Blog 11.02.2023 - GrandTerrier

Blog 11.02.2023

Un article de GrandTerrier.

Jump to: navigation, search
Image:Right.gif Les billets récents du Blog de l'actualité du GrandTerrier

[modifier] Majorité matrimoniale en 1893

11.02.2023 - Un fait-divers gabéricois impliquant le jeune boulanger Corentin Le Berre et rapporté par le journal politique républicain Le Finistère.

En cette année 1893 la situation est très tendue localement à Ergué-Gabéric : les élections municipales de l'année précédente, gagnées par la liste conservatrice du maire Hervé Le Roux de Mélennec, sont contestées par les républicains, un prêtre ayant menacé les mauvais électeurs du jugement de Dieu à leur mort. Les élections sont annulées par le Conseil d'Etat, et organisées de nouveau en juin 1893, mais avec le même résultat favorable pour Hervé Le Roux.

Dans ce contexte agité, comme le relate un article du 10 octobre dans le journal « Le Finistère », les services municipaux n'ont pas noté le 25 septembre que, lors de la cérémonie du mariage du jeune boulanger du bourg Corentin Le Berre, le père de ce dernier, n'ayant pas pu faire le déplacement depuis la commune voisine de Coray (où il est journalier agricole), est remplacé par son beau-frère : « Le maire d’Ergué-Gabéric n’eut connaissance du faux que par la rumeur publique. »

Bien qu'il soit majeur, le marié, ainsi que son oncle, sont arrêtés quelques jours après : « Tous deux furent mis sous les verrous, tandis que se lamentait la jeune épousée ». Et pourtant l'oncle, chiffonnier de son état, est réticent au départ : « Le bonhomme n’avait consenti qu’avec peine à jouer le rôle qu’on lui imposait, mais enfin, il y avait consenti, et répondit et signa le vrai père.  »

Après quelques jours emprisonnement, le boulanger sera autorisé à revenir s'occuper de son fournil, car la justice est restée clémente selon l'entrefilet du 12 octobre : « Une ordonnance de non-lieu vient d'être rendue dans une affaire de faux dont nous avons raconté les détails jeudi. Corentin Le Berre et son oncle ont été remis en liberté. »
 

Cette relaxe s'explique sans doute par le fait que le marié a 26 ans révolus et donc atteint la majorité matrimoniale pour pouvoir s'engager dans les liens du mariage sans autorisation de ses parents ou tuteurs. Cette majorité matrimoniale, différente de la majorité civile de 21 ans, est depuis le code civil de 1804 de 25 ans pour les hommes (21 ans pour les femmes qui peuvent convoler librement plus tôt).

Au XIXe siècle, jusqu'en 1907, les jeunes gens ont besoin de ses parents pour se marier, même au-delà de 25 ans : en principe les mariés doivent notifier aux parents le projet par un acte notarié, dit « acte respectueux » ou « acte de respect ». Aujourd'hui c'est plus précoce et bien plus simple : majorité civile et matrimoniale à 18 ans pour tout le monde., nul besoin de faire passer son oncle pour son père.


En savoir plus : « Substitution d'un faux père au mariage de Corentin Le Berre, Le Finistère 1893 »