Les deux verrières authentiques de St-Guinal de 1515-17 et l'atelier Le Sodec
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- | <i>Où il est question de vitraux bien conservés depuis leur élévation dans l'église paroissiale d'Ergué-Gabéric dans les années 1516.</i> | + | <i>Où il est question de deux vitraux bien conservés depuis leur élévation dans l'église paroissiale d'Ergué-Gabéric en 1515-1517.</i> |
- | Les éléments de l'article sont basés sur les études et documents suivants : l'inventaire « <i>Corpus Vitrearum, les vitraux de Bretagne</i> » de Françoise Gatouillat et Michel Hérold, la thèse de Roger Barrié « <i>Etude sur le vitrail en Cornouaille au 16e siècle, Plogonnec et un groupe d'églises de l'ancien diocèse de Quimper</i> » (1978), l'étude de Jean-Yves Cordier <ref name="JYCordier">{{PR-JYCordier}}</ref> sur les verrières des peintres vitriers Le Sodec sur son site Internet [http://www.lavieb-aile.com/article-les-vitraux-anciens-de-l-eglise-d-ergue-gaberic-123229458.html http://www.lavieb-aile.com], l'article « <i>Une famille de peintres vitriers cornouaillais du XVIe siècle</i> » de Jean-Pierre Le Bihan sur son site blog [http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-3062028.html http://jeanpierrelebihan.over-blog.com]. | + | Les éléments de l'article sont basés sur l'inventaire « <i>Corpus Vitrearum, les vitraux de Bretagne</i> » de Françoise Gatouillat et Michel Hérold, la thèse de Roger Barrié « <i>Etude sur le vitrail en Cornouaille au 16e siècle, Plogonnec et un groupe d'églises de l'ancien diocèse de Quimper</i> » (1978), l'étude de Jean-Yves Cordier <ref name="JYCordier">{{PR-JYCordier}}</ref> sur les verrières des peintres vitriers Le Sodec sur son site Internet [http://www.lavieb-aile.com/article-les-vitraux-anciens-de-l-eglise-d-ergue-gaberic-123229458.html http://www.lavieb-aile.com], et enfin sur l'article « <i>Une famille de peintres vitriers cornouaillais du XVIe siècle</i> » de Jean-Pierre Le Bihan sur son blog [http://jeanpierrelebihan.over-blog.com/article-3062028.html http://jeanpierrelebihan.over-blog.com]. |
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+ | Nota : dans le prochain bulletin de la Société Archéologique du Finistère, un article d'Hervé Quéinnec sera publié sur la verrière de l'Arbre de Jessé de Kerfeunteun, oeuvre aussi signée Le Sodec. | ||
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- | Autres articles : {{Tpg|GATOUILLAT et HÉROLD - Corpus Vitrearum, les vitraux de Bretagne}}{{Tpg|BARRIÉ Roger - Etude sur le vitrail en Cornouaille au 16e siècle}}{{Tpg|La maîtresse-vitre de la Passion de l'église St-Guinal}}{{Tpg|1516 - Inscription millésime en minuscules gothiques sur le vitrail de St-Guinal}}{{Tpg|La pierre tombale à enfeu des Liziart conservée au Cleuyou}} | + | Autres articles : {{Tpg|GATOUILLAT et HÉROLD - Corpus Vitrearum, les vitraux de Bretagne}}{{Tpg|BARRIÉ Roger - Etude sur le vitrail en Cornouaille au 16e siècle}}{{Tpg|La maîtresse-vitre de la Passion de l'église St-Guinal}}{{Tpg|La Nativité de la maîtresse-vitre de l'église Saint-Guinal}}{{Tpg|1516 - Inscription millésime en minuscules gothiques sur le vitrail de St-Guinal}}{{Tpg|La pierre tombale à enfeu des Liziart conservée au Cleuyou}} |
==Présentation== | ==Présentation== | ||
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- | L'authenticité des deux anciennes verrières de l'église paroissiale d'Ergué-Gabéric est due à leur datation du 16e siècle et de la préservation de la majeure partie des ajours d'origine. | + | L'authenticité des deux anciennes verrières de l'église paroissiale d'Ergué-Gabéric est due à leur ancienneté, du début du XVIe siècle, et de la préservation de la majeure partie des ajours d'origine. Ces deux vitraux font partie de la rétrospective de Jean-Yves Cordier des 16 œuvres attribuées ou attribuables aux peintres vitriers cornouaillais Le Sodec. |
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+ | L'analyse technique et description picturale de ces vitraux sur les thèmes de la Vie du Christ, de la Vierge ou d'Arbre de Jessé ont fait l'objet en 1978 d'une thèse très étayée par Roger Barrié. | ||
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+ | Ces travaux ont été résumés et complétés en 2005 dans l'inventaire « <i>Corpus Vitraerum</i> » des Vitraux de Bretagne de Françoise Gatouillat et Michel Hérold qui notent, pour l'église paroissiale d'Ergué-Gabéric, qu'il faudrait aussi inclure la petite verrière placée au sud de la maîtresse-vitre, car elle est aussi ancienne et très probablement livrée aussi à la fondation de l'église St-Guinal dans les années 1515-1517. | ||
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+ | En effet, omise par Roger Barrié dans sa thèse, elle représente le couple de donateurs nobles d'Ergué-Gabéric, François Liziart et Marguerite de Lanros (en médaillon sur le photo-montage ci-contre). Ces derniers résidaient dans leur petit manoir de Kergonan entre 1481 et 1540. | ||
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+ | Quant au maître verrier présumé du 16e siècle, Jean-Pierre Le Bihan, intervenu sur place pour l'entretien de la maîtresse-vitre de St-Guinal, confirme les rapprochements thématiques des cartons des verrières étudiées, et ajoute qu'il constate aussi, même pour les vitraux non signés, une fréquence importante d'inscriptions similaires indéchiffrables avec des groupes de 3 lettres, marquées à Ergué-Gabéric par une double combinaison SVOE (SVO ET VOE). | ||
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+ | La généalogie des Sodec se transmettant leur atelier familial de Quimper est ténue, mais on note au moins deux prénoms : Olivier et Laurent. Roger Barrié avance l'hypothèse qu'Olivier a été le maître d'oeuvre des premières Vie du Christ, dont celle de St-Guinal, et que l'Arbre de Jessé de Kerfeunteun est une réalisation collective d'Olivier et Laurent, ce dernier répliquant ensuite le style Renaissance. Il mentionne aussi un Gilles Le Sodec pour un vitrail destiné à Brasparts. Et pour les décennies précédentes au 15e siècle, il signale un Sodec exerçant à Nantes, ville qui pourrait être la provenance familiale des vitriers quimpérois. | ||
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Dans cette église construite au début du XVIe siècle, la maîtresse-vitre et sa voisine au sud conservent leurs vitraux d'origine. Les lancettes de la fenêtre principale comprennent douze scènes de la Vie du christ de belle qualité, datées en chiffres romains de 1516 - ou 1517, si le dernier caractère est caché par un plomb. Ce chronogramme contribue à situer des verrières qui présentent avec celle-ci des rapports de cartons, à Penmarc'h, à Plogonnec et à Guengat, ou d'autres de facture analogue, comme celle de Tréméoc. Toutes aident à définir l'oeuvre d'un atelier fort actif à Quimper au cours du premier tiers du XVIe siècle, probablement celui de Laurent et Olivier Le Sodec. | Dans cette église construite au début du XVIe siècle, la maîtresse-vitre et sa voisine au sud conservent leurs vitraux d'origine. Les lancettes de la fenêtre principale comprennent douze scènes de la Vie du christ de belle qualité, datées en chiffres romains de 1516 - ou 1517, si le dernier caractère est caché par un plomb. Ce chronogramme contribue à situer des verrières qui présentent avec celle-ci des rapports de cartons, à Penmarc'h, à Plogonnec et à Guengat, ou d'autres de facture analogue, comme celle de Tréméoc. Toutes aident à définir l'oeuvre d'un atelier fort actif à Quimper au cours du premier tiers du XVIe siècle, probablement celui de Laurent et Olivier Le Sodec. | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
+ | Baie o (MH I) | ||
+ | <br><i>1516 ou 1517</i> | ||
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+ | 4 lancettes trilobées (3 registres), tympan à 2 grandes fleurs de lys (14 ajours). H. 6,60 m - L. 2,70 m. Verrière de la Vie du Christ, de son Enfance à sa Passion ; 12 scènes présentées devant des damas de couleurs variées ou des paysages, surmontées de petits dais Renaissance. Au bas des lancettes, socle architectural à motifs courbes, orné de putti en partie d'origine ; inscription sur un cartouche à droite : <i>CESTE VICTRE FUT FECTE L'AN MIL V<sup>CC</sup> XVJ [...] et // POUR LORS FABRIQUE.</i> ... | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
+ | Baie 2 | ||
+ | <br><i>Vers 1515 ?</i> | ||
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+ | 2 lancettes et tympan en forme de fleur de lys. H. 1,70 m - L. 1,20 m. Lancettes : un couple de donateurs agenouillés devant des tentures damassées galonnées, présenté par ses saints patrons, sous un lourd entablement percé d'oculi où apparaissent des masques grotesques, encadrés de culots avec deux putti. À gauche, un chevalier en cotte armoriée « d'or à trois croissants de gueules », identifié comme François Liziart de Kergonan ; derrière lui, saint François d'Assise stigmatisé, le Christ séraphique placé entre les lancettes, à la base du lys qui forme le réseau du tympan (assez bien conservé ; nimbe du saint vert gravé de pastilles ; pièces de la coule du saint et du damas du fond restaurées). En vis à vis, la donatrice présentée par sainte Marguerite (jupe armoriée complétée, armes de l'époux seules conservées ; restauré : mains de la sainte et de la donatrice, pièces de drapés et du linteau architectural. Tympan (vers 1850) : emblème du Sacré-Cœur au sommet ; ajours inférieurs : écus de fantaisie ; pièces d'origine dans les motifs végétaux de leurs chapeaux de triomphe. | ||
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{{Citation}} | {{Citation}} | ||
+ | III À LA RECHERCHE D'UNE IDENTITÉ STYLISTIQUE | ||
+ | 1) Tendances baroques, p. 57 | ||
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+ | Dès la fin du XVe siècle, avec une élévation de 13 m, Kerdévot est un édifice hors du commun, comme le chœur de Saint-Michel de Quimperlé du même atelier de Saint-Michel de Quimperlé du même atelier et c'est bien cette illusion de hauteur qu'a éprouvée Léon Pallustre devant Penmarch et que cherchent à donner les chevets d'Ergué-Gabéric et de Plogonnec vers 1510. A l'intérieur, la lumière abondante de la maîtresse vitre et des grandes fenêtres du chevet fait vibrer ces volumes et accuse leur discontinuité, adoucie cependant par l'éclairage indirect provenant la plupart du temps du bas-côté méridional. | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
+ | III LA TECHNIQUE | ||
+ | <br>b. La mise en oeuvre, p. 84 | ||
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+ | Un décennie plus tard environ, l'Arbre de Jessé de Kerfeunteun renoue avec la qualité technique de Penmarc'h. L'application plus ou moins grande de la mise en oeuvre ; il est certain que la grande verrière de Penmarc'h a été une oeuvre de prestige, commanditée par Charles Jégou et par les barons et exécutée comme telle ... ; les verrières de Guengat, Ergué-Gabéric et Plogonnec occupent une position intermédiaire entre ces deux œuvres tant du point de vue des commanditaires que de la destination de l'oeuvre, et apparaissent donc d'une bonne exécution technique. | ||
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+ | Enfin la gravure du verre est absente à Lanvénégen, à Ergué-Gabéric et à peine représentée à Plogonnec ... La rareté du procédé marque plus une désaffection progressive qu'une impuissance technique de la part de l'atelier d'Olivier Le Sodec ... | ||
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+ | Le problème est identique pour les inscriptions montées en chef-d'oeuvre : alors que la vitre de Locronan en montre plusieurs exemples, alors que dans le saint Adrien de la baie 110 au transept nord de Quimper les incrustations se mêlent aux gravures, le procédé est soit réservé aux armoiries, soit timidement employé dans la Nativité d'Ergué-Gabéric. C'est donc tout à l'honneur que notre atelier, celui probablement d'Olivier Le Sodec qui n'a pas le génie des Le Prince pour transcender la technique, de s'en tenir presque uniquement aux seules ressources du métier pictural. | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
+ | IV - LE STYLE | ||
+ | <br>2) Les composantes du style, p. 92 | ||
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+ | Mais le style de l'atelier cornouaillais, à la différence de celui du grand maître (Arnoult de Nimègue), trouve vite ses limites comme si Olivier Le Sodec, artiste bas-breton qui, d'après notre lecture (cf. catalogue, p. 10, p. 12, p. 69), a signé le vitrail de Plogonnec, avait fait son apprentissage dans les ateliers de Rouen, ce qui est fort plausible. | ||
+ | {{FinCitation}} | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
+ | CONCLUSION, p. 154 | ||
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+ | Sur cet atelier nous ne savons que peu de choses, la Passion de Plogonnec est signée Olivier et la Vierge, du tympan, plus tardive, Sodec ; le vitrail de Kerfeunteun porte les noms d'Olivier Le Sodec, Laurent Le Sodec et de Robin ; ces deux derniers noms réapparaissent dans la Transfiguration de Plogonnec. Laurent Le Sodec est cité dans les comptes de la cathédrale de Quimper ; en 1514, il peint les inscriptions des murs de l'ossuaire nouvellement construit. Enfin un autre Le Sodec, Gilles, passe contrat avec Charles de la Marche en 1543 pour exécuter un vitrail, malheureusement disparu, destiné à l'église de Brasparts selon un montant de 64 livres. D'olivier à Gilles, il s'agit bien d'une dynastie de peintres vitriers quimpérois et il est tentant de spéculer sur des attributions en considérant l'évolution des styles et les diverses "mains" : les Vies du Christ seraient plutôt d'Olivier ; le vitrail de Kerfeunteun une sorte d'oeuvre collective avant le style Renaissance de la maturité de Laurent et Robin ; enfin, on accorderait volontiers les vitraux de Saint-Théleau ou le Jugement Dernier de Trégourez à Gilles vers 1550. La mention d'un Le Sodec à Nantes, réparant en 1480 la vitre de saint Nicolas pourrait indiquer la provenance de cet atelier familial. Le vitrail de Cornouaille serait ainsi relié au milieu nantais dont l'activité, dans la seconde moitié du XVe siècle, paraît avoir été capitale pour les arts picturaux de l'Ouest. Plus généralement, ce serait une preuve de la cohérence de la vie artistique du duché en liaison avec la Normandie comme avec les pays de Loire et favorisé par l'embellie du début du XVIe siècle. | ||
+ | {{FinCitation}} | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
+ | PLOGONNEc, Eglise Saint-Thurien | ||
+ | <br>Scène B2 : Descente de Croix. Annexe p. 10 | ||
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+ | Le galon de la demi-manche droite de Nicodème porte une série de lettres : "OLIERAV" qui est probablement une signature, Olivier Le ... comme à Kerfeunteun (catalogue, p. 69). | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
+ | PLOGONNEc, Eglise Saint-Thurien | ||
+ | <br>Tympan. Vierge à l'enfant. Annexe p. 12 | ||
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+ | Les galons du manteau de la Vierge portent deux inscriptions inédites, en capitales romaines : "XEALOLODEG SOVO?VRAEVEMSOENR" où le N est dessiné à l'envers ; puis "VERFOVRON...". Dans la première série, se détache le nom de Sodeg ou Sodec, patronyme d'une dynastie connue de peintres verriers quimpérois ; les deux lettres précédentes, OL, pourraient être soit l'abréviation d'Olivier soit les initiales d'Olivier Le Sodec, nom que l'on relève sur le vitrail de Kerfeunteun. | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
II. UN GROUPE D'EGLISES PAROISSIALES | II. UN GROUPE D'EGLISES PAROISSIALES | ||
- | 3) Ergué-Gabéric | + | 3) Ergué-Gabéric Annexe pp 14-22 |
Il est certain que le chevet d'Ergué-Gabéric fut réalisé par un atelier individualisé par un sens de la décoration différent de celui qu'avait l'atelier qui édifia Plogonnec, Penmarc'h et Guengat ; de plus, il semble se garder plus facilement de la séduction du plein cintre et affirmer la pureté du tiers point, alors que l'autre atelier a tendance à surbaisser ses arcs. Mais le principe d'organisation architecturale demeure, comme en témoigne par exemple le désaxement, ici encore, de la baie centrale en regard du faîte du pignon ; il s'agit bien du choix du parti haut, manifesté à l'extérieur par le caractère monumental du chevet en rapport avec la quantité de lumière nécessaire à l'éclairage indirect des parties inférieures. À cette communauté de choix esthétique qui unirait deux ateliers voisins, ou bien qui pourrait indiquer peut-être qu'un même maître d'oeuvre cornouaillais travailla ici et là avec des collaborateurs différents, notamment des sculpteurs ou que le cahier des charges l'obligea, par économie ou par préférence, à utiliser une autre solution, s'ajoute l'argument épigraphique du vitrail daté des environs de 1516 prouvant que les chevets de ces quatre églises sont bien des œuvres contemporaines édifiées dans le même esprit. | Il est certain que le chevet d'Ergué-Gabéric fut réalisé par un atelier individualisé par un sens de la décoration différent de celui qu'avait l'atelier qui édifia Plogonnec, Penmarc'h et Guengat ; de plus, il semble se garder plus facilement de la séduction du plein cintre et affirmer la pureté du tiers point, alors que l'autre atelier a tendance à surbaisser ses arcs. Mais le principe d'organisation architecturale demeure, comme en témoigne par exemple le désaxement, ici encore, de la baie centrale en regard du faîte du pignon ; il s'agit bien du choix du parti haut, manifesté à l'extérieur par le caractère monumental du chevet en rapport avec la quantité de lumière nécessaire à l'éclairage indirect des parties inférieures. À cette communauté de choix esthétique qui unirait deux ateliers voisins, ou bien qui pourrait indiquer peut-être qu'un même maître d'oeuvre cornouaillais travailla ici et là avec des collaborateurs différents, notamment des sculpteurs ou que le cahier des charges l'obligea, par économie ou par préférence, à utiliser une autre solution, s'ajoute l'argument épigraphique du vitrail daté des environs de 1516 prouvant que les chevets de ces quatre églises sont bien des œuvres contemporaines édifiées dans le même esprit. | ||
- | |||
- | Dès la fin du XVe siècle, avec une élévation de 13 m, Kerdévot est un édifice hors du commun, comme le chœur de Saint-Michel de Quimperlé du même atelier de Saint-Michel de Quimperlé du même atelier et c'est bien cette illusion de hauteur qu'a éprouvée Léon Pallustre devant Penmarch et que cherchent à donner les chevets d'Ergué-Gabéric et de Plogonnec vers 1510. A l'intérieur, la lumière abondante de la maîtresse vitre et des grandes fenêtres du chevet fait vibrer ces volumes et accuse leur discontinuité, adoucie cependant par l'éclairage indirect provenant la plupart du temps du bas-côté méridional | ||
{{FinCitation}} | {{FinCitation}} | ||
<br>{{Citation}} | <br>{{Citation}} | ||
ANNEXE -ERGUE-GABERIC - EGLISE SAINT-GUINAL | ANNEXE -ERGUE-GABERIC - EGLISE SAINT-GUINAL | ||
- | <br>BAIE 0 - VIE DU CHRIST, pp 14-22 | + | <br>BAIE 0 - VIE DU CHRIST, Annexe pp 14-15 |
Le chœur de l'austère chevet plat, construit vers 1515, reçoit principalement la lumière par la très haute baie axiale à quatre lancettes surmontée d'un tympan développé, à deux fleurs de lys, presque aussi haut (3 m 20). C'est un cadre formel idéal pour exposer la Vie du Christ découpée en scènes identiques, se déroulant de gauche à droite sur trois registres superposés ; on compte cinq barlotières par lancette. | Le chœur de l'austère chevet plat, construit vers 1515, reçoit principalement la lumière par la très haute baie axiale à quatre lancettes surmontée d'un tympan développé, à deux fleurs de lys, presque aussi haut (3 m 20). C'est un cadre formel idéal pour exposer la Vie du Christ découpée en scènes identiques, se déroulant de gauche à droite sur trois registres superposés ; on compte cinq barlotières par lancette. | ||
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On ne connait que la dernière restauration en date pour cette verrière qui dut être bien entretenue au XVIIIe siècle, comme d'ailleurs tout le mobilier d'après les comptes des fabriciens, et qui dut être restaurée lors de son classement en 1898. | On ne connait que la dernière restauration en date pour cette verrière qui dut être bien entretenue au XVIIIe siècle, comme d'ailleurs tout le mobilier d'après les comptes des fabriciens, et qui dut être restaurée lors de son classement en 1898. | ||
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+ | <big><u>Thèse BARRIÉ Suite</u></big> | ||
- | <br>{{Citation}} | + | {{Citation}} |
- | ELEMENTS D'ARCHITECTURE, p. 18 | + | ELEMENTS D'ARCHITECTURE, Annexe p. 18 |
Dans l'encadrement des scènes, on retrouve de nombreux motifs Renaissance rencontrés à Plogonnec, constituant des structures identiques ou très voisines, dans le même esprit ornemental. Aux soubrassements des lancettes a et d, les consoles cantonnées de pattes ailées délimitent deux niches creusées dans un stylobates mouluré, des angelots munis d'une cornemuse se dressent dans ces niches à tenture et à pavage régulier. | Dans l'encadrement des scènes, on retrouve de nombreux motifs Renaissance rencontrés à Plogonnec, constituant des structures identiques ou très voisines, dans le même esprit ornemental. Aux soubrassements des lancettes a et d, les consoles cantonnées de pattes ailées délimitent deux niches creusées dans un stylobates mouluré, des angelots munis d'une cornemuse se dressent dans ces niches à tenture et à pavage régulier. | ||
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L'épaisseur excessive du joint en ciment moderne obstrue en partie l'inscription dont la dernière ligne avec le nom du fabricien, discernable encore sur les photographies de 1948, n'a jamais été lue. La lecture la plus honnête est celle d'Abgrall (1916, p. 200) alors que, par la suite, Couffon croit lire 1571 (1952, p. 14), erreur que l'on s'étonne de voir reprise dans un ouvrage récent (1968 Charpy, Waquet). | L'épaisseur excessive du joint en ciment moderne obstrue en partie l'inscription dont la dernière ligne avec le nom du fabricien, discernable encore sur les photographies de 1948, n'a jamais été lue. La lecture la plus honnête est celle d'Abgrall (1916, p. 200) alors que, par la suite, Couffon croit lire 1571 (1952, p. 14), erreur que l'on s'étonne de voir reprise dans un ouvrage récent (1968 Charpy, Waquet). | ||
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- | <big><u>Article de Jean-Pierre Le Bihan</u></big> | + | <br>{{Citation}} |
+ | KERFEUNTEN | ||
+ | <br>Eglise de la Trinité, p. 66 | ||
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+ | Scène a1 : Trinité ... Sur la tunique blanche du Père, on distingue des lettres épaisses, sur plusieurs lignes : "LOR.../SODE.../...R...A.../SODEC", signature de Laurent Le Sodec qui est répêtée sur toute la verrière | ||
+ | {{FinCitation}} | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
+ | KERFEUNTEN | ||
+ | <br>Eglise de la Trinité, p. 69 | ||
+ | |||
+ | Scène b3 : Jéchonias, Joram et le Christ en croix ... Sous le chapeau couronné, Jéchonias porte un bonnet avec cache-oreille sur lequel on lit "OLIERAN" soit, en breton, Olivier Le ..., prénom déjà relevé dans la Passion de Plogonnec. Imberbe, Joram est le plus jeune des rois représentés ici ; son chapeau vert est attaché par une écharpe nouée sous le menton ; sous le galon du camail, on lit nettement "LORAS-AN-SODEC/LOR...SODECSOD", et au bas du menteau, "SALVE.REGINA.MISER". | ||
+ | {{FinCitation}} | ||
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+ | <br><big><u>Article de Jean-Pierre Le Bihan</u></big> | ||
{{Citation}} | {{Citation}} | ||
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{{Citation}} | {{Citation}} | ||
+ | Les vitraux anciens de l'église d'Ergué-Gabéric (29). | ||
+ | |||
+ | La Maîtresse-vitre ou Baie 0. | ||
+ | |||
+ | Mesurant 6,60 m de haut et 2,70 m de large, elle est constituée de quatre lancettes trilobées de 4m sur 0,52 m, organisées par cinq barlotières par lancettes en trois registres et douze scènes, et d'un tympan de 14 ajours de 3,20 m de haut, composant deux fleurs de lys. | ||
+ | |||
+ | Elle est datée grâce à une inscription sur un cartouche à droite : CESTE VICTRE FUT FECTE L'AN MIL VccXVJ [...] et // POUR LORS FABRIQUE. | ||
+ | |||
+ | Classement MH au titre d'objet : 25/07/1898/ | ||
+ | |||
+ | Des Passions bretonnes issues d'un même atelier. | ||
+ | |||
+ | Car cette Passion ressemble par de nombreux points aux Passions ou Vie du Christ de Plogonnec, de Guengat, de Penmarc'h et de Lanvénégen, et provient selon Roger Barrié d'un même atelier, sans-doute celui des quimpérois Laurent et Olivier Le Sodec. La recherche de ces points communs et des différences propres à chaque paroisse rehausse considérablement l'intérêt de son étude. J'ai donc mis en parallèle les panneaux communs aussi souvent que possible. | ||
+ | {{FinCitation}} | ||
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+ | <br>{{Citation}} | ||
VITRAUX - PASSIONS FINISTÉRIENNES. | VITRAUX - PASSIONS FINISTÉRIENNES. | ||
Version actuelle
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Où il est question de deux vitraux bien conservés depuis leur élévation dans l'église paroissiale d'Ergué-Gabéric en 1515-1517. Les éléments de l'article sont basés sur l'inventaire « Corpus Vitrearum, les vitraux de Bretagne » de Françoise Gatouillat et Michel Hérold, la thèse de Roger Barrié « Etude sur le vitrail en Cornouaille au 16e siècle, Plogonnec et un groupe d'églises de l'ancien diocèse de Quimper » (1978), l'étude de Jean-Yves Cordier Nota : dans le prochain bulletin de la Société Archéologique du Finistère, un article d'Hervé Quéinnec sera publié sur la verrière de l'Arbre de Jessé de Kerfeunteun, oeuvre aussi signée Le Sodec. |
Autres articles : « GATOUILLAT et HÉROLD - Corpus Vitrearum, les vitraux de Bretagne » ¤ « BARRIÉ Roger - Etude sur le vitrail en Cornouaille au 16e siècle » ¤ « La maîtresse-vitre de la Passion de l'église St-Guinal » ¤ « La Nativité de la maîtresse-vitre de l'église Saint-Guinal » ¤ « 1516 - Inscription millésime en minuscules gothiques sur le vitrail de St-Guinal » ¤ « La pierre tombale à enfeu des Liziart conservée au Cleuyou » ¤
[modifier] Présentation
L'authenticité des deux anciennes verrières de l'église paroissiale d'Ergué-Gabéric est due à leur ancienneté, du début du XVIe siècle, et de la préservation de la majeure partie des ajours d'origine. Ces deux vitraux font partie de la rétrospective de Jean-Yves Cordier des 16 œuvres attribuées ou attribuables aux peintres vitriers cornouaillais Le Sodec. L'analyse technique et description picturale de ces vitraux sur les thèmes de la Vie du Christ, de la Vierge ou d'Arbre de Jessé ont fait l'objet en 1978 d'une thèse très étayée par Roger Barrié. Ces travaux ont été résumés et complétés en 2005 dans l'inventaire « Corpus Vitraerum » des Vitraux de Bretagne de Françoise Gatouillat et Michel Hérold qui notent, pour l'église paroissiale d'Ergué-Gabéric, qu'il faudrait aussi inclure la petite verrière placée au sud de la maîtresse-vitre, car elle est aussi ancienne et très probablement livrée aussi à la fondation de l'église St-Guinal dans les années 1515-1517. En effet, omise par Roger Barrié dans sa thèse, elle représente le couple de donateurs nobles d'Ergué-Gabéric, François Liziart et Marguerite de Lanros (en médaillon sur le photo-montage ci-contre). Ces derniers résidaient dans leur petit manoir de Kergonan entre 1481 et 1540. Quant au maître verrier présumé du 16e siècle, Jean-Pierre Le Bihan, intervenu sur place pour l'entretien de la maîtresse-vitre de St-Guinal, confirme les rapprochements thématiques des cartons des verrières étudiées, et ajoute qu'il constate aussi, même pour les vitraux non signés, une fréquence importante d'inscriptions similaires indéchiffrables avec des groupes de 3 lettres, marquées à Ergué-Gabéric par une double combinaison SVOE (SVO ET VOE). La généalogie des Sodec se transmettant leur atelier familial de Quimper est ténue, mais on note au moins deux prénoms : Olivier et Laurent. Roger Barrié avance l'hypothèse qu'Olivier a été le maître d'oeuvre des premières Vie du Christ, dont celle de St-Guinal, et que l'Arbre de Jessé de Kerfeunteun est une réalisation collective d'Olivier et Laurent, ce dernier répliquant ensuite le style Renaissance. Il mentionne aussi un Gilles Le Sodec pour un vitrail destiné à Brasparts. Et pour les décennies précédentes au 15e siècle, il signale un Sodec exerçant à Nantes, ville qui pourrait être la provenance familiale des vitriers quimpérois. |
[modifier] Les sources
Corpus Vitraerum de Gatouillat et Hérold
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Thèse BARRIÉ Suite
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[modifier] Iconographie
photos des deux verrières | |||||
[modifier] Annotations
- Jean-Yves Cordier est un passionné du patrimoine finistèrien qui partage ses découvertes sur le site http://www.lavieb-aile.com/. Ayant commencé par de très beaux billets et photos sur la nature, les oiseaux en tous genres, il poursuit sa quête actuellement par des visites de chapelles, où il découvre des éléments méconnus de notre patrimoine, avec une documentation photographique exceptionnelle. [Ref.↑]
Thème de l'article : Patrimoine communal d'Ergué-Gabéric Date de création : décembre 2019 Dernière modification : 8.01.2020 Avancement : [Développé] |