1. UN GRAND PARDON POPULAIRE
Dans son manuscrit versifié « Le voiage de Rennes à Brest et son retour », le frère carme Alexandre de Saint Charles Borromée évoque en 1674 la popularité du pardon de Kerdévot et de ses processions aux bannières :
De ce lieu nous nous transportons
Pour voir ce grand amas de monde
Qui dans ce lieu ce jour abonde ;
Un nombre de processions
Font icy leurs incessions
Outre le grand pardon de mi-septembre (qui était qualifié de « Kerfricot » en raison des agapes et ripailles des pèlerins festoyant devant le placître), de multiples occasions ont existé de se re-contrer autour du célèbre sanctuaire :
- Jeudi saint (fin mars, début avril) : Pèlerinage de silence.
- Quasimodo (1er dimanche après Pâques) : Petit pardon.
- Veilles de l'Ascension (fin mai) : Jours des Rogations.
- Saint-Jean (24 juin) : Pardon des chevaux.
- Assomption (15 août) : Procession.
- Nativité de la Vierge (Dimanche suivant le 8 Septembre) : Grand Pardon.
- Lendemain de Nativité (Lundi du pardon) : Foire.
- Immaculée Conception (8 Décembre) : Foire aux gages.
2. UNE SACRISTIE XVIIIe SIECLE
Paul Peyron et Jean-Marie Abgrall la décrivent ainsi : « La sacristie est postérieure au reste de l'édifice ; elle a une corniche à médaillons et trois lucarnes, dont deux en œils-de-bœuf. Le toit a la forme d'une carène de navire renversée. »
Elle fut construite dans les années 1702-1705 de façon coordonnée avec la reconstruction du clocher qui s'était écroulé subitement le 2 février 1701.
Ceci est évoqué dans l’ancien cantique de Kerdévot composé en 1712 et dans les registre paroissial : « le tonnerre et un tourbillon de vent sapèrent la tour de la chapelle de Notre-Dame de Kerdévot, par la chambre des cloches, et les matériaux de la dite tour tombèrent en partie sur François Le Gonnidec, comme il estoit prest d'entrer pour entendre l'office divin ».
Un même blason est sculpté sur la sacristie et sur le clocher représente les armes de la famille Lopriac propriétaire des terres voisines de Botbodern en Elliant.
3. PREEMPTION A LA REVOLUTION
La chapelle de Kerdévot au moment de la Révolution de 1789 fait l’objet d’une vente aux en-chères comme bien national confisqué au Clergé. L’acquéreur est Jérôme Crédou cultivateur à Crec’h-Ergué.
En 1804 il signe un document de cession à titre gratuit de la chapelle à la commune : « ledit Jérome Crédou fait don et abandon à la dite commune, priant le gouvernement et toute autre autorité compétente d'autoriser la dite commune à accepter la donation volontaire que fait par le présent ledit Jérôme Crédou de son plein gré et franche volonté »
En fait, c’est une vaste opération collective des paroissiens qui est à l’origine de cet achat, comme le l’atteste le maire de l’époque : « En l'an trois il fut fait une quette ... Dans ce moment, à raison d'un individu par parcelle, à effet de se procurer les fonds nécessaires pour l'acquisition de la chapelle de Kerdevot et pour la payer des prix de l'adjudication, ..., et que le montant d'icelle fut remise au dit Jerome Credou ».
Jerome Crédou sera fabricien, puis maire de la commune de 1812 à 1820. Son nom est gravé sur l’une des cloches de la chapelle fondue en 1803 : « GEROME CREDOU, fabrique de Kerdévot ».
4. FONTAINE ET CALVAIRE
La fontaine de Notre Dame de Kerdévot est située dans un champ à 300 m à l'est de la chapelle. Lors de la procession des pardons c’est la station obligée de mi-parcours pour les prières et chants religieux.
L'édifice gothique qui pourrait être du XVIe siècle et qui supporte une statuette de la Vierge à l'Enfant, est un bassin assorti d'un toit de pierres à deux pentes et accosté de deux pinacles. Sur un des côtés, il y a une tête d'homme sculptée dans la pierre.
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Devant la fontaine, deux vasques carrées qui servaient pour les ablutions sacrées : « Selon la tradition, ses eaux guérissaient du catarrhe et de la fièvre. De plus, lorsqu'une jeune maman ne pouvait allaiter son enfant, elle se rendait à la fontaine, la vidait, la nettoyait, et N.D. de Kerdévot lui accordait assez de lait pour nourrir deux bébés. » (J.L. Morvan)
Dans le placître de la chapelle se trouve un très beau calvaire du XVIe siècle également, à base rectangulaire, qui a été très endommagé à la Révolution. Les statues des apôtres placées dans 12 niches creusées dans les 4 faces ont disparu. Au-dessus trois croix au fût bosselé avec de part et d’autre un Saint-Michel terrassant le dragon et une Sainte-Véronique.
5. UN SAINT POPULAIRE
Une statue de bois polychrome de 90cm de hauteur environ, a été reléguée pendant de longues années, ce qui explique que la plupart des ouvrages en font abstraction. En septembre 2017, elle est ressortie de l'oubli en occupant dorénavant une place de choix, en surplomb sur une console du mur intérieur sud du chevet.
Elle représente saint Alain, 4e évêque de Cornouaille, avec une barbe blanche fournie, faisant le geste symbolique de bénédiction de sa main droite, et retenant un livre sacré et sa crosse épiscopale de l'autre main.
À ses pieds est posée une petite enclume de forgeron, cet attribut donnant une symbolique complémentaire. En effet on retrouve là le culte d'un saint populaire dans le diocèse de Quimper, formant une figure composite des saints Eloi, Alar, Alor, Alour et Allan, tous patrons protecteurs des orfèvres, des maréchaux-ferrants, des vétérinaires et de la race chevaline. D’où l’importance du pardon des chevaux de Kerdévot organisé à la Saint-Eloi.
6. VISITES TRES IMPORTANTES
Le 31 mai 1990 une visiteuse de haut rang s’est déplacée jusqu’à Kerdévot : Elizabeth Bowes-Lyon (1900-2002), reine mère d’Angleterre. La reine mère est restée exactement 45 minutes dans la chapelle alors que la visite protocolaire devait durer 30. Elle s'est émerveillée devant la beauté des lieux. La situation de la chapelle, en pleine campagne, a tout de même étonné la reine « Il n'y a ni château ni agglomération ? » a-t-elle demandé.
Sinon, les pèlerins ont toujours été nombreux à venir à Kerdévot se recueillir dans la « cathédrale de campagne », suite à des vœux en temps de guerre, ou des remerciements de type ex-voto.
De nombreux peintres, écrivains ou photographes ont également témoigné artistiquement après leurs venues : Anatole Le Braz, Eugène Boudin, Raphaël Binet, Hervé Jaouen, Jean-Marie Déguignet …
7. VITRAUX ODES A LA NATURE
Démarré en 1990, le projet des nouveaux vitraux de la chapelle de Kerdévot a été mené par les membres de l'association Arkae et son président de l'époque, Raymond Lozac'h.
L'artiste peintre Hung Rannou, quimpérois d’origine vietnanienne, fut retenu pour la conception des vitraux et son ami Antoine Le Bihan de Quimper pour pour leur fabrication et pose, les 4 premiers en 1994, les 4 suivants en 1995 et le neuvième en 1997.
En 1992 le journaliste Daniel Morvan d'Ouest-France titrait son article « En verre et contre tous », pour illustrer l'audace et les difficultés du projet.
Le thème central de ces vitraux est un motif végétal, en complète harmonie avec la campagne avoisinante de la chapelle, comme le confirme l'artiste : « J'ai voulu célébrer l'espace de la Création, la lente germination souterraine qui finit par produire la vie. »
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