1793-1796 - Cache, vente et restitution des biens d'Alain Dumoulin, prêtre simple déporté
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- | On sauvait les paroissiens d'Ergué-Gabéric solidaires de leur curé non assermenté : en 1791 le maire demandait son maintien, en 1795 une quete est organisée pour l'achat collectif de la chapelle de Kerdévot, ... Et dans ce document inédit de1793, on découvre que certains d'entre eux ont rassemblé les biens de ce recteur pendant sa fuite. | + | On sauvait les paroissiens d'Ergué-Gabéric solidaires de leur curé non assermenté : en 1791 le maire demandait son maintien, en 1795 une quete est organisée pour l'achat collectif de la chapelle de Kerdévot, ... Et dans ce document inédit de 1793, on découvre que certains d'entre eux ont rassemblé les biens de ce recteur pendant sa fuite. |
- | En effet, ces biens étaient normalement confisqué et revendus comme « Biens nationaux » par les autorités révolutionnaires. Et avant de les séquestrer pour la vente, il a fallu procéder à des perquisitions chez les citoyennes de la Salle-Verte et de Poulduic où les meubles du prêtre avaient été cachés. | + | En effet, ces biens étaient normalement confisqué et revendus comme « <i>Biens nationaux</i> » par les autorités révolutionnaires. Et avant de les séquestrer pour la vente, il a fallu procéder à des perquisitions chez les citoyennes de la Salle-Verte et de Poulduic où les meubles du prêtre avaient été cachés. |
+ | [[Image:BlogDumoulin.jpg|center|400px|thumb|Le déménagement du Clergé, Gravure, Musée Carnavalet]] | ||
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+ | La paroissienne de la Salle-Verte explique : « <i>il a été transporté chez elle depuis près de deux ans trois charretés de meubles appartenant audit Dumoulin</i> ». À la question sur son silence vis-à-vis des enquêtes communales, elle se justifie : « <i>elle va souvent à la messe à Quimper et qu'il est possible que cette loi a été publiée lorsqu'elle était à Quimper et qu'elle n'en a eu aucune connaissance</i> ». Elle dénonce quand même les coupables qui l'ont mis dans l'embarras : « <i>l'une des charrettes appartenait à Jean Le Guyader de la métairie de Lezergué sur la ditte commune et qu'il accompagnait sa charrete ; que Guénolé Kergourlay du manoir de Lezergué paraissait avoir la conduite des dits meubles</i> ». | ||
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+ | Les biens retrouvés furent vendus dans la foulée à des acquéreurs quimpérois. Et ensuite un an après, Marie-Anne, la sœur du prêtre en exil à Prague, entame une procédure de contestation et demande la restitution des titres de propriété. | ||
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+ | Pour traiter la demande et la levée des séquestres, l'administration se pose une question : Alain Dumoulin était-il émigré (peine encourue par les anti-constitutionnels notoires) ou déporté (décision individuelle ultérieure) ? La réponse est la seconde, car elle seule permettait le recouvrement des biens par les héritiers. | ||
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+ | Ce qui compte pour un déporté, c'est d'avoir quitté le territoire français après le 1er juillet 1792, or Dumoulin n'est parti a priori de France que fin juillet suivant des témoins quimpérois. La propriétaire dit par contre en octobre 1793 que les charrettes contenant ses meubles sont arrivées chez elle deux ans avant, soit après l'été 1791. Le curé rebelle logeait-il chez sa sœur dans l'intervalle ? | ||
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Au nom de la nation et de la République. | Au nom de la nation et de la République. | ||
- | Le huitième jour de la première décade du second mois de l'an deux de l'an deux de la République française une et indivisible, nous soussignés Alexandre César Auguste Biller notaire à Quimper y demeurant rue Rossignol paroisse de la cathédrale du finistère, commissaire nommé par l'administrattion du district de Quimper, nous somme exprès ce jour transporté de notre susdite demeure et accompagné de Laure Provot estimatrice et de cinq canoniers commandés par le citoyen Jean-Pierre Marie Le Floc'h demeurant tous séparément audit Quimper même paroisse, jusqu'en la demeure de Marie Françoise Guilot veuve Pétillon au lieu de Seglas en la paroisse d'Ergué-Gabéric à l'effet de perquérir les meubles du nommé Dumoulin prêtre émigré prêtre émigré curé été dudit Ergué où étant rendus et y ayant fait appeller Jean Le Jour <strike>Le Dé</strike> officier municipal de la ditte commune demeurant au lieu de Boden-prédéric dudit Ergué, lequel s'y étant renus nous avons interpellé la ditte Guilot de nous déclarer si elle avait des effets appartenant audit Dumoulin, à quoi ayant répondu qu'il a été transporté chez ezlle depuis près de deux ans trois charretés de meubles appartenant audit Dumoulin, qu'elle les avait souvent refusés, mais qu'un jour en son absence on les y [...] qu'elle bien aise qu'on les en enlève et nous a montré les effets suivants. | + | Le huitième jour de la première décade du second mois de l'an deux de l'an deux de la République française une et indivisible, nous soussignés Alexandre César Auguste Biller notaire à Quimper y demeurant rue Rossignol paroisse de la cathédrale du finistère, commissaire nommé par l'administrattion du district de Quimper, nous somme exprès ce jour transporté de notre susdite demeure et accompagné de Laure Provot estimatrice et de cinq canoniers commandés par le citoyen Jean-Pierre Marie Le Floc'h demeurant tous séparément audit Quimper même paroisse, jusqu'en la demeure de Marie Françoise Guilot veuve Pétillon au lieu de Seglas en la paroisse d'Ergué-Gabéric à l'effet de perquérir les meubles du nommé Dumoulin prêtre émigré prêtre émigré curé été dudit Ergué où étant rendus et y ayant fait appeller Jean Le Jour <strike>Le Dé</strike> officier municipal de la ditte commune demeurant au lieu de Boden-prédéric dudit Ergué, lequel s'y étant rendus nous avons interpellé la ditte Guilot de nous déclarer si elle avait des effets appartenant audit Dumoulin, à quoi ayant répondu qu'il a été transporté chez elle depuis près de deux ans trois charretés de meubles appartenant audit Dumoulin, qu'elle les avait souvent refusés, mais qu'un jour en son absence on a y transporté, qu'elle bien aise qu'on les en enlève et nous a montré les effets suivants. |
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Version du 16 août ~ eost 2014 à 08:28
| Les biens du curé anticonstitutionnel d'Ergué-Gabéric, Alain Dumoulin, réfugié à Prague, seront cachés et gardés précieusement par des paroissiens.
Ils feront l'objet d'une perquisition, puis restitués à sa sœur par les autorités révolutionnaire avant son retour de déportation. | |||||||
Autres lectures : « Archives des Biens Nationaux » ¤ « Alain Dumoulin (1748-1811), prêtre et écrivain » ¤ « ROUZ Bernez - Alain Dumoulin dans la tourmente révolutionnaire » ¤ « 1790 - Trois lettres d'Alain Dumoulin au Directoire du District de Quimper » ¤ « 1791 - Demande du maire pour le maintien de prêtres réfractaires » ¤ « 1792-1795 - Liste des citoyens absents et réputés émigrés » ¤ « 1791-1792 - Echanges épistolaires entre un prêtre réfractaire et un assermenté » ¤ « 1809 - Attestation de quête pour l'acquisition de la chapelle de Kerdévot » ¤ |
1 Présentation
On sauvait les paroissiens d'Ergué-Gabéric solidaires de leur curé non assermenté : en 1791 le maire demandait son maintien, en 1795 une quete est organisée pour l'achat collectif de la chapelle de Kerdévot, ... Et dans ce document inédit de 1793, on découvre que certains d'entre eux ont rassemblé les biens de ce recteur pendant sa fuite. En effet, ces biens étaient normalement confisqué et revendus comme « Biens nationaux » par les autorités révolutionnaires. Et avant de les séquestrer pour la vente, il a fallu procéder à des perquisitions chez les citoyennes de la Salle-Verte et de Poulduic où les meubles du prêtre avaient été cachés. La paroissienne de la Salle-Verte explique : « il a été transporté chez elle depuis près de deux ans trois charretés de meubles appartenant audit Dumoulin ». À la question sur son silence vis-à-vis des enquêtes communales, elle se justifie : « elle va souvent à la messe à Quimper et qu'il est possible que cette loi a été publiée lorsqu'elle était à Quimper et qu'elle n'en a eu aucune connaissance ». Elle dénonce quand même les coupables qui l'ont mis dans l'embarras : « l'une des charrettes appartenait à Jean Le Guyader de la métairie de Lezergué sur la ditte commune et qu'il accompagnait sa charrete ; que Guénolé Kergourlay du manoir de Lezergué paraissait avoir la conduite des dits meubles ». |
Les biens retrouvés furent vendus dans la foulée à des acquéreurs quimpérois. Et ensuite un an après, Marie-Anne, la sœur du prêtre en exil à Prague, entame une procédure de contestation et demande la restitution des titres de propriété. Pour traiter la demande et la levée des séquestres, l'administration se pose une question : Alain Dumoulin était-il émigré (peine encourue par les anti-constitutionnels notoires) ou déporté (décision individuelle ultérieure) ? La réponse est la seconde, car elle seule permettait le recouvrement des biens par les héritiers. Ce qui compte pour un déporté, c'est d'avoir quitté le territoire français après le 1er juillet 1792, or Dumoulin n'est parti a priori de France que fin juillet suivant des témoins quimpérois. La propriétaire dit par contre en octobre 1793 que les charrettes contenant ses meubles sont arrivées chez elle deux ans avant, soit après l'été 1791. Le curé rebelle logeait-il chez sa sœur dans l'intervalle ? |
2 Transcriptions
8 brumaire an 2 : Perquisitions
2 frimaire an 2 : Inventaire
5 frimaire an 2 : Vente
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5 thermidor an 3 : Liquidation
19-20 messidor an 4 : Restitution
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3 Originaux
Lieu de conservation : Archives Départementales du Finistère. Série : 1Q, Révolution, Biens nationaux Cotes : 1 Q 2747 (Séquestres, Dumoulin, Ergué-Gabéric) |
Droit d'image : Protégé. Usage : Accès privé et restreint aux abonnés inscrits Accès : Connexion obligatoire sur un compte GrandTerrier. |
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19-20 messidor an 4 / 8 Juillet 1796 | |||||
4 Annotations
- Framboy, fembroi, s.m. :débris végétaux pour fabriquer le fumier par le piétinement des bêtes ; la boue résultante était appelée le « framboy ». Le mot se disait au départ « fembroi » (latin fimarium, dérivé de fimum : fumier). Puis, par métathèse (déplace-ment du r), il est devenu « fremboi », puis « frembois ». Le lieu où se trouvait ce tas de fumier était généralement dénommé dans les actes la « cour à frambois » ou « pors à framboy ». [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
- Lit à tombeau, g.n.m. : lit avec draperies de « ciel » tombant sous forme de rideaux. Dans un lit à simple tombeau (et non double) le ciel était plus élevé vers la tête que vers les pieds. [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 2,0 2,1]
- Assignat, s.m. : monnaie sous la Révolution française. Avec le Système de Law, l'assignat est la seconde expérience de monnaie fiduciaire en France au XVIIIe siècle : les deux se soldèrent par un échec retentissant. À l'origine, il s'agissait d'un titre d'emprunt émis par le Trésor en 1789, dont la valeur est assignée sur les biens nationaux. Les assignats deviennent une monnaie en 1791, dont la valeur est le plus souvent comprise entre 2 et 30 sols, et les assemblées révolutionnaires multiplient les émissions, qui entraînent une forte inflation. Le cours légal des assignats est supprimé en 1797. Source : Wikipedia. [Terme] [Lexique] [Ref.↑ 3,0 3,1 3,2]
Thème de l'article : Document d'archives sur le passé d'Ergué-Gabéric. Date de création : Juin 2014 Dernière modification : 16.08.2014 Avancement : [Développé] |