1584 - Dixmes pour Kermorvan en Ergué-Gabellic
Un article de GrandTerrier.
| Un document traitant d'un conflit éventuel entre la dîme ecclésiastique due pour le village de Kermorvan à l'évêque de Quimper et la qualification du domaine congéable au profit de Vincent Rozerc'h, seigneur de la Forest.
Document conservé aux Archives Départementales du Finistère sous la cote 1 G 138. | |||||||
Autres lectures : « Ergué-Gabéric, an Erge-Vras » ¤ « 1773-1779 - Dixmes des gros fruits pour Kermorvan et Quillihouarn » ¤ « 1682 - Possessions gabéricoises du seigneur de Coëtlogon, évêque de Quimper » ¤ « 1790 - Lettres d'Alain Dumoulin sur la dîme et son traitement de recteur » ¤ « 1789 - Le cahier de doléances du Tiers-Etat d'Ergué-Gabéric » ¤ « Le manoir de Penanrun » ¤ |
[modifier] 1 Présentation
La première particularité de ce document conservé aux Archives Départementales du Finistère sous la cote 1 G 138 est
l'orthographe retenue pour le nom de la commune : Ergué-Gabellic. Le suffixe Gabellic est sans doute la reprise du patronyme d'une famille fondatrice, les Cabellic seigneur de Lezergué. Cette orthographe, et non Gabéric comme aujourd'hui, est notée dans quelques rares autres aveux ou inventaires : « 1647 » ¤ « 1679-1681 » ¤ , et également citée par Bernard Tanguy pour un document de 1574 La seconde spécificité est son sujet, les dîmes Le document intitulé « mémoire » résume une procédure instruite en 1584 au Présidial de Quimper, les arguments échangés entre les deux parties, les enquêtes respectives et les conclusions de l'instruction. À l'origine une requête de l’évêque de Cornouaille Noël Le Poupon, fermier de l’évêque, c'est-à-dire la personne chargée de recouvrer les impôts épiscopaux, a une première surprise lorsqu'il se présente au champ cultivé où il devait prélever une gerbe La perception de la dîme se fait obligatoirement sur le champ et en nature. Les paysans doivent prévenir le décimateur, ou son fermier, au moins 24 heures avant le début de la récolte. Mais en aucun cas ils n'ont le droit d'enlever les produits, comme le fit le domanier de Kermorvan, avant le passage de l'agent du décimateur. La défense de l'évêque affirme de plus qu' « on a de coustume de payer de quinze gerbes l'une audit seigneur Eveque ou à ses fermiers sans préjudice aucunement au droit du recteur. ». Cela veut peut-être dire que le recteur pouvait réclamer sa « portion congrue » |
Même en 1790 le recteur d'Ergué-Gabéric, Alain Dumoulin, quand il déclare aux autorités révolutionnaires les boisseaux Le document de l'affaire de Kermorvan nous révèle qu'une enquête est organisée pour savoir si avant le conflit la dîme avait été versée à l'évêque. L'archidiacre de Poher réussit à convaincre trois précédents fermiers à témoigner dans ce sens. En 1682 un document d'aveu Par ailleurs, dans le mémoire ci-dessous, pour sa défense, le domanier avance l'argument supplémentaire que, sa tenue agricole étant sous le régime de domaine congéable Et qu'advint-il de cette dime lors de l'établissement des cahiers de doléances de Révolution de 1789. Les rédacteurs d'Ergué-Gabéric, commune rurale en bordure d'une ville épiscopale, ne demandèrent pas l'abolition de la dîme, mais une meilleure répartition au profit des simples prêtres : « Qu’il soit fait une répartition proportionnelle de tous les biens ecclésiastiques, sans distinction, de manière que tous les membres du clergé y aient une part raisonnable et graduelle, depuis l’archevêque jusques aux simples prêtres habitués des paroisses, afin que ceux-ci soient affranchis de la honte de la quête, c’est-à-dire de celle de mendier ». Le 11 août 1789, l’Assemblée nationale vote le « décret relatif à l’abolition des privilèges », et son article 5 dit ceci : « Les dîmes de toute nature, et les redevances qui en tiennent lieu, sous quelques dénominations qu'elles soient, connues et perçues, même par abonnement, possédées par les corps séculiers et réguliers,en remplacement et pour option de portions congrues, sont abolies ». Aujourd'hui, les dîmes ont été remplacées par le "denier du culte", qui est en général payé volontairement et à la discrétion des fidèles. |
[modifier] 2 Transcription
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[modifier] 3 Originaux
Lieu de conservation :
Il est écrit en fin du présent document que l'original de la sentence a été porté sur un parchemin "velin" |
Usage, droit d'image :
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Archives | |||||
[modifier] 4 Annotations
- Explications toponymiques sur l'origine du nom de commune Ergué-Gabéric, aka Cabellic : Ergué-Gabéric, an Erge-Vras [Ref.↑ 1,0 1,1 1,2]
- Dîme, dixme, s.f. : impôt sur les récoltes, de fraction variable, parfois le dixième, devant revenir au Clergé, prélevé pour l'entretien des prêtres et des bâtiments et les œuvres d'assistance. Son taux, théoriquement d'1/10ème, est généralement inférieur ; il est fréquemment proche d'1/30ème dans notre région (source : glossaire des cahiers de doléances AD29), ou d'1/15ème ("à la quinzième gerbe") lorsque le prélèvement est dû aux Régaires de Quimper. La dîme ne doit pas être confondue avec le Dixième et les Décimes. [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 2,0 2,1 2,2 2,3 2,4 2,5 2,6 2,7]
- Charles du Liscouët fut évêque de Cornouaille de 1583 à 1614, date de sa mort. Pendant la ligue, Mgr du Liscouët, qui était partisan du roi, se retira à Concarneau. [Ref.↑ 3,0 3,1 3,2 3,3 3,4]
- Gerbe, s.f. : unité de mesure du blé, composé de 7 à 8 javelles, pour le paiement de la dime (source : histoiresdeserieb.free.fr). Terme de féodalité ; Dîme sur les moissons ; lever la gerbe (source : Littré). Lorsque la Dîme est due aux Régaires de Quimper, le prélèvement "à la quinzième gerbe" indique un taux d'environ 1/15ème. [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 4,0 4,1 4,2 4,3]
- Portion congrue, g.n.f. : partie des bénéfices revenant à un tiers. Dans de nombreux cas, les grosses dîmes sont perçues par l’évêque, le chapitre, des abbés et monastères et autres bénéficiers, qui sont appelés « curés primitifs » ou gros décimateurs. Ces derniers doivent entretenir le desservant de la paroisse de la paroisse en lui versant une somme fixe, la portion congrue. Source : Dictionnaire de l'Ancien Régime. [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
- Boisseau, s.m. : mesure de capacité pour les matières sèches, les grains surtout. Sa contenance varie beaucoup suivant les produits et les localités et aussi suivant que la mesure est rase ou comble [¤source : AD Finistère, glossaire des cahiers de doléances]. La précision « Mesure du Roi » indique la volonté d'uniformiser les disparités, avant que le poids en mesure décimale ne soit adopté à la Révolution. Avant uniformisation, chaque ville ou village avait ses poids et ses mesures particuliers. Dans certains cantons, et plus particulièrement en Bretagne on était obligé d'avoir jusqu'à six mesures différentes dans son grenier pour procéder aux pesées. Par exemple le boisseau ras pour le froment contenait 11,2 litres à Morlaix et 107,1 litres à Landevennec [¤source : Wikipedia]. La mesure de Quimper était établie comme suit : 67 litres pour le froment et le seigle, 82 pour l'avoine et 79 pour le blé noir [¤source : Document GT de 1808] ou alors 67 litres pour le froment, 82 pour le seigle, et 80 pour l'avoine [¤source : Document GT de 1807]. [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
- Aveu, s.m. : déclaration écrite fournie par le vassal à son suzerain lorsqu’il entre en possession d’un fief, à l'occasion d'un achat, d'une succession ou rachat. L’aveu est accompagné d’un dénombrement ou minu décrivant en détail les biens composant le fief. La description fourni dans l'aveu indique le détail des terres ou tenues possédées par le vassal : le village dans lequel se situe la tenue, le nom du fermier exploitant le domaine congéable, le montant de la rente annuelle (cens, chefrente, francfief) due par le fermier composée généralement de mesures de grains, d'un certain nombre de bêtes (chapons, moutons) et d'une somme d'argent, les autres devoirs attachées à la tenue : corvées, obligation de cuire au four seigneurial et de moudre son grain au moulin seigneurial, la superficie des terres froides et chaudes de la tenue. Source : histoiresdeserieb.free.fr. [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
- Domaine congéable, s.m. : mode de tenue le plus fréquent en Cornouaille et en Trégor au Moyen-Age pour la concession des terres. Ces dernières constituent le fonds et restent la propriété des seigneurs. Par contre les édifices sont concédés en propriété aux domaniers par le propriétaire foncier (généralement noble) qui peut, en fin de bail, congéer ou congédier les domaniers, en leur remboursant la valeur différentielle des édifices nouveaux ou améliorés. Cela comprend tout ce qui se trouve au dessus du roc nu, notamment les bâtiments, les arbres fruitiers, les fossés et talus, les moissons, les engrais. Ce régime qui ne sera pas supprimé à la Révolution malgré les doléances de certaines communes bretonnes, sera maintenu par l'assemblée constituante en 1791, supprimé en août 1792 et re-confirmé en 1797. [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 8,0 8,1]
- Le manoir de la Forêt, fut construit vers 1540 au bord de l'Odet, à l'emplacement actuel de l'Espace associatif à Quimper (quartier de l'Hyppodrome) et rasé en 1943. Dans les années 1580-1620 c'est Vincent Rozerc'h, sieur de la Forest, qui en est le propriétaire. Des Rozerc'h étaient propriétaires du manoir de Pennarun en Ergué-Gabéric où l'on peut encore leur blason : « Le manoir de Pennarun » ¤ . [Ref.↑ 9,0 9,1]
- Présidial, s.m. : tribunal de justice de l'Ancien Régime créé au XVIe siècle ; c'est en 1552 que le roi Henri II de France, désireux de renforcer son système judiciaire et de vendre de nouveaux offices, institue les présidiaux ; le présidial de Quimper-Corentin a été créé à cette date dans le ressort du parlement de Bretagne (Wikipedia). [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 10,0 10,1]
- Estage, s.m. : habitation, demeure, bâtiment destiné à divers buts (Dictionnaire Godefroy 1880). Dans les documents d'aveux ou d'inventaire de succession, le terme désigne un corps de ferme et ses dépendances, et par extension est synonyme de tenue ou de convenant. [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
- Velin, s.m. : parchemin dont l'usage est rendu obligatoire pour nombre d'actes à la fin de l'ancien régime, notamment pour tous les actes de vente. Source : AD Finistère, glossaire des cahiers de doléances. [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 12,0 12,1]
Thème de l'article : Document d'archives sur le passé d'Ergué-Gabéric. Date de création : Juin 2009 Dernière modification : 20.05.2021 Avancement : [Développé] |