera plus tard en héritage de la famille Bolloré. Dans le document notarial on peut admirer cette magnifique signature qui dénote d'une énergie débordante.

En mars 1822, n'ayant pas encore élu domicile à Odet ou à Keronguéo, il fait l'acquisition « une petite portion de montagne terre froide dite Menez Pennanech et dépendant du lieu de Pennanech ... donnant ladite portion de montagne du midi sur le surplus de Ménez Pennanech, du levant sur la propriété du sr. Lemarié, du couchant sur la rivière d'Odet et du nord sur ruisseau de Kerouguéau appartenant à l'acquéreur, contenant sous fonds environ trente cinq ares soixante cinq centiares »

Si l'on fait l'hypothèse que le surplus de « Menez Pennanec'h » est la pente nord du village de Stang-Venn (non habité à l'époque) et que la propriété Le Marié est le village de Keronguéo, on peut supposer que l'acquisition est la partie nord du site d'Odet, voire peut-être le site du moulin d'Odet ...

En 1852 la papeterie est en pleine activité, une centaine d'ouvriers y travaillent. Mais l'heure est venue d'utiliser encore plus la force motrice de l'eau et de développer les futures machines machines à vapeur. Il achète donc « tous les droits qu'ils peuvent ou pourront avoir sur la partie fluide de la rivière de l'Odet », et surtout sur la rive droite de Briec, car du côté d'Ergué-Gabéric il est déjà propriétaire de presque tout le site. A l'est il fait l'acquisition de la « montage nommée Luzigou, à l'ouest de la garenne de Stang-Odet (le long de laquelle le descendant Gwenn-Aël Bolloré fera construire son musée océanographique), et en bien en amont de son usine, le « moulin à eau sur l'Odet nommé Meil Coat Piriou avec sa prairie, ses courtils et toutes ses dépendances » ...

En savoir plus : « 1821-1822 - Premières transactions foncières du marchand Nicolas Le Marié », « 1852 - Acquisitions à Odet et au moulin de Coat-Piriou par Nicolas Le Marié », « Nicolas Le Marié (1797-1870), entrepreneur papetier », « Nicolas Le Marié, maire (1832) »

13 La guerre des mouteaux de 1749

Billet du 22 novembre 2015 - «  La construction des moulins était règlementée ; en Bretagne, elle était interdite sur les domaines roturiers, il n'appartenait qu'aux nobles d'en construite sur des fonds nobles », Dictionnaire de l'Ancien Régime de Lucien Bély et Jean Gallet.

Les 71 pages retranscrites de nos quatre documents d'archives exhumés cette semaine ne disent pas le contraire : « on ne connait point en Bretagne d'autre droit de moulin que celuy qui est attaché à la mouvance dans son principe ».

Et en 1749 les histoires de mouvances dans notre commune de Basse-Bretagne pouvaient être très compliquées et faire l'objet de contestations relayées par des « mémoires » ou plaidoiries d'avocats au parlement de Bretagne à Rennes.

Les mouvances étaient les relations de dépendances d'inféodation entre deux fiefs ou domaines nobles. Et comme les fiefs d'Ergué-Gabéric ont été nombreux lors des siècles précédents, les mouvances ont souvent bougé et le seigneur supérieur a pu changer par rapport à la situation primitive.

Que se passe-t-il en 1749 ? Le Chevalier Geslin, seigneur du moulin de Pennanrun, situé sur son fief dépendant du roi, voudrait étendre l'usage de son moulin à certains domaniers du fief concurrent et voisin de Lezergué. Ces domaniers, « obligés de suivre ledit moulin », sont désignés sous le mot « moutaux », ou « arrières-moutaux » s'ils sont dans des villages plus distants du fief, parce qu'ils doivent payer le « droit de moutte » ou de « suite de moulin » aux seigneurs propriétaires du moulin respectant l'usement, le seigneur local inférieur Gilles-François de Geslin et le Roi en l’occurrence.

Dans les deux premiers documents de 1749, les avocats s'affrontent en se basant sur les nombreux documents historiques décrivant l'évolution des anciens fiefs nobles : Kergonan, Lezergué, Kerfors (ces trois domaines différents détenus au 18e siècle par la famille de La Marche) et celui de Pennarun (propriété du chevalier Geslin). Et ce dernier se base essentiellement sur le fait que, du temps de son propriétaire Guy Autret et de sa nièce Marguerite, le seigneur de Lezergué a été débouté à la Réformation du domaine royal en 1681 de son « droit de juridiction haute, basse et moyenne » et que donc toutes ses mouvances doivent être retirées des droits de suite du domaine de Lezergué-Kerfors-Kernaou.

Les plaidoiries donnent de nombreuses références d'articles des anciennes et nouvelles coutume, à l'usement « de la sénéchaussée de Quimper », appelé aussi « usement de Cornoüaïlles ». Et il est certain que la transcription précises et complète des textes n'a pas fini de produire des explications et analyses historiques.

Dans les deux derniers documents de 1752, ce sont les domaniers de trois villages qui sont assignés en justice par le Chevalier Geslin : « Pierre et Jean Ropars l'un domainier du lieu de Botgars et l'autre du lieu de Rûbernard, et François Hemon fermier du manoir de Mezanlez  ». La bataille juridique a lieu contre le seigneur Joseph Derval, seigneur de Kergoz et propriétaire du fief de de Mezanlez. Les fermiers qui ont préféré le moulin plus proche de leurs terres et ont refusé de porter leur blé à moudre à Pennarun, seront contraints d'obéir pendant les années suivantes, mais la Révolution de 1789 va changer la donne ...

En savoir plus : « 1749-1752 - Mémoires du sieur Chevalier Geslin pour son moulin de Pennanrun »


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