14 nov 1887 - PV Gendarmerie
11e Légion. Compagnie de Quimper. Brigade de Quimper. Du 14 novembre 1887.
Procès-verbal constatant l'arrestation en flagrant délit de Mme Lozach Marie-Jeanne, 42 ans, propriétaire, née à Ergué-Gabéric Finistère. 1ère expédition.
Moysan René, agé de 40 ans, journalier au village de Kerfréis. (signature J. Doré)
Vu, transmis par le commandant des brigades à M. le Procureur de la République. Quimper, le 15 novembre 1887.
Gendarmerie nationale
Ce jourd'hui quatorze Novembre mil huit cent quatre-vingt sept à trois heures du soir.
Nous soussignés Doré Joseph-Marie et Mescam Joseph-Marie, gendarmes à pied à la résidence de Quimper département du Finistère, revêtus de notre uniforme, et conformément aux ordres de nos chefs.
Rapportons qu'étant à notre caserne, avons été informés par Mr le docteur Gisso, docteur à Quimper, qu'un cultivateur de la commune d'Ergué-Gabéric Mr Moysan, demeurant au village de Kerfréis, après duquel il avait été appellé, était mortellement blessé, et, que les coups lui avaient été portés par la femme Feunteun, demeurant au même lieu.
Nous nous sommes immédiatement transportés au logis de la victime, où son beau-père Mr Feunteun Laurent, 74 ans, nous a faits connaître qu'hier, vers 9 heures en rentrant du bourg d'Ergué-Gabéric, il avait trouvé son gendre (*) au lit et que ce dernier lui avait déclaré avoir été battu par la femme Feunteun, sa voisine et belle-sœur. Ce vieillard a ajouté que Moysan, son gendre, n'avait prononcé aucune parole depuis 10 heures hier soir. Ce matin, en présence ce ces complications, il avait mandé un médecin de Quimper qui, après examen, avait déclaré que Moysan avait été mortellement frappé.
§ Feunteun Marie-Jeanne, ...
Feunteun Marie-Jeanne, ... ans, femme Moysan, déclare n'avoir aucune connaissance de la scène dans laquelle son malheureux mari a trouvé la mort ; elle était absente. Elle est mère de 6 enfants dont le plus âgé a 12 ans, le plus jeune 13 mois, et est enceinte du septième. Le père Feunteun, Laurent, demeurant au village de Krefréis, donnait hospitalité aux époux Moysan et à leur famille, dans sa maison.
Navor, Hervé, 25 ans, domestique au service du sieur Laurent, cultivateur à Kerféis, fait la déclaration suivante : « Hier dimanche, 13 courant, dans la matinée, je me trouvais dans la cour de mon patron, lorsque j'entendis quereller dans la cour de la ferme Feunteun. Je ne comprenais point les paroles ; alors mes regards se dirigèrent vers cet endroit et je vis la femme Feunteun et le sieur Moysan en face l'un de l'autre. Aussitôt la femme Feunteun, qui avait un râteau dans les mains, en porta un coup à Moysan dans la poitrine avec le bout du manche. Moysan lava, à ce moment, le bras sur la femme Feunteun et fit un pas vers elle ; mais il reçut un 2e coup, avec l'outil il me semble à la tête, côté gauche, et tomba sur le sol ; étant à terre, la femme Feunteun porta encore 4 coups à sa victime, sur l'épaule gauche je crois. Moysan se releva et vint sur le chemin ; là il prit 2 pierres et les lança dans la direction de la femme Feunteun ; il ne l'atteignit point ; elle s'était renfermée dans une soue à porcs. Moysan se dirigea ensuite vers le jardin en descendant le chemin. Je ne l'ai pas revu. Il avait peut-être bu mais il n'était pas ivre. »
Cothalem Pierre, 14 ans, domestique chez l'inculpée, confirme la déclaration précédente, ajoutant que lorsqu'il vit d'abord sa patronne et Moysan dans la cour, en face l'un de l'autre, sa patronne n'avait pas le râteau ; elle se détacha pour aller le prendre devant sa demeure, revint en courant vers Moysan, et lui en porta un coup, debout, avec le manche, dans la poitrine. Et comme Moysan levait le bras vers elle, il reçut un 2e coup à la tête, il tomba à terre ; elle lui porta encore plusieurs coups dans cette position. Je ne sais si le 2e coup fut porté avec le manche ou avec le râteau. Moysan ne paraissait pas en étai d'ivresse.
Nous avons reconstitué cette malheureuse scène, faisant remplir le rôle de la victime par le témoin Narvor, l'inculpée munie de son râteau ; dans cette position, nous avons constaté que les coups ont été portés, dans la cour de l'inculpée, près du chemin commun au village, à 8 m. du seuil de la porte de l'inculpée et à 3 m. du pignon de sa demeure. Les témoins se trouvaient, l'un devant la maison d'habitation du sieur Laurent, l'autre derrière. Cathalem qui se trouvait sur le mur bordant le chemin au pignon ouest de l'habitation Laurent était à environ 25 m. du malheureux Moysan et de la femme Feunteun ; Narvor était devant la maison à distance de 20 m de ces derniers. Ces témoins ont parfaitement vu les faits.
Lozac'h Marie-Jeanne, 42 ans, femme Feunteun, née à Ergué-Gabéric le 22 Novembre 1846, fille de feu René et de Catherine Istin, mariée4 enfants, propriétaire au village de Kerfrèis en Ergué-Gabéric, interrogée sur les faits qui lui sont imputés déclare ce qui suit :
« Dans la matinée d'hier dimanche, mon beau-frère Moysan est venu chez moi me reprocher que mon fils avait battu le sien samedi, je l'ai mis hors de chez moi ; plus tard, il est revenu, vers 10 h. 1/2 ; sur le seuil de ma porte, m'insultant de P. et de G. Ne pouvant supportant supporter de pareilles insultes, je suis sortie de chez moi ; mon beau-frère se trouvait alors près du tas de boue au pignon de ma maison ; je suis allée vers lui ; me voyant le suivre, il s'est retourné et a fait quelques pas ; le voyant revenir vers moi, j'ai rebroussé chemin, me suis armée d'un râteau placé devant ma demeure et me suis de nouveau dirigée sur lui et en l'accostant, je lui ai porté un coup, debout, dans la poitrine, avec le manche de cet outil. Alors il a levé la main en me menaçant, c'est à ce moment que je lui ai porté le 2e coup à la tête, mais avec le manche ; il est tombé à terre. Etant dans cette position, je l'ai encore frappé, toujours avec le manche, de 2 ou 3 coups, sur l'épaule gauche, il était tombé sur le côté droit ; il s'est relevé et dirigé vers le chemin ; arrivé là, il a saisi 2 pierres et les a lancées vers moi ; je n'ai pas été atteinte car je me suis réfugiée dans l'étable de mes cochons. - Je regrette sincèrement les faits qui se sont passés hier entre mon beau-frère et moi ; nous vivions en bonne intelligence et il a fallu qu'une méchante bataille d'enfants nous cause, à tous, un si grand malheur. - Conformément aux articles 249 et 300 du décret du 1er mars 1857, nous avons arrêté Marie-Jeanne Lozac'h, femme Feunteun, et l'avons conduite par devant le procureur de la République à Quimper. Le magistrat, sur le résumé verbal de notre enquête, nous a délivré un o/o d'écrou en vertu duquel nous l'avons écrouée à la maison d'arrêt de cette ville. L'inculpée a été fouillée, par une personne de son sexe, au moment de son arrestation. L'instrument meurtrier a été saisi et sera déposé au greffe du tribunal pour servir de pièce à conviction. Les renseignements recueillis près des époux Laurent font connaître que l'inculpée a un caractère très emporté ; la victime, déclarent les mêmes personnes, buvait jusqu'à l'ivresse. Quelquefois et dans ce cas, querellait facilement, mais n'aurait pas frappé. - En foi de quoi, etc ... Fait et clos à Quimper, les jour, mois et an ... J. Doré.
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15 nov 1887 - Réquisitoire introductif
Cour d'appel de Rennes. Tribunal de première instance de Quimper. Parquet.
Réquisition introductif.
Nous, Procureur de la République à Quimper. Vu le procès-verbal de la gendarmerie de Quimper, en date du 14 novembre 1887. Inculpons la nommée Lozach Marie Jeanne, femme Feunteun, 42 ans, cultivatrice, née et demeurant à Ergué Gabéric de coups mortels, faits prévus par l'article 309 du code pénal ;
Requérons qu'il plaise à M. le Juge d'Instruction procéder à une information et délivrer mandat de dépôt.
Fait au Parquet, à Quimper, le 15 novembre 1887. Le Procureur de la République. (signature).
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16 nov 1887 - Déposition Hervé Narvor
Du 16 novembre 1887. Tribunal de première instance de Quimper. Chambre d'instruction. Information contre Lozach Marie Jeanne, inculpé de coups mortels.
Déposition de Narvor, Hervé, domestique à Kerfrez en Ergué-Gabéric.
L'an mil huit cent quatre-vingt sept, le seize novembre. Devant Nus, Juge d'Instruction de l'arrondissement de Quimper (Finistère), assisté de Mr Me Poussin Commis-Greffier et du sieur Guillerm âgé de 65 ans, Interprète de la langue bretonne, qui a prêté le serment prescrit par la loi,
A comparu volontairement, le témoin ci-après nommé, lequel après avoir prêté le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, a, sur notre demande, par l'organe de l'interprète susnommé, déclarer se nommer Narvor Hervé, âgé de 24 ans domestique deumeurant à Kerfrès en Ergué Gabéric, connaître l'inculpée ne lui être parent, allié, serviteur, ni domestique et a déposé séparément, hors la présence de l'inculpé, comme suit :
§ Dimanche, 13 courant, dans la matinée ...
Dimanche, 13 courant, dans la matinée j'ai vu la femme Feunteun repousser son beau-frère Moysan avec le manche d'un râteau qu'elle avait appuyé contre sa poitrine, jusqu'à un tas de boue sis au pignon de la maison. À cet endroit, Moysan ayant levé la main sur sa belle sœur, celle-ci prenant son outil par le bout du manche, je crois, assèna deux coups de cet instrument, sur la tête de Moysan, qui tomba à terre. Etant dans cette position, Moysan disait à sa belle sœur : "frappez donc" et elle lui asséna encore quatre autres coups sur l'épaule. J'arrivai à de moment et je dis à Moysan de partir ; il se releva, prit deux pierres qu'il lança sur la femme sans pouvoir l'atteindre , quand la dernière lui fut lancée, elle se réfugia dans une soue à porcs. Cela fait, Moysan partit par le chemin qui conduit au moulin de Kerfres et je ne le revis plus.
Je n'ai jamais vu Moysan avoir des discussions, ni la femme Feunteun non plus. Ce jour-là Moysan était un peu échauffé par la boisson.
Lecture faire le témoin persiste, dit ne savoir signer et nous signons avec l'interprète et le greffier. (trois signatures)
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16 nov 1887 - Déposition Laurent Feunteun
Du 16 novembre 1887. Tribunal de première instance de Quimper. Chambre d'instruction. Information contre Lozach Marie Jeanne, inculpé de coups mortels.
Déposition de Feunteun Laurent.
L'an mil huit cent quatre-vingt sept, le seize novembre. Devant Nous, Juge d'Instruction de l'arrondissement de Quimper (Finistère), assisté de Mr Me Poussin Commis-Greffier et du sieur Guillerm âgé de 65 ans, Interprète de la langue bretonne, qui a prêté le serment prescrit par la loi,
A comparu volontairement, le témoin ci-après nommé, lequel après avoir prêté le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, a, sur notre demande, par l'organe de l'interprète susnommé, déclarer se nommer Feunteun Laurent, âgé de 75 ans cultivateur demeurant à Kerfrès en Ergué Gabéric, connaître l'inculpée ne lui être parent, allié, serviteur, ni domestique et a déposé séparément, hors la présence de l'inculpé, comme suit :
§ Dimanche dernier 13 novembre ...
Dimanche dernier 13 novembre, lorsque je suis revenu du bourg, vers trois heures de l'après-midi, ne voyant pas mon gendre, j'ai demandé aux enfants où il était ; je crus qu'il était ivre, mais ils me dirent que leur père était couché et qu'il avait été battu par leur tante. Je n'allais pas le voir dans son lit, mais vers neuf heures du soir, il demanda un peu de cidre doux pour le faire vomie pensant qu'il irait mieux. Il se leva un instant, après pendant quelques minutes seulement, et fut obligé de se recoucher, et j'entendis sa femme tirer tirer du cidre à la barrique. Après son accident il ne m'a adressé aucune parole.
Lecture faite le témoin persiste et dit ne savoir signer ; nous signons avec le greffier et l'interprète. (trois signatures).
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16 nov 1887 - Interrogatoire Marie-Jeanne Lozach
Du 16 novembre 1887. Tribunal de Quimper. Interrogatoire de Lozach Marie, femme Feunteun, inculpé de coups mortels (... à Kerfres en Ergué-Gabéric).
L'an mil huit cent quatre-vingt sept, le seize novembre 4 H. Devant Bous Juge d'Instruction de l'arrondissement de Quimper, assisté de Mr Le Poussin Cn, Greffier.
A comparu la dénommée ci-après, inculpée de coups mortels et à l'interrogatoire de laquelle nous avons procédé comme suit par l'organe du sieur Guillerm âgé de 65 ans, Interprète de la Langue Bretonne, qui a prêté le serment prévu par la loi.
D. - Quels sont vos nom, prénoms, âge, profession, lieu de naissance et de domicile ? À quelle classe appartenez-vous ? Dans quel canton avez-vous tiré au sort ? Quel numéro avez-vous obtenu ? Etes-vous marié ou célibataire ? Savez-vous lire et écrire ? Possédez-vous quelques biens ? Avez-vous déjà été condamné ?
§ Lozach Marie-Jeanne, femme Feunteun ...
Lozach Marie-Jeanne, femme Feunteun, 42 ans, propriétaire-cultivatrice, née à Ergué-Gabéric, de René et de Catherine Istin, 4 enfants, demeurant à Kerfrès en Ergué-Gabéric, possédant quelques biens, sachant un peu lire et écrire, non condamnée.
D. - Vous êtes inculpée d'avoir, le dimanche 13 novembre courant, à Ergué-Gabéric, volontairement porté des coups et fait des blessures au sieur Moysan, lesquels coups et blessures volontairement portés ont occasionné la mort ?
R. - Oui, je le reconnais. - Dimanche, treize novembre, dans la matinée, mon beau frère Moysan est venu dans ma maison m'insulter, me traitant de P. et de G., parce que mon fils et le sien s'étaient disputés la veille au soir, au retour de l'école. Je le poussais hors de chez moi. Vers dix heures et demie, il est revenu sur le seuil de ma porte, m'insultant encore de (Pot Lourd) en français Lourdeau. J'étais alors à balayer ma maison, je continuai à pousser les ordures dehors, et balayais devant ma porte. Mon beau frère continuait à m'insulter, je me suis emparée d'un râteau qui se trouvait devant ma porte et je l'ai repoussé en plaçant le bout du manche contre sa poitrine. Moysan ayant levé alors la main pour menacer, en s'avançant sur moi, je l'ai frappé à la tête du bout du manche du râteau et étant tombé à terre sur le côté. Là je lui ai encore donné trois coups sur l'épaule, mais pas bien fort. Il s'est relevé, a pris deux pierres qu'il a essayé de me lancer ; et il ne m'a pas atteint et je me suis renfermée dans mon refuge à porcs, contre la porte duquel une des pierres a été jetée. Le nommé Narvor, domestique dans le village est arrivé et lui a dit de s'en aller.
Une demu heure après, j'au vu Moysan tirer de la paille à la meule qui est près de sa maison. Dans la soirée, mon beau père vint me dire que Moysan était malade et je suis allée le voir ; il ne me parla point. Je retournai le lundi matin et dans l'après-midi j'ai été arrêtée.
Depuis quatre ans que mon beau frère habite le village je n'ai jamais aucune discussion avec lui. Je l'ai employé pendant seize mois comme domestique et depuis qu'il nous a quitté, je l'ai employé comme journalier, chaque fois que j'ai eu besoinde lui.
Je regrette bien ce qui est arrivé ; je ne croyais pas causer la mort de mon beau frère.
Lecture faite, l'inculpée persiste et signe avec nous, l'interprète et greffier. (quatre signatures)
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16 nov 1887 - Rapport juge
Cour d'appel de Rennes. Tribunal de première instance de Quimper. Cabinet du Juge d'Instruction.
L'an 1887. Le 16 novembre.
Nous J. Leray, juge faisant fonction de Juge d'Instruction en remplacement du titulaire empêché.
Accompagné de M. Patuet juge suppléant, remplaçant M. le Procureur de la République et de M. le docteur Collé, et assisté de M. Poussin commis greffier et de M. Guillerme, interprète de la langue bretonne.
Vu la réquisition de M. le Procureur de la République en date du 15 novembre 1887.
Nous sommes transporté au village de Kerfreis en Ergué Gabéric, et nous sommes fait conduire à la maison où est décédé le sieur Moysan René. Le cadavre était couché dans un lit clos, mais l'insuffisance d'éclairage et d'espace ne permettant pas de procéder en cet endroit aux opérations nécessaires, nous l'avons fait transporter dans un édifice contigu. En cet endroit l'inculpée a été confrontée avec la victime qu'elle a déclaré reconnaître.
Puis le cadavre ayant été dépouillé de ses vêtements nous l'avons minutieusement examiné avec l'assistance du médecin et n'avons constaté d'autres traces extérieures de violences qu'une très petite éraflure en avant de l'oreille gauche et une forte contusion à l'épaule gauche.
Nous avons alors reçu le serment de M. le Docteur Collé et l'avons requis de procéder à la visite et à l'autopsie.
Puis nous avons visité le théâtre des faits, entendu deux témoins et interrogée l'inculpée contre laquelle nous avons décerné mandat de dépôt.
L'autopsie terminée M. le substitut du Procureur a délivré un permis d'inhumer.
De tout ce que dessus, nous avons dressé le présent procès-verbal que nous avons signé avec M. le substitut et le commis-greffier. (trois signatures)
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21 nov 1887 - Casier Marie-Jeanne Lozach
Extrait de casier du tribunal de Quimper (Finistère).
Relevé des Bulletins individuels de condamnations alphabétiquement classés au casier judiciaire. Concernant la nommé Lozach Marie Jeanne, né à Ergué Gabéric le 20 novembre 1844, âgé de 43 ans, fille de René et de Marie Catherine Istin, 4 enfants, Profession de propriétaire-cultivatrice.
Néant.
Vu au parquet par le Procureur de la République (signature). Certifié conforme par le Greffier soussigné. Quimper, le 21 novembre 1887. (signature)
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28 nov 1887 - Casier René-Jean Moysan
Extrait de casier du tribunal de Quimper (Finistère).
Relevé des Bulletins individuels de condamnations alphabétiquement classés au casier judiciaire. Concernant le nommé Moysan René-Jean, né à Ergué Gabéric le 3 octobre 1847, âgé de 40 ans, fille de Hervé et de Marie Françoise Poher.
19 juillet 1877. Quimper. Coups et blessures volontaires. 8 jours de prison
Vu au parquet par le Procureur de la République (signature). Certifié conforme par le Greffier soussigné. Quimper, le 28 novembre 1887. (signature)
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28 nov 1887 - Déposition Pierre Coathalem
Du 16 novembre 1887. Tribunal de première instance de Quimper. Chambre d'instruction. Information contre Lozach Marie Jeanne, inculpé de coups mortels.
Déposition de Coathalem, Pierre, 14 ans, domestique à Kerfez, Ergué Gabéric
L'an mil huit cent quatre-vingt sept, le vingt-huit novembre. Devant Nous, Juge d'Instruction de l'arrondissement de Quimper (Finistère), assisté de Mr Me Vaillant, Prosper, Commis-Greffier et du sieur Le Bloch Jean-François âgé de 33 ans, Interprète de la langue bretonne, qui a prêté le serment prescrit par la loi,
A comparu volontairement, le témoin ci-après nommé, lequel nus a représenté l'avertissement à lui donné en date du 22 novembre 1887, et après avoir prêté le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, a, sur notre demande, par l'organe de l'interprète susnommé, déclarer se nommer Coathalem, Pierre, domestique de l'inculpée, âgé de 14 ans domestique demeurant à Kerfrès en Ergué Gabéric, connaître l'inculpée, ne lui être parent, et a déposé séparément, hors la présence de l'inculpé, comme suit :
§ Le treize novembre, vers les dix heures du matin ...
Le treize novembre, vers les dix heures du matin, je me trouvais à travailler avec Narvor dans un hangar lorsque nous entendîmes une discussion dans la cour Feunteun. Curieux de voir ce qui se passait, je sortis du hangar et montai sur un petit mur bordant le chemin au pignon ouest de l'habitation Laurent. Je me trouvai ainsi à environ cent mètres de Moysan et de sa belle-sœur. Je ne comprenais pas les paroles qui s'échangeaient. Tout à coup je vis ma patronne se détacher pour aller prendre un râteau devant sa maison, revenir en courant vers Moysan et le repousser avec le bout du manche qu'elle appuyait contre sa poitrine. Moysan, qui avait reculé de quelques pas, leva alors le poing sur elle, mais il reçut un coup du râteau à la tête et tomba à terre. Je ne puis vous dire, je vous l'affirme, si ce coup a été porté avec le bout du manche ou avec les pointes en fer, ce qu'il y a de certain c'est que Moysan tomba aussitôt à terre. Elle lui porta encore plusieurs coups sur l'épaule gauche, trois ou quatre je crois. Je n'ai point entendu, à ce moment, le blessé dire "frappez donc". Moysan se retira ensuite, ramassa deux pierres sur le chemin qu'il lança contre la femme Feunteun sans l'atteindre. Quand le lança la seconde, ma patronne s'était réfugiée sous le toit à porcs.
Moysan avait bu, mais il n'était pas trop ivre.
Je n'ai pas revu de la journée, le blessé. Quand je suis allé chez lui, le lendemain, il était alité et ne parlait plus.
J'ai vu ma patronne dans la journée, mais, ni ce jour, ni le lendemain, elle n'a parlé devant moi de ce qui venait de se passer. Je n'ai rien à dire de ma patronne, mais quelquefois elle est un peu vive.
Je n'ai pas assisté à la dispute qui a eu lieu entre l'un des enfants Feunteun et un enfant Moysan, mais j'ai entendu dire par le premier, qui s'appelle Laurent, qu'il s'était disputé avec son cousin René. Il ne m'a pas dit qu'il l'avait égratigné.
Confrontation
[El l'endroit nous faisons entrer l'inculpée et nous lui faisons donner le [...] qui précède par l'organe de l'interprète susnommé].
L'inculpée - Je n'ai rien à dire à la déposition du témoin, si ce n'est que je n'ai point frappé mon beau-frère à la tête avec les points en fer, mais bien avec le manche près de son extrémité, c'est-à-dire que je ne l'ai pas frappé avec le bout du manche.
Le témoin - Je persiste dans ma déposition.
Lecture faite, le témoin et l'inculpée persistent, le témoin dit ne savoir signer et l'inculpée signe avec nous, l'interprète et le greffier. (quatre signatures)
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28 nov 1887 - Déposition Hervé Narvor
Du 16 novembre 1887. Tribunal de première instance de Quimper. Chambre d'instruction. Information contre Lozach Marie Jeanne, inculpé de coups mortels.
Déposition de Narvor, Hervé, 24 ans, domestique à Kerfez, Ergué Gabéric
L'an mil huit cent quatre-vingt sept, le vingt-huit novembre. Devant Nous, Juge d'Instruction de l'arrondissement de Quimper (Finistère), assisté de Mr Me Vaillant, Prosper, Commis-Greffier et du sieur Le Bloch Jean-François âgé de 33 ans, Interprète de la langue bretonne, qui a prêté le serment prescrit par la loi,
A comparu volontairement, le témoin ci-après nommé, lequel nus a représenté l'avertissement à lui donné en date du 22 novembre 1887, et après avoir prêté le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité, a, sur notre demande, par l'organe de l'interprète susnommé, déclarer se nommer Narvor, Hervé, déjà entendu, âgé de 24 ans domestique demeurant à Kerfrès en Ergué Gabéric, connaître l'inculpée, ne lui être parent, allié, serviteur, ni domestique, et a déposé séparément, hors la présence de l'inculpé, comme suit :
§ Je persiste dans la déclaration ...
Je persiste dans la déclaration que j'ai faite le seize novembre. J'étais à travailler sous un hangar quand j'entendis une discussion dans la cour de la femme Feunteun, sans comprendre les paroles qui s'échangeaient. Quand j'arrivai sur les lieux, je vis l'inculpée qui repoussait son beau-frère avec le manche du râteau appuyé contre la poitrine, mais je ne puis affirmer si elle a porté le coup à la tête avec le manche du râteau ou avec les piques en fer. Elle n'a frappé qu'un coup et non deux à la tête, mais elle a agit si prestement que, bien qu'à vingt pas de là, je ne puis dire si la victime a été atteinte par les pointes de fer ou le bout du manche. Je crois cependant que c'est avec les piques.
Quand Moysan lança les deux pierres contre la femme Feunteun sans l'atteindre, la première fut lancée avant que celle-ci se fut réfugiée dan le toit à porcs, la seconde le fut ensuite.
Je n'ai pas revu le blessé depuis ce moment, je ne sais donc pas si, une demi-heure après, il est allé tirer de la paille et s'il a raconté la scène à sa femme ou à d'autres personnes. Je ne sais rien non plus des discussions qui ont pu avoir lieu, la veille, entre les enfants ou, le matin, entre les parents de ceux-ci.
Je connaissais Moysan depuis cette année seulement, ce n'était point un méchant homme, mais il avait l'habitude de boire. Je ne sais s'il cherchait des querelles quant il était dans cet état.
J'ai travaillé quelques jours au service de l'inculpée et je n'ai eu qu'à me louer de mes rapports avec elle. Je ne puis dire si elle le caractère vif et emporté.
Confrontation.
[En l'endroit nous faisons entrer l'inculpée et nous lui donnons lecture de ce qui précède]
L'inculpée. - Je n'ai rien à dire sur cette déposition. Je n'en voulais nullement à mon beau-frère, il ne m'a jamais fait de mal, mais, il y a sept ou huit ans je crois, il a été condamné pour violences, je ne sais pas si c'est par le juge de paix ou le tribunal correctionnel de Quimper. Il a eu quelques jours de prison.
Le témoin. - Je persiste dans ma déposition.
Lecture faire, le témoin et l'inculpée persistent, le témoin dit ne savoir signer et l'inculpée signe avec nous, l'interprète et le greffier. (quatre signatures)
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28 nov 1887 - Déposition Laurent Feunteun
29 nov 1887 - PV Gendarmerie
30 nov 1887 - Rapport autopsie
12 déc 1887 - Déposition Laurent Moysan
12 déc 1887 - Déposition Laurent Feunteun
15 déc 1887 - Déposition Marie-Jeanne Feunteun
20 déc 1887 - Interrogatoire Marie-Jeanne Feunteun
23 déc 1887 - Ordonnance
23 déc 1887 - Réquisitoire définitif
24 déc 1887 - Avis à prévenu
29 déc 1887 - Minutes greffe
29 déc 1887 - Mise en accusation
29 déc 1887 - Acte d'accusation
01 fév 1888 - Délibéré
La Cour
après avoir entendu l'avoué et l'avocat de la partie civile dans leurs conclusions et plaidoiries, la femme femme Feunteun et le sieur Feuteun, son mari, et leur avocat Me de Chamaillard dans leurs observations, conclusions et plaidoiries,
ouï M. le Procureur de la République dans ses conclusions et après avoir délibéré conformément à la loi
attendu qu'il n'est pas dénié par la défendeuse que sa responsabilité civile est engagée par le fait qui a entraîné la comparution devant las cour d'assises ; que malgré le verdict négatif dont elle a bénéficié, il est établi et avoué que la mort de sieur Moysan est due à une faute de la femme Feunteun ; que s'il faut tenir compte des circonstances dans lesquelles s'est produite cette faute, il y a lieu aussi de proportionner les dommages intérêts aux besoins du demandeur ;
attendu que les offres faites par Feunteun et sa femme sont repoussés par la veuve Moysan au nom qu'elle agit ; qu'elles sont en réalité insuffisantes eu égard aux ressources de la défendeuse ainsi qu'aux charges de la demandeuse et des besoins auxquels elle a à pourvoir seule par suite du décès de son marie ; qu'il y a donc lieu d'allouer une somme fixe pour réparer le préjudice dont la femme Feunteun reconnaît être l'auteur ; que la Cour a les éléments suffisant pour arbitrer ce qu'elle doit de ce chef ;
par ces motifs, dit qu'il y a lieu de donner acte au sieur Feunteun de ses offres lesquelles sont déclarées insuffisantes ; condamne la femme Feunteun née Lozach à payer à la veuve Moysan tant en son nom qu'à qualité la somme de trois mille francs ; dit qu'elle sera tenue à titre de supplément de dommages intérêts, des intérêts de la dite somme de 3000 f. au taux légal et ce depuis le jour de la demande, la condamne en outre aux dépens faits par la partie civile, liquidés à ... non compris le coût retrait et notification du présent, dont distraction à Me Le Scour.
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01 fév 1888 - Conclusion de Chamaillard
01 fév 1888 - Conclusion Le Scour
01 fév 1888 - Réponses jury
Cour d'appel de Rennes. Cour d'assises du département du Finistère. Audience du 8 février 1888.
Déclaration du jury dan le procès criminel instruit contre la femme Feunteun née Lozach
Questions. Fait principal.
Marie Jeanne Lozach, femme Feunteun, est-elle coupable d'avoir, dans la commune d'Ergué-Gabéric, au mois de novembre 1887, volontairement porté des coups et fait des blessures à René Jean Moysan ?
Réponse : non
Circonstance aggravante. Ces coups portés et ces blessures faites volontairement, sans intention de donner la mort à René Jean Moysan, l'ont-ils pourtant occasionnée ?
réponse : non
Quimper le 1er février 1888, le Président des Assises, (signature Saulniere)
Quimper, le 1er février 1888, le chef du jury, (trois signatures)
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09 fév 1888 - Indemnités Le Scour
09 fév 1888 - Condamnation
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