Sant Mikael an Nobletz
Un article de GrandTerrier.
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Michel Le Nobletz
Dom Michel Le Nobletz (1577-1652) fut au début du XVIIe siècle le premier et l'un des plus vigoureux missionnaires de la Contre-Réforme dans le royaume. Actif dans l'ouest de la Bretagne, il développa pour nourrir son propos des méthodes pédagogiques nouvelles, et inventa notamment l'usage de cartes peintes - appelées aujourd'hui taolennoù ou tableaux de mission, dont il reste de nombreux exemplaires. L'Église le déclara vénérable en 1897. L'évêque de Léon ouvrit son procès en béatification en 1701, mais elle est toujours en attente.
Michel le Nobletz (Mikêl an Nobletz) naquit au manoir de Kerodern à Plouguerneau (Léon) le 29 septembre 1577 dans une famille noble et aisée qui compta onze enfants. Son père était notaire royal.
Son père le fit rejoindre ses quatre frères à l'université de Bordeaux en 1596. Il étudia ensuite au collège des Jésuites d'Agen la théologie, les langues anciennes (latin, grec) et les mathématiques. C'est au cours d'un pèlerinage à Toulouse qu'il aurait décidé de sa vocation, avant de venir approfondir sa théologie au collège des Jésuites de la Madelaine de Bordeaux. Il revint dans sa paroisse natale en 1606, à 29 ans et imagina alors une méditation composée d'une description des dix écueils menaçant la vie sacerdotale sur une carte marine.
Désireux de parfaire ses connaissances, il alla étudier l'hébreu à la Sorbonne. Il reçut le sacerdoce à Paris où son directeur fut le fameux père Coton, confesseur d'Henri IV. Rentré en Léon, tourmenté par l'enseignement religieux qui recommande au prêtre de vivre l'évangile qu'il annonce, il refusa la carrière classique qui s'ouvrait à lui, un poste avec de confortables bénéfices, pour une vie de pauvreté vouée à l'Évangile. Au désespoir des ses parents, il se retira à Plouguerneau dans une sorte de cellule qu'il se fit ériger au milieu des rochers de la plage de Treménac'h. Il y passa un an dans le dénuement et l'ascèse.
En 1608 il effectua sa première mission, dans l'île d'Ouessant, reprenant une activité que saint Vincent Ferrier avait initié au début du XVe siècle en Bretagne, et que les Frères mineurs capucins avaient réactivé.
Après un passage chez les Dominicains de Morlaix qui le chassèrent à cause d'un scandale retentissant (il avait vandalisé le portait d'une jeune fille placé sur sa tombe parce qu'il ne voulait pas que l'on s'y recueillit comme devant la statue d'un saint), il se mit à prêcher avec le P. Quintin, dominicain de Morlaix. Ensemble ils parcoururent le Trégor et le Léon de 1608 à 1611.
Michel le Nobletz missionna alors dans les îles avec succès, à Ouessant, Molène, Batz (où il brandit à son départ un crâne humain extrait de l'ossuaire), avant de revenir au Conquet. C'est là que sa sœur Marguerite le rejoignit. Elle faisait partie de l'"Ecole de cartographie du Conquet" et mit sa science au service de son frère, si bien qu'à Landerneau en 1614 il commença d'utiliser les cartes peintes de Marguerite comme d'Alain Lestobec (régistrateur au Conquet) pour évangéliser les populations, ayant compris qu'il se ferait mieux comprendre par le dessin, alors peu répandu et donc plus frappant. Les cartes marines étaient par ailleurs extrêmement rares et de ce fait les cartes dites "taolennoù", mêlant science et religion, amenaient les impies à la cathéchèse par le biais de la géographie.
Pour toucher son public de marins et de paysans du petit peuple et afin qu'ils mémorisassent aisément son enseignement, Le Nobletz mit des paroles édifiantes sur des airs de chansons populaires, voire gaillardes. L'évêque de Léon ne comprenant pas le breton, interdit ces cantiques dont l'air lui semblait scandaleux, jusqu'à ce qu'on lui expliquât le sens des paroles.
Le Nobletz fit aussi appel à des femmes pieuses de toutes origines pour l'aider, à commencer par ses sœurs Anne et Marguerite le Nobletz, ce qui lui fut durement reproché. Parmi celles-ci, il y eut la morlaisienne Mlle de Quisidic (noble demoiselle), les veuves douarnenistes Claude le Bellec (armateur et négociante en vin), Dammath Rolland (fabricante de filets) et Anne Keraudren, les conquetoises Jeanne le Gall (paysanne) et Françoise le Troadec (cartographe polyglotte). Il ne négligea pas de s'adjoindre l'assistance d'hommes que le sort lui faisait rencontrer, le cartographe et employé du fisc Alain Lestobec, le pêcheur sénan Fanch le Su, Heny Pobeur, Bernard Poullaouec, Guillaume Coulloch...
De Landerneau, Michel le Nobletz fut autorisé par l'évêque de Quimper à passer en Cornouaille, évangéliser Quimper, Le Faou, Concarneau et surtout les campagnes environnantes où les pratiques superstitieuses étaient selon lui tellement développées qu'elles constituaient un retour au paganisme. Le père Verjus, son hagiographe, relate que le succès couronna ses efforts.
Après sa mission dans l'Île de Sein, il resta 25 ans à Douarnenez, de 1617 à 1639. C'est là qu'il perfectionna l'usage des tableaux allégoriques appelés taolennoù en breton, et qu'il écrivit un certain nombre de cantiques bretons qui complétaient son enseignement et que la tradition a conservés.
Il fut cependant en butte à bien des épreuves, des persécutions de la part de ses proches, des marchands, des débauchés dont il stigmatisait les vices, des "dévots", des prêtres mondains que sa conduite austère condamnait, et qui le dénonçaient aux évêques comme un exalté et un fanatique. Surnommé par ses contemporains "ar beleg foll" (le prêtre fou), il donnait lui-même prise aux accusations de fanatisme par ses outrances et son caractère trempé. Au point même qu'on l'accusait de vider les églises, les paroissiens sortant de celle-ci dès qu'il commençait son prêche.
Chassé de Douarnenez où il s'était rendu odieux à la population par son rigorisme outrancier, il revint au Conquet en 1639. Il y restera jusqu'à sa mort, handicapé par la maladie de Parkinson et souffrant de difficultés d'élocution. C'est au Conquet qu'il retrouva le père jésuite Julien Maunoir qu'il avait connu à Quimper dix ans plus tôt, et qui sera son successeur. Après sept mois de paralysie et un mois d'agonie, le père Le Nobletz mourut le 5 mai 1652 au Conquet. Il fut inhumé dans l'église tréviale de Lochrist. En 1856, ses restes furent transférés à l'église du Conquet devenue paroissiale.
Bibliographie
- Michel le Nobletz/Mikêl an Nobletz. Fañch Morvannou & Yves-Pascal Castel, ed. Minihi-Levenez 2002.
- An Taolennoù. Le ciel et l'enfer. Des tableaux de mission à la bande dessinée 1630-1950. catalogue d'exposition du château de Kerjean (1990)
- Les chemins du paradis/Taolennoù ar baradoz. Fañch Roudaut, Alain Croix et Fañch Broudic. Le Chasse-Marée éd. de l'Estran 1988.
- Le miroir du cœur. Anne Sauvy. Ed. du Cerf 1989
Site Info Bretagne
C'est aux deux grands missionnaires Le Nobletz et Maunoir que la Bretagne doit sa belle renaissance chrétienne du XVIIème siècle. La Bretagne les révère comme des apôtres.
Michel Le Nobletz naquit le 29 septembre 1577 (jour dédié à l'honneur du glorieux archange Saint-Michel) au manoir de Kerodern, situé en la paroisse de Plouguerneau (évêché de Léon). Il possédait quatre frères et six soeurs. Son père et sa mère étaient de petite noblesse : son père s'appelait Hervé Le Nobletz, seigneur de Kerodern (un des quatre notaires du Léon), et sa mère Françoise de Lesvern ou Lesguern, issue de l'ancienne et illustre maison de Coatmanach ou Coëtmenech. Les Nobletz sont mentionnés dans les réformations et les "montres", à partir de 1426 sur les paroisses de Plouguerneau et de Plouvien (un certain A. Le Nobletz vient au 36ème rang des 115 chevaliers et écuyers de l'évêché de Léon). La famille de Lesvern ou Lesguern est originaire de Saint-Frégant, près de Lesneven. La branche de Coatmanach habitait jadis le manoir de Saint-Frégant en Saint-Renan. La famille Le Nobletz possédait trois tombes dans la chapelle du Grouanec, en Plouguerneau. Un vitrail y portait ses armoiries.
Michel Le Nobletz commença ses études dans les petites écoles des environs, à Saint-Frégant d'abord, où il passa quelques temps chez son grand-père à Lesvern ou Lesguern. Dès l'âge de 4 ans, on le trouvait à l'église de Saint-Claude, proche de Kerodern : il montrait déjà une piété fervente. A l'âge de 7 ans, il eut pour maître un prêtre nommé Thomas Cozic, qui lui enseigna à lire dans la chapelle de Sainte-Anastasie, proche du manoir de Lesvern (situé en la paroisse de Saint-Frégant). De retour à Kerodern (après le décès du grand-père), il eut pour maître un pédagogue nommé Gilles Mazéas, puis Yves et Henri Gourvennec qui lui enseignèrent la Vertu et les Sciences dans un établissement situé au lieu-dit Saint Antoine Perroz (sur les bords de l'Aber-Wrach). Il n'avait alors que 10 ans.
A l'âge de 13 ans, il est envoyé à Ploudaniel où il étudia durant 6 ans sous un prêtre nommé Alain Le Guern. Il eut vers 14 ans la vision de notre Seigneur et se sentit attiré à la piété et à la vertu. Voyant l'ignorance où étaient les paroissiens parmi lesquels il vivait, il commença à les catéchiser. A 18 ans son père, effrayé de son ascétisme précoce, l'envoya achever ses études au collège de Guienne ou Guyenne à Bordeaux où il retrouva ses frères aînés. Intelligent, instruit, il écrivait aisément en latin, savait le grec et l'hébreu.
Il étudia la théologie avec succès chez les Jésuites, à Bordeaux d'abord, à Agen ensuite (dès le mois d'Octobre 1597) au collège de la Madeleine où un événement décisif orienta sa vie. Il vit la sainte Vierge lui apparaître qui lui dit : "Michelig, n'ho pe ket aon, na oueli ket : va Mab ho tiouallo ha me ho sikouro" (petit Michel, ne pleurez pas et n'ayez pas peur : mon Fils vous défendra et moi je vous assisterai). Ayant lu la vie de Saint Ignace, après avoir étudié quelques années sous les Pères de la Compagnie de Jésus, il prit la résolution d'imiter cette vie. Il se sentit très tôt appelé à l'état ecclésiastique. Il s'adonna à la lecture de Saint Thomas et étudia la Sainte Ecriture. Lorsque ses compatriotes faisaient grande chère, il conviait quelques pauvres écoliers à dîner chez lui. Lorsque ses compatriotes faisaient la récréation, il visitait les églises en méditant toute la Passion du Christ. Quand il avait le temps, il allait visiter les hôpitaux, les indigents et les prisonniers.
Ses études terminées, Michel revint à Kerodern, avant d'être chassé comme un vaurien par son père. Il vivra six mois chez sa vieille nourrice passant des heures à catéchiser les humbles et les enfants. C'est alors que Michel Le Nobletz prit la décission de partir à Paris parachever ses études à la Sorbonne. Sur les conseils du Père Cotton, jésuite, ancien confesseur de Henri IV, il reçut la prêtrise en 1607. De retour en Bretagne (à Plouguerneau), il se retira dans une cellule qu'il se fit édifier dans les rochers sur la plage de Trémenech ou Trémenach (près de Plouguerneau) et où il mena une vie austère. Il y passa une année complète (de 1607 à 1608). Après cette retraite, il prit la décision d'être missionnaire, contre le gré de ses parents qui le chassèrent à nouveau de la maison paternelle. Il avait pris pour devise ces paroles de Saint-Paul "Voe mihi, si non evangelisavero !" (Malheur à moi, si je ne catéchise et si je ne prêche l'Evangile).
Il commença sa vie missionnaire dans le dénuement le plus complet, prêcha à Plouguerneau et manqua d'être tué par des jeunes voyous dont il stigmatisait les vices. Des femmes du village de Kerventa en Ploudaniel le prirent à partie et le conspuèrent à l'endroit où se trouve aujourd'hui une fontaine appelée Feunteun Sant Mikel Nobletz. On l'appelait "ar belek fol" (le prêtre fou). Appelé à Morlaix, par son ami Pierre Quintin, qui, après avoir été lieutenant d'une compagnie de ligueurs, était entré au couvent des Dominicains, le Père Nobletz accourut, mais là aussi son austérité fut mal acceptée par les moines qui le chassèrent honteusement. Il entreprit des missions dans les évêchés de Tréguier où il prêcha jusqu'en 1611 (principalement Morlaix) et de Léon. En 1611, Michel Le Nobletz s'installa à Lochrist, une trève de Plougonvelin, à deux pas de la mer, entre le Conquet et l'abbaye de la Pointe Saint-Mathieu. Il se rendit dans les îles d'Ouessant, de Molènes et de Batz, où les habitants vivaient dans une situation déplorable et leur enseigna les principales vérités de la religion. Dans la visite des villages, s'il rencontrait quelque pauvre, quelque orphelin délaissé, il en faisait une liste et allait chercher l'aumône pour eux. Son divertissement était de visiter, consoler, assister et confesser. Ses premières victoires, il les remporta au sein de sa famille en convertissant son père et en entraînant dans sa voie deux de ses soeurs (Marguerite et Anne) qui se consacrèrent aux enfants et aux pauvres.
Nota : La tradition veut que les restes de Marguerite Le Nobletz reposent sous la dalle tumulaire qui se trouve vers le milieu du bas-côté nord de l'église de Ploaré.
Son zèle le porta ensuite de la pointe de Saint-Mathieu vers d'autres endroits de la Basse-Bretagne. Dénoncé par des condisciples ("prêtres mondains") qui le considéraient comme un fanatique, un 'prêtre fou" ("ar belec fol"), il sera défendu par l'abbé du Louët, grand vicaire de Léon, qui devait devenir évêque de Quimper. Tous les dimanches, il courait de paroisse en paroisse, où il prêchait, catéchisait et confessait avec grâce et ferveur. Après une mission, qui fut presque infructueuse, à Landerneau, le Père Nobletz partit pour la Cornouaille, en 1614. Il prêcha à Pont-Labbé, à Concarneau et à Audierne. Il s'arrêta en 1618 dans la région de Douarnenez où il resta près de vingt-cinq ans, avant de revenir dans le diocèse du Léon, au Conquet, vers 1642 où il passa les dix dernières années de sa vie.
Michel Le Nobletz mourut au Conquet, le 5 mai 1852, à l'âge de 75 ans. Il fut enterré le mardi des Rogations 1652 dans l'enfeu de la famille du Halgouët à Lochrist, où on lui a élevé, dans l'église, un tombeau en marbre noir. Sa statue de proportion humaine (à genoux, les mains jointes et le visage tourné vers l'évangile du maître autel) se trouve sur le tombeau. Des grâces miraculeuses furent obtenues par les prières faites sur son tombeau.
Nota : La cellule de Dom Michel Le Nobletz à Trémenech existe toujours. Elle fut restaurée en 1889. Quant à la chapelle de Trémenech, elle a disparu sous les sables en 1729.
Dom Michel Le Nobletz avait écrit un journal de ses missions dont on lit quelques fragments dans sa vie, publiée en 1666.