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Le quadriskell du chevet de la chapelle de Kerdévot

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Catégorie : Patrimoine
 Site : GrandTerrier

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§ E.D.F.
Le chevet de la chapelle de Kerdévot est orné d'un très beau quadriskell ou hevoud [1] de pierres et de vitrail, qui souvent a été présenté comme une rosace et non comme une figure celtique.

Tout comme le triskell qui est fait de trois branches tournantes, le quadriskell est composée de quatre amorces de spirales.

Il est intéressant de comparer ce type de figuration celtique présent à Kerdévot (et également sur la chapelle de St-André) par rapport à celles - à trois ou quatre branches - des autres chapelles ou églises bretonnes.

Autres lectures : « Le quadriskell ou hevoud de la chapelle de St-André » ¤ « La chapelle de Saint-André et la fontaine Saint-Jacques » ¤ « La maîtresse-vitre de la chapelle de Kerdévot » ¤ « Planches de Joseph Bigot, architecte départemental et diocésain » ¤ 

[modifier] 1 Présentation

En novembre 2010, nous avions publié un article sur le quadriskell de St-André en signalant l'originalité de ce symbolisme celtique. Mais il avait été complètement omis de signaler que cette figure à quatre branches était présente sur la chapelle voisine de Kerdévot.

En fait ce type d'ornement passe inaperçu car il est généralement décrit dans les monographies comme une rosace. Or une rosace est figure symétrique, formée de courbes inscrites dans un cercle à partir d'un point ou bouton central, ayant plus ou moins la forme d'une rose ou d'une étoile stylisée.

Sur le chevet de Kerdévot, au-dessus de la maîtresse-vitre, la forme n'est pas composée de cercles, mais d'amorces de spirales. La méthode ci-dessous permet de reconstituer cette forme originale avec ses quatre branches et lobes :

Hormis la taille plus importante de l'oculus (ou « œil de bœuf ») par rapport à celui de St-André, celui de Kerdévot possède les particularités ou différences suivantes :

  • Dans la courbe intérieure de chaque lobe, un rond formé dans la pierre est orné d'une croix en vitrail à cinq branches.
  • Au centre des lobes, les quatre vitraux sont composés par des blasons écartelés (cf l'article sur la maîtresse-vitre pour leur identification).
  • Les branches ne tournent pas dans le même sens : à Kerdévot, vu de l'extérieur, le mouvement est de type lévogyre [2]
 

[modifier] 2 Origine du symbole de l'hevoud

Le symbole du quadriskell ou hevoud [1] a été popularisé dans les années 1920 et 1930 par le Parti national breton (PNB). En 1933, il est également utilisé par le mouvement Ar Falz (fondé par le Parti national breton et déclaré proche du Parti communiste français), au-dessus d'une faucille. Le symbole à 4 branches était aussi en entête du journal Breizh Atao d'avant guerre.

Breizh Atao, 12 février 1933.
Breizh Atao, 12 février 1933.
Ar Falz n° 26, décembre 1935
Ar Falz n° 26, décembre 1935

Bien sûr le symbole des partis autonomistes bretons de la période 1939-1945 a été associé à la funeste croix gammée du parti nazi allemand. Mais on peut noter néanmoins que la croix nazie est formée de bras angulaires et que leur mouvement est sénestrogyre, c'est-à-dire tournant dans le sens inverse des aiguilles d'une montre.

De plus cette croix n'est qu'une reprise de la croix dite "Svastika", un des plus anciens symboles de l'humanité que l'on retrouve en Europe, Océanie et Inde. Comme son équivalent breton, en langue sanscrit le terme "Svastika" peut se traduire comme « ce qui apporte la bonne fortune, ce qui porte chance » et est très ancrée dans la religion hindoue.

Une autre représentation régionale du symbole à 4 amorces de spirales est le lauburu ou croix basque, croix formée par quatre virgules, chaque virgule étant constituée de trois demi-cercles.

 

Abandonné en 1938 en tant qu'insigne du PNB, l'hevoud à 4 branches est remplacé en 1940 par le triskell, avec le retrait d'une des branches de la croix. Le triskèle avait été adopté dans les milieux druidiques à la fin du 19ème siècle. Dans les années 1970, le renouveau de la musique bretonne et son succès, sous l’influence d’Alan Stivell, a fortement contribué à populariser le symbole.

Le symbole et drapeau de l'île de Man, appelé Ny Tree Casyn en mannois, en français « les trois pieds », représente un triquètre (une variété de triskell) en armure et en mouvement dextrogyre [3]. Et pour revenir aux croix celtiques à 4 branches, signalons également la croix de Ste-Brigitte, vénérée comme un des saints patrons d'Irlande.

[modifier] 3 Recensements de quadriskells bretons

Attachons-nous ici à rechercher et comparer les ornementations similaires qu'on peut trouver dans les autres chapelles ou églises bretonnes, voire même sur d'autres pièces de patrimoine (mobilier ...).

La première d'entre elles est la très belle chapelle en ruines de Ste-Barbe en Berrien. On y voit un oculus formé d'un triskell à trois branches dont chaque courbure est, comme à Kerdévot, ornée d'un rond intérieur.

La chapelle de Saint-Fiacre en Melrand est également doté d'un beau triskell qui est décrit ainsi sur le site Mérimée du ministère de la culture : « Edifice construit à la fin du 15e ou au début du 16e siècle, en granit. La nef est éclairée par un petit oculus au réseau composé de mouchettes rayonnantes ».

Un autre oculus plus simple est celui de la chapelle de Burthulet de la commune de St-Servais dans les Cotes-d'Armor. Un triskell est également signalé sur la chapelle rurale restaurée de Kervréhan en Languidic.

Quant aux quadriskells à quatre branches, on en trouve sur plusieurs œils-de-bœuf de chapelles de basse-Bretagne, notamment à Tremorvezen en Névez, St-Mathieu en Bannalec, Locmaria-an-Hent en St-Yvi.

Et enfin la chapelle St-Fiace, à l'origine à Kerspen sur la commune de Riec sur Belon, et transportée au Cabellou en 1936. Ses vitraux, notamment ce très beau quadriskell du vitrail sud, ont été restaurés en 2001-2004.

 

Sans oublier, très près d'Ergué-Gabéric, à la chapelle Ste-Cécile en Briec où le panonceau de présentation précise : « Au sud, la nef est éclairée par une petite fenêtre ajourée en triskell à quatre branches très rare ».

Et bien sûr à Ergué-Gabéric dans un œil-de-bœuf du mur nord de la chapelle St-André, et dans un oculus du chevet de la chapelle de Kerdévot. À noter que Joseph Bigot, architecte diocésain, quand il dessine le pignon oriental de Kerdévot ; il représente un triskell au lieu d'un quadriskell :


On notera aussi que certains meubles ancien bretons peuvent être ornés de motifs celtiques. Ainsi au Musée Breton de Quimper un lit clos avec deux quadriskells ajourés sur la porte coulissante. Henri Waquet, dans sa présentation du musée (Collection Memoranda, Paris, Henri Laurens éditeur, 1926, page 20), signale le meuble : « Un lit clos à banc de 1666 entièrement couvert de dessins au compas ».

Lit clos 1666, photo Villard

[modifier] 4 Annotations

  1. Hevoud, ou quadriskell, s.m. : figure géométrique formée de quatre branches et deux spirales entrecroisées. Symbole traditionnel celtique et breton au même titre que le triskell, présent sur des décorations pré-celtiques et en architecture religieuse (œil-de-bœuf, baptistère). Terme en breton signifiant « bien-être » ; l'adjectif hevoudek signifie « qui cause du bien-être, qui porte bonheur ». Dans les années 1920 et 1930, logo du Parti national breton (P.N.B.). [Terme] [Lexique] [Ref.↑]
  2. Le sens "lévogyre" est déterminé par les courbures des branches supérieures inclinées vers la gauche et faisant tourner l'ensemble dans le sens contraire des aiguilles d'une montre. [Ref.↑]


Thème de l'article : Descriptiif et origine d'éléments de patrimoine

Date de création : Mai 2013    Dernière modification : 24.08.2013    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]