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Sant Melar

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1 Fiche signalétique


s. Melar
Vie / Buhez : fils de Milio et de la princesse Aurèle, martyr à la main d'argent, assassiné près de Lanmeur par son oncle Rivod
Genre / Reizh : Masculin
Signification / Sinifiañs : origine Celtique, Mael=Prince
Variantes / Argemmoù : Maelor (Bretagne) - Magloire (France) - Maglor (Bretagne) - Maglorix (Celtique) - Melair (Bretagne) - Melar (Bretagne) - Meler (Bretagne) - Meloir (Bretagne) -

2 Almanach


le 2 octobre 2024 ~ d'an 2 a viz Here 2024
Saint(e) du jour ~ Sant(ez) an deiz s. Melar (fils de Milio et de la princesse Aurèle, martyr à la main d'argent, assassiné près de Lanmeur par son oncle Rivod)
Proverbe breton ~ Krennlavar Etre daou-ugent ha hanter-kant, Ar brasañ c'hoant. [Entre quarante et cinquante ans est la plus grande envie (sexuelle).]




Almanach complet : [Calendrier:Vie des saints]

3 Sources

4 Iconographie

saint Mélar en l'église de Lanmeur
saint Mélar en l'église de Lanmeur
Eglise St-Mélar de Confort Meilars
Eglise St-Mélar de Confort Meilars
Crype de St-Mélar en l'église de Lanmeur
Crype de St-Mélar en l'église de Lanmeur

5 Monographies

Site Bretagne.net :

Melar

prénom masculin, fête le 2 octobre

Déclinaisons du prénom breton : Meloar

Origine du prénom

Saint Mélar est le saint patron de Locmélar (29).

Sur les murs de l'église de Locmélar, on peut lire son histoire, celle de l'homme à la main d'argent. Il serait enterré à Lanmeur, près de Morlaix. Du celtique "Maël" qui signifie prince.

Diocèse de Quimper :

Saint Mélar (Méloir)

Fêté le 3 octobre
Martyr

Mélar n'avait que 7 ans quand son père, saint Miliau, fut traîtreusement tué par Rivode son frère. Celui-ci s'en prit ensuite au fils de sa victime, lui faisant couper la main droite et le pied gauche pour l'empêcher de manier l'épée et de monter à cheval. Il finit par le faire assassiner près de Lanmeur, où une partie de ses reliques fut gardée dans la crypte jusqu'aux invasions normandes. De Lannéanou à Lanmeur, le chemin porte le nom de "Hent sant Melar", chemin du martyre d'un jeune innocent.

Les églises de Lanmeur et de Locmélar, les chapelles d'Irvillac, Plouézoc'h, Plouigneau (en ruines), Plounéventer, Saint-Jean-du-Doigt sont dédiées au jeune prince martyr. Ont disparu les chapelles de Guimaëc, Plobannalec, Plozévet, Querrien et Saint-Cadou.


Melar n'e-noa nemed seiz vloaz pa oe lazet e dad sant Miliau dre drubarderez, gand e vreur Rivod. Heman a en em gemeras goudeze ouz mab Miliau o lakaad troha e zorn dehou hag e droad kleiz, evid mired outan d'en em zervicha euz ar c'hleze ha da vond war varc'h. Da echui, e lakeas e vuntra damdost da Lanmeur, el lec'h ma oe dalc'het e relegou er japel dindan-douar beteg argadennou an Normanded. Euz Lanneanou da Lanmeur eo anvet "Hent sant Melar" hent merzerenti eun den yaouank didamall.

Info Bretagne / Plouzelambre :

PATRIMOINE de PLOUZELAMBRE

L’EGLISE de Plouzélambre et les CHAPELLES de Saint Siméon et de Saint Mélar. Mélar, de même que la plupart des saints de la Bretagne, n’a jamais été canonisé à Rome. On le confond à tort avec Méloir, abbé, que la paroisse de Tréméloir, dans l’arrondissement de Saint-Brieuc, a pris pour patron.

Mélar ou Mélair était fils de Méliau et de la princesse Aurèle. Il avait pour oncle Rivod, assassin de son père, et qui bientôt devait être aussi le sien, après l’avoir affreusement mutilé. En effet la légende rapporte que Rivod ayant plusieurs fois tenté inutilement d’empoisonner son neveu, envoya une troupe de forcenés pour le tuer. Mais ceux-ci, vaincus par les larmes de la mère et par la résignation du jeune prince, se contentèrent de lui couper la main droite pour l’empêcher de manier à l’avenir une épée, et le pied gauche pour qu’il ne pût plus monter à cheval : c’était le rendre impuissant à régner.

Mélar, qui était très pieux, faisait toujours le signe de la croix sur les aliments qu’on lui servait, ce qui dit la légende, rendit vaines toutes les tentatives d’empoisonnement. Mélar, ainsi mutilé, se retira dans le monastère de Quimper, où on lui fit faire un pied d’airain et une main d’argent, dont il se servit si bien, qu’il surpassa en adresse les guerriers les plus expérimentés. Comme la majorité du prince approchait et que les mutilations dont il avait été l’objet n’avaient fait qu’augmenter l’affection des Domnonéens pour lui, Rivod résolut de s’en débarrasser pour toujours. Il gagna à force de promesses et d’argent, le comte Kerioltan et son fils nommé Justin.

Ces deux misérables s’introduisirent dans le château où Budic gardait le jeune prince, et lui tranchèrent la tête. Justin se rompit le cou en cherchant à fuir, mais son père parvint jusqu’à Rivod et lui remit la tête de Mélar ! Trois jours après, Rivod pris d’un accès de frénésie, expirait en écumant de rage, et Kerioltant, monté sur une colline pour embrasser du regard, dans toute son étendue, la seigneurie qui lui avait été donnée comme récompense de son forfait, perdait tout à coup la vue.

Chemins de Bretagne / Albert Le Grand :

Vie de saint Mélar
Récit d'Albert Le Grand publié en 1636

Les histoires de Bretagne nous aprennent qu'aprés la mort d'Alain II. du nom, surnommé le Long, onzième Roy de Bretagne Armorique, avenuë l'an 670. Daniël, surnommé Drem-Rutz, fils de Jean, Comte de Cornoüaille, parvint à la couronne, &, de la fille de l'Empereur Leonce, ou Leon II. eut deux enfans, les Princes Budic & Maxence. Budic partagea le Royaume avec Macliau Comte de Vennes, & prit pour soy le Royaume Dononéen, ou de basse Bretagne, & eut de sa femme trois fils, Theodoric, Meliau & Rivode. Budic mort, Maxence, son frere, s'empara du Royaume & en expulsa ses néveus; mais Theodoric, venu en âge de porter les armes, fit la guerre à son oncle Maxence & le contraignit de luy rendre son royaume, &, craignant que S. Guigner, fils de Clyton, Roy d'Hybernie (qui étoit descendu en Bretagne avec 300. compagnons) vint au secours de Maxence, il les mit tous à mort, &, en punition de ce massacre, il perdit son Etat, car il n'eût qu'un fils, nommé Inocus, lequel se fit Prestre; & ainsi, après sa mort, le Royaume parvint à son second frere Meliau, pere de nostre saint Melaire; lequel, ayant regné sept années en grande prosperité, fut traîtreusement tué par son frere Rivodius. Son corps fut enterré en 1'Eglise Cathedrale du Coz-gueaudet, où Dieu fit de grands miracles par son intercession. Il est devotement invoqué en l'Eglise Paroissiale de Plou-miliau, Diocese de Treguer, & Guicmiliau, Diocese de Leon (1).

II. Le tyran Rivode ne se contenta pas d'avoir commis un si abominable fratricide, & privé la Bretagne d'un Prince, le plus vertueux & accomply de son âge; mais, de plus, il s'empara du gouvernement du Royaume & donna une mediocre pension à la Reyne Haurille, veuve du deffunt Roy, sans autre doüaire. Ce tygre ne se contenta encore de ces excés, mais pour se maintenir dans son inique usurpation il crût estre necessaire de tuer saint Melaire, fils unique du feu roy, de peur qu'un jour il ne lui fit comme son frere aîné Theodoric avoit fait à son oncle Maxence. Il avoit continuellement cet exemple recent devant les yeux, qui incitoit sa cruauté naturelle à prévenir le danger qu'il apprehendoit, par la mort de ce jeune Prince; mais, n'ozant y proceder à decouvert, crainte des Barons qui estoient offensez de la mort du deffunt Roy, il convoqua les Estats en la ville d'Occismor (c'est Saint-Paul de Leon) & fit tous ses efforts pour tascher à avoir la garde du jeune Prince; mais la Reyne Haurille s'y opposa, & fut confirmée par l'assemblée tutrice du Prince Melaire, son fils. Ce dessein n'ayant reüssi au tyran, il corrompit les gouverneurs dudit Prince & leur promit monts & merveilles, pourveu qu'ils le fissent mourir; &, afin de le faire plus couvertement, il leur donna du poison, lequel ils meslerent dans son breuvage & en saupoudrerent ses viandes par plusieurs fois; mais le Saint, faisant le signe de la Croix dessus, fit paroistre le poison aux yeux de toute l'assistance, dont les conspirateurs resterent confus, &, reconnaissans leur faute, se jetterent à ses pieds, lui demanderent pardon et lui promirent fidelité à l'avenir; le Saint les releva, & leur pardonna de bon coeur.

III. Le tyran Rivode ayant entendu que le venin n'avoit operé aucun effet sur son néveu, & que les meurtriers qu'il avoit mis en besongne s'estoient reconnûs & convertis, leva tout à fait le masque, & se resolut, à quelque prix que ce fut, d'avoir sa vie; il fit armer une compagnie de gens déterminez, qu'il avoit prés de soy, & leur commanda d'aller assaillir le chasteau où demeuroient, d'ordinaire, le jeune Prince Melaire et sa Mere; & que, sans faute, ils lui apportassent sa teste. Les soldats y allerent, &, ayans frappé à la porte du chasteau, demanderent à parler au Prince; mais, si-tost que la porte eut esté ouverte, ils se saisirent du portier & des clefs, & monterent dans la chambre du Prince, auquel ils declarerent la commission qu'ils avoient de son oncle Rivode, &, partant, qu'il se disposast à endurer la mort. Le Saint jeune Prince leur repondit courageusement: Qu'il y avoit long-temps qu'il se disposoit à experimenter la cruauté de son oncle, lequel, ayant massacré son propre frere, n'epargneroit son néveu, & ayant attenté à sa vie, si souvent par poison, qu'il se doutoit bien qu'il y eut enfin procedé de vive force; que, quant à ce qui concernoit le Royaume, qui estoit le motif qui poussoit son oncle à le faire mourir, Dieu luy avoit tellement osté l'affection des choses du monde, qu'il ne cherchoit autre Royaume que celuy du Ciel, lequel il attendoit de la misericorde de Dieu. Ayant dit cela, il les pria de luy permettre de se confesser à son Aumônier, avec lequel il entra dans sa Chapelle, dont la porte fut gardée par une bande de satellites.

IV. Pendant qu'il se confessoit, sa mere, la Reyne Haurille, se jetta aux pieds du capitaine de cette compagnie, puis, le conduisit en sa chambre & luy ouvrit son cabinet, le priant de prendre autant qu'il luy plairoit de ses bagues, joyaux & argent, pourveu, seulement, qu'il sauvast la vie à ce pauvre Prince innocent. Ces tygres s'amolirent aux larmes de cette mere éplorée, & ayans tenu conseil par entr'eux, le capitaine leur dit: Compagnons, ce que pretend le Prince Rivode, nostre maistre, en cette barbare execution, c'est de s'asseurer du gouvernement du Royaume, en faisant mourir ce jeune Prince, qui seul le lui peut contester; faisons donc autrement, & le mettons en tel estat, qu'il ne puisse, ny mettre la main à l'épée, ny monter à cheval, ny faire aucune action de guerre, & ainsi nous asseurerons le Royaume à nostre maistre, & ne nous rendrons coupables d'un si detestable assassinat. Cét avis fut suivy de tous, & fut resolu qu'on luy couperoit la main droite & le pied gauche. Ayant achevé sa confession & fait ses prieres, il sortit de sa Chapelle & entra dans la salle, &, ayant baisé sa mere & dit adieu à ses serviteurs, il se depoüilla & dit aux soldats: Enfans, executez sur moy la commission que votre maistre vous a donnée; je le lui pardonne de bon coeur & à vous aussi. Disant cela, il se mit à genoux, croyant qu'on le dût poignarder, ou luy trancher la teste; mais les soldats l'empoignerent, &, l'ayant lié sur un banc, luy couperent les membres susdits, sans qu'il dit mot, pendant ce cruel tourment, que le doux Nom de Jesus. Après cette barbare execution, les satellites se retirerent devers leur maistre, & luy presenterent ces membres inutiles, dont il fut fort marry de ce qu'ils ne l'avoient tué tout à fait.

V. Cet acte, ayant esté sceu par le Païs, scandaliza grandement tout le peuple, qui detestoit la barbarie de ce tyran & se disposoit à luy courir sus; partant, pour prevenir sa ruïne & la revolte generale de son Estat, il convoqua ses Estats en la Ville de Karhaix, où, en pleine assemblée, il desavoüa ce qui avoit esté commis sur la personne de son néveu, consentant qu'on fit punition exemplaire de ceux qui avoient commis le crime; requeroit au reste que, puisque son néveu estoit incapable de regner, estant estropié de pieds & de mains, ils le reconnûssent & reçûssent pour leur Roy, comme le prochain heritier & celuy qui seul restoit du sang de Daniël Drem-Rutz; demandoit, en outre, la garde de son néveu, lequel il entretiendroit en sa cour & s'obligeroit à le representer aux Estats, toutesfois & quantes qu'il en seroit requis. Il eut beau plastrer son forfait & tascher à l'excuser, toute l'assemblée connût assez sa malice & ne voulut consentir qu'il eût la garde de son néveu, le Prince Melaire, mais luy donnerent pour tuteur l'Evêque de Cornouaille & le Comte Kyoltanus, lesquels se chargerent de luy & s'obligerent de repondre de sa personne. Le tyran, ayant sçeu la resolution des Estats, touchant la garde du jeune Prince, & le refus précis qu'on luy en avoit fait, en fut extrêmément courroucé, & se mit en devoir de le faire enlever; mais on y avoit donné ordre, & il fut rendu en la ville de Kemper-Corentin & delivré à l'Evesque de Cornoüaille.

VI. Ayant esté guery de ses blesseures, on luy fit un pied d'airain & une main d'argent, desquels il se servoit aussi-bien que si c'eussent esté ses membres naturels; manioit les armes de sa main d'argent, aussi dextrément que si elle eut esté de chair & d'os; &, ce qui estoit plus admirable, l'un & l'autre croissoit, à mesure que les autres parties de son corps croissaient aussi. Pendant que S. Melaire fut en la maison de l'Evesque de Cornoüaille, il s'adonna à l'estude de l'Ecriture Sainte, à l'Oraison & Contemplation des choses Celestes, sans se méler aucunement du monde. Le Comte Rivode, son Oncle, ne pouvant oublier le refus que les Estats luy avoient fait de le reconnoistre & recevoir pour Roi, & que son néveu, qu'il pensoit estre estropié, se servoit fort bien de ses membres empruntez, jugea que le peuple l'affectionnait, & ne vouloit autre Roy que luy, &, voyant qu'il s'en alloit majeur, il craignoit qu'on ne luy ostast le gouvernement pour couronner S. Melaire; &, pour divertir ce coup, il se résolut, de rechef, de le faire tuer par le moyen du Comte Kyoltanus, qui l'avoit en garde. Il manda un jour ce Comte, & luy ayant fait bonne chere, il le mena dans son cabinet & luy ouvrit son dessein, luy fit offre d'une bonne somme d'argent, s'il vouloit tuer le Prince Melaire qu'il avoit chez luy, & que, pour recompense de ce service, il le feroit le premier de sa Cour & luy donneroit toutes les terres qu'il pourroit decouvrir de dessus la prochaine montagne. Ce miserable, aveuglé de sa convoitise, prît goust aux offres de Rivode, & promit de luy lever cette épine, & dépescher le Prince.

VII. Estant arrivé au logis, il tira à part sa femme, nommée Rarisia, & luy raconta tout ce que le prince Rivode luy avoit dit & les offres qu'il luy avait faites, s'il vouloit tuer S. Melaire. Cette femme, autant ambitieuse qu'avaricieuse, ayant entendu parler des honneurs & des biens que te tyran leur offroit, conseilla son mary d'accepter ces offres & d'executer hardiment ce qu'il avoit promis; que c'estoit le vray moyen de se mettre à jamais à leur aise & à l'abry de la faveur du Prince Rivode, qui se tiendroit leur obligé, toute sa vie. Le conseil de sa femme le confirma davantage en son dessein; mais, pour faire joüer son ressort avec plus de seureté, il alla consulter le president, ou juge souverain du Païs, lequel, connivant aux passions du Prince Rivode, au lieu de le divertir d'une resolution si barbare & luy faire voir l'injustice de ce procedé, le pressa de joüer son coup au plûtost, puisque, de la mort de cét homme, dependoit le repos de l'Estat & sa propre fortune & l'avancement de sa maison. Kyoltanus s'en retourna chez soy, bien resolu & confirmé en son entreprise, &, de peur que le Saint jeune homme se doutast de son dessein, il luy faisait des caresses & cheres extraordinaires. Toutesfois, Dieu, qui tient compte de tous les cheveux de ses éleus, un seul desquels ne tombe sans sa permission, le delivra de ses mains pour ce coup: car Kyoltan estant allé à la cour de Rivode pour deliberer des moyens pour commettre ce massacre, Dieu toucha le coeur à Rarisia, laquelle, considerant le malheureux conseil qu'elle avoit donné à son mary, detesta l'avarice & l'ambition qui en avoit esté cause, & ayant demandé pardon à S. Melaire, luy decouvrit la trahison qui se brassoit contre sa vie, le conjurant, pour l'amour de Dieu, de se retirer chez quelques uns de ses amis, avant que son mary arrivast au logis.

VIII. S. Melaire resta bien estonné de cette nouvelle & remercia Dieu de l'avoir preservé des embusches de ses ennemis, &, ayant remercié Rarisia de cét avis, il suivit son conseil & se retira chez le Comte Budicius, ou Budich, qui demeuroit en un sien chasteau, en Treguer, prés la ville de Kerfeunteun (à present dite Land-meur), duquel il fut trés-bien recueilly; &, ayant entendu la trahison du Comte Kyoltan & la conspiration de Rivode, il le pria de demeurer en son chasteau, offrant de le garantir des embusches de ses ennemis. S. Melaire, remercia Budich de cette offre & accepta de demeurer chez luy, & fit bastir un petit pavillon, prés la chapelle du chasteau, où il se retira, vivant plûtost en Hermite, ou Moyne solitaire, qu'en Prince mondain. Kyoltan, arrivé au logis & ne trouvant S. Melaire, fut bien étonné; il le manda à Rivode, qui fut extrêmement fasché; &, sçachant qu'il s'estoit retiré chez le Comte Budich, il en fit avertir Kyoltan, qui reprit ses brizées & commença à tramer de nouvelles trahisons. Il feignit le repentant & s'en vint à l'Hermitage du Saint, assisté de son fils Justin & de deux autres garnemens, &, d'abord, se jetta à ses pieds, versant des larmes feintes, avoüant sa lascheté d'avoir consenty à un acte si detestable, & protestant qu'il s'en repentoit de tout son coeur, & qu'il endureroit plûtost mille morts, que d'executer telle cruauté; enfin, il joüa si bien son personnage, que le Saint le releva de terre et luy pardonna la faute commise; mais de s'en retourner chez luy, il ne le voulut pas; seulement, il l'alla reconduire jusques dans la ville de Kerfeunteun.

IX. Le traistre Kyoltanus, jugeant que, si sa proye luy eschapoit à ce coup, il ne la pourroit pas aisément attraper, se resolut de faire son coup; &, étant dans la ville de Kerfeunteun, il pria le Saint de prendre le dîné en son Hôtellerie, puisqu'il ne vouloit s'en retourner en sa maison; S. Melaire s'y accorda & dîna avec eux; puis, étant sur le point de prendre congé pour se retirer, les assassinateurs le firent retirer dans une chambre, comme pour luy dire quelque chose à part; &, comme Kyoltanus parloit à luy, il fit signe à son fils Justin, lequel, tirant son épée, en déchargea par derriere, un grand coup sur la teste du Saint, lequel coup le coucha par terre, &, levant les mains & les yeux au Ciel, recommanda son Ame à Dieu & pria pour ses meurtriers, lesquels l'acheverent, &, luy ayant coupé la teste, la mirent en un sac de cuir; &, s'étans sauvez par une fenestre, se retirerent hors la ville & ne cesserent de galoper, qu'ils ne fussent arrivez chez Rivode, auquel Kyoltan presenta la teste de saint Melaire toute sanglante, le sommant de luy tenir promesse. Cependant, ceux de la suite de saint Melaire, voyans qu'il tardoit à descendre, monterent & fraperent à la porte, croyans qu'il fut en conference de quelque affaire; mais personne ne leur répondant rien, ils enfoncerent la porte, lors trouverent le tronc de leur maistre tout soüillé en son sang, & dans la cour fut trouvé Justin, l'un de ses assassinateurs, lequel, ayant voulu sauter par la fenestre pour se sauver comme les autres, s'étoit rompu le col & estoit demeuré sur la place, tenant son espée toute teinte de sang.

X. Le Comte Budich, ayant esté averty de ce desastre, s'en vint à Kerfeunteun, fit lever le saint Corps, l'embaumer & le porter en la Chapelle de son château, attendant les préparatifs pour ses funerailles; tous les Barons & Prélats se rendirent à Kerfeunteun pour conduire le Corps en l'Eglise Cathedrale de Lexobie, où on le devoit ensevelir, prés de ses ancestres; mais Dieu en disposa tout autrement: car le corps, ayant esté mis sur un chariot, couvert de velours noir, tiré de six chevaux blancs, au lieu de suivre le chemin du Coz-Gueaudet, les chevaux le traînerent en la ville de Kerfeunteun & s'arresterent au milieu de la grande place, où le chariot se rompit & le corps se trouva à plate terre, dont il fut impossible de le remuer. Par ce miracle, on connût bien que Dieu vouloit qu'il fut enterré en ce lieu; par quoy l'Archevesque de Dol le benit, & le S. corps fut mis en un sepulchre élevé; &, depuis, a esté édifiée, par dessus, une belle Eglise, dediée à Dieu, sous le nom & invocation de S. Melaire, par les merites duquel Dieu a fait grand nombre de miracles. Son chef fut recouvert par l'Evêque de Cornoüaille, qui le mit au Trésor de sa Cathedrale, où il est reveremment conservé, comme precieuse Relique; & son corps, ayant esté levé de terre, fut mis en un coffre de pierre de grain, qu'on voit elevé par dessus le grand Autel, en l'Eglise Doyennale & Parrochiale de saint Melaire de Land-meur, Diocese de Dol, és enclaves de Treguer.

XI. Cét assassinat ne resta pas impuny, car Kyoltanus, ayant présenté la teste de S. Melaire au tyran Rivode, monta sur la montagne prochaine, pour contempler les terres qui luy avaient esté promises; mais, si-tôt qu'il eut levé la veuë pour les regarder, les yeux luy tomberent de la teste, &, peu après, il mourut miserablement; quant à Rivode, il devint furieux & enragé, & mourut, le troisième jour de sa maladie, sans avoir joüy des Estats qu'il avoit tant desirés.

Cette vie a esté par nous recueillie des Histoires anciennes de Bretagne, Imprimées et manuscrites; des anciens Legendaires manuscrits de Leon et Cornoüaille et de l'Eglise Doyennale de S. Melar de Land-Meur, d'où la prit Noble et Discret M.re Yves Arrel, sieur de Coatmen, grand-Vicaire de Dol, és enclaves des trois Eveschez de Basse Bretagne, Doyen de Land-Meur et Prieur de Kernitroun, qui en a fait un livre, Imprimé à Morlaix par Georges Allienne, l'an 1627, et des memoires M.SS. du sieur de l'Auberdiere Bridon; les Breviaires anciens de Leon et Cornoüaille en ont l'Hist. en 9 Leçons.

Frère Albert Le Grand
Religieux, Prêtre de l'Ordre des Frères Prêcheurs de Morlaix
Vie des Saints de la Bretagne Armorique
1636

Notes de l'édition de 1901:

(1) Et à Plonevez-Porzay, diocèse de Cornouaille, ainsi qu'à Pluméliau, diocèse de Vannes. A.-M. T.