Blog 22.07.2017 - GrandTerrier

Blog 22.07.2017

Un article de GrandTerrier.

Jump to: navigation, search
Image:Right.gif Les billets récents du Blog de l'actualité du GrandTerrier

[modifier] Fin de l'Union sacrée en 1919

Billet du 22.07.2017 - Merci à Jean-François Douguet d'avoir présenté ce magnifique entre-filet républicain dans son livre sur la Grande Guerre et à Pierrick Chuto pour avoir relevé cet épisode local dans le contexte de l'opposition "blancs - rouges" très marquée dans notre région cornouaillaise.

L'article du journal « Le Finistère » daté du 15 septembre 1919 rend compte du conflit entre les républicains voulant célébrer une fête commémorative de la Grande Guerre dans l'esprit de l'Union sacrée et le recteur Louis Pennec qui fait interdire le bal au nom de la morale chrétienne.

L'Union sacrée est le nom donné au mouvement de rapprochement politique qui a soudé les Français de toutes tendances politiques ou religieuses lors du déclenchement de la Première Guerre mondiale, et qui est ici mis à mal par les positions antagoniques des clans laîcs et catholiques.

Cette cérémonie patriotique eut lieu le dimanche 9 novembre 1919 à Ergué-Gabéric : « une fête des Poilus organisés par les démobilisés de la commune. Fête réussie en tous points ... ». Sauf le bal qui était prévu pour combler « leur désir d'être à la joie ce jour-là ».

En fait les organisateurs ont demandé naïvement au recteur de venir procéder à une cérémonie religieuse en l'honneur des disparus. Et sa réponse est cinglante : « Le service religieux ne sera célébré qu'à la condition que le bal n'eût pas lieu »

Le recteur va « jusqu'à juger de façon très inconvenante les paroissiennes qui assisteraient au bal ». La formulation est assez volontairement ambiguë pour que le terme d'inconvenance puisse s'appliquer aussi bien au recteur, aux paroissiennes dévergondés ou au bal lui-même.

Le journal républicain remarque en conclusion que le recteur aurait pu être plus flexible du fait que ses trois vicaires (*) ont été mobilisés, et sous-entend en quelque sorte que son intransigeance est due au fait que lui-même personnellement n'a pas connu le front.

Et la conclusion de l'article est plutôt sibylline : « Singulière façon de perpétuer l'union sacrée cimentée au front ! Insister serait cruel ...  »

Quand le recteur Louis Pennec décède en 1943 il aura droit à une nécrologie dithyrambique : « en 1914, recteur à Ergué-Gabéric, et c'est là, qu'en 1935, à l'occasion de ses noces d'or, Monseigneur l'Evêque voulut récompenser sa prudence, sa charité, sa douceur et son zèle sacerdotal, en lui conférant la mosette de doyen honoraire !  ». De l'art de concilier le zèle et la douceur !

 

Quant à la mosette, il s'agit de cet élégant petit manteau couvrant les épaules que l’ecclésiastique peut porter fièrement à titre honorifique.

Image:Right.gif En savoir plus : « Interdiction du bal des poilus et intransigeance du recteur Pennec, Le Finistère 1919 », « Louis Pennec, recteur (1914-1938) »

(*) : Jean-François Douguet donne page 77 les noms des trois vicaires (Corentin Breton, Théophile Madec, François Le Gall) dans un extrait d'interview dans le journal paroissial : « Les vicaires ne tardèrent pas à être mobilisés et le recteur dût seul assurer le service de la paroisse. Monsieur Breton, mobilisé à Quimper, peut quelquefois rendre service pour le ministère dans la paroisse. Monsieur Le Gall, après avoir été réformé, fut successivement auxiliaire à Fouesnant, à Edern, à Morlaix. Monsieur Madec put rarement aider au service de la paroisse en raison de ses obligations militaires. Le bedeau lui-même fut quelquefois mobilisé. »