Sant Victor
Un article de GrandTerrier.
1 Fiche signalétique
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2 Almanach
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3 Sources
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4 Iconographie |
5 Monographies
Site Info Bretagne :
Campbon vient du gaulois "cambodonum" (hauteur non fortifié).
Le pays est christianisé très tôt. La première église est dédiée à Saint-Pierre au Vème siècle. A la fin du VIème siècle est né un homme du nom de Victor, ermite reconnu comme un saint. L'oratoire de l'église est détruit par les Normands en même temps que l'église paroissiale.
Vie des Saints d'Albert Le Grand :
LA VIE DE SAINT VICTOR DE CAMPBON Confesseur, le 13 Aoust.
Les frequentes desolations qui arriverent en nostre Bretagne depuis la mort du Roy saint Salomon, avenuë l'an 874, jusques au Regne du Duc Geoffroy I nous ont privé aussi-bien de la connaissance des gestes de plusieurs saints Bretons, que de leurs venerables Reliques ; car les Normands & autres Payens qui, pendant ce temps, coururent & saccagerent cette Province, ne se contenterent pas d'arrazer les belles Eglises & Religieux Monasteres dont elle estoit remplie, mais, de plus, éventoient les venerables Reliques des Saints & condamnoient au feu les Livres sacrez & les Legendaires qui en contenoient les vies, comme ne desirans rien plus que d'exterminer nostre sainte Religion. Ce fut cette generale calamité & desolation, laquelle mit fin au Noble Royaume de Bretagne, l'an 878 & nou spriva des Corps de nos Saints Patrons, que les Normands, ayans pris terre à Saint-Nazaire, saccagerent tout le Comté Nantois, &, entr'autres lieux Saints, razerent l'Eglise et l'Hermitage de S. Victor & brûlerent la Paroissiale de Campbon, ensevelissans dans ses ruïnes la memoire de ce Saint, duquel l'Eglise et l'Hermitage estoient frequentez des Bretons, à cause des grands miracles que Dieu y faisoit par son intercession.
II. Ce neanmoins, aprés le cours de quelques années, la devotion se ralluma vers ce Saint, par un accident estrange qui fut tel. Du temps du Pape Jean XV, sous l'Empire d'Otton III, le Duc Conan I du nom (dit de Rennes) estant mort, le Prince Geoffroy, son fils aisné, succeda à la Couronne, regnant en France le Roy Robert, l'an de grace 962. Ce Prince, trouvant Judicaël, Comte de Nantes, haut à la main & refusant deluy rendre l'hommage de sa Comté, pour premier exploit resolut de le plier & mettre à la raison ; pour à quoy parvenir, il mist sur pied une puissante Armée & fit le dégat par le Comté Nantois, resolu d'assieger la Ville, si Judicaël ne se fust mis en son devoir. Le Duc, ayant pris logis, une nuit, au Bourg de Campbon, les granges & escuries ne pouvans suffire pour loger les chevaux, les valets & goujats, voyans les murailles de l'Oratoire de saint Victor encore sur bout, & les prenans pour les ruïnes de quelque édifice prophane, y accomoderent des perches de travers, d'une paroy à l'autre, le couvrirent de glé & de foin, & y logerent autant de chevaux que le lieu en pût comprendre ; mais Dieu punit cette irreverance ; car, le lendemain, tous les chevaux qui y avoient esté logez furent trouvez morts sur le carreau. Cét accident, rapporté au Duc, l'estonna & attrista fort ; mais le Curé de Campbon l'avertit que "ce lieu avoit esté toûjours estimé Saint, parce que ç'avoit esté l'Hermitage d'un grand serviteur de Dieu, lequel y avoit esté enterré, duquel le Sepulchre avoit esté, autre fois, religieusement visité par les Pelerins ; mais que les Normands ayans brûlé ce Saint Lieu, nous en avoient presque ravy la memoire." Le Duc, qui fut un des plus religieux Princes de son temps (aussi fit-il rebastir & reformer la pluspart des Monasteres de son Duché), ayant ouy ce rapport, fit nettoyer ce lieu, visita le tombeau du Saint, y fit ses prieres, & donna au Curé une grosse somme de deniers pour faire rebastir cét Hermitage.
III. Dans un peu de temps, le Curé réedifia la Chapelle & dressa le Sepulchre du Saint, auquel accouroient, de toutes parts, les malades pour recouvrer leur santé, & Dieu fit plusieurs miracles en ce lieu par l'intercession de ce Saint, ce que voyant un certain personnage, nommé Chambennus, qui avoit long-temps porté les armes, il faisoit laver les Ossemens de saint Victor en de l'eau besnite, &, ayant mis cette eau dans des bouteilles & semblables vaisseaux, alloit la distribuer aux malades, qui, pour leur actuelle infirmité, ne pouvoient aller en personne visiter les Reliques de S. Victor, de laquelle eau, si-tost qu'ils avoient bu, ils estoient gueris ; & continua long-temps cét homme à porter cette eau par la Bretagne Haute & Basse, l'Anjou, Poitou, Maine & Normandie.
IV. Il y avoit, en la Paroisse de Campbon, un honneste personnage, nommé Vivian, fort devot envers S. Victor, lequel, sa femme étant morte, se fit Prêtre & faisoit écolle aux jeunes Clercs qui aspiroient à la Prêtrise, leur apprenant le Chant Ecclesiastique qu'il sçavoit parfaitement ; entre ses écolliers, il avoit un fils, nommé Jamgonus, jeune enfant leger & tout à fait fripon, lequel, un jour que son pere estoit absent, dit à ses condisciples : "Or sus, Enfans, voulez-vous que nous experimentions si S. Victor, duquel les Reliques sont si honorées de tout le Peuple, est vraiment si grand Saint, comme on le croit ? Allumons un feu & y jettons ses ossemens pour voir si le feu les épargnera " ; tous ses compagnons, detestans telle impieté, luy repondirent qu'il n'en fist rien, & qu'ils ne doutoient aucunement des merites de S. Victor, lequel ne manqueroit à châtier un tel attentat.
V. Mais le miserable, persistant en sa perverse resolution, les ayant voulu induire, plusieurs fois, à participer à sa meschanceté, voyant qu'ils n'y vouloient entendre, se resolut de l'executer, &, ayant derobé les clefs de la chasse, prit les venerables Ossemens du Saint, alluma un grand feu, fait de fagots de sarment, & les y jetta ; mais, tout incontinent, ils rejaillirent hors, avec un tel bruit & éclat, que tous les assistans en furent épouventez & s'enfuirent ; le miserable, s'opiniâtrant en sa malice, les jetta, de rechef, dans le feu, d'où ils sortirent encore avec un bruit plus horrible qu'auparavant, & le miserable tomba à la renverse, roide comme une bille de bois, sourd, muet & privé de tous ses sentimens. Son pere, de retour & averty de ce qui s'estoit passé, extremément affligé de l'injure faite par son fils aux Reliques du Saint, & aussi de l'horrible punition qu'il s'estoit procurée, fit porter ce corps en la chapelle saint Victor & le coucher de son long prés de son Sepulchre, où ayant fait sa priere à Dieu & invoqué le Saint, son fils fut entierement guery & resta fort affectionné au Saint, duquel la Chapelle se voit au bout du Bourg de Campbon, frequentée par les Fidels, à cause des graces que Dieu y fait à ceux qui reclament son intercession.
Les Breviaires anciens Nantois en font memoire le 31 Aoust.
Vies des saints de la Bretagne Armorique par Albert le Grand (1636) - édition de 1901 - Quimper