Mémoire que le sieur Mermet négociant à Quimper a l'honneur de présenter à monsieur le Préfet et à Messieurs les conseillers de préfecture du département du finistère. Messieurs,
Le sieur de la Marche, propriétaire du moulin de Kerfors en Ergué-Gabéric, se prétend aussi propriétaire d'un amas d'eau par lui qualifié d'étang, enclavé dans une prairie aux dépendances du lieu de Kervreïen, même commune, acquise du gouvernement par le sieur Mermet ; pour se faire établir en la propriété de cet amas d'eau, il vous a présenté, Messieurs, une pétition tendante à ce qu'il vous plut déclarer que cet étang ne fait point point partie de l'acquisition du sieur Mermet avec réservation de poursuivre ce dernier en dommages-intérêts pour indue jouissance.
Vous avez, Messieurs, à décider si cet amas d'eau fait partie de l'acquisition du sieur Mermet ? ou au contraire s'il est la propriété du sieur Delamarche.
Pour arriver à une solution précise de cette question, le premier pas à faire est de bien connaître les titres respectifs des deux contendants, car c'est de leurs titres que dérivent leurs droits.
Le sieur Mermet vous présente, Messieurs, le procès verbal d'expertise du dit lieu de Kervreïen en date du 1er, 2, 3, 4 à 6 Messidor an 2, en vertu duquel l'adjudication de ce lieu a eu lieu à son profit ; un des articles de ce procès-verbal porte : " Autre pré fauchable, nommé parc-ar-foënnec contenant 14 journées à faucher, donnant du midi sur taillis du présan, du nord sur futaye de Kerfors, le long de laquelle elle [...) de l'allée de Kerfors, du levant sur chemin de Kervreïen au moulin et du couchant sur chemin menant à Kerbihan, édifices levant et couchant, contenant sous fonds 14 journées à faucher ".
Si l'amas d'eau ou l'étang réclamé par le sieur Lamarche se trouve enclavé dans ce pré et dans l'enceinte des limites et tracées du pré, nul doute qu'il ne fasse partie du pré et par conséquent de l'acquisition du sieur Mermet.
Or on soutient sans crainte d'être démenti que cet amas d'eau est enclavé dans le pré et dans l'enceinte des limites tracées par le procès verbal de deux experts.
Peu importe que l'étendue donnée à ce pré soit plus ou moins grande puisque le gouvernement a toujours vendu les domaines nationaux sans aucune espèce de garantie, de mesure ni d'étendue.
Pour convaincre le sieur Delamarche que cet amas d'eau fait partie du pré de Kervrïen, le sieur Mermet a fait retirer le procès-verbal d'estimation du moulin et dépendances de Kerfors, fait par les mêmes experts vingt-un jours après celui de Kervreïen.
Ce procès-verbal ne fait point mention de ces amas d'eau parce que déjà les experts l'avaient compris dans le pré de la métairie du sieur Mermet.
Le moulin de Kerfors fut vendu dans les [...] au sieur Le Guen, mais faute ce paiement du quart en numéraire, il fut déchut de son acquisition.
Il est incontestable que si le sieur Le Guen était resté propriétaire de ce moulin, il n'aurait eu aucun droit à cet étang en vertu de son contrat d'acquet basé sur le procès-verbal d'estimation ; il en doit être de même du sieur Delamarche.
§ Au surplus monsieur Delamarche est dans l'erreur
Au surplus monsieur Delamarche est dans l'erreur s'il croit que cet étang servait autrefois à retenir l'eau nécessaire pour la mouture de son moulin de Kerfors.
Ce moulin est très éloigné de cet amas d'eau, et jamais il n'exista ni pelle ni vanne pour y tenir les eaux qui en découle par la pente naturelle du terrain.
Il n'existe même aucun avantage pour le sieur Lamarche à s'approprier ces eaux. Son moulin est chomant depuis longtems et l'on peut dire qu'il n'existe plus aujourd'hui ; et existerait-il ? le sieur Mermet pourrait-il changer la direction de ces eaux que leur pente naturelle entrainerait toujours vers l'emplacement de son moulin.
Le sieur Delamarche n'aurait donc aucun intérêt à s'approprier ces eaux, si ce n'est le plaisir de nuire au sieur Mermet, car s'il devenait propriétaire, bientôt il fera retenir les eaux avec d'autant plus de facilité qu'elles luiu sont inutiles n'ayant plus de moulin ; et ces eaux refluant sur la prairie du sieur Mermet n'en feraient bientôt qu'un étang.
En un mot par le procès-verbal d'expertise du lieu de Kervreïen, les experts ont compris comme dépendances de ce lieu le pré Parc-ar-foënnec en entier sans distnguer l'amas d'eau qui y était renfermé et ont donné des débornements à cette prairie au-delà de cet amas d'eau ; donc cet amas d'eau qui faisait partie de la prairie a été vendu avec elle au sieur Mermet, sans cela les débornements de cette prairie [...] sur cet amas d'eau et non au delà.
Le moulin de Kerfors a été vendu après avoir été estimé et il existe un procès-verbal des dépendances de ce moulin et ce procès-verbal postérieur seulement de vingt un jours au procès verbal des terres de Kervreyen, ne fait nullement mention de cet étang prétendu. Les experts qui étaient lors mêmes n'ont pû comprendre cet amas d'eau au moulin puisqu'ils l'avait déjà compris dans le pré de la métairie du sieur Mermet.
En conséquence ce dernier a l'honneur de requérir :
À ce qu'il vous plaise, Messieurs, oyant à joindre les deux procès-verbaux d'experts [...], débouter le sieur Delamarche de son injuste réclamation et maintenir le sieur Mermet dans ses acquisitions et [...] la prairie entière de Parc-ar-foënnec jusqu'au [...] fixés par le procès-verbal d'experts surdaté de fer [...] sous ses droits et actions vers le dit sieur Delamarche.
Fait à Quimper, ce jour 20 septembre 1809, Mermet.
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