Le voyage en Bretagne d'Henriette Marie, reine déchue d'Angleterre, La Gazette 1644
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<i>Les honneurs rendus à la Reine d'Angleterre, à son arrivée en France</i> | <i>Les honneurs rendus à la Reine d'Angleterre, à son arrivée en France</i> | ||
Bien que vous ayez desja sceu quelque chose du voyage de la Reine d'Angleterre en France : sa qualité & les honneurs que la Reine lui a déferez sont trop considérables, pour ne vous en donner point un recit particulier. | Bien que vous ayez desja sceu quelque chose du voyage de la Reine d'Angleterre en France : sa qualité & les honneurs que la Reine lui a déferez sont trop considérables, pour ne vous en donner point un recit particulier. | ||
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Aussi tost qu'elle fut accouchée d'une fille à Oxford, elle fut conseillée pour sa santé de faire un voyage en France, aux eaux de Bourbon, & s'embarqua à cette fin le 25 du passé à Falmouth, dans le Vice-Amiral Holandois, du port de luit cents tonneaux, bien armé & accompagné de trois ramberges Royales d'Angleterre, & d'une chaloupe de la ville de Dinan, qu'elle trouva au port de ladite ville de Falmouth. Son dessein estoit d'aborder à la coste de Bretagne : mais se trouvant vers S. Malo elle en fut empeschée par le vent contraire, & par un vaisseau Parlementaire qui attaqua si rudement le sien, qu'il receut huit coups de canon, dont l'un coupa un cordage & l'autre le perça à fleur d'eau. Sad. M. aborda neantmoins en la dite province sur les costes de l'Evesché de Léon : où estant descendue dans la chaloupe de Dinan, elle mit pied à terre en un lieu nommé Aber Idant à trois lieues de Brest. Toute la coste estant en armes, l'obligea de faire mettre un mouchoir au haut d'un baston. Elle fut fort bien receue par toute la Noblesse & le peuple ; & de là conduite à Brest le 28, avec la plus grande partie de sa suite qui estoit lors d'environ deux cents personnes. Elle en partit le premier de ce mois pour aller coucher à Landerneau dans la principauté de Leon, qui appartient à la Damoiselle de Rohan, dont les Officiers la receurent & logèrent avec beaucoup de soin. Le 2, elle arriva à Chasteaulin, où elle receut les compliments de l'Evesque de Cornouaille, & des Députez de la ville de Kimpercorentin qu'on avoit envoyez au devant d'elle. Elle arriva le 3 audit Kimpercorentin, ville capitale de la basse Bretagne & Siège de l'Evesché de Cornouaille, où sa Majesté Britannique fut receue à plus d'une lieue par 60 Gentilshommes, conduits par le sieur de Kerharo, en l'absence du Marquis de Molac qui en est Gouverneur , & à demie lieue, par huit cents hommes sous les armes, qui firent leur décharge à son abord : & hors la porte de Medart, par le sieur de Talhoet Scindic : lequel accompagné des principaux habitans lui présenta les clefs dans un bassin d'argent, & un poile de velours cramoisi en broderie & crespine d'or aux armes de France et d'Angleterre. Le sieur du Run Furic lui fit une belle harangue, à laquelle, comme à tous les autres complimens, ayant répondu fort gracieusement, Sadite Majesté entra dans la ville, dont les rues estoyent tapissées, précédée de cette infanterie, & suivie de la cavalerie. Estant arrivée à la porte de l'Eglise Cathédrale de S. Corentin, elle descendit de sa litière, & le poile que quatre des principaux habitans portoyent devant elle, fut mis sur sa personne. Lors elle fut saluée des Officiers du Présidial en Corps, par la bouche du sieur du Botilieau Président, en robe rouge ; & à l'entrée de l'Eglise, par l'Evesque en habits pontificaux, suivi de tout son Clergé, qui la conduisit au Choeur sous un dais de velours, où ayant assisté au Te Deum, qui y fut chanté en musique ; elle fut menée en la maison du Marquis de Molac qu'on lui avoit préparée. | Aussi tost qu'elle fut accouchée d'une fille à Oxford, elle fut conseillée pour sa santé de faire un voyage en France, aux eaux de Bourbon, & s'embarqua à cette fin le 25 du passé à Falmouth, dans le Vice-Amiral Holandois, du port de luit cents tonneaux, bien armé & accompagné de trois ramberges Royales d'Angleterre, & d'une chaloupe de la ville de Dinan, qu'elle trouva au port de ladite ville de Falmouth. Son dessein estoit d'aborder à la coste de Bretagne : mais se trouvant vers S. Malo elle en fut empeschée par le vent contraire, & par un vaisseau Parlementaire qui attaqua si rudement le sien, qu'il receut huit coups de canon, dont l'un coupa un cordage & l'autre le perça à fleur d'eau. Sad. M. aborda neantmoins en la dite province sur les costes de l'Evesché de Léon : où estant descendue dans la chaloupe de Dinan, elle mit pied à terre en un lieu nommé Aber Idant à trois lieues de Brest. Toute la coste estant en armes, l'obligea de faire mettre un mouchoir au haut d'un baston. Elle fut fort bien receue par toute la Noblesse & le peuple ; & de là conduite à Brest le 28, avec la plus grande partie de sa suite qui estoit lors d'environ deux cents personnes. Elle en partit le premier de ce mois pour aller coucher à Landerneau dans la principauté de Leon, qui appartient à la Damoiselle de Rohan, dont les Officiers la receurent & logèrent avec beaucoup de soin. Le 2, elle arriva à Chasteaulin, où elle receut les compliments de l'Evesque de Cornouaille, & des Députez de la ville de Kimpercorentin qu'on avoit envoyez au devant d'elle. Elle arriva le 3 audit Kimpercorentin, ville capitale de la basse Bretagne & Siège de l'Evesché de Cornouaille, où sa Majesté Britannique fut receue à plus d'une lieue par 60 Gentilshommes, conduits par le sieur de Kerharo, en l'absence du Marquis de Molac qui en est Gouverneur , & à demie lieue, par huit cents hommes sous les armes, qui firent leur décharge à son abord : & hors la porte de Medart, par le sieur de Talhoet Scindic : lequel accompagné des principaux habitans lui présenta les clefs dans un bassin d'argent, & un poile de velours cramoisi en broderie & crespine d'or aux armes de France et d'Angleterre. Le sieur du Run Furic lui fit une belle harangue, à laquelle, comme à tous les autres complimens, ayant répondu fort gracieusement, Sadite Majesté entra dans la ville, dont les rues estoyent tapissées, précédée de cette infanterie, & suivie de la cavalerie. Estant arrivée à la porte de l'Eglise Cathédrale de S. Corentin, elle descendit de sa litière, & le poile que quatre des principaux habitans portoyent devant elle, fut mis sur sa personne. Lors elle fut saluée des Officiers du Présidial en Corps, par la bouche du sieur du Botilieau Président, en robe rouge ; & à l'entrée de l'Eglise, par l'Evesque en habits pontificaux, suivi de tout son Clergé, qui la conduisit au Choeur sous un dais de velours, où ayant assisté au Te Deum, qui y fut chanté en musique ; elle fut menée en la maison du Marquis de Molac qu'on lui avoit préparée. | ||
Version du 22 février ~ c'hwevrer 2018 à 21:12
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Relations d'un voyage entre Brest et Nantes d'une reine d'Angleterre On trouvera ici les facsimilés de ces deux numéros, l'un de la Bibliothèque municipale de Lyon, l'autre de la BnF-Gallica, ainsi que leurs numérotations exactes, leurs transcriptions intégrales, les évocation épistolaires sur cette publication dans les lettres de l'auteur à son correspondant Pierre d'Hozier Autres lectures : « Lettre du 29 août 1644 de Guy Autret à Pierre d'Hozier (Rosmorduc, XXI) » ¤ « Guy Autret, seigneur de Missirien et de Lezergué (1599-1660) » ¤ « 1644-1645 - Deux lettres de Guy Autret évoquant l'épistolière Marquise de Sévigné » ¤ « 1635-1659 - Lettres de Guy Autret seigneur de Lezergué, travaux Rosmorduc » ¤ |
1 Présentation
L'auteur évoque le double reportage dans une lettre qu'il adresse à son correspondant Pierre d'Hozier Les deux articles sont publiés respectivement les 6 et 31 août 1644, le premier dans les pages Gazette n° 93, le second dans les Extraordinaires n° 103. La Gazette fait 8 pages au total avec une quinzaine d'informations brèves de quelques paragraphes chacune. Les Extraordinaires, par opposition aux Nouvelles ordinaires qui sont le 3e type de gazette, incluent deux à trois compte-rendus beaucoup plus longs. Contrairement aux Extraordinaires qui ne contiennent aucun décor hormis la lettrine de début de texte, les titres des Gazettes et des Nouvelles ordinaires incluent une vignette avec respectivement les lettres stiliséees G et N. Les gazettes ont été créées en 1631 par Théophraste Ranaudot avec l'appui de Richelieu. En 1644 elles sont généralement datées du samedi, avec pour le mois d'août quelques numéros complémentaires en semaine. La pagination et la numérotation des gazettes, suivant leur nature, se font chaque an en démarrant par le n° 1 au début de janvier. Ainsi le 6 août 1644 deux numéros, le n° 92 et le n° 93 de l'année 1644, sont publiées aux pages 629-632 et 633-640, l'un pour les Nouvelles Ordinaires, l'autre pour la Gazette. Pour cette dernière la vignette est estampillée d'un G et de cette maxime : « guidée du ciel, j'adresse et par mer et par terre ».Le texte de Guy Autret pour le 1er article du 6 août donne bien le contexte historique de ce voyage : « La Reine d'Angleterre est aujourd'hui arrivée en cette ville sur un vaisseau Holandois, monté de quarante pièces de canon : contre lequel le Vice-Amiral du Parlement de Londres a tiré 80 coups de canon ». En effet, Henriette, sœur de Louis XIII, mariée avec le roi anglais Charles Ier, est en fuite avant que son époux ne soit exécuté lors de la première révolution anglaise menée par Oliver Cromwell. La reine d'Angleterre vient d'accoucher à Owford avant d'embarquer : « Elle est tellement incommodée de ses couches ». La légende, non rapportée par Guy Autret dans la Gazette, dit aussi que, face aux canons ennemis des Parlementaires anglais, elle demanda à son capitaine : « Quand vous ne pourrez plus me défendre, tuez-moi. ». En tout cas, la gazette précise que, débarquée gràce à une chaloupe de Dinan, elle n'est pas vraiment rassurée dans un premier temps : « Toute la coste estant en armes, l'obligea de faire mettre un mouchoir au haut d'un baston. » Dans le deuxième article du 31 août, après un rappel de l'accostage très mouvementé, c'est un véritable article « people » que nous produit avec force détails Guy Autret, à savoir la tournée d'un star internationale qui « fut fort bien receue par toute la Noblesse & le peuple »:
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A chaque étape de nombreux carrosses l'accueillent, et le marquis de Molac met à la disposition de la reine un « carrosses à six chevaux. Le voyage se poursuit hors la Bretagne, en passant par Angers, Saumur, Amboise et Tours, jusqu'à Bourges où l'attend le prince de Condé. Henriette restera en France, ne reverra plus jamais le roi son mari, et se retirera au couvent de la Visitation de Chaillot où, après sa mort, Bossuet prononcera une de ses plus célèbres oraisons. |
2 Transcriptions
La gazette du 6 août 1644
§ Autres originaux (Bibliothèque de Lyon)
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3 Annotations
- Henriette Marie de France (26 novembre 1609 - 10 septembre 1669) fut une reine consort d'Angleterre. Fille du roi de France Henri IV et de la reine Marie de Médicis, elle épousa le roi d'Angleterre Charles Ier (1625). [Ref.↑]
- Théophraste Renaudot (1586-1653) est un journaliste, médecin et philanthrope français. Il est le fondateur de la publicité et de la presse française par ses deux créations du Bureau d'adresse (1629) et de la Gazette, journal hebdomadaire à partir de 1631. [Ref.↑ 2,0 2,1]
- Pierre d'Hozier (1592-1660) est un historien et auteur de généalogies des grandes familles françaises. Sous les règnes de Louis XIII et de Louis XIV il fut juge d'armes et commis pour certifier la noblesse. Il a composé la « Généalogie des principales familles de France », ouvrage manuscrit de cent cinquante volumes. Il fut ami et correspondant de Théophraste Renaudot, le fondateur de la Gazette. Il fut inhumé dans l'église Saint-André-des-Arts à Paris. [Ref.↑ 3,0 3,1 3,2]
Thème de l'article : Coupures de presse relatant l'histoire et la mémoire d'Ergué-Gabéric Date de création : juin 2010 Dernière modification : 22.02.2018 Avancement : [Développé] |