L'assassinat crapuleux d'un casseur de pierres à Niverrot, journaux de 1930-31 - GrandTerrier

L'assassinat crapuleux d'un casseur de pierres à Niverrot, journaux de 1930-31

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Catégorie : Journaux
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§ E.D.F.

Où il est question de casseurs de pierres près de Niverrot et du moulin de Quénéhaye (Elliant), d'un assassinat en plein champ de pommes de terre et du procès en assises d'un jeune domestique qui avait l'intention d'aller tuer sa maîtresse entre Dieppe et Abbeville.

Coupures de presse d'octobre 1930 et janvier-février 1931 : L'Ouest-Eclair [1], La Dépêche de Brest [2], Le Petit Breton [3].

Autres lectures : « GILDAS Louis - Faits divers en Bretagne - 2e saison » ¤ « Village du Niverrot » ¤ « Divers faits divers à Ergué-Gabéric, journaux locaux 1930 » ¤ 

Casseurs de pierres de Courbet
Casseurs de pierres de Courbet

1 Présentation

Cette transcription de procès dans les colonnes de l'Ouest-Eclair [4], de la Dépêche de Brest et du Petit Breton met en lumière la misère de nos campagnes en cette première moitié de 20e siècle, et la violence en est une illustration.

L'accusé Louis-Marie Lizen, natif de Fouesnant de parents miséreux, est domestique pour 200 francs par mois (300 pendant la moisson) dans une ferme de Niverrot, après avoir été ouvrier verrier dans la région rouennaise. En 1930 il tue à coups de houe un casseur de pierres et lui dérobe ses 1660 francs d'économies. Pour commettre son délit il avoue avoir bu un litre de vin rouge et de l'eau-de-vie de cidre. Il est condamné à 15 ans de travaux forcés.

La victime est Fañch (François) Gourmelen. Il a 56 ans et est qualifié de vieillard. Méfiant, il porte ses économies sur lui, dans son veston. Casseur de pierres en charge du remblaiement des routes, il est aussi employé par un meunier comme journalier et ramasseur de pommes de terre. [Etat civil ...]

Les personnes citées à la barre et impliquées de près ou de loin dans cette affaire sont :

  • M Bourbigot, 31 ans, cultivateur à Niverrot.
  • André Tanguy, 14 ans, domestique à Niverrot. Son père était un grand buveur et sa mère épileptique. Orphelin de son père, pupille de l'Assistance publique, renvoyé de l'orphelinat Massé [5]. Quand il était petit, son père l'obligeait à aller mendier son pain. Il est acquitté de l'accusation de complicité du meurtre de Fañch Gourmelen.
  • Jean-Louis Quéméré, meunier à Quénéhaye en Elliant, patron de la victime.
  • Louis Barré, cultivateur à Kerlavian en Elliant.
  • Jean-Marie Rioual, charretier de Trégunc.
  • René Leroux, cultivateur de Kerdévot, et son fils Jean et le jeune Rannou, tous trois chasseurs.
  • Laurent Le Grand, cultivateur à Menez-Kerdévot.
  • Pierre Le Cam, dit "Tambour", domestique à Kergariou en Elliant. Alors qu'il était ivre allongé dans un fossé le jour du pardon de Kerdévot, il est victime de Louis Lizen qui lui dérobe son argent.
  • M. Huitric, cultivateur à Niverrot, hébergeur de la victime.

[conditions des domestiques ...]

[Le verdict] ... [le jury]]

 
Le lieu du crime à Menez-Niverrot, à 150-200 mètres du moulin de Quénéhaye

2 Transcriptions

Les textes transcrits ci-dessous contiennent des paragraphes ( § ) non déployés. Vous pouvez les afficher en un seul clic : § Tout montrer/cacher

Dépêche de Brest du 16.10.1930

Le crime d'Elliant [6]

L'assassin, un ouvrier agricole de 19 ans, a été arrêté, hier, par la brigade mobile.

Sachant que Gourmelen portait toujours ses économes sur lui, il l'a tué à coups de houe pour le voler.

Quimper, 15. - Depuis dimanche, de nombreux groupes de curieux venus des alentours, bravant le mauvais temps et les chemins boueux où l'on enfance jusqu'aux chevilles, sont venus aux abords du moulin de Kernac'hait s'entretenir avec les habitant du lieu de l'horrible crime qui a douloureusement surpris toute la région.

François Gourmelen, la victime, était une physionomie plutôt sympathique. très sobre, il acceptait rarement à boire - il buvait de l'eau - ce qui, à certains points de vue, le faisait passer pour un original dans un pays où l'on ne recule pas devant la bolée. Soit par goût, soit par calcul, Gourmelen évitait les dépenses superflues, étant d'un naturel très économe, ce qui d'ailleurs lui avait permis de mettre de côté de sérieuses économies.

Avant de s'embaucher au service de M. Quéméré, sur les terres du moulin, il s'employait avec deux autres manœuvres à casser du caillou sur la route de Kerdévot à Niverrot et cela depuis trois ou quatre mois. Il ne fit alors, pas plus qu'antérieurement, parler de lui. On ne lui connaissait pas d'ennemis. Les deux dimanches qui ont précédé le crime, il avait mis à profit son repos hebdomadaire pour aller voir sa fille à Rosporden. C'était là l'un des rares déplacements qu'il s'accorait. Au demeurant un brave homme sur la triste fin duquel on se montre unanime dans le pays à s'apitoyer.

§ Comment fut découvert le cadavre …


Ouest Eclair du 17.10.1930

Le crime d'Elliant [6]

L'assassin, un jeune homme de 19 ans, est arrêté

Pendant qu'il accomplissait le crime, un gamin de 14 ans faisait le guet

La somme volée, 1.660 francs, est retrouvée dans un tas de paille.

Quimper, le 15 octobre. - (De notre rédaction). - L'enquête même, autour de l'affaire d'Elliant [6], a abouti ce soir à l'arrestation de deux jeunes gens dont l'un le principal coupable, Jean Lizen, n'a que 19 ans et l'autre, André Tanguy, 14 ans. Les deux arrestations confirment ce que nous avions toujours dit, à savoir qu'il fallait rechercher le ou les coupables parmi les familiers du journalier.

À vrai dire, l'affaire telle qu'elle se présentait à la perspicacité des enquêteurs, gendarmes et inspecteurs de la brigade mobile, constituait malgré les présomptions recueillies comme une énigme difficile à résoudre. Et cependant les investigations comme nous l'avons déjà dit devaient être limitées à un cercle restreint autour de la petite contrée entourant le moulin de Quénéhaye.

Plusieurs piste ssérieuses ont été suivies depuis le premier jour, tant par la brigade mobile que par la gendarmerie. L'une au moins que l'on croyait décisive n'avait pas donné hier les résultats qu'on en escomptait. Mais ce premier échec n'avait pas découragé les policiers et c'est ainsi qu'aujourd'hui ils ont repris leur travail avec plus de persévérance que jamais. Parmi les nombreux témoignages recueillis, il en est qui avait plus ou moins d'importance. Les enquêteurs comme bien on pense ont interrogé tous les habitants de la région susceptibles de leur donner une indication quelconque. Parmi les plus intéressantes, il y avait par exemple celle de M. René Le Roux de Kerdévot, de son fils René et des deux frères Rannou. M. Le Roux et les trois autres chassaient dans l'après-midi du 12 octobre, à 14 heures 55 exactement. Ils se souviennent de l'heure parce que l'un d'eux regarda sa montre à de moment. Ils passèrent dans le champ même où Gourmelen, le journalier, travaillait à arracher des pommes de terre. M. Le Roux demanda à Gourmelen s'il y avait du gibier dans les environs. Celui-ci répondit négativement et les chasseurs prirent à travers champs la direction du village voisin de Niverrot.

Après qu'ils eurent parcouru 200 ou 300 mètres, les deux frères Rannou aperçurent un homme qui se dirigeait vers le champ où se trouvait Gourmelen. Ils semblèrent le reconnaître d'abord pour être un journalier agricole de Niverrot. puis l'un d'eux émit l'idée que ce devait être un domestique d'un village proche. Ils en étaient distants de 300 mètres environ. La taille de l'homme comme son signalement semblaient, en effet, indiquer qu'on avait plutôt affaire à ce dernier, un jeune homme de 19 ans, nommé Lizen.

Ces témoignages des quatre chasseurs étaient, comme nous le disons plus haut, particulièrement précieux. On se souvient, en effet, que M. Le Grand retrouva le cadavre de Gourmelen vers 16 heures et encore chaud. Le coup avait donc été porté entre 14 h 55 et 16 heures et, vraisemblablement, peu après le passage de M. Le Roux et de ses trois compagnons. Le coupable était-il l'homme qui avait été vu, à ce moment, marchant à travers champs dans la direction du lieu où se trouvait le journalier ? Il y avait tout lieu de le croire et c'est vers cette piste surtout que gendarmes et policiers aiguillèrent leurs recherches.

§ Deux pistes abandonnées pour un instant ...

 

Dépêche de Brest du 17.01.1931

Assises du Finistère. Audience du samedi 17 janvier. L'assassinat de François Gourmelen à Ergué-Gabéric.

Louis Lizen est condamné à 15 ans de travaux forcés. André Tanguy est acquitté.

Quimper, 18. - Les débats sont présidés par M. Bertin, conseiller à la Cour d'Appel de Rennes, assisté de MM. Dufour et Durand, juges. M. Lhéritier occupe le siège du ministère public ; M. Michard celui de greffier.

Les faits

L'accusé Louis-Marie Lizen, 19 ans, domestique de ferme chez M. Bourbigot, cultivateur au village de Niverrot, en Ergué-Gabéric, avait travaillé précédemment comme ouvrier verrier à Blangy-sur-Bresle (Seine-Inférieure), où il avait laissé une jeune fille qui était, dit-il, devenue sa maîtresse. Au mois d'août 1930, celle-ci lui écrivit qu'elle était fiancée et que, dès lors, il eut à cesser sa correspondance.

Lizen exhala sa colère devant son patron et devant le jeune André-Marie Tanguy, âgé de 14 ans, comme lui domestique chez M. Bourbigot, et sur lequel il avait pris un certain ascendant, disant à plusieurs reprises que, s'il avait de l'argent, il achèterait un révolver et irait la tuer.

Un jour étant avec Tanguy, il s'arrêta avec un casseur de pierres, François Gourmelen, âgé de 56 ans, qui venait de vendre des cailloux et qui montra à Lizen et à Tanguy la somme de 5 à 600 francs qu'il portait sur lui.

§ Le même jour, Lizen, projetant de voler cet argent ...


Ouest Eclair du 17.01.1931

« Quimper. Aux Assises du Finistère. Le crime de deux vauriens : pendant que l'un faisait le guet, l'autre assommait un vieillard à coups de houe.

Quimper, 17 janvier (de notre rédaction). La dernière audience de la première session des Assises appelle l'affaire suivante :

Louis Lizen, 19 ans, domestique de ferme à Niverrot, en Ergué-Gabéric, est accusé : 1° d'avoir, le 12 octobre 1930, tué un casseur de pierres, François Gourmelen, 56 ans ; 2° d'avoir volé une certaine somme d'argent au préjudice de sa victime et ce, avec préméditation.

André Tanguy, 14 ans, domestique de ferme au même lieu, est accusé de complicité.

Les faits

L'accusé, Louis-Marie Lizen, 19 ans, domestique de ferme chez M. Bourbigot, cultivateur au village de Niverrot, en Ergué-Gabéric, avait travaillé précédemment comme ouvrier verrier à Blangy-sur-Bresle [7] (Seine-Inférieure), où il avait laissé une jeune fille qui était, dit-il, devenue sa maîtresse. Au mois d'août 1930, celle-ci lui écrivit qu'elle était fiancée et que, dès lors, il eut à cesser sa correspondance.

Lizen exhala sa colère devant son patron et devant le jeune André Tanguy, âgé de 14 ans, comme lui domestique chez M. Bourbigot, et sur lequel il avait pris un certain ascendant, disant à plusieurs reprises que s'il avait de l'argent, il achèterait un revolver et irait la tuer.

Un jour étant avec Tanguy, il s'arrêta à parler avec un casseur de pierres, François Gourmelen, âgé de 56 ans, qui venait de vendre des cailloux et qui montra à Lizen et à Tanguy la somme de 5 à 600 francs qu'il portait sur lui.

§ Le même jour, Lizen projetant de voler cet argent ...


Petit Breton du 01.02.1931

Après les assises du Finistère

La Cour d'Assises du Finistère a, au cours de la première session de l'année 1931, qui a été close samedi, jugé deux très graves affaires d'assassinat avec préméditation et vols, qui avaient causé une légitime émotion dans notre département, et tout particulièrement dans le monde agricole, qu'ils intéressaient d'une façon plus spéciale.

[...]

En ce qui concerne l'affaire qui est venue samedi devant la Cour d'Assises, M. Lhéritier, procureur de la République, n'a pas hésité, dans son réquisitoire, à demandé au jury de rendre un verdict impitoyable, c'est-à-dire portant condamnation à mort, pour l'assassin du casseur de pierres François Gourmelen, d'Ergué-Gabéric, le jeune Louis Lizen, âgé de 19 ans, originaire d'Elliant, domestique de ferme, à Niverrot, dans cette commune.

§ La responsabilité de Lizen était, en effet, entière ...

3 Coupures de presse

4 Annotations

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  1. L'Ouest-Éclair est un ancien quotidien régional français, créé par deux Bretons chrétiens d'une sensibilité républicaine et sociale, l'abbé Félix Trochu, prêtre en Ille-et-Vilaine, et Emmanuel Desgrées du Lou, natif de Vannes, commissaire de la Marine, puis avocat. Les ventes décollent après la Première Guerre mondiale et, en 1930, le patron embauche son gendre, Paul Hutin, un Lorrain de 42 ans qui deviendra son gendre. Le journal rayonnait, à ses débuts, sur cinq régions, la Bretagne, la Normandie, l'Anjou, le Maine et le Poitou, comme Journal républicain du matin. En 1940, Paul Hutin, militant antinazi comme sa femme, souhaite que L'Ouest-Eclair ne paraisse pas sous le joug allemand et s'engage dans la Résistance. L'Ouest-Éclair sera interdit à la Libération pour acte de collaboration. Paul Hutin revient à Rennes, à peine libérée, le 4 août 1944 pour créer le Ouest-France. [Ref.↑]
  2. La Dépêche de Brest est lancée le 18 novembre 1886 avec des moyens très limités et succède à l’Union Républicaine du Finistère créée 10 ans plus tôt. Quotidien, il sera même biquotidien durant des périodes d’actualité forte, comme lors de la première guerre mondiale, avec une édition du matin et une édition du soir. Installé rue Jean Macé à Brest (à l’époque rue de la rampe), à l’emplacement des locaux actuels du Télégramme, La Dépêche de Brest poursuivit son évolution jusqu’au 17 août 1944. Ce jour là, en application de la nouvelle réglementation de la Libération, les biens de la Dépêche furent mis sous séquestre. L’ensemble du matériel est alors loué au Télégramme, nouveau titre autorisé par le Comité régional de l’information. [Ref.↑]
  3. Le Petit Breton (1920-1940) hebdomadaire de la Fédération des républicains démocrates du Finistère (Ligue nationale de la démocratie) ["puis" organe du Parti démocrate populaire "puis" organe du Parti démocrate populaire dans le Finistère]. Première année : n° 1 (3 oct. 1920) ; dernière année : n° 1070 (16 juin 1940) - Brest (impr. à Morlaix puis Rennes). [Ref.↑]
  4. Coupure de presse signalée par Mme Hélène Gille-Perrier. [Ref.↑]
  5. Alexandre Massé est un industriel et un inventeur français, né à Quimper le 15 février 1829 et mort le 13 avril 1910 à Plomelin (Finistère). Il est l'auteur d'une invention d'apparence modeste, mais qui est une innovation d'importance mondiale : le bouton de vêtement comportant quatre trous pour une meilleure fixation. Il se retire à Plomelin pour se consacrer à l'aide à l'éducation des orphelins auxquels, n'ayant pas d'enfants, il lègue toute sa fortune. Une fondation à buts sociaux, la Fondation Massé-Trévidy, héritière de la Fondation Massé-Peticuénot créée en 1894 pour gérer l'orphelinat de Quimper, perpétue ses œuvres. [Ref.↑]
  6. Les deux journaux titrent "Le crime d'Elliant" parce que la victime est employé dans un moulin situé sur la commune d'Elliant, mais le champ de ce moulin où a été commis le meurtre sont de l'autre côte de la rivière sur le territoire d'Ergué-Gabéric à proximité du village de Niverrot. [Ref.↑ 6,0 6,1 6,2]
  7. Blangy-sur-Bresle, au coeur de la Vallée de la Bresle, à mi-distance de Dieppe et d'Abbeville, est au centre d’une vallée verrière mondialement connue « La Glass Valley » qui fournit environ 80% des plus beaux flacons de la parfumerie de luxe du monde. [Ref.↑]
  8. Le crime de Gouézec, ou plus exactement de Men-Gleuz-ar-Pont près de Pont-Coblanc, date du 5 jullet 1930 : une jeune fille, une vieille femme et son fils assassinent un vieillard pour le voler. [Ref.↑]


Thème de l'article : Coupures de presse relatant l'histoire et la mémoire d'Ergué-Gabéric

Date de création : janvier 2011    Dernière modification : 31.10.2020    Avancement : Image:Bullgreen.gif [Fignolé]    Source : Ouest-Eclair 1931