Vente de façade de vieux château, Ouest-Eclair et autres journaux 1924-1930
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<spoiler id="991" text="Le possesseur de ce vieux manoir serait disposé à le vendre ...">Le possesseur de ce vieux manoir serait disposé à le vendre ; mais, inspiré par un sentiment respectable, quoiqu'un peu exclusif, et surtout fâcheux par les conséquences qui fatalement en découleront, il ne veut aliéner que les pierres, laissant à l'acquéreur, s'il lui plaît, la faculté de les rassembler ailleurs ; quant à lui, il entend garder l'emplacement du château et y rebâtir une maison moderne où il vivra dans le même cadre familier qu'on connu ses ancêtres. Nous savons qu'une personne désireuse d'acquérir Lezergué pour le restaurer et lui rendre son ancienne splendeur en a offert la somme de 400.000 francs ; mais en raison des prétentions du propriétaire qui ne veut céder que les murs, et non le tertre sur lequel ils sont assis, aucun accord n'a pu intervenir. On nous a même assurer que l'intention du dit propriétaire est, s'il ne trouve point à bref délai un acheteur disposé à entrer dans ses vues, de livrer ce beau monument à un entrepreneur de démolitions et à le faire raser jusqu'au sol, pour construire en ces lieux et place la plus insignifiante des habitations rurales. | <spoiler id="991" text="Le possesseur de ce vieux manoir serait disposé à le vendre ...">Le possesseur de ce vieux manoir serait disposé à le vendre ; mais, inspiré par un sentiment respectable, quoiqu'un peu exclusif, et surtout fâcheux par les conséquences qui fatalement en découleront, il ne veut aliéner que les pierres, laissant à l'acquéreur, s'il lui plaît, la faculté de les rassembler ailleurs ; quant à lui, il entend garder l'emplacement du château et y rebâtir une maison moderne où il vivra dans le même cadre familier qu'on connu ses ancêtres. Nous savons qu'une personne désireuse d'acquérir Lezergué pour le restaurer et lui rendre son ancienne splendeur en a offert la somme de 400.000 francs ; mais en raison des prétentions du propriétaire qui ne veut céder que les murs, et non le tertre sur lequel ils sont assis, aucun accord n'a pu intervenir. On nous a même assurer que l'intention du dit propriétaire est, s'il ne trouve point à bref délai un acheteur disposé à entrer dans ses vues, de livrer ce beau monument à un entrepreneur de démolitions et à le faire raser jusqu'au sol, pour construire en ces lieux et place la plus insignifiante des habitations rurales. | ||
- | Ce serait là une solution extrêmement regrettable. D'une part, Lezergué offre un type intéressant - et très rare dans le Finistère - des châteaux bas-bretons du XVIIIe siècle, et mériterait à ce seul titre | + | Ce serait là une solution extrêmement regrettable. D'une part, Lezergué offre un type intéressant - et très rare dans le Finistère - des châteaux bas-bretons du XVIIIe siècle, et mériterait à ce seul titre d'être conservé. D'autre part, il s'y rattache des souvenirs historiques très heureusement évoqués, devant ses murailles vénérables, à l'une des dernières excursions de la Société archéologique du Finistère, par M. Waquet, archiviste départemental. C'est là, dans un manoir plus ancien, que vivait sous Louis XIII et Louis XIV, le bon Guy Autret de Missirien, gentilhomme lettré et acharné travailleur, d'une conscience et d'une probité admirables, mort avant d'avoir pu mettre en œuvre les trésors de documents amassés par lui sur l'histoire bretonne. C'est là aussi, croit-on, qu'est né, en 1729, le dernier évêque de Saint-Pol de Léon, Mgr Jean-François de la Marche, dont M. l'abbé Kerbiriou a récemment restitué, dans sa remarquable thèse de doctorat, l'attachante et énergique physionomie. |
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+ | Que Lezergué donc, loin de disparaître, puisse échoir à quelque homme de goût, qui saura l'arracher à la ruine, et y faire revivre les vieilles traditions abolies ! Le site est charmant, tout baigné de fraîcheur et d'eaux courantes. Une riche campagne l'environne, et la ville n'est pas loin. Qu'un amateur fortuné de la paix des champs vainque, par des arguments irrésistibles, les honorables scrupules du propriétaire actuel, et qu'il restitue à cette demeure si longtemps avilie, son prestige et sa fierté d'autrefois ! Ce serait un beau geste et une bonne œuvre à accomplir. | ||
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Signé : L. G. | Signé : L. G. | ||
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<spoiler id="992" text="Le comte de la Marche, frère aîné du dernier évêque de Léon ...">Le comte de la Marche, frère aîné du dernier évêque de Léon, employa les pierres de leur manoir ancestral de Kerfors où était né ce dernier, à faire reconstruire le château de Lezergué qu'il tenait de la succession de leur mère, Marie-Rose de Tréouret. Entrepris sur de belles proportions, l'édifice était à peine achevé quand éclata la Révolution. | <spoiler id="992" text="Le comte de la Marche, frère aîné du dernier évêque de Léon ...">Le comte de la Marche, frère aîné du dernier évêque de Léon, employa les pierres de leur manoir ancestral de Kerfors où était né ce dernier, à faire reconstruire le château de Lezergué qu'il tenait de la succession de leur mère, Marie-Rose de Tréouret. Entrepris sur de belles proportions, l'édifice était à peine achevé quand éclata la Révolution. | ||
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+ | Sans précisément émigrer, les de la Marche se retirèrent aux Antilles, après avoir vendu leur domaine à un riche paysan du voisinage. Les descendants de l'acquéreur se souviennent encore que leur aïeul dut aller à Nantes payer à un notaire le prix de son acquisition, qu'il fit le voyage à cheval - jamais il n'avait été si loin ! - sur un bidet chargé de gros sacs d'écus, denrée éminemment périlleuse par ce temps de brigands et de « <i>chauffeurs</i> », et qu'après huit jours de transes, sa famille eut la joie de le voir réapparaître sain et sauf, grâce à sa bonne étoile et à un gros cierge brûlé devant la statue de N.-D. de Kerdévot. | ||
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+ | Trop vaste pour ses occupants, qui se cantonnaient dans quelques salles basses, exigeant des réparations trop coûteuses, le château était devenu peu à peu inhabitable. Les pluies d'hiver s'engouffraient par ses toitures crevées, inondaient les greniers, dégoulinaient jusqu'au premier étage et ruisselaient en cascade le long des marches de l'escalier monumental pour s'en aller noyer les caves. Le propriétaire actuel a fini par se résoudre à abandonner cette immense masure. Si les murs en étaient encore robustes, les plafonds transpercés et pourris menaçaient de lui choir dessus. | ||
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+ | Il en fait abattre une grande partie, et des matériaux ainsi obtenus il s'est construit au bord de la rabine <ref name="Rabine">{{K-Rabine}}</ref> une maison neuve, dont la porte est surmontée du sanglier héraldique des Tréouret. Mais il a épargné toute la façade, ainsi que l'escalier de granit, à double montée et voûte plate d'un tracé hardi, qui occupait le fond du vestibule. On lui a dit que de « <i>nouveaux riches</i> », que les Américains surtout, payaient très cher les pierres historiques françaises, patinées de passé, et qu'il avait des chances de vendre les siennes un bon prix. C'est pourquoi paraît l'annonce que j'ai citée, et pourquoi la façade de Lezergué, vraiment tragique avec les trous béants de ses fenêtres, les arrachements de ses pignons détruits, la couleur de bronze de ses pierres vêtues d'une moisissure verdâtre et de ses frontons courbes, encadrant dans un double cartouche Louis XV, le blason encore visible des de La Marche attend là-bas, sur sa butte ombragée, un acquéreur. | ||
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Signé : L. | Signé : L. | ||
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Image:DP1924-11-24-Lezergué.jpg|1924 Dépêche de B. | Image:DP1924-11-24-Lezergué.jpg|1924 Dépêche de B. | ||
Image:OE1929-08-30-Lezergué.jpg|1929 Ouest-Eclair | Image:OE1929-08-30-Lezergué.jpg|1929 Ouest-Eclair | ||
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Image:OE1929-09-27-Lezergué.jpg|1929 Ouest-Eclair | Image:OE1929-09-27-Lezergué.jpg|1929 Ouest-Eclair |
Version du 5 janvier ~ genver 2017 à 08:38
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Où il est question de l'émotion créée par le projet de démolition des ruines du château de Lezergué. |
Autres lectures : « Choses et gens de Basse-Bretagne, le chateau de Lezergué, l'Ouest-Eclair 1929 » ¤ « Présentation et historique du manoir de Lezergué » ¤ « Histoire de Lezergué et de ses occupants » ¤ « Rdv du ps 1 - La vie de château à Lezergué, OF-LQ 1985 » ¤ « Rdv du ps 2 - Jean Nédélec, le dernier châtelain de Lezergué, OF-LQ 1985 » ¤ « 1910-1935 Notes et coupures gabéricoises de Louis Le Guennec » ¤ « Eléments classés et inscrits du patrimoine de la commune d'Ergué-Gabéric » ¤
1 Présentation
2 Transcriptions
Les textes transcrits ci-dessous contiennent des paragraphes ( § ) non déployés. Vous pouvez les afficher en un seul clic : § Tout montrer/cacher
La Dépêche de Brest, 24.11.1924
Ouest-Eclair, 30.08.1930
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Le Finistère, 31.08.1929
Ouest-Eclair, 27.09.1929
Ouest-Eclair, 02.02.1930
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3 Coupures de presse
Articles et annonce | |||||
4 Annotations
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- Rabine, s.f. : allée de grands arbres plantés sur l'avenue d'une maison de noblesse et de quelque monastère ; source : Dom Pelletier. Ce mot existe en breton avec la même prononciation ; source : dictionnaire gallo de cc-duguesclin. [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
- L'association « La Sauvegarde de l'Art Français » œuvre toujours dans le domaine du mécénat, notamment pour la sauvegarde des églises et chapelles : Site Internet. [Ref.↑]
- Le Potomac est un fleuve de 665 km de long qui se jette dans la Baie de Chesapeake, située sur la côte Est des États-Unis. La rivière Rouge est une rivière d'Amérique du Nord qui marque la frontière des États du Minnesota et du Dakota du Nord. [Ref.↑]
- Le blason est décrit par Louis Le Guennec dans ses notes ainsi : « Dans le talus d'un champ à droite de l'avenue de Lezergué, on a encastré une pierre de granit portant un écusson carré mi-parti coupé au 1 de 3 fasces ondées, qui est Autret - au 2 de 3 épées en bande, qui est Coatanezre - au 2 d'une mâcle, qui est
TréannaLohéac ».Guy Autret de Missirien, de Lezergué, de Kernaou à Ergué-Gabéric épousa Blanche de Lohéac fille de Mathieu de Lohéac seigneur de Pencleuz et de Marguerite le Baud. Ils n'auront pas d'enfants. Le blason des Lohéac est supposé être « Vairé contre-vairé d'argent & d'azur » et non une mâcle, ce qui semble contredire la mention manuscrite et l'article de l'auteur dans l'Ouest-Eclair en 1929. Les Tréanna par contre avaient bien comme armoiries « d’argent à une mâcle d’azur ». [Ref.↑] - Question non tranchée à ce jour : la lettre inédite de Guy Autret est soit une découverte et transcription de Louis Le Guennec, soit une transcription déjà publiée par le Comte de Rosmorduc (cf « 1635-1659 - Lettres de Guy Autret seigneur de Lezergué, travaux Rosmorduc »). [Ref.↑]
Thème de l'article : Revue de presse Date de création : Janvier 2017 Dernière modification : 5.01.2017 Avancement : [Développé] |