1825 - Transfert de la fabrique de chapeaux de Jean-Guillaume Bolloré - GrandTerrier

1825 - Transfert de la fabrique de chapeaux de Jean-Guillaume Bolloré

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Catégorie : Documents    
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§ E.D.F.
Un dossier constitué de sept pièces datées de 1825 décrivant un projet industriel d'extension et de transfert d'une usine de fabrication de chapeaux fins avec le support du préfet et du maire de Quimper.

Ces documents conservés aux Archives Départementales du Finistère attestent de la création de la fabrique en 1812, et de l'indépendance économique du fabricant de chapeaux vis-à-vis de son beau frère papetier qui créa son usine en 1822 à Odet en Ergué-Gabéric.

Autres lectures : « Jean-Guillaume Bolloré (1788-1873), fabricant chapelier » ¤ « 1811 - Autorisation de résidence parisienne pour Jean-Guillaume Bolloré » ¤ « Nicolas Le Marié (1797-1870), entrepreneur papetier » ¤ « Jean-René Bolloré (1818-1881), chirurgien et entrepreneur » ¤ « 1859 - Construction du pont entre Odet et Briec » ¤ « La plaque inaugurale de la manufacture de papiers d'Odet en 1822 » ¤ « Généalogie BOLLORÉ » ¤

[modifier] 1 Présentation

Les échanges d'avril et mai 1825 entre César Elzéar de Castellane [1], préfet du Finistère, et Athanase de Larchantel [2], maire de Quimper, ont pour but de valider la demande de Jean-Guillaume Bolloré de transférer sa fabrique sur un nouveau terrain acquis entre la rue des Réguaires et les quais de l'Odet.

L'entrepreneur Bolloré explique tout d'abord l'histoire de son affaire : « Depuis 1812 j'ai établi à Quimper une fabrique de chapeaux. Cette fabrique était d'abord placée dans la rue du Chapeau Rouge, ensuite dans la rue Obscure et elle se trouve actuellement dans la rue du Frout. »

La signature sur sa requête est « Bolloré fils ainé », car en effet il est l'ainé survivant (trois frère et sœurs décédés très jeunes en 1784-86) d'une famille nombreuse de 13 enfants. Son père René, syndic des marins et négociant-propriétaire à Quimper-Locmaria, décède en 1826. Par la suite Jean-Guillaume gardera l'habitude de signer « Bolloré ainé », lorsqu'il paraphe en 1838 le document de succession de son frère René-Corentin et cosigne en 1859 un document officiel pour un projet de pont à Odet.

Le maire ne manque pas d'arguments pour défendre le projet d'extension de 1825 : « Cet établissement mérite, on peut le dire, de fixer la sollicitude de l'autorité, il a pris depuis quelques années un certain accroissement, les chapeaux fins [3] qu'on y fabrique sont estimés et ils peuvent recevoir, chaque jour, un nouveau degré de perfection, on y occuppe un grand nombre d'ouvriers. » On y compte 25 ouvriers pour fabriquer des chapeaux de poils fins [3] et de feutre.

 

Après avis de l'expert, à savoir l'Ingénieur en chef du département, chargé de la surveillance des rivières et cours d'eau, le préfet publie l'arrêté d'exécution : « Art 1er. Le sieur Bolloré, fabricant de chapeaux à Quimper, est autorisé à établir sa fabrique dans sa propriété de la rue des Réguaires. »

Le siècle suivant, dans une publication intitulée « Papeteries d'Odet, discours des Fêtes du Centenaire (1822-1922) », une note au-dessous du facsimilé de la plaque commémorant la création de l'usine d'Odet par son beau-frère Nicolas Le Marié précise que « François Le Marié père et Guillaume Bolloré ont aussi contribué, par leurs conseils, à la création de cet établissement ». Il est question de conseil et non de co-participation, car on voit bien qu'en 1825 il était encore très impliqué dans l'extension de sa fabrique de chapeaux.

On est loin du détournement documentaire de 1930 dans le « Livre d'or des papeteries » de René Bolloré qui introduit volontairement un pluriel « ont posé » (au lieu de "a posé") dans la première phrase de la plaque commémorative : « Nicolas Le Marié et R.-G. Bolloré, de Quimper ont posé la première pierre de cet établissement ».

Jean-Guillaume Bolloré n'a pas posé de première pierre à Odet (ni son hologramme « R.-G. » aux initiales inventées), mais il a prodigué des conseils à son beau-frère gabéricois et favorisera le transfert en 1861 de l'usine à papier à son neveu, tutoré et gendre Jean-René Bolloré lorsque Nicolas Le Marié sera en incapacité suite à un accident.

[modifier] 2 Transcriptions

20 avril - Bolloré à maire

Monsieur le Maire,

Depuis 1812 j'ai établi à Quimper une fabrique de chapeaux. Cette fabrique était d'abord placée dans la rue du Chapeau Rouge, ensuite dans la rue Obscure et elle se trouve actuellement dans la rue du Frout. Je viens d'acheter le jardin occupé aujourd'hui par le sieur Groissier dans la rue des Réguaires et mon intention est d'y placer ma fabrique. Mais voulant me conformer au décret du 15 octobre 1810, et à l'ordonnance royale du 14 janvier 1815, je prends la liberté de solliciter à cet égard votre autorisation.

J'ose espérer, Monsieur le Maire, que vous me l'accorderez, d'autant plus volontiers que vous êtres toujours disposé à favoriser l'Industrie, et que ma fabrique ne peut présenter aucun inconvénient.

J'ai l'honneur d'être avec respect, Monsieur le Maire, votre très obéissant serviteur.

Quimper le 20 avril 1825. Signature Bolloré fils ainé.

24 avril et 4 mai - Avis du maire

L'an mil huit cent vingt cinq le quatre mai nous maire de Quimper, chevalier de l'Ordre Royal de la Légion d'honneur, certifions et rapportons avoir fait publier et afficher pendant dix jours, dans les lieux d'usage l'avis suivant :

Le maire de Quimper chevalier de l'Ordre Royal de la Légion d'honneur, prévient les habitans que le sieur Bolloré est dans l'intention de transporter sa fabrique de chapeaux dans le jardin occupé actuellement par le sieur Grossier, rue des Reguaires en cette ville.

Ceux qui croieraient avoir des motifs fondés de s'opposer à l'exécution de ce projet sont invités à présenter leurs réclamations dans la huitaine au secrétariat de la Mairie.

En mairie à Quimper, le 24 avril 1825. Le maire, signé A. de Larchantel.

Aucune réclamation n'est survenue. Aucune opposition n'a été faite. De tout quoi nous avons dressé le présent procès-verbal pour servir et valoir ce que de droit, les dits jour et an que dessus. Le Maire. Signature : A. de Larchantel. Cachet : Mairie de Quimper (Finistère).

5 mai - Maire à préfet

Mairie de Quimper. Finistère.
Quimper, le 5 mai 1825. Monsieur le Préfet.

Le 20 avril dernier le sieur Bolloré fabricant de chapeaux en cette ville m'a adressé une pétition tendant à obtenir l'autorisation de transférer et d'établir sa fabrique dans un jardin situé rue des Reguaires, occupé par le sieur Grossier et dont il vient de faire l'acquisition.

Je me suis empressé d'afficher cette demande et de procéder à l'information de commodo et incommodo prescrite par le décret du 15 octobre 1810.

Aucune opposition n'est survenue, aucune réclamation n'a été faite ; et j'ai l'honneur de vous transmettre le procès-verbal que j'ai rédigé à cet égard, en vous priant de vouloir bien accorder au sieur Bolloré l'autorisation qu'il sollicite.

Son établissement placé près de la rivière, éloigné des habitations ne saurait incommoder en aucune manière, et l'administration doit favoriser, encourager l'industrie.

Cet établissement mérite, on peut le dire, de fixer la sollicitude de l'autorité, il a pris depuis quelques années un certain accroissement, les chapeaux fins qu'on y fabrique sont estimés et ils peuvent recevoir, chaque jour, un nouveau degré de perfection, on y occuppe un grand nombre d'ouvriers.

J'ai l'honneur de vous saluer avec respect.
Le maire de Quimper, chevalier de la légion d'honneur. Signature : A. de Larchantel.

7 mai - Préfet à ingénieur

7 mai 1825. Le sieur Bolloré de Quimper demande à établir une fabrique de chapeaux sur la rivière d'Odet.
Joindre la pétition.

À. Mr l'Ingénieur en chef, À Quimper. Mr.

J'ai l'honneur de vous communiquer une pétition du 20 avril dernier, par laquelle le sieur Bolloré, fils, demande l'autorisation de construire une fabrique de chapeaux, sur un terrain qu'il vient d'acquérir pour cette destination, et qui est situé à Quimper, rue des Réguaires, sur le bord de la rivière d'Odet.

Je vous prie de me donner votre avis, au sujet de l'établissement projeté, en ce qui concerne le cours d'eau.

Recevez ... Signature.

 

25 mai - Ingénieur à préfet

Département du finistère. Etablissement de chapellerie sur le bord de l'Odet. Rapport.
Ponts et Chaussées, Navigation intérieure, Ports maritimes de commerce.

Quimper le 25 mai 1825. Monsieur le Préfet,

J'ai l'honneur de vous retourner la pétition du sieur Bolloré de Quimper, jointe, pour communication, à votre lettre du 7 de ce mois.

Le pétitionnaire demande l'autorisation d'établir une fabrique de chapeaux dans un terrein situé entre la rue des Reguaires et la rivière d'Odet, terrein dont il vient d'acquérir la propriété.

L'établissement projeté, d'après les renseignements verbaux que m'a fournis le sieur Bolloré, ne parait pas de nature à nuire aux riverains, ni à modifier le régime de la rivière.

Je pense donc qu'il y a lieu, en ce qui concerne le cours d'eau, d'autoriser l'établissement dont il s'agit ; mais sous une première surveillance d'exécution exercée pour maintenir le statu quo de la rivière et de ses berges. En conséquence le sieur Bolloré devra, s'il construit quelques maçonneries ou charpentes bordant la rivière adjacente à sa propriété, en informer à temps l'ingénieur en chef, afin que ce fonctionnaire puisse alors prendre une connaissance suffisante des ouvrages entrepris.

Je suis avec respect, Monsieur le Préfet, votre très humble et très obéissant serviteur, l'Ingénieur en chef. Signature P Gourec ainé.

28 mai - Arrêté du préfet

28 mai 1825. [...] autorisation d'établir une fabrique de chapeaux, à Quimper.
Le préfet du finistère,

Vu la pétition du 20 avril dernier, par laquelle le sieur Bolloré, fabricant de chapeaux à Quimper, sollocite l'autorisation de transférer et d'établir sa fabrique dans un jardin qu'il vient d'acquérir pour cette destination, et qui est situé en cette ville, Rue des Reguaires, sur la rive droite de l'Odet.

Vu, sur cette demande :

1°. L'information de commodo et incommodo, faite par M. le Maire de Quimper, le 24 avril 1825, et les observations particulières de ce magistrat, en date du 5 mai courant.

2°. Le rapport du 25 de ce mois de M. l'Ingénieur en chef du département, chargé de la surveillance des rivières et cours d'eau.

Vu le décret du 15 octobre 1810, et l'ordonnance royale du 14 janvier 1815.

Considérant que l'ordonnance du 14 janvier 1825 classe la fabrique de chapeaux dans la catégorie des usines dont l'éloignement des habitations n'est pas rigoureusement nécessaire.

Qu'il résulte de l'information mentionnée ci-dessus, que publication faire de la pétition du sieur Bolloré, il n'a été formé aucune réclamation, ni aucune opposition, contre l'établissement projeté.

Qu'il est constaté par le rapport de Mr l'Ingénieur en chef, que cet établissement ne parait pas de nature à nuire aux riverains, ni à modifier le régime de la rivière, qu'il ne peut non plus nuire à la salubrité publique, puisque précédemment placé dans un point plus central de la ville, il n'a, sous ce rapport, donné lieu à aucune plainte vers l'administration.

Arrête :

Art 1er. Le sieur Bolloré, fabricant de chapeaux à Quimper, est autorisé à établir sa fabrique dans sa propriété de la rue des Réguaires, à la condition que, s'il fait construire quelques maçonneries ou charpentes bordant la rive de l'Odet, adjacente à sa propriété, il en informe, à temps Mr l'Ingénieur en chef du département, pour que ce fonctionnaire prenne connaissances suffisantes des ouvrages entrepris.

Art 2. Il sera transmis une expédition du présent arrêté, au sieur Bolloré, par l'intermédiaire de M. le Maire de Quimper.

28 mai - Préfet à maire

28 mai 1825. Le sieur Bolloré, de Quimper, est autorisé à y établir une fabrique de chapeaux.
Joindre l'arrêté?

À M. le Maire de Quimper.

Mr le Maire, j'ai l'honneur de vous adresser une expédition de mon arrêté de ce jour, qui autorise, conformément au désir de votre lettre du 5 de mois, le sieur Bolloré, fabricant de chapeaux à Quimper, à établir sa fabrique dans sa propriété située rue des Reguaires.

Veuillez bien transmettre cet arrêté au sieur Bolloré, en l'invitant à se conformer, s'il y a lieu, aux clauses conditionnelles qu'il impose.

Recevez ... Signature.

[modifier] 3 Originaux

Lieu de conservation :

  • Archives Départementales du Finistère.
  • Cote 5 M 94.
 

Usage, droit d'image :

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[modifier] 4 Annotations

  1. César Elzéar de Castellane (1784-1835), comte de Castellane-Majastres, fut secrétaire général des Bouches-du-Rhône et préfet du Finistère du 1824 à 1832. [Ref.↑]
  2. Athanase François Coprin Gilart de Larchantel (1761-1832) fut commandant des canonniers de la Garde Nationale de Quimper, puis maire de 1821 à 1825. Son portrait par Olivier Perrin est exposé au musée des Beaux-Arts de Quimper. [Ref.↑]
  3. Avant le 18e et l'usage du poil fin de castor ou du feutre, les chapeaux étaient si grossiers, que les gens les faisaient couvrir de velours, de taffetas, ou d'étoffe de soie ; on ne les portait nus que par économie, ou pour aller à la pluie (Histoire de la chapellerie, Augris Chrystel) [Ref.↑ 3,0 3,1]


Thème de l'article : Document d'archives sur le passé d'Ergué-Gabéric.

Date de création : Mars 2017    Dernière modification : 17.03.2021    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]