L'ancienne chapelle de Sainte-Appoline près de Sulvintin - GrandTerrier

L'ancienne chapelle de Sainte-Appoline près de Sulvintin

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Catégorie : Patrimoine
 Site : GrandTerrier

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§ E.D.F.

À la recherche d'une chapelle disparue peu après la Révolution et qui reste encore néanmoins virtuellement présente dans les mémoires des habitants de l'ancienne trève [1] de Sulvintin.

On peut découvrir ci-après les lieux champêtres où la chapelle était réputée être sous formes de photo et d"une vidéo panoramique, ainsi que les autres traces documentaires de son existence, sans oublier la belle statue de Ste-Appoline de l'église paroissiale.

Autres lectures : « Jérôme Salaun, agriculteur et mémoire de Kerzudal, Pont-Mein et Ste-Appoline » ¤ « La statue de sainte Appolline de l'église paroissiale St-Guinal » ¤ « 1794-1795 - Procès verbaux d'expertise et de vente de Sainte-Appoline » ¤ « Souvenirs d'enfance de fin de guerre 1939-45, par Michel Le Goff » ¤ « Carnets d'Anatole Le Braz sur Jean-Marie Déguignet et Ergué-Gabéric » ¤ « Santez Apolina » ¤ « Sainte-Appoline, Santez-Apolina » ¤ « Cartographie du village de Sulvintin » ¤ « Carte de Cassini ou de l'Académie au 1:86400 de 1750-1790 » ¤ « Toponymie du lieu-dit Sulvintin » ¤ 

1 Présentation

Au départ de la recherche du champ de Ste-Appoline, il y avait ce croquis de Michel Le Goff, originaire de Sulvintin, où il avait marqué l'emplacement présumé de la chapelle et de la fontaine de ses souvenirs d'enfant. Retrouver cette prairie avec son dessin fut très aisé, plus facile même qu'avec le support d'un plan cadastral ou d'une carte d'état-major.

Nous avons consulté a postériori le vieux cadastre de 1836 pour vérifier la cohérence des informations ; seul un déplacement de la route entre Sulvintin et Kervéady est notable (cf ci-dessous le chapitre cartographie). Et la prairie indiquée est exactement celle qui sous le n° 415 porte le nom de « Foennec ar chapel » (la prairie de la chapelle) ; on ne peut pas être plus précis.

Comme on peut le voir ci-dessous sur les photos et la vidéo, l'endroit forme une jolie pente, en surplomb d'un ruisseau, et est assurément un lieu idéal pour abriter une petite chapelle de campagne. Malheureusement, signalée en ruines dès 1795 et ne pouvant être réparée, ses murs seront revendus « comme simples matériaux ».

À la fin du 18e siècle, « St. Apoline », avec un seul p et un seul l, apparait par contre sur les cartes de Cassini, entre Sulvintin et Kerdudal, à partir de relevés fait entre 1750 et 1790 :

En 1795 la chapelle est confisquée à l'Eglise et vendue au plus offrant : c'est une citoyenne de Quimper, Marie Madeleine Merpaut [2] qui l'emporte pour un montant de 85 livres. Elle est d'ailleurs la seule enchérisseuse. Hormis St-Gildas près de Loqueltas vendue 75 livres et St-Joachim près de Lezergué 125 livres, les prix de ventes des autres chapelles sont bien plus élevés : Kerdévot (3000 livres), St-Guénolé (630 livres), St-André (395 livres).

Le document d'adjudication précise : « la chapelle de Sainte Appoline, située sur la commune d'Ergué-Gabéric, estimée suivant procès-verbal de Le Roux, commissaire expert du 6 brumaire 3ème année quatre vingt livres.  ». Ce procès-verbal de l'expert décrive la chapelle ainsi : « La dite chapelle sans issues ni dépendances, sans couverture ni boiserie et absolument ruinée, à la longueur à deux longères [3] cinquante deux pieds [4], de largeur seize et en hauteur huit.  », ce qui donne les dimensions de 16,8 mètre de long, 5,2 mètre de large et 2,6 de haut.

Par rapport à Kerdévot et St-Guénolé, ce qui explique le prix modique est d'une part les dimensions modestes de Ste-Appoline, et aussi le fait qu'elle ne soit plus opérationnelle, étant manifestement en cours de démolition.

 

La négociante de cette chapelle a sans doute fait la même chose que pour les trois autres biens qu'elle a acquis à proximité (le manoir et le moulin du Cleuyou ; la métairie de Kerampensal), à savoir la revendre, pour un acquéreur intéressé par les pierres. Le rapport d'expertise était explicite sur la seule destination possible de l'édifice : « Cette chapelle n'étant pas susceptible d'être réparée, je l'ai estimé, comme simples matériaux, quatre-vingt livres  ».

Des pierres de Ste-Appoline, on en a retrouvé la trace de quelques-unes :
  • un bénitier : c'est Michel Le Goff père qui l'a découverte en curant une zone marécageuse dans sa propre prairie, côté Sulvintin.
  • un pilier de granit de forme carrée [5], servant de socle à la très vieille croix de Tréodet, telle qu'elle est exposée aujourd'hui dans le jardin du presbytère.

Quant à la fontaine indiquée, nous n'avons retrouvé ni source, ni empilement de pierres, en bordure du talus indiqué. D'après Michel Le Goff, il y avait dans les années 1970 une fontaine symbolique dans le coin sud de la prairie de la chapelle. Pour preuve cette photo Kodak ci-dessous qui montre une petite fontaine rustique avec un écoulement d'eau de source. De l'autre côté du ruisseau il existait sur les terres de Kerveady une autre fontaine plus fonctionnelle et un lavoir, mais la petite fontaine de la prairie était réputée être celle de Ste-Appoline.

En fait Jérôme Salaün, agriculteur à Kerdudal, l'a précisément repérée en bas de la prairie, mais du côté nord, non loin de l'entrée de champ (précisément au niveau du "e" de prairie de la carte ci-dessous) : « Au bas du champ il y avait une fontaine dont l'eau se jette encore aujourd'hui dans le ruisseau. Quand j'ai drainé le champ j'ai vu le conduit de pierre sur 7 mètres entre le ruisseau et la source, les pierres de la fontaine ont du être déplacées. Je peux vous montrer l'endroit. »

Anatole Le Braz raconte dans ses cahiers les propos que lui auraient dit Jean-Marie Déguignet : « Il y a en Ergué, sur la route de Kerdévot, auprès de Lézergué, une fontaine de Sainte Apolline (santez Apollina). C'est la patronne des dents : elle est représentée à St-Guénnolé avec une tenaille à la main, et une dent entre les pinces de la tenaille. On allait à la fontaine jeter des croix de bois, pour le mal de dents. Peut-être la statue de sainte Apolline est-elle maintenant au bourg d'Ergué. » Cette note étant imprécise sur le lieu de conservation de la statue, et pour la localisation de la fontaine sur la route de Kerdévot nous pensons que l'auteur s'est trompé, et nous préférons la situer à proximité de sa chapelle.

Et sainte Appoline au fait, qui était-elle ? C'était une vierge martyre du 3e siècle vénérée en Bretagne pour la guérison des maux de dents et singulièrement lors de la pousse douloureuse des premières dents chez le nourrisson.

À l'église paroissiale d'Ergué-Gabéric, dans le méconnu et très beau retable du 17e siècle de la chapelle du Rosaire, il y a une magnifique statue de Ste-Appoline, portant d'énormes tenailles impressionnantes et montrant une dent arrachée dans sa main gauche. Au passage, cette dent s'étant égarée, tout indice permettant de la retrouver sera le bienvenu !

2 Iconographie

Champ de la chapelle (vidéo)

3 Cartographie

La parcelle sur le cadastre Napoléonien porte le n° 415 et son nom dans la matrice est explicite : « Foennec ar chapel » (la prairie de la chapelle). La parcelle 418, de l'autre côté du ruisseau, est dénommée « Liors ar chapel » (le courtil de la chapelle).

4 Annotations

  1. Trève, s.f. : du breton Trev résultant d'un emprunt par le vieux breton Treb "lieu habité et cultivé" au latin Tribus "tribu". Ce terme va prendre au 11e siècle le sens de "quartier, circonscription". L'acception de "trève, "église succursale" est plus récente. Source : Albert Deshayes, dict. des noms de lieux bretons. [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
  2. Marie Magdelaine Merpaut, née vers 1755 à Rennes, qualifiée de marchande dans les actes d'acquisition des biens nationaux du Cleuyou, était la sœur de Jeanne Yvonne Merpaut (laquelle épousa en 1778 Jean François Guillaume Lafage, marchand en la rue Kéréon). Les Merpaut étaient originaire de la paroisse de Rennes St-Germain. Marie Magdelaine Merpaut reste célibataire et décède le 15 juin 1829, à Quimper, rue Keréon. [Ref.↑]
  3. Longère, s.f. : mur principal d'une bâtisse. Ce terme n'avait la même signification qu'aujourd'hui, il désignait, non pas un bâtiment de forme très allongée, mais dans un bâtiment donné, le mur de façade et le mur arrière. On parlait donc de la longère de devant et de la longère de derrière. Quant à l'appentis, comme il s'appuyait contre la maison, il n'avait évidemment qu'une longère. Source : Jean Le Tallec, La vie paysanne en Bretagne sous l'Ancien Régime. [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
  4. Pied, s.m. : unité de mesure de longueur divisée en 12 pouces, et d'environ 32-33 cm. En France, avant la réforme de Colbert en 1668, le pied de roi ancien avait une valeur de 326,596 mm. En 1668 une tentative de normalisation fut tentée avec la nouvelle toise dite de Chatelet pour une mesure de 324,839 mm. Cette valeur fut conservée en 1799 avec l'introduction du mètre estimé à environ 3,09 pieds [¤source : Wikipedia]. On note une valeur de 3,07 pieds dans un document GrandTerrier de 1808[Terme] [Lexique] [Ref.↑]
  5. C'est l'abbé Pierre Pennarun qui fit transporté en 1962 la croix de Tréodet au presbytère et qui affirmait que le socle carré venait de la chapelle Ste-Appoline. Le précédent socle, qui fut dessiné par l'abbé Abgrall vers 1900, était de forme ronde. [Ref.↑]


Thème de l'article : Richesses patrimoniales

Date de création : Juillet 2014    Dernière modification : 23.02.2019    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]