1792-1803 - Séquestre, amnistie et main levée pour les de La Marche de Lezergué - GrandTerrier

1792-1803 - Séquestre, amnistie et main levée pour les de La Marche de Lezergué

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§ E.D.F.
Les documents de séquestre des biens de François-Louis de La Marche en 1792, le certificat d'amnistie du même et de son fils donnant lieu à main-levée de séquestre en 1803.

Premier document découvert par Grégory Floc'h lors de la rédaction d'un article pour la Société Archéologique du Finistère. L'amnistie et la main-levée apparaissent dans la même liasse des Archives départementales du Finistère.

Autres lectures : « FLOC'H Grégory - Lézergué, château du XVIIIe siècle breton » ¤ « Les de La Marche, nobles de Kerfort et de Lezergué, 17e-18e siècles » ¤ « 1794 - Inventaire des papiers de François-Louis de La Marche après son décès à Jersey » ¤ « 1789 - Le cahier de doléances du Tiers-Etat d'Ergué-Gabéric » ¤ « 1800 - Déclaration et inventaire de Lezergué » ¤ « 1808 - Saisie du château de Lezergué » ¤ « 1742 - Succession de Jean Floc'h métayer du manoir de Lezergué » ¤ 

[modifier] 1 Présentation

Cet inventaire de 1792 concerne bien le séquestre ou confiscation des meubles et effets du château style Louis XIII, bâti en 1772-73 près de la métairie de Lezergué par François-Louis de La Marche (1720-1794), dit Lamarche père, tel que restitué ci-contre par l'aquarelliste Anne Cognard. En cette fin d'avril 1792 les de La Marche sont « émigrés et hors du royaume » : Lamarche père vient de partir sur l'île de Jersey et son fils cadet Joseph-Louis-René en Guadeloupe, le dernier des fils étant resté à Quimper et le fils aîné décédé à Lezergué en 1774.

Suite à la désertion des propriétaires de Lezergué, les autorités révolutionnaires procèdent à l'adjudication des tenues agricoles et aux convenants de Lezergué, et au séquestre de leurs biens personnels, Pour les Lamarche père et fils cadet qui habitaient aussi dans un hôtel quimpérois, l'inventaire de séquestre de Lezergué est complété par un séquestre dit « de la Quintin » où sont listés également des habits, du linge et quelques meubles laissés sur place.

L'inventaire de Lezergué est bien plus important, du fait des objets entreposés et du nombre de « chambres », désignées aussi sous le terme d'appartements. Hormis la cuisine, ces six grandes pièces de part et d'autre du grand escalier intérieur sont sous clefs, et le responsable de l'inventaire doit faire venir un serrurier pour les ouvrir.

Deux métayers sont ses interlocuteurs locaux : Guénnolé Kergourlay, valet domestique résidant au manoir et Jean Leguiader ménager demeurant à la métairie. Deux personnages officiels de la commune sont invités à rester présents pendant l'inventaire, le maire Jean Lenoach (ou Lozac'h ?) et l'officier municipal Jean Leday (alias Le Jour), mais ils « s'y sont refusés, de dire et de signer la cause de leur refus ». Sans doute voulaient-ils éviter de se prononcer contre les châtelains en fuite.

Et par ailleurs on peut noter que la fonction de maire pendant les premières années révolutionnaires n'était pas convoitée à Ergué-Gabéric, car les deux premiers, l'un pour 1791, le deuxième ici mentionné pour 1792, sont très discrets pour n'être mentionnés chacun que dans un seul document d'archives. Et le patronyme de celui de 1792 est incertain, car l'orthographe Le Noac'h ne correspondant à aucun actif de l'époque : seul Jean Lozac'h de Kervian (patronyme parfois transcrit en Lenoac'h) est l'un des signataires du cahier de doléances de 1789.

Ce qui frappe dans le relevé patrimonial, c'est la richesse des habitants qu'on ne trouve pas dans les documents habituels de successions de roturiers : des dizaines d'assiettes ou de plats de faïence, des assiettes, des gobelets ou théières de porcelaine, des couverts d'argent armoiriés ... Le niveau de vie est aussi dans les lits à tombeau [1] avec ciel, rideaux et courtepointes (couverture doublée). Comme les cheminées sont légion, dans chaque appartement on trouve le nécessaire pour maintenir un feu : des chenets ou landiers [2], des soufflets, des pèles à feu, des tourne-broches.

Au niveau des armes détenus par les occupants et laissées dans leurs chambres, on note plusieurs fusils à un ou deux canons et une épée à poignée d'argent.

 
Lezergué, Anne Cognard 2017
Lezergué, Anne Cognard 2017

Ensuite le niveau culturel est élevé car on compte deux grandes bibliothèques dans les deux appartements à gauche de l'escalier, pour plus de 600 volumes au total. Est-ce un héritage des livres de Guy Autret, précédent occupant de Lezergué, avant la construction du château Louis XIII ?

Plus surprenant, des affaires religieuses sont rangées dans la première chambre à gauche : des calices, des patennes [3], des chasubles [4], des aubes, un banc d'église, des ornements d'autel, un livre d'église et des nappes d'autel.

Il est vraisemblable que tous ces effets resteront conservés à Lezergué pendant l'exil des maîtres des lieux. En 1803, le 13 floréal de l'an 11, les survivants peuvent se réjouir d'une amnistie du ministère de la justice : « exposent Joseph-Louis-René-Marie Delamarche ainé, et Joseph-Hiacinthe Delamarche cadet, qu'ils ont obtenû un certificat d'amnistie du grand juge ministre de la justice de deux floréal an onze pour François-Louis Lamarche leur père ». Ce dernier est décédé en exil à Jersey en octobre 1794.

Les raisons de l'amnistie, et donc de main-levée des séquestres les concernant, sont certainement des preuves de bonne volonté de leur part vis-à-vis des nouveaux pouvoirs politiques, et aussi le fait que le dernier fils Joseph-Hyacinthe, celui qui signe Lamarche Kerfors (et non Lezergué car ce titre échoit à son aîné), n'est pas parti en exil et est resté sur Quimper. On notera également que, parmi les papiers du défunt Lamarche père, des attestations de don patriotique lui avaient été délivrées pour la période 1789-90.

La décision d'amnistie donne aussi l'explication du défaut d'adjudication du manoir de Lezergué en tant que bien national. Les héritiers, la veuve du fils aîné et les deux autres fils cadets, se voient rétablir leurs droits de jouissance sur les convenants du domaine noble. Joseph-Louis-René détient la propriété de Lezergué, mais une dette contractée en Guadeloupe l'oblige à céder le lieu en 1808.

[modifier] 2 Transcriptions

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Inventaire de séquestre

18 avril 1792. Lesergué en Ergué-Gabéric. Lamarche père et fils cadet. 18 et autres jours du mois d'avril 1792. Séquestre.

Ce jour dix huit avril, mil sept cent quatre vingt douze, après midi, l'an quatrième de la liberté, je sousigné, Jean Louis L'argenton, général et d'armes au tribunal, di cy-devant présidial de Quimper, y reçu et huissier en la justice de paix de la dite ville, y juré et y demeurant, rue Quéréon, parroisse cathédrale deu finistère, certifie et rapporte qu'à la requete du sieur François Abgrall, procureur syndic du district de Quimper, y demeurant, dites rue et parroisse que custitiée, en tant que besoin, pour avoué, au tribunal du district de Quimper, le sieur Danguy, et fait élection de domicile en étude, à Quimper, rue Saint-Nicolas, je me suis transporté jusqu'au manoir de Lezergué, en la paroisse d'Ergué-Gabéric, ou étant environ les deux heures de relevée de ce jour, j'ai en vertu de l'arrêté du directoire du district de Quimper, ayant pour témoin et assisrants, Guillaume Cozec et Jacques Le Moal demeurants à Quimper, le premier rue Villy et le second rue des étaux, vaqué à l'annotation et séquestre des meubles et effets, réputés appartenants aux sieurs La Marche père et fils cadet, demeurant cy-devant au dit lieu de Lezergué, et pour le présent émigrés et hors du royaume, le tout sur la démonstration que nous en a faite par Guénnolé Kergourlay, valet domestique au dit manoir de Lezergué, étant préalablement engagé et en tant que

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Amnistie et main-levée

Au préfet du département du finistère

Exposent Joseph-Louis-René-Marie Delamarche ainé, et Joseph-Hiacinthe Delamarche cadet.

Qu'ils ont obtenû un certificat d'amnistie du grand juge ministre de la justice de deux floréal an onze pour François-Louis Lamarche leur père,

Ce considéré

Vous plaise citoyen préfet accorder aux exposants maie-levée du séquestre établi sur les biens de François-Louis Lamarche leur père dans toute l'étendue du département du finistère.

À Quimper le 13 floréal an 11

Salut et respect, Lamarche cadet pour Joseph-Louis-René-Marie Delamarche aîné habitant à la Guadeloupe.

(Signature : Lebescond)

§ Lette du 25 nivose an 11

Etat des domaines de la préfecture

19 floréal an 11. François-Louis Delamarche. Main-levée. Pour le Directeur des domaines.

Département du Finistère. Extrait des Registres de la Préfecture du Département du Finistère.

Quimper, le dix neuf floréal an onze de la République française, une et indivisible.

Le préfet, vû le certificat accordé le 2 floréal an 11 par le grand-juge ministre de la justice, signé Reguier et Saladin secrétaire général, à de la Marche (François-Louis) décédé.

Vû l'état certifié par le directeur des domaines nationaux du département du finistère, des biens invendus séquestrés sous le nom de François-Louis La Marche, avec l'évaluation au denier vingt, du produit de chaque bien, les contributions non déduites, desquels biens la désignation suit.

§ Noms et nature des biens ...

[modifier] 3 Originaux

Lieu de conservation :
  • Archives Départementales du Finistère.
  • Cote 1 Q 2974.
  Usage, droit d'image :
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[modifier] 4 Annotations

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  1. Lit à tombeau, g.n.m. : lit avec draperies de « ciel » tombant sous forme de rideaux. Dans un lit à simple tombeau (et non double) le ciel était plus élevé vers la tête que vers les pieds. [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 1,0 1,1 1,2]
  2. Landier, s.m. : grand chenet que l'on peut trouver aujourd'hui dans les cheminées d'agrément et qui autrefois, dans les grandes cheminées de cuisine, supportait des broches à rôtir et permettait de maintenir à la chaleur du charbon de bois des aliments dans les corbeilles de fer les surmontant (TLFi). [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 2,0 2,1]
  3. Patenne, patène, s.f. : petite assiette, généralement en métal doré, sur laquelle repose le pain (l'hostie principale) qui va être consacré par le prêtre au moment de la consécration, lors d'une cérémonie eucharistique (Wikipedia). [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
  4. Chasuble, s.f. : Vêtement sacerdotal en forme de manteau à deux pans, que le prêtre met par-dessus l'aube et l'étole pour célébrer la messe (Dictionnaire du Moyen Français). [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 4,0 4,1]
  5. Étoupe, s.f. : du latin "stupa,-ae", sous-produit fibreux non tissé issu essentiellement du travail du chanvre ou du lin. Source : Wikipedia. [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
  6. Dame-jeanne, s.f. : grosse bouteille le plus souvent en verre, parfois en grès, protégée par de la mousse, de la paille ou de l'osier tressé (le clissage) à même la paroi et servant à la conservation et au transport d'aliments, de boissons et d'autres liquides (Wikipedia). [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 6,0 6,1]
  7. Cabaret, s.m. : petite table à plateau creux ou coffret contenant un service à liqueurs (Larousse). [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
  8. Mouchette, s.f. : instrument ancien ayant la forme d’une paire de ciseaux destiné à tailler la mèche brûlée d’une chandelle et pourvu sur sa lame d’un petit réceptacle destiné à la recueillir (Wiktionary). [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
  9. Douaire, s.m. : droit d'usufruit sur ses biens qu'un mari assignait à sa femme par son mariage et dont elle jouissait si elle lui survivait ; source : Trésor Langue Française. [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 9,0 9,1]


Thème de l'article : Document d'archives sur le passé d'Ergué-Gabéric.

Date de création : Juin 2018    Dernière modification : 28.07.2018    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]