« L'ennemi, courroucé de cette vigoureuse défense et de cette grande vigilance, résolut pendant le bombardement de concentrer sur cette batterie le tir d'un grand nombre de bouches à feu. Mais la résistance devait équivaloir à l'impétuosité de l'attaque.
Pendant la première journée du bombardement (qui dura 23 jours sans interruption), 45 servants furent tués ; le capitaine Denis, ben que blessé très grièvement, continua à commander le feu jusqu'au moment où ses forces l'obligèrent à remettre ses fonctions à son lieutenant. Cuzon continua à diriger le tir jusqu'à la nuit, et il profita de l'obscurité pour faire réparer le parapet et changer les deux affûts brisés par le tir de l'ennemi.
Le second jour, nouvel acharnement de la part de l'ennemi ; résistance aussi opiniâtre de notre côté. Le capitaine d'artillerie de terre, qui avait pris le commandement de la batterie lui-même, fut tué dans la journée. Cuzon reprit de nouveau le commandement qu'il conserva pendant plusieurs jours, dirigeant encore un feu meurtrier sur l'ennemi, alors que les forts de Vanves et d'Issy avait cessé la lutte.
Le dernier jour de bombardement amena une fin également tragique pour le 3e capitaine commandant. Quant à notre camarade, il semblait que la protection qui lui avait été accordée dès le commencement du feu, devait se terminer avec la fin du tir, car il reçut une égratignure du dernier coup de canon tiré par l'ennemi.
Ainsi Cuzon, dans deux circonstances exceptionnelles en face de l'ennemi, a commandé une batterie de siège et a su imprimer à ses hommes le sentiment du devoir en les maintenant autour des pièces, malgré un feu meurtrier de la part de nos adversaires, tout en faisant réparer de nuit les avaries causées par leur tir ; et cela dans des conditions très délicates, attendu que la batterie n'était gardée par aucune troupe de soutien et que sa position isolée, sans chemin de communication la reliant au fort de Vanves, l'exposait à chaque instant à être tournée.
Cuzon fur récompensée de sa belle conduite par la croix de chevalier de la Légion d'honneur. »
Quelques mois après le siège de Paris, Cuzon fut envoyé en Cochinchine, d'où il revint avec le grade de capitaine, mais aussi, hélas ! avec le germe d'une maladie contractée sous ce climat meurtrier, et qui ne devait pas lui pardonner. C'est pendant une trève trompeuse de son mal qu'il épousa Mlle Daucourt, la jeune femme qu'il vient de laisser veuve au bout de dix-huit mois.
Saluons respectueusement, au moment où il nous quitte, ce brave soldat, cet officier d'avenir, ce breton bien trempé, à qui semblaient s'offrir tant d'espérances, et dont la carrière inachevée est cependant assez longue pour montrer à tous les yeux les consolantes images du patriotisme, du courage militaire, de l'attachement au travail et de la fidélité au devoir !
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