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Les billets hebdos de l'actualité du GrandTerrier

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Version du 5 novembre ~ miz du 2022 à 08:51

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Chaque semaine, un nouveau billet annonçant un ou plusieurs articles sur le site GrandTerrier.

Une compilation des billets est publiée en fin de trimestre sous la forme des chroniques du Bulletin Kannadig.

Anciens billets hebdos : [Actualité, archives]

Les anciennes affichettes : [Accroches à la une]

Modifications d'articles : [Journal des MàJs]


Sommaire

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1 Bulletin Kannadig de la rentrée

Billet du 05.11.2022 - Au sommaire de ce numéro : Séries, empereur, 1918-22, 1940-50, photo, portraits. En version papier : 32 pages ou 8 feuillets A4 recto verso pliés en A5, agrafés et mis sous pli postal dans la quinzaine.

Les séries en question ne sont pas sur Netflix, mais aux Archives départementales du Finistère. Ces séries constituent un plan de classement des documents auxquels sont attribuées des « cotes ».

Ainsi le plus vieux document gabéricois de la série B « Cours et juridictions » (conservée à Brest et non à Quimper) répond à la cote B284 et la date de 1572.

En cette fin d’été indien on s’est attelé à dresser des tables générales par série en y listant tous les articles et sujets « grandterriens » : de cette façon on sait maintenant ce qu’on a traité, et on pourra donc plus facilement repérer de nouveaux sujets d’analyse. Et les tables seront systématiquement mises à jour sur le site.

Soit par exemple le sujet d’archives concernant les initiatives municipales en 1858 lors de la visite de Napoléon III (série O « Domaine et enregistrement », cote 3O595).

Pour la période 1818-22 qui suit la Grande Guerre, on notera le nombre important de suicides dans le secteur ouest de la commune : analyse des circonstances d’après les coupures de presse et les transmissions familiales.

Pour les années difficiles 1940-50 le personnage du recteur Gustave a marqué les esprits, et son journal est un incontournable, ainsi que les souvenirs d’enfance de Jean Guéguen de Lestonan.

La photo des jeunes gens de la classe 1959 est aussi l’occasion de se rappeler des têtes connues et des anecdotes.

Et enfin une artiste d’Odet, Renée Cosima, qui a posé pour les plus grands peintres des années 1950 : Edouard Goerg, Bernard Buffet, Jean Carzou, Paul Kerouedan, Marcel Jacno.

En guise d’illustration de la continuation des sujets d’études et des prochaines découvertes sur le site GrandTerrier, nous vous proposons cette réflexion d’artiste-peintre : “Peindre signifie penser avec son pinceau” » (Paul Cézanne).

 

Image:square.gifImage:Space.jpgLire, feuilleter ou imprimer le bulletin en ligne : « KANNADIG n° 59 NOVEMBRE 2022 »

2 Octroi et/ou secours impérial

29.10.2022 - Où il est question d'une demande de secours adressée à l'Empereur Napoléon III en visite à Quimper le 16 août 1858, et de l'achat municipal d'un drapeau pour acclamer ses majestés impériales. NOTA : La semaine prochaine sort (enfin) le bulletin trimestriel Kannadig !

Durant l'été 1858, l'Empereur des Français visite la Bretagne avec son épouse Eugénie, en passant par les villes de Rennes, Brest et Quimper. Une visite triomphale qui visait à conforter le régime dans une région travaillée par les royalistes légitimistes et les républicains.

Le maire d'Ergué-Gabéric lui envoie à cette occasion une lettre dans laquelle il présente une demande de secours pour suppléer aux multiples dépenses communales : « Votre Majesté connaît maintenant la double cause de leur état de souffrance ; elle connaît, mieux que nous, les moyens d'y remédier ».

La double cause est d'une part les faibles ressources communales malgré le rétablissement récent de l'octroi et d'autre part l'entretien de la route départementale qui traverse la commune. Et tous les autres travaux ordinaires : le mobilier de l'église paroissiale, la réfection du mur d'enceinte du cimetière, les réparations et nettoyage du presbytère (« qui, outre son aspect rebutant, révèle une sorte d'ancienne prison féodale ») l'entretien des routes vicinales, notamment celles menant à Kerdévot, chapelle de grand renom et lieu de miracles.

Le style de la supplique, tout en étant un rien alambiqué, contient des formules habiles et faussement naïves pour susciter la générosité impériale : « Partout sur votre passage, des acclamations joyeuses ; partout, des souhaits, des compliments, des bénédictions pour votre auguste personne, pour l'Impératrice et le Prince Impérial ... ».

La lettre met en lumière les aléas de la fiscalité locale, notamment en ce concerne l'octroi. Le 19 février 1791, la Constituante décide la suppression de l'impôt indirect privant ainsi les villes de leur principale ressource, l'octroi sur les marchandises de consommation locale (droits d'entrée), sans solution de remplacement. Tout au long de la première moitié du XIXe siècle les communes françaises ont réclamé son rétablissement, et Ergué-Gabéric dès 1806 la demande de deniers d'octroi fait l'objet d'une délibération municipale.

 
Août 1858, l'empereur et l'impératrice quittant la ville de Quimper pour Lorient. Les flèches de la cathédrale ont remplacé les deux tours carrées deux ans auparavant. Couverture du journal L'Illustration n° 811.
Août 1858, l'empereur et l'impératrice quittant la ville de Quimper pour Lorient. Les flèches de la cathédrale ont remplacé les deux tours carrées deux ans auparavant. Couverture du journal L'Illustration n° 811.

Il faudra attendre août 1856 pour que l'octroi soit mis en place, mais uniquement sur les « boissons enivrantes » à hauteur d'un revenu annuel prévisionnel de 274 francs (avec une consommation importante de 294 hectolitres de cidre et hydromel).

Deux ans après, le conseil municipal vote l'acquisition d'un drapeau tricolore pour l’accueil à Quimper de Napoléon III. On peut s'étonner de son absence locale 69 ans après la Révolution Française. Toujours est-il qu'il est commandé à un tapissier pour la valeur de 18 francs.

La demande de secours de 1858 ne sera pas honorée. Dans sa réponse le préfet fait remarquer que la pétition est « conçue dans des termes très vagues », sans « plans et devis formant le projet des travaux à exécuter ». Et de plus en terme ressources municipales Ergué-Gabéric « a obtenu tout récemment l'établissement d'un octroi sur les boissons, ressource importante qui manque à bien des communes. ». L'aide impériale n'est donc pas octroyée.

En savoir plus : « 1858 - Supplique du maire à Napoléon III en visite finistérienne »

3 Le temps des inventaires bis

22.10.2022 - Le travail d'inventaire de nos articles selon le plan de classement des Archives départementales du Finistère s'est poursuivi cette semaine avec les années révolutionnaires (séries L et Q) et la période moderne (séries M, O, R, T, U, V et X).

Pour commencer on a complété le tableau des articles GrandTerrier de trois séries d'Ancien Régime initiées la semaine dernière et contenant aussi des documents du XVIIIe au XXe siècle :
  • E- Noblesses, villes, état-civil, notaires  : acquisitions de terres à Odet, attestation de quête pour la conservation de la chapelle de Kerdévot, vente ou bail à Kerveady, Kernaou ...
  • H- Clergé régulier, hôpitaux : des fiches de garde ou autres documents administratifs de l'Hospice de Quimper.
  • J- Archives privées  : soit des dépots d'études notariales, soit des fonds d'historiens et archivistes comme Prosper Hémon, Louis Le Guennec, Daniel Bernard, Henri Waquet ...


Ensuite on s'est attaqué aux années révolutionnaires (la série Q incluant aussi quelques archives dites modernes) :

Le recensement complet de la population en 1790 (10L168), la requête d'emprisonnement d'une prostituée qui pollue les fontaines (12L4), la levée du contingent de la Convention (14L27), des correspondances avec le prêtre réfractaire Alain Dumoulin (10L58), la création du canton et l'installation d'une municipalité (10L30 et 10L58) ...

Les documents relatifs aux biens nationaux (expertises des biens confisqués, ventes aux enchères) pour tous les domaines nobles et leurs mouvances, ainsi que les chapelles, église et presbytère, le suivi des nobles et curés exilés (1Q69), la restitution du presbytère à la commune (2Q191), l'affection de certains villages au domaine de la Légion d'Honneur (1Q2393) ...


Et on a évidemment complété par les nombreux documents d'archives des séries thématique de la période moderne :

Les documents relatifs aux maires et adjoints du XIXe siècle, aux élections législatives et municipales avec les républicains et les conservateurs, à la lutte préfectorale contre l'alcoolisme, à l'implantation de la papeterie Le Marié-Bolloré, aux grèves des ouvriers de la mine d'antimoine de Kerdévot-Niverrot, à la légion d'honneur agricole pour Alain Le Berre et le titre de chevalier pour Prosper Le Guay, aux sociétés de chasse (La Saint-Guénolé) ou sportive (Paotred-Dispount), à la chasse aux loups ...

Le dossier de contestation du projet de déplacement du bourg au centre de la commune en 1842 (3O1154), les travaux de voiries et de ponts (à Odet et au Cleuyou), les travaux d'électrification, les premières transformations des maisons d'écoles au bourg et à Lestonan, le refus et le rétablissement de l'octroi (20413*) ...

 
3 O 1154 : Monsieur le Préfet. Persuadés que votre religion ne saurait être assez éclairée sur la grande question qui agite si déplorablement la commune d'Ergué-Gabéric depuis plus de 2 ans
3 O 1154 : Monsieur le Préfet. Persuadés que votre religion ne saurait être assez éclairée sur la grande question qui agite si déplorablement la commune d'Ergué-Gabéric depuis plus de 2 ans

Registres matricules des appelés et des militaires, rangés par classe de conscription : Joseph Le Saux (classe 1903, Indochine, Tunisie et Alger) ; Jean Lazou (classe 1915, guerre 14-18) ; Pierre Tanguy (classe 1911, guerre 14-18) ; Hervé Herry (classe 1914, guerre 14-18) ; Alain Yvon Feunteun (classe 29, guerre 39-45).

Les arrêtés d'inscription ou de classement aux Monuments Historiques, et d'autre part les différents rapports sur les instituteurs et les ouvertures de classes. On trouvera entre autres une enquête sur un instituteur aux idées anti-militaristes et déclarations d'épidémies de grippe, rougeole, dysenterie et teigne dans les écoles.

Les dossiers d'affaires civiles et criminelles du XIXe siècle, dont le plus connu est celui du jeune sorcier Yves Pennec dont Stendhal avait fait une analyse dans ses mémoires de touriste. Les autres procès sont des affaires de meurs, des drames familiaux, un cas de délinquance entraînant l'envoi au bagne, et une condamnation pour exercice illégal de la médecine.

Des dénonciations d'agissement de prêtres auprès des services préfectoraux, des réparations à engager sur le presbytère ou l'église, un demande de réhabilitation d'une religieuse à l'école privée du bourg 9 ans après son exclusion en 1902, et un décret impérial pour l'érection de Kerdévot en chapelle de secours.

Essentiellement la politique préfectorale et municipale contre la mendicité.

En savoir plus : « Espace Inventaires des Archives » - « Archives départementales du Finistère »

4 Le temps des inventaires

15.10.2022 - Une semaine consacrée à l'inventaire de nos articles selon le plan de classement des Archives départementales du Finistère, en commençant par 6 séries d'Ancien Régime. Suite des prochains jours : séries révolutionnaires et modernes, archives de la ville de Quimper, du Diocèse, de Loire-Atlantique, BnF Richelieu, Archives Nationales, Temps Libres de Rennes. Et impression des index thématiques dans le bulletin Kannadig début novembre.

À ce jour le fonds d'archives de GrandTerrier contient 447 articles différents, et pour chacun il y a au moins une pièce d'archives en provenance d'archives municipales, départementales, régionales ou nationales. Pour s'y retrouver, on se servait jusqu'à présent du plan de classement interne du site Interne, par siècles et par années, et unitairement on trouvait les références au classement par série des institutions de conservation.

Il manquait donc l'inverse, pour savoir ce qu'on a déjà traité et ce qui reste à transcrire et analyser : les titres d'articles GT pour chaque liasse, chaque registre, chaque série. Comme les séries des Archives départementales du Finistère constituent au moins 60% de notre fonds, on commence par les séries "Ancien Régime".

Chaque série inclut un tableau détaillé des correspondances des articles GT, ainsi que l'inventaire(s) complet(s) publié(s) par les archivistes départementaux :

Liasses bien fournies et de gros registres incluant de nombreux actes : A34 (confiscation des terres de Kerjestin, propriété des Rohan, nobles "hérétiques"), A38 (aveux nobles du XVe et XVIe siècles, tous manoirs et leurs dépendances), A85 (actes de propriétés nobles des XVe-XVIIe siècles), A187 (Rentier de Kerjestin) ...

1592, A34. "La seigneurye de Keristin adjugée à maistre Daniel Goulezre par la cauption de maistre Hervé Goalezre dudict Kempertin. Pour la some de quatre vingt deux escuz. Et pour ce ..."
1592, A34. "La seigneurye de Keristin adjugée à maistre Daniel Goulezre par la cauption de maistre Hervé Goalezre dudict Kempertin. Pour la some de quatre vingt deux escuz. Et pour ce ..."

Des documents de successions de 1572 (B284, Kerjestin) à 1787 (B295, Parc-Allan), une mise sous écrou en 1698 pour les frères Gélin de Pennarun (B766), une procédure criminelle pour vol à la chapelle de Kerdévot en 1774 (B805, B910), la liste des mouvances de la sénéchaussée (B502, B503), et enfin les originaux des cahiers de doléances en 1789 (10B22).

 

Pour une part extraits des registres paroissiaux et d'état-civil. Ou alors ils sont issus des fonds notariaux : contrat de palmage au Cleuyou (4E23/3), déclaration à Kerho pour Françoise de Guengat (4E226/210), ...

Le plus vieux document en français de cette série est daté de 1389 (2G181, Kerelan), et le plus ancien en latin est de 1439 (2G94, don de cire à Kerdévot), les cartulaires étant par ailleurs conservés en Nantes ou à la BnF. Sinon dans les autres documents il est beaucoup de conflits autour de dîmes ecclésiastiques (cf. notamment les "Dixmes des gros fruits pour Kermorvan et Quillihouarn") et de rentes dues au seigneur évêque de Quimper (secteurs du Cleuyou-Kerampensal et de Créac'h-Ergué).

Les terres dépendantes de l'abbaye de Landévennec au village de Quélennec font l'objet de plusieurs pièces jusqu'en 1693, la plus ancienne étant datée de 1447.

2G94, 1439. "Kerzevot in parochia de ergue gaberic"
2G94, 1439. "Kerzevot in parochia de ergue gaberic"

Le plus vieux document gabéricois de cette série est vraisemblablement la montre militaire de Cornouaille en 1562. Les autres documents les plus intéressants sont trouvés dans les fonds suivants : le chartrier de Kérézellec (32J) pour la seigneurie de La Marche (avec un très beau sceau ducal en 32J81), le fonds de Silguy (49J), les archives de Kernuz (100J) ...

En savoir plus : « Espace Inventaires des Archives » - « Archives départementales du Finistère »

5 Tristes suicides de 1918 à 1922

08.10.2022 - Comme l'a écrit Jean-Yves Broudic dans son livre « Suicide et alcoolisme au XXe siècle en Bretagne », le nombre important de suicides dans notre région peut s'expliquer par les effets traumatiques de la Grande Guerre : ces actes désespérés à Ergué-Gabéric entre 1918 et 1922 semblent l'attester.

À ce jour, on a repéré six suicides localisés à Ergué-Gabéric et évoqués dans la presse de l'époque, ce qui sans aucun doute est loin d'être exhaustif. Le plus étrange est que tous travaillent et/ou habitent dans les villages du secteur ouest de la commune de Poulduic à Odet, en incluant Kerdudal, Kerleur, Squividan et Meil-Poul.

La diversité d'âge et sociologique de ces personnes désespérées est notable :

Image:Right.gifImage:Space.jpgdeux fermiers, une fermière, un domestique de ferme, un ouvrier papetier et un vieillard.

Image:Right.gifImage:Space.jpgcinq hommes et une femme, âgé(e)s de 43 ans à 70 ans.

De même les modalités d'exécution et les causes connues de leur états psychologiques sont différentes également :

Image:Right.gifImage:Space.jpgquatre pendaisons, dont trois aux branches d'arbres (noisetier, châtaignier et pommier), une noyade et une défenestration.

Image:Right.gifImage:Space.jpgun pour raison d'alcoolisme, un pour sénilité, un pour délire paranoïaque, une pour neurasthénie dépressive, un pour congédiement de fermage.

Les effets de la guerre sont explicites pour l'un des suicidés, l'ouvrier papetier d'Odet qui habite Scaër : « il avait eu ses facultés ébranlées à la vue d'un train de blessés en se rendant aux armées en 1915 », « interné par l'autorité militaire en 1915, puis réformé n° 2 ».

Pour les autres, les raisons sont moins évidentes, et hormis l'alcool évoqué une fois, il s'agit plus vraisemblablement de la peur de l'avenir et de difficultés à survivre économiquement : « Le malheureux fermier, qui avait déjà cherché en vain à trouver une autre terre d'exploitation, fut très affecté de ce congédiement, et à partir de ce moment devint sombre n'adressant plus la parole à qui que ce soit. ».

Dans la plupart des cas, le non-dit familial est la règle, sans doute par honte et du "qu'en dira-t-on". Cela peut donner lieu, deux ou trois générations plus tard, à des tentatives d'explications sur la façon dont les évènements se sont produits : « Le curé de l'époque a bien voulu faire une messe pour les proches, mais sans le corps qui était resté à l'extérieur de l'église. » ; « n'a pas supporté ce que disait cette rumeur et a mis fin à ses jours » ; « la version de la chute dans le puits à laquelle croyaient fermement certains cousins ». Ou alors c'est l'ignorance complète et l'envie de comprendre 100 ans plus tard.

 

L'histoire la plus triste très certainement, donnant lieu à 5 articles de journaux, est celle de Jeanne Daniel, épouse Douguet, âgée de 48 ans, mère de 17 enfants, qui se pend en février 1921 avec son mouchoir (sic) à une branche de noisetier.

Avec son mari ils étaient fermiers locataires d'une ferme à Kerdudal, et leur bail se termine brutalement quelques mois plus tard le 29 septembre 1922. Corentin Douguet devra vendre matériels et bétail pour s'installer dans une petite maison à Ergué Armel.

Ce congédiement fait écho au propre malheur des propriétaires de Kerdudal 3 ans plus tôt : en avril 1918 Yves Salaün de Kerdudal qui avait construit avant guerre une grande ferme à Kerleur (et donc loué sa petite ferme de Kerdudal) se suicide en laissant une veuve et neuf enfants. Ces derniers mobilisés en 1915-15, il faut attendre 1922 pour que l'héritier de Kerdudal, grand blessé de guerre, ne revienne au pays.

Triste époque décidément !


En savoir plus : « Suicides suite au traumatisme de la Grande Guerre, journaux locaux 1918-1922 »

6 Portraits d'actrice et génériques

01.10.2022 - Quelques tableaux de maîtres commandés par Gwenn-Aël Bolloré et Renée Cosima, son épouse, et insérés dans les génériques de leurs courts-métrages : merci à leur fille Anne Bolloré pour la communication du cliché du tableau Goerg de sa collection privée et pour son témoignage familial éclairé.

À l'époque, dans toutes les salles de cinéma de France, les grands films étaient précédés il y avait de la pub, des actualités et un court-métrage. Et Gwenn-Aël Bolloré et son épouse ont produit ensemble un certain nombre de « courts », la plupart sur les thèmes de la mer, la pêche et l'océanographie. Leur fille Anne témoigne : « Pour chacun de ces films, mon père demandait à un artiste de réaliser un portrait de Maman qui servirait de fond pour le générique. »
L'un d'entre eux intitulé « L'Odet », filmé en noir-et-blanc, démarre par le visage souriant de Renée Cosima. Le tableau original (cf. ci-dessous) réalisé par Edouard Goerg est encore plus attrayant avec ses couleurs chatoyantes : on la voit portant une corne d'abondance ou un grand bouquet de fleurs, et en arrière-plan, en vue plongeante depuis le manoir familial d'Odet, coule la rivière avec ses poissons, un pêcheur et un lièvre.

Edouard Goerg (1893-1969), élève des "bretons" Paul Sérusier et Maurice Denis, est un peintre majeur de l’expressionnisme français, son œuvre se caractérisant par des couleurs profondes et des compositions étranges.

  Dans trois autres courts-métrages filmés en couleur, « Le vire-cailloux », « Derniers voiliers » et « Requins sur nos plages », un autre tableau est inséré en générique, à savoir l'œuvre du peinte Jean Carzou (1907-2000) d'origine arménienne et installé en Provence.

On y voit Renée Cosima posant de profil devant une armada de voiliers. Sa fille l'apprécie moins que le Goerg : « un Carzou, où la silhouette de Maman, sur fond de mâts, me faisait un peu honte tant il avait exagérément moulé ses seins dans un tricot de marin. »

Les autres portraits de René Cosima, tableaux commandés par Gwenn-Aël Bolloré dont on n'a pas les fac-similés, sont les suivants :

  • Bernard Buffet (1928-1999) : « Un portrait où Maman, sur fond de paysage méditerranéen, ressemble à Bernard Buffet. »
  • Paul Kerouedan (1929-2016) : « Maman étant assise sur une table basse dans le salon d’hiver, riche de souvenirs africains, d’où l’on voyait couler la rivière, mais sur ce tableau, elle portait quinze ans de plus qu’elle n’en avait. »
  • et à l'occasion du film long-métrage « Les Naufrageurs », Marcel Jacno (1904-1989),  : « un tableau où la présence de ma mère n’était en rien diminuée par le capuchon de la naufrageuse. »


En savoir plus : « Portraits de peintres et génériques de Renée Cosima-Bolloré »

7 Vive la classe 59

25.09.2022 - Sur le thème « Faire parler les photos anciennes », la parole est donnée aux anciens et leurs descendants. Cette semaine une photo de classe qui n'est pas du tout scolaire, mais celle de jeunes qui se sont rassemblés pour la 1ère fois l'année de leur 20 ans.

Jusqu'aux années 1970, on a connu la tradition de la "classe", sorte de coterie ou de clan pouvant regrouper quelques dizaines de jeunes gens d'une même commune, baptisée par l'année de leur 20 ans quand ils étaient appelés au service militaire.

Et leur premier rassemblement cette année-là était festif et donnait lieu à une photo souvenir. La classe 1959 photographiée ci-dessous est formée des jeunes gens nés en 1939, mais aussi pour la seconde fois des jeunes filles gabéricoises du même âge (la classe 1958 « d'avant-garde » était aussi mixte).

Merci à Geneviève Salaün, épouse Cosmao, pour nous avoir communiqué la photo de sa classe et identifié les premières têtes connues. Sur cette photo posent 28 jeunes enjoués, la plupart des garçons coiffés d'un béret, et presque toutes les filles d'un large chapeau exotique.

Ils se sont rendus tous bien endimanchés dans le studio d'un photographe professionnel quimpérois et la fête s'est ensuite déroulé à la salle Thomas au Bourg. Comme le voulaient les traditions de l'époque, les gars ont élu la reine de leur groupe, et c'est, parait-il, Denise Istin de Quélennec qui obtint le titre.

Avec les encarts mensuels d'état-civil publiés dans la presse locale et suite à un appel aux anciens, tous les jeunes de la classe de 1959 ont été identifiés (il ne manque qu'un prénom) et leurs villages d'appartenance notés.

  Beaucoup sont du quartier d'Odet, quelques-uns du bourg et de l'ouest du territoire communal, et à l'est ils sont largement moins nombreux.
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1. Fanch Gaonac'h (Kerho) 2. Annick Le Meur (Quélennec) 3. Pierre Floc'h (Poulduic) 4. Jeannine Narvor (Stang-Venn) 5. Louis Le Dé (Kernoaz) 6. Yvette Thomas (Lestonan) 7. Louis Barré (Bourg) 8. Geneviève Salaün (Kerdudal) 9. Corentin Gaonac'h (Kerho)[1] 10. Yves Quillec (Ty-Nevez-Coutilly) 11. Jean-Claude Velin (Keranguéo) 12. Germaine Le Meur (Bigoudic)) 13. Noël Le Moigne (Keranguéo) 14. Annie Le Roux (Kernevez) 15. Alain Letty (Menez-Kerdévot) 16. ? Cossec (Menez-Kerveady) 17. Louise Le Moigne (Bourg) 18. Hervé Yaouanc (Kerellou) 19. Marcel Le Moigne (L'Hotel) 20. Louis Le Roux (Bohars) 21. Marie-Antoinette Le Floc'h (Bigoudic) 22.  ? Vautier (Rouillen) 23. Annick Thomas (Ker Anna) 24. André Bellinger (Keranguéo) 25. Denise Istin (Quélennec) 26. René Feunteun (Munuguic) 27. Monique Huitric (Lestonan) 28. Pierre Bellinger (Keranguéo)

Un appel aux bonnes volontés aux participants ou proches reste d'actualité pour la collecte des anecdotes relatives à leur fête de classe.

Image:Square.gifImage:Space.jpgEn savoir plus : « 1959 - La classe des filles et des gars nés en 1939 »

8 Gustave, Person Bragou Ruz

17.09.2022 - Gustave Guéguen, surnommé "Gustave" par tout le monde, recteur de la paroisse d'Ergué-Gabéric de 1941 à 1956, a tenu un registre-journal dans lequel il parlait de lui alternativement à la 3e personne (« le Recteur arriva à l'heure fixée ») et la 1ère personne (« je viens d'apprendre que ... »).

La fraîcheur de ses observations, ses agacements et obsessions, sont un vrai matériau pour comprendre cette époque de guerre et d'après-guerre. Fanch Ac'h et l'association ont démarré et publié quelques extraits, notamment pour les années 1941 et 1947, et Jean Guéguen a transcrit certaines pages de 1943 et 1944. Mais le travail est loin d'être achevé : un jour prochain il sera peut-être possible d'en publier une version intégrale. D'ores et déjà, voici quelques perles qui peuvent donner une idée des transcriptions déjà réalisées (cf. les textes en ligne).

Le 2 mars 1941, le recteur constate une bonne assistance au pardon de St-Guénolé, mais il ne peut s'empêcher de pourfendre la jeunesses : « Il est toutefois regrettable que certains jeunes gens et jeunes filles, au lieu d'assister aux offices, aient senti le besoin de se réunir trop nombreux dans les granges du voisinage pour des amusements » et il conclut par un « Des arriérés !  »

La rentabilité des quêtes est l'une de ses grandes obsessions, que ce soit pour les grand messes, les messes basses et les pardons : « 5 F. comme offrande à toutes les messes !!! Inconcevable.  » ; « Un pardon qui paie bien. », à savoir le pardon "mud" (muet) de Kerdévot le 10 avril 41.

L'occupation de l'école des sœurs par un cantonnement de soldats allemands en juillet 1943 est racontée avec des précisions quant à la façon dont le déménagements des meubles et des occupantes a été organisée : « Jusqu'à 23 h on a transporté au presbytère dans la cour, les objets les plus hétéroclites. Dans la matinée du samedi le clergé, les abbés ont mis un peu d'ordre dans ce capharnaüm ».

Quand la fin de la guerre se profile, Gustave observe et note un tas d'évènements, l'arrivée des résistants au bourg, avec les drapeaux français qui apparaissent une journée - « deux cafés arborent les 3 couleurs » - et sont retirés ensuite par crainte de l'occupant. Et cet exploit d'un jeune garçon anonyme (?) : « Un scout a hissé le drapeau au sommet de la tour (clocher) sans ma permission. J'ai fait la remarque le lendemain et le jeune est venu offrir ses excuses. »

On notera aussi ce passage où le recteur évoque l’exécution du résistant François Balès, boulanger au bourg : « Cette mort m'affecte beaucoup, car si nous avons de grandes divergences, ce jeune homme s'approchait de moi parce que ma loyauté l'attirait. ». Derrière la carapace on devine une humanité débordante qui sut se remettre en question.

En savoir plus : « Journal paroissial du recteur Gustave Guéguen, extraits 1941-47 »

 
Le jeune Jean Guéguen et l'abbé Pennarun

Jean Guéguen né en 1926 a produit cet article manuscrit dans lequel il fait le portrait du recteur gabéricois de son adolescence : « Notes sur Gustave Guéguen, recteur de la paroisse d'Ergué-Gabéfic (1941-1956) que m'a contées l'abbé Pennarun qui l'a remplacé après son décès, à la tête de la paroisse. Ces récits m'ont été faits dans les années 1960. »

Grâce à eux on apprend que le recteur Gustave Guéguen, pour exercer sa passion du jardinage, mettait systématiquement un pantalon de couleur brique, ce qui lui valut ce surnom de « Person bragou ruz », le recteur au pantalon rouge.

C'est dans cette tenue qu'il fut surpris un jour lors d'une visite des neveux du diplomate Jean François Poncet, l'un de ses amis. Il leur dit quelques mots, partit discrètement se changer, et les retrouva dans sa salle à manger et dit en évoquant le premier contact : « c'est mon frère jumeau que j'héberge et qui entretient le presbytère ! ».

On apprend aussi que la veuve de René Bolloré, pour remercier Notre-Dame de Kerdévot d'avoir protégé ses deux fils René-Guillaume et Gwenn-Aël pendant le conflit, a financé la réalisation de six statues destinées à orner les niches vides du calvaire de Kerdévot. Mais Gustave s'embrouilla avec le directeur des Monuments Historiques et les statues de pierre ont dû être dispersées dans des écoles et autres églises des environs.

En savoir plus : « Gustave "Person bragou ruz" raconté par Jean Guéguen et l'abbé Pennarun »

9 Années difficiles 1940-45

11.09.2022 - Aujourd'hui, jour du pardon de Kerdévot, reprise des billets hebdos avec un texte de Jean Guéguen (1926-2018), lequel a toujours eu à cœur de transmettre aux générations suivantes la mémoire de son quartier et de sa famille, les évènements du passé et les richesses du patrimoine local.

En juillet 2022, en feuilletant l'un des livres de sa bibliothèque, « Le Finistère dans la guerre » de Georges-Michel Thomas et Alain Le Grand, nous avons trouvé ces 11 feuillets manuscrits rédigés dans les années 1990, « quelques soixante années plus tard », dans lesquels il rassemble les évènements significatifs de la période 1940-1945.

Dans ces pages, Jean Guéguen mélange ses souvenirs d'enfant habitant le quartier de Lestonan (son père y était boulanger), sa connaissance de la chronologie des évènements en région quimpéroise et les faits inédits rapportés dans le journal manuscrit du recteur Gustave Guéguen (cf. en article séparé).

Dans les deux feuillets supplémentaires où il détaille l'histoire de l'arrivée de l'armée allemande dans les écoles privées de Lestonan, il signe ainsi son texte : « Jean Guéguen témoin oculaire de l'époque et propos recueillis par le même auprès du Frère directeur François Nédélec ».

De ces souvenirs il en ressort un certain nombre d'anecdotes inédites, dont celles-ci :

  • les premières années : « les contacts étaient surtout d'ordre administratif avec la mairie, surtout en ce qui concernait les réquisitions de fourrages », et en 1941 un accident marquant, « un camion allemand est venu prendre du foin chez Pierre Quéré ... À la sortie de Lestonan, au virage de Lestonan-Vihan, le soldat qui était sur le chargement est éjecté et projeté sur la route. Il sera soigné par Malou Lazou, fille du directeur de l'école publique de Lestonan (tué au front en 1940). »
  • la réquisition de l'école des sœurs du Bourg en 1943 : « Trois officiers allemands se présentent à l'école des sœurs du bourg, ce jeudi 15 juillet. L'école doit être totalement libéré" pour le samedi 17 juillet à midi. Avec le concours de la population du bourg l'école est déménagée et le tout est transportée dans la cour du presbytère. Un vrai capharnaüm dira le recteur. »
 
  • l'arrivée d'un autre détachement à Lestonan : « il est demandé aux Frères de quitter l'école et de laisser leurs appartements tels quels. Le Frère directeur François Nédélec refuse et après une dispute tendue et épique avec l'officier commandant le détachement réussit à garder sa chambre. Interdiction formelle est faite d'évacuer quoi que ce soit de l'école. C'était sans compter sur la roublardise de René Sizorn, garde chasse chez Bolloré, celui-ci s'enferme dans la salle à manger avec le soldat allemand et le "dope" au lambic (alcool fort local) pendant qu'on déménageait le mobilier. »
  • le cambriolage des dossiers STO en 1944 (cf. autres articles sur le site GrandTerrier) : « Ceux d'Ergué Fanch Balès, Jean Le Corre, Pierre Moigne et Hervé Bénéat dérobent les dossiers des réfractaires, les entassent dans des sacs, puis dans la voiture qu'a emprunté François Balès à sa tante et reviennent à Ergué où les dossiers sont brûlés dans le four de la boulangerie familiale. ».
  • l'arrivée des résistants au bourg : « Vendredi 4 août. Dans la soirée, le bourg est en effervescence par l'arrivée de la résistance. Des voitures et des camions descendent des jeunes gens armés de fusils et de mitraillettes. Ces jeunes sont enthousiastes. et veulent "bouffer du boche". Le bourg est pavoisé de drapeaux français et alliés.  »
  • des exécutions choquantes : « C'est la stupeur à Ergué. François Balès a été tué sur les pentes du Menez-Hom. » ; « Auparavant en fin de matinée, un gabéricois, Jean-Louis Le Meur de Kervernic, se rendait à Ergué-Armel. Il fut pris en otage par une colonne de Russes Vlassov  » ; « une centaine de victimes, dont Yvon Benoit de Ti-Nevez-Kernaou qui, quelques jour auparavant, portait le drapeau lors des obsèques de son camarade François Balès. »

Image:Square.gifImage:Space.jpgEn savoir plus : « Les années difficiles 1940-1945, témoignage de Jean Guéguen ». La semaine prochaine, nous poursuivrons par un portrait du recteur Gustave Guéguen (1889-1956), non apparenté à Jean, avec des extraits de son journal paroissial.

10 Bulletin Kannadig de l'été

Billet du 09.07.2022 - Version papier : 28 pages ou 7 feuillets A4 recto verso pliés en A5, agrafés et mis sous pli postal. ON FAIT UNE PAUSE DE BILLETS EN JUILLET AOÛT ET LE BULLETIN D'OCTOBRE RASSEMBLERA LES BILLETS DE SEPTEMBRE ET DES DOSSIERS SURPRISES PRÉPARÉS PENDANT L’ÉTÉ.

Du patrimoine du bourg aux photos des Bolloré

Ce bulletin, couvrant les articles du trimestre passé, démarre par 4 articles sur le patrimoine du bourg :

  • Le premier est relatif au puits ancestral de la Capitale avec son épigraphe datée de 1649.
  • Les 3 suivants portent sur la belle bâtisse du presbytère, aliénée comme bien national à la Révolution et recédée à la paroisse 30 ans après.

Nous avons ensuite deux chroniques de mémoire et d’archives militaires :

  • Les 23 jeunes conscrits nés en 1931 réunis pour la photo de leur « classe » et quelques souvenirs de la période de guerre.
  • Les documents Arolsen des camps en Allemagne pour 21 gabéricois déportés ou prisonniers.

Les 5 derniers articles s’inscrivent dans le cadre de la fête du bicentenaire des papeteries Bolloré d’Odet :

  • Les triples éloges funèbres du patriarche René Bolloré en 1935.
  • La commande par le susdit René d’une statue de sainte Thérèse pour la chapelle de Cascadec.
  • Et enfin trois séries inédites de photos de Jacques-Henri Lartigue en villégiature chez son ami René, puis chez ses enfants René-Guillaume, Jacqueline et Gwenn-Aël Bolloré, avec des extraits du journal du « génie du noir et blanc » et des reproduc-tions de ses albums de 1926, 1939, 1953 et 1980.

À l’instar de Jean Thomas se désaltérant au puits de la Capitale, cette belle réflexion sur la soif de poursuivre les recherches grand-terriennes : « Méfions-nous de l'eau qui, en nous désaltérant, nous prive des plaisirs de la soif. » (Grégoire Lacroix, Le penseur malgré lui, 2012).

 

Image:square.gifImage:Space.jpgLire, feuilleter ou imprimer le bulletin en ligne : « KANNADIG n° 58 JUILLET 2022 »

11 Retour du presbytère dans la fabrique

02.07.2022 - Fabrique, s.f. : désigne, avant la loi de séparation de l'église et de l'état, tantôt l'ensemble des biens affectés à l'entretien du culte catholique, tantôt le corps politique spécial chargé de l'administration de ces biens. >> 3e épisode de l'histoire du presbytère. Semaine prochaine : bulletin trimestriel.

À la Révolution, en 1796, le presbytère situé au bourg d'Ergué-Gabéric, déserté par son recteur réfractaire, est considéré comme bien national et vendu à titre privé pour 1790 francs à l'avoué quimpérois Salomon Bréhier.

Après la décision d'affermer la bâtisse à la commune pour y loger les nouveaux prêtres desservants, puis plusieurs tentatives de ventes à la commune refusées par les autorités impériales et royales, il s'en suit des embrouilles sans fin sur la budgétisation du loyer annuel d'une part, et sur la prise en charge des travaux d'entretien d'autre part.

Entre 1804 et 1809, un premier recteur acquitte des avances sur de multiples réparations par des artisans : réfection des toitures par un « couvreur d'ardoises », « relève de la porte cochaire » ... Ces travaux sont exécutés avec l'accord écrit des maires, Jean Le Jour, puis Salomon Bréhier qui, ne l'oublions pas, est aussi le propriétaire du presbytère.

Néanmoins, en 1810, quand il quitte Ergué-Gabéric pour Plomodiern, il n'est toujours pas remboursé et 6 ans encore plus tard il doit insister auprès des préfets successifs. Seulement une partie de ses créances est finalement prise en charge, car le maire de l'époque, Jérôme Crédou, et ses conseillers estiment qu'il n'avait pas « le concours de l'autorité locale ».

Pour les dépenses autorisées, le remboursement des travaux autorisés par la commune est autorisé par le préfet bien que couverts normalement par fabrique, c'est-à-dire de la communauté paroissiale : « Les réparations du presbytère lorsque que ce bâtiment appartient à la commune, sont d'ailleurs à la charge de la fabrique comme dépense du culte à moins que cette fabrique ne justifie de l'insuffisance de ses ressources ».

En 1814, Salomon Bréhier et son épouse réussissent à vendre non pas à la commune, mais au nouveau recteur : « Lesquels Monsieur et Madame Bréhier ont par le présent avec garantie déclaré vendre, comme de fait ils vendent sans autres garanties que celles leurs accordées par le Gouvernement, au dit Monsieur Le Bescon acceptant le presbytère d'Ergué-Gabéric situé au bourg communal avec un verger, jardin, hangard, cour, issues et autres dépendances ».

 

Sept ans après, le recteur rédige son testament et y explique son acquisition au nom de la fabrique : « Je déclare qu'il m'est dû 973 francs par la fabrique de l'église communale d'Ergué-Gabéric, au nom de laquelle j'ai entendu acquérir le presbytère de la dite commune suivant contrat du 24 février 1814 ... je déclare me dessaisir par le présent, de la propriété du susdit presbytère et dépendances, ... je vais comparaitre le trésorier de la fabrique, lequel signera le présent acte avec moi comme acceptant, au nom de la fabrique, le presbytère d'Ergué-Gabéric ».

La formule « fabrique de l'église communale » indique bien la nation complexe de la propriété. Le conseil de fabrique est certes responsable du culte paroissial, mais ses biens immobiliers - essentiellement l'église-lieu de culte entretenu par la commune et le presbytère privatisé, puis restitué - sont bien en théorie des propriétés municipales.

De ce fait, le paiement du reste dû au recteur défunt pour la restitution du presbytère par le recteur se fait en deux temps en 1823-24  : le conseil de fabrique dans un premier temps règle le montant, et dans un second temps le maire s'engage à rembourser la fabrique de l'avance de fonds.

Cette ambiguïté communale et/ou paroissiale perdurera pendant tout le XIXe siècle. En 1926 l'administration des domaines revient sur les conditions de ce legs de 1823 : « Les termes du testament Le Bescou "léguant le presbytère à la fabrique communale d'Ergué-Gabéric" m'ont fait considérer cet immeuble comme propriété de la commune. Un nouvel examen de ce testament me fait reconnaître que cette interprétation est erronée et que le presbytère d'Ergué-Gabéric paraît avoir été réellement légué à la fabrique paroissiale de cette commune ».

Image:Square.gifImage:Space.jpgEn savoir plus : « 1814-1824 - Achat du presbytère par le recteur et legs de propriété à la fabrique »

12 Quête et octroi pour le presbytère

25.06.2022 - Des transactions difficiles entre la municipalité, le clergé, l'administration préfectorale et son propriétaire, à la lecture des documents des Archives diocésaines, des délibérations de conseils des Archives municipales, et des documents préfectoraux des Archives départementales du Finistère.

Le presbytère fait l'objet d'une vente aux enchères en 1796, le 7 messidor de l'an 4, dans le cadre de la confiscation des biens du clergé et c'est l'avoué franc-maçon Salomon Bréhier qui en devient le propriétaire.

Après le Concordat, en juillet-août 1804, Brehier propose à la commune un contrat de location : « Je déclare affermer à la commune pour le terme d'un an à commencer à la Saint Michel prochaine, mon presbitaire d'Ergué-Gabéric et ses dépendances, pour une somme de cent vingt francs payable à deux termes et en six mois. »

Et il précise même qu'il veut bien vendre : « Je consens pareillement de vendre au prix de trois mille francs payables trois mois, après l'autorisation du gouvernement arrivé à Quimper à même d'en passer acte par devant notaires. »

Le conseil municipal accepte la transaction d'affermage dans deux comptes-rendus de délibération datées du 10 thermidor an 12 (31 juillet 1804) et du 1er fructidor an 12 (19 août 1804), en justifiant leur décision par « l'impossibilité de se pourvoir pour loger son curé d'un autre local que celui-ci du ci-devant presbitère ».

Mais très vite les ressources municipales ne suffisent plus pour payer le loyer annuel du presbytère réévalué à 200 francs. Il faut dire que le budget total des dépenses et recettes de la commune ne dépasse pas les 370 francs. En janvier 1808 le loyer de 1806 est déclaré arriéré par un tiers et celui de 1807 complètement impayé.

Et là, Bréhier a une idée géniale : par un courrier il demande au préfet d'écrire au maire pour qu'il lance une quête à l'église paroissiale. Dont acte : « Monsieur le maire. Veuillez à cet effet vous concerter avec MM le desservant et les marguilliers pour faire un appel aux âmes généreuses et charitables de votre commune à l'effet d'obtenir les fonds nécessaires pour subvenir à ses pressans besoins.  »

Cette méthode particulière d'obtention de subside pour couvrir des dépenses communales aura été appliquée pendant quelques années. Mais en 1808 on voit poindre la possibilité de rétablir l'octroi pour permettre aux communes et villes d'augmenter leurs recettes.

 
Et Bréhier lui-même ne manque pas en janvier 1808 de rappeler au préfet : « Vous me fîtes égallement l'honneur de me dire que vous pourriez incessam-ment obtenir les octrois pour cette commune. Je le désire bien sincèrement et aussitôt que votre arrêté me sera connû je m'empresserai de m'entendre avec l'adjoint pour le faire mettre à exécution. » Car l'un des arguments majeurs pour le rétablissement de l'octroi à Ergué-Gabéric est bien les frais d'affermage du presbytère.

Salomon Bréhier est nommé maire d'Ergué-Gabéric le 26 mai 1808 par le préfet. Et dès octobre, il fait l'objet d'une réclamation de remboursement de frais de réparations de la part du recteur desservant François Le Pennec : « Le maire et l'adjoint de cette commune m'avaient chargé de faire faire dans le presbitère les réparations nécessaires et cela par un billet signé d'eux ». Le recteur, tenace, sera remboursé plus de 10 ans après.

En octobre 1811, Bréhier étant toujours maire et propriétaire du presbytère, un conseil municipal constate la difficulté de gestion du presbytère : « Après avoir enfin reconnu la difficulté qui résultent d'avoir recourru annuellement à une quête volontaire dont le produit incertain et toujours insuffisant pour faire face aux loyers, réparations et contributions évaluées annuellement à une somme de trois cents francs

Et les conseillers, validant le principe d"une acquisition communale, « sont d'avis définitivement d'en faire l'acquisition aux conditions proposées par ce dernier et d'y adhérer par et moyennant la somme de quatre mille francs »

Mais il manque « l'approbation de monsieur le préfet du finistère et l'autorisation de sa majesté empereur et roi et ses ministres ». En effet Napoléon, même dans le cadre du Concordat, n'est pas favorable aux annulations des ventes passées de biens de l'église, et il faudra donc attendre.

* * *

La semaine prochaine, nous poursuivrons avec la période 1814-1826, à savoir la vente factice du presbytère en 1814 par Bréhier au recteur occupant et son retour administratif en 1824 en tant que patrimoine communal.

Image:Square.gifImage:Space.jpgEn savoir plus : « 1804-1811 - Location, quête et tentative d'acquisition du presbytère par la commune »

13 Aliénation du logis presbytéral

18.06.2022 - On dit que c'est la plus jolie bâtisse du centre-bourg, et rien d'étonnant donc qu'à la révolution elle fasse déjà l'objet de convoitises.
Sources documentaires : liasses 1Q431 et 1Q675 conservées aux Archives départementales du Finistère.

La vente de presbytère n'est pas systématique pendant la Révolution française. En effet le 20 décembre 1790, un décret soustrait de la vente des biens de l'Église, chaque fois que cela est possible, un logis convenable servant de presbytère au prêtre de chaque paroisse ainsi qu'un demi arpent de terre utilisé comme jardin.

Mais, au départ du recteur en exil à Prague, le logis presbytéral gabéricois reste vide et pour cette raison l’aliénation est mise en exécution le 25 prairial de l'an 4, c'est à dire le 13 juin 1796 : « l'estimation par experts est ordonnée pour fixer le prix auquel il doit être aliéné, tant en revenu qu'en capital sur le pied de la valeur de 1790  » (sur le pied de : "d'après des ressources évaluables à cette date", c'est-à-dire hors inflation et dépréciations ultérieures).

Le document d'estimation donne des précisions sur la valeur patrimoniale non négligeable du bien confisqué :

Image:Right.gifImage:Space.jpg« couverte en ardoises, elle a cinquante six pieds de longueur dans sa longère du midi laquelle est percée d'une porte et huit fenêtres  » : des ardoises plus cossues qu'un toit de chaume, et une bâtisse de plus de 15 mètres.

Image:Right.gifImage:Space.jpg« À l'ouest de la maison principale, intérieurement à la même cour, est construite une écurie en mêmes matériaux que la maison » : à l'endroit du garage actuel.

Image:Right.gifImage:Space.jpg« Au midi de la cour est un jardin de quinze cordes d'étendue » : un petit verger de moins de 1000 m2.

Image:Right.gifImage:Space.jpg« Sur la limitte vers Quimper de la commune d'Ergué Gabéric et bordant la rivière d'Odet, entre Tréodet et Keranroux est une prairie de deux journaux » : une prairie d'un hectare (laquelle hébergeait une statue de saint Gwenaël qui sera rapatriée au presbytère bien plus tard).

Après le calcul à partir des revenus annuels de la valeur du capital, sur la base des taux de conversion de l'époque (x18 et x22), Vincent Leblond de St-Aubin, expert nommé par le directoire de Quimper, aboutit à un chiffre de 1790 livres, arrondies à 1790 francs au moment de la vente (normalement un franc vaut 1 livre et 3 deniers).

Ce qui surprend c'est la précipitation dans laquelle la cession du presbytère est opérée : l'autorisation administrative le 13 juin, l'estimation sur place une semaine après, et la vente entérinée le 25 juin, sans enchères publiques comme lors des autres attributions de biens nationaux communaux. Le soumissionnaire de l'autorisation administrative est l'acquéreur lui-même, et ce dernier, Salomon Bréhier, contresigne lui-même le document d'estimation de son collègue avoué expert Vincent Leblond.

 


François Salomon Bréhier, né le 20 octobre 1760 à St-Ronan (Quimper), d'une famille originaire de la Manche, a l'habitude des aliénations de biens, ayant lui-même rédigé des documents d'expertise pour la plupart des chapelles et des biens nobles de la commune. C'est un notable quimpérois influent, initié à la loge maçonnique de La Parfaite Union, qui exerce les professions de procureur au présidial de Quimper et d'avoué (avocat expert des tribunaux).

* * *

La semaine prochaine, nous examinerons, avec des documents inédits, ce qu'il est advenu du presbytère après son aliénation en 1796.

Image:Square.gifImage:Space.jpgEn savoir plus : « 1796 - Estimation et vente du presbytère comme bien national »

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