Le redémarrage des papeteries Bolloré après-guerre, Ouest-France 1944-1949
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- | |width=60% valign=top|<i>Des encarts et articles de presse.</i> | + | |width=60% valign=top|<i>Des articles de presse sur la reprise après la seconde guerre mondiale des activités papetières dans les usines d'Odet (Ergué-Gabéric) et de Cascadec (Scaër).</i> |
- | Source : Archives en ligne du journal Ouest-France. | + | Source : Archives en ligne du journal Ouest-France (transcriptions et fac-similés ci-après). |
- | Autres lectures : {{Tpg|Les 40 ans de vie OCB, Odet-Cascadec-Bolloré, d'Henri Le Gars}}{{Tpg|Henri Le Gars, employé aux usines Bolloré en novembre 1939}}{{Tpg|L'entreprise Bolloré, Réalités Noël 1949}}{{Tpg|Index chronologique de l'histoire des papeteries d'Odet-Cascadec}} | + | Autres lectures : {{Tpg|Les 40 ans de vie OCB, Odet-Cascadec-Bolloré, d'Henri Le Gars}}{{Tpg|Henri Le Gars, employé aux usines Bolloré en novembre 1939}}{{Tpg|L'entreprise Bolloré, Réalités Noël 1949}}{{Tpg|Index chronologique de l'histoire des papeteries d'Odet-Cascadec}}{{Tpg|1950 - Match inter-usines des Paotred d'Odet contre Cascadec}} |
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+ | [[Image:HenriJosephLeGars.jpg|120px|left]]Henri Le Gars, ayant commencé sa carrière dans l'entreprise Bolloré en 1939, a déjà raconté l'arrêt de la production à Odet et le maintien au ralenti de la fabrication dans l'usine sœur de Cascadec : « <i>En 1941 quand l'usine d'Odet s'est arrêtée, tous ceux qui étaient au mois ont pu rester pendant 4 ans, payés à ne rien faire, en vacances en quelque sorte. Ceux qui étaient payés à l'heure ont été tous débauchés.</i> » Il a témoigné aussi, pour y avoir participé, de la façon dont la production est repartie sur les deux sites. | ||
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+ | Les articles collectés dans le journal Ouest-France de 1944 à 1949 confirment aussi des difficultés de trouver des matières premières (charbon, produits chimiques, chiffons), notamment ce reportage complet paru le 23 septembre 1946 : « <i>La production industrielle a donné à M. Bolloré, directeur des usines d'Odet, avis de l'attribution de charbon, en quantité suffisante pour permettre une exploitation tout à fait normale.</i> » | ||
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+ | C'est le résistant François de Menthon, ministre de l’Économie nationale, en visite officielle à Cascadec-Odet en ce mois de septembre 1946, qui a permis cette attribution de charbon et accéléré la reprise d'activité. | ||
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+ | Une démarche administrative interne a aussi été nécessaire, car le patron historique René Bolloré est décédé en 1935 et ses fils n'ont pas vraiment pris avant-guerre les rênes de l'entreprise. La veuve de René Bolloré, remariée en 1940 au chirurgien André Soulas, en est restée la gérante. | ||
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+ | L'avis Ouest-France publié en septembre 1944 officialise la passation des pouvoirs au fils aîné René-Guillaume : « <i>Par décision de l'Assemblée générale de la Société à responsabilité Les Papeteries René Bolloré, dont le siège social est à Odet commune d'Ergué-Gabéric (Finistère), réunie le 30 août 1944, M. René-Guillaume BOLLORÉ est nommé Gérant de la dite Société pour une durée de 5 années en remplacement de Mme SOULAS, démissionnaire.</i> » | ||
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+ | Deux augmentations de capitaux ont été aussi nécessaires en décembre 1946 (de 23 à 65 millions de francs) et en juillet 1949 (180 millions) pour « <i>Les Papeteries René BOLLORÉ</i> », toujours organisée en Société à responsabilité limitée. | ||
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+ | Les chiffres de production sont représentatifs de la période : la production annuelle de papier des deux usines est de 3.800 tonnes en 1938, moins de 1.000 tonnes de 1941 à 1945, 2.000 en 1946 et 3.000 en 1947. Il y avait seulement 50 employés à Odet de 1941 à 1945, pour atteindre en 1947 : 350 à Odet et 650 à Cascadec. | ||
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+ | En 1948 on note deux décès importants qui marque la fin d'une époque : Léonie Bolloré, centenaire et mère du patron historique d'avant-guerre, et le contremaître chef de fabrication Pierrot Éouzan à l'âge de 63 ans. | ||
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+ | [[Image:OF-1946.09.23-ReportageBolloré.jpg|400px|center]] | ||
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+ | En 1948 et 1949 les journalistes rencontrent et citent régulièrement Gwenaël Bolloré, le directeur général des usines, son frère René-Guillaume étant basé à Paris. Et notamment lorsqu'il organise pour la première fois en avril 1948 le tournoi de football des deux papeteries sur le terrain d'Odet. | ||
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+ | Et il est aussi en position de négociateur face aux grèves de la C.G.T. à la fin 1939 à Cascadec. Il faut dire que ce syndicat s'était déjà penché sur le sort des vieux en organisant une souscription en novembre 1946. Trois ans après, les revendications sont salariales, notamment le rehaussement des primes de logement, de rendement et de panier. Des arrêts de travail ont lieu au service de façonnage à Cascadec, alors qu'Odet ne connaît aucune action de ce genre. | ||
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+ | Les journalistes d'Ouest-France notent une progression du syndicat concurrent C.F.T.C. lors des élections syndicales des années 1947 et 48. Le journal appelle même à la fin du conflit et fait paraître une mise au point de la Direction sur les avantages déjà accordés au personnel papetier. La C.G.T. de Cascadec se résoudra à une reprise normale du travail en décembre 1949. | ||
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OF, 28 sept 1944 : | OF, 28 sept 1944 : | ||
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- | AVIS. Par décision de l'Assemblée générale de la Société à responsabilité <b>Les Papeteries René Bolloré</b>, dont le siège social est à <b>Odet</b> commune d'Ergué-Gabéric (Finistère), réunie le 30 août 1944, M. René-Guillaume BOLLORÉ est nommé Gérant de la dite Société pour une durée de 5 années en remplacement de Mme SOULAS, démissionnaire. Il aura la signature sociale et la Direction exclusive des affaires de la Sociétyé, avec les pouvoirs les plus étendus, le tout dans les termes de l'article 14 des statuts. Pour extrait conforme : M. SOULAS. | + | AVIS. Par décision de l'Assemblée générale de la Société à responsabilité <b>Les Papeteries René Bolloré</b>, dont le siège social est à <b>Odet</b> commune d'Ergué-Gabéric (Finistère), réunie le 30 août 1944, M. René-Guillaume BOLLORÉ est nommé Gérant de la dite Société pour une durée de 5 années en remplacement de Mme SOULAS, démissionnaire. Il aura la signature sociale et la Direction exclusive des affaires de la Société, avec les pouvoirs les plus étendus, le tout dans les termes de l'article 14 des statuts. Pour extrait conforme : M. SOULAS. |
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OF, 23 sept 1946 | OF, 23 sept 1946 | ||
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- | En marge du voyage de M. de Menthon. <b>Le moulin à papier repart ...</b> | + | En marge du voyage de M. de Menthon. <br><b>Le moulin à papier repart ...</b> |
Dans le site enchanteur d'Odet, le Moulin à papier a rouvert ses portes ... À vrai dire, il ne les avait jamais complètement fermées, car au plus fort de cette longue léthargie, qui a paralysé une usine importante de notre région, pendant cinq ans, quelque cinquante ouvriers, en majorité des techniciens, ont assuré l'entretien des lieux et des machines. | Dans le site enchanteur d'Odet, le Moulin à papier a rouvert ses portes ... À vrai dire, il ne les avait jamais complètement fermées, car au plus fort de cette longue léthargie, qui a paralysé une usine importante de notre région, pendant cinq ans, quelque cinquante ouvriers, en majorité des techniciens, ont assuré l'entretien des lieux et des machines. | ||
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Si la mobilisation et la guerre réduisirent de façon sensible le chiffre de production, l'arrivée des Allemands en juin 1940 ne marqua pas pour autant l'arrêt des machines. Mais il était à prévoir que l'appauvrissement du pays, la fermeture de nombreux marchés situés en zone d'opération militaire, le blocus de fait que nous subissions, ne tarderaient pas à se faire ressentir sur nos industries ne travaillant pas pour la guerre. | Si la mobilisation et la guerre réduisirent de façon sensible le chiffre de production, l'arrivée des Allemands en juin 1940 ne marqua pas pour autant l'arrêt des machines. Mais il était à prévoir que l'appauvrissement du pays, la fermeture de nombreux marchés situés en zone d'opération militaire, le blocus de fait que nous subissions, ne tarderaient pas à se faire ressentir sur nos industries ne travaillant pas pour la guerre. | ||
- | Les stocks de combustibles, de produits chimiques et de chiffons que possédait l'usine, lui permirent d'étaler jusqu'en juillet 1941, date à laquelle il lui fallut se résoidre à la fermeture. | + | Les stocks de combustibles, de produits chimiques et de chiffons que possédait l'usine, lui permirent d'étaler jusqu'en juillet 1941, date à laquelle il lui fallut se résoudre à la fermeture. |
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+ | Les moyens de production furent alors concentrés sur l'usine de Cascadec, qui possède un matériel un peu plus perfectionné et surtout - ceci avait son importance en raison du manque d'exportation - une machine à fabriquer les carnets de feuilles à cigarettes. Pendant ce temps, le Moulin à papier d'Odet se vidait de son personnel - à part une cinquantaine, ainsi que nous l'avons écrit plus haut. | ||
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+ | Une partie de ceux qui habitent Lestonan et y possèdent un coin de terre, restèrent à la cultiver, mais la plus grande partie émigra vers Quimper et les autres villes où s'offrait un peu partout du travail de manœuvre. | ||
</spoiler><spoiler id="996" text="CASCADEC CONTINUE ...">CASCADEC CONTINUE ... | </spoiler><spoiler id="996" text="CASCADEC CONTINUE ...">CASCADEC CONTINUE ... | ||
- | Certes, il serait exagéré de laisser croire | + | Certes, il serait exagéré de laisser croire continua normalement à Cascadec. Cette usine fonctionna sans arrêt, mais à un ralenti de plus en plus accentué. Même, à la période troublée de 1944, l'usine produisit quelque 150 tonnes de papier soit à peine le 1/12 des années d'avant-guerre. |
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+ | L'entrée en guerre des U.S.A. contre l'Allemagne consacra de façon définitive une situation existant de fait depuis la déclaration de guerre. Plus de débouchés hors du continent et sur ce continent les seules exportations de commande : Allemagne et Italie. | ||
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+ | Il restait donc surtout le marché de la métropole. C'est alors qu'apparurent les célèbres cahiers O.C.B. qui acquirent presque un monopole de droit. | ||
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+ | Aussi, aujourd'hui, ainsi que nous le fit remarquer M. Bolloré, au cours d'un entretien qu'il voulut bien accorder, la justification économique des dépenses engagées en un temps où les bénéfices étaient illusoires, d'une part par le maintien en place de 50 spécialistes à Odet, d'autre part en raison de créations nouvelles toujours onéreuses, trouve-t-elle aujourd'hui plein effet. | ||
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+ | Outre le papier à cigarettes livré en cahiers et dont la plus grande partie reste en France ou en Afrique du Nord, l'usine de Cascadec s'est spécialisée dans la fabrication de papiers pour condensateurs électriques, jadis fabriqué à peu près exclusivement en Allemagne. Il s'agit d'un papier très fin pesant 8 grammes au mètre carré. | ||
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+ | Mentionnons encore le papier pour support de carbone servant ensuite à la fabrication du papier dit « papier carbone » et le papier pour éditions. | ||
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+ | Actuellement cette usine emploie 650 personnes. | ||
</spoiler><spoiler id="997" text="ET ODET VA REPARTIR ...">ET ODET VA REPARTIR ... | </spoiler><spoiler id="997" text="ET ODET VA REPARTIR ...">ET ODET VA REPARTIR ... | ||
- | Or donc, le Moulin à papier d'Odet va repartir. Et il est permis d'établir | + | Or donc, le Moulin à papier d'Odet va repartir. Et il est permis d'établir une relation entre la visite de M. Marcel Paul, ministre de la Production Industrielle, à l'usine de Cascadec le 28 juillet dernier et celle que doit accomplir à son tour M. de Menthon. Car le Ministre de l’Économie nationale, soucieux d'être informé complètement par les intéressés eux-mêmes, tient à se rendre sur place pour recueillir leurs observations, et leurs remarques concernant les mesures déjà prises, de connaître les répercussions éventuelles de ces mesures sur d'autres secteurs. |
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+ | Ces répercussions sont en ce qui concerne l'usine d'Odet du travail à quelque 350 ouvriers et des exportations de l'ordre annuel de 1.500.000 dollars. | ||
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+ | Mais pour repartir il faut, à notre moulin à papier autre chose que 350 paires de bras, ce dont d'ailleurs M. Bolloré compte trouver sous quelques jours, mais la matière première. | ||
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+ | En période normale, il faut à cette usine 600 tonnes de charbon par mois. Il est à craindre que les répercussions aux U.S.A. se fassent sentir dès le démarrage ; la production des seules mines françaises n'arrivant pas à satisfaire les besoins de l'industrie. | ||
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+ | Il faut encore du chlore, des produits de blanchiment et de façon plus générale des produits chimiques. | ||
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+ | Quant aux chiffons, ils étaient fournis avant-guerre presque exclusivement par la Russie et la Pologne et acheminés sur Brest par cargos. | ||
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+ | Actuellement, les nouveaux marchés sont la France, la Belgique, l'Angleterre, les Etats de l'Amérique du Sud et ... la Russie via les U.S.A. ! | ||
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+ | C'est dans ces conditions que, sauf accident, maintenant imprévisible, le papier d'Odet doit sortir dans les premiers jours de Novembre. | ||
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+ | 350 ouvriers répartis en trois équipes de 8 heures assureront le roulement sans arrêt des machines. | ||
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+ | Odet va repartir ... | ||
+ | </spoiler><spoiler id="998" text="QUELQUES CHIFFRES ...">QUELQUES CHIFFRES | ||
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+ | Nos lecteurs seront sans doute curieux de connaître la production annuelle en papier à cigarettes des usines d'Odet et de Cascadec. Nous leur donnons ici, les chiffres que M. Bolloré nous a aimablement communiqués. | ||
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+ | Année 1938, 3.800 tonnes ; 1939, 3.200 ; 1940, 2.000 ; 1941, 1.000 ; 1942, 700 ; 1943, 600 ; 1944, 150 ; 1945, 600. | ||
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+ | Pour l'année en cours, il est prévu la fabrication de 2.000 tonnes et pour 1947 : 3.000 tonnes. | ||
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+ | L'an prochain, nous approcherons donc du chiffre des années d'avant-guerre. | ||
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+ | Il nous est agréable d'enregistrer le départ d'une usine dont la renommée n'est plus à établir et dont les produits bien français connaissent la faveur des marchés non seulement d'Amérique, mais de la plus grande partie des pays d'Europe, jusqu'à la Suède, la Turquie et le Portugal. | ||
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+ | En les temps que nous vivons, le départ d'Odet est un acte de confiance en l'avenir du Pays. | ||
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<spoiler id="992" text="Nous avons tenu à aller voir ...">Nous avons tenu à aller voir M. Gwenaël Bolloré, directeur général des Papeteries, qui a bien voulu nous recevoir et nous expliquer le point de vue de la direction. | <spoiler id="992" text="Nous avons tenu à aller voir ...">Nous avons tenu à aller voir M. Gwenaël Bolloré, directeur général des Papeteries, qui a bien voulu nous recevoir et nous expliquer le point de vue de la direction. | ||
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+ | « C'est une erreur, nous dit-il, de dire que nous avons lock-outé l'usine de Scaër ; en réalité nous nous sommes trouvés en face d'une nécessité : nos machines fournissant trois tonnes de papier par exemple, et les ouvriers de façonnage par suite de leur détermination de diminuer le rendement de l'usine n'en façonnant qu'une tonne et demie, très vite nous nous sommes trouvés devant un amoncellement de papier qu'il nous était impossible de continuer à travailler. | ||
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+ | « D'autre part, il ne nous appartient pas de donner satisfaction aux ouvriers en ce qui concerne les revendications qui sont du ressort du Gouvernement et de lui seul. » | ||
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+ | IL N'Y A PAS DE BÉNÉFICES AVANT LE BILAN | ||
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+ | « Qui peut parler de bénéfices, soi-disant astronomiques, réalisés par l'usine avant le bilan de fin d'année ? nous répond M. Bolloré à notre question à ce sujet. Il ne faut pas confondre bénéfices, chiffres d'affaires et augmentations de capital ... » | ||
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+ | LA POSITION DE LA DIRECTION | ||
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+ | « Notre position est très simple, nous répète encore une fois M. Bolloré, nous n'accepterons aucune discussion avant la reprise du travail. | ||
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+ | « Lorsque la délégation ouvrière nous a présenté sa liste des revendications, liste que la loi ne nous permet pas d'ailleurs d'accepter, nous avons toutefois consenti ce qui était de notre ressort : une augmentation de la prime de logement ce qui revenait à augmenter les traitements de 2 %. » | ||
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+ | LA REPRISE DU TRAVAIL | ||
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+ | Interrogé sur la durée possible du conflit, M. Bolloré nous répond qu'il espère que les ouvriers comprendront que leur intérêt ne peut être de prologer indéfiniment cette grève qui ne peut, en aucune façon, leur apporter satisfaction, car l'usine ne pourra jamais travailler raisonnablement aux conditions demandées par la délégation ouvrière C.G.T. | ||
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+ | Avant de terminer, M. Bolloré nous déclare que les proportions d'augmentation de production citées par le secrétaire du syndicat, prétendant que les garnitures du bobinage ont passé de 4 à 5, chiffre d'avant-guerre, à 11 et 23, aujourd'hui, sont dénuées de tout fondement, aussi bien d'ailleurs que l'augmentation prétendue de 100 kilos à 400 kilos de la production des calandres. | ||
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+ | En ce qui concerne les salaires, M. Bolloré nous fait remarquer que le salaire moyen de l'usine est actuellement nettement supérieur au salaire maximum moyen, lequel est lui-même de 15% au-dessus du salaire minimum. | ||
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+ | LES REVENDICATIONS DES GRÉVISTES | ||
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+ | Les revendications des grévistes restent les mêmes. Elles sont, comme l'on sait : une allocation d'attente de 3.000 francs par mois ; le salaire de 48 heures pour un travail effectif de 40 heures, une prime de rendement, une extension de la prime de panier qui n'est accordée actuellement qu'au personnel de nuit travaillant huit heures consécutives, la prime de vacances et une augmentation de la prime de logement qui est, à leur point de vue, ridiculement basse. | ||
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+ | À L'USINE D'ODET LE TRAVAIL CONTINUE | ||
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+ | À l'usine d'Odet, le travail n'a pas cessé et continue normalement. Des élections ont eu lieu hier qui ont porté à 102 le nombre de voix C.F.T.C. pour les délégués titulaires et 97, les voix C.F.T.C. pour le comité titulaire, contre 140 et 150 à la C.G.T. La proportion note un fort apport de voix à la C.F.T.C. si l'on compare les votes des années 1947 et 1948 qui donnaient : | ||
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+ | * Délégués titulaires C.G.T. : 142 ; C.F.T.C : 43 en 1947. C.G.T. 128 ; C.F.T.C. : 43 en 1948. | ||
+ | * Comité titulaire. C.G.T : 144 ; C.F.T.C. : 57, en 1947. C.G.T. : 136 ; C.F.T.C. : 52, en 1948. | ||
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+ | Des échos que nous avons recueillis tant à Scaër qu'à Lestonan, on souhaite que le conflit prenne fin le plus tôt possible et que le travail soir repris. C'est aussi le nôtre. | ||
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1° Rappelons que le 23 octobre le bureau syndical C.G.T. déposait un cahier de revendications et décidait d'engager toutes actions nécessaires pour les faire aboutir. | 1° Rappelons que le 23 octobre le bureau syndical C.G.T. déposait un cahier de revendications et décidait d'engager toutes actions nécessaires pour les faire aboutir. | ||
- | <spoiler id="993" text="Les améliorations décidées par la Direction ...">Les améliorations décidées par la Direction (elles concernaient la prime de logement et les indemnités aux vieux travailleurs) ayant paru insuffisantes, divers ateliers entreprirent de réduire la production. | + | <spoiler id="993" text="Les améliorations décidées par la Direction ...">Les améliorations décidées par la Direction (elles concernaient la prime de logement et les indemnités aux vieux travailleurs) ayant paru insuffisantes, divers ateliers entreprirent de réduire la production. Le Directeur de l'usine s'efforça d'attirer l'attention du personnel sur le caractère extrêmement grave d'agissements consistant, en contradiction avec les ordres des chefs responsables, à concerter le bouleversement de l'organisation établie et à conduire dans un délai très court à la paralysie de l'usine. Les invitations pressantes et réitérées du Directeur ne furent pas entendues. L'action, dont le cahier des revendications faisait menace, s'est poursuivie, entraînant la désorganisation des services et, comme conséquence finale, l'arrêt de l'usine. |
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+ | Les responsables du mouvement savaient fort bien que tel serait l'aboutissement d'une action qu'ils avaient voulue ; ils sont également responsables de cet aboutissement. | ||
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+ | 2° La Direction a de nouveau fait connaître au personnel que la moyenne des salaires de l'usine est actuellement nettement supérieure au salaire maximum moyen, lequel est lui-même de 15% au-dessus du salaire minimum légal. | ||
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+ | Des avantages et primes de diverses natures viennent s'y ajouter. | ||
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+ | En outre au cours des 12 derniers mois, il a été entre autres alloué au personnel une gratification de Noël, une augmentation de la prime d'ancienneté, une distribution lors de la réunion annuelle en juin dernier du Comité d'Entreprise et le 2 novembre une amélioration de la prime de logement et des indemnités aux vieux travailleurs. | ||
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+ | Sans que cette affirmation ait pu être contredite, la Direction a rappelé que l'ensemble des primes ou avantages divers et des salaires se comparait favorablement dans notre usine avec des conditions similaires. On ne s'explique pas dès lors que les seules usines de Cascadec et de Troyes fassent l'objet de l'action qui a été déclenchée contre elles. | ||
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+ | 3° La Direction déplore l'attitude des dirigeants C.G.T. qui ont entrepris une action qui compromet l'avenir de l'usine de Cascadec et qui privera le personnel des salaires correspondant à la période d'arrêt de l'usine. Elle veut encore espérer que le bon sens et la raison finiront par prévaloir pour permettre la reprise normale du travail. | ||
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Version actuelle
| Des articles de presse sur la reprise après la seconde guerre mondiale des activités papetières dans les usines d'Odet (Ergué-Gabéric) et de Cascadec (Scaër).
Source : Archives en ligne du journal Ouest-France (transcriptions et fac-similés ci-après). Autres lectures : « Les 40 ans de vie OCB, Odet-Cascadec-Bolloré, d'Henri Le Gars » ¤ « Henri Le Gars, employé aux usines Bolloré en novembre 1939 » ¤ « L'entreprise Bolloré, Réalités Noël 1949 » ¤ « Index chronologique de l'histoire des papeteries d'Odet-Cascadec » ¤ « 1950 - Match inter-usines des Paotred d'Odet contre Cascadec » ¤ |
[modifier] Présentation
Henri Le Gars, ayant commencé sa carrière dans l'entreprise Bolloré en 1939, a déjà raconté l'arrêt de la production à Odet et le maintien au ralenti de la fabrication dans l'usine sœur de Cascadec : « En 1941 quand l'usine d'Odet s'est arrêtée, tous ceux qui étaient au mois ont pu rester pendant 4 ans, payés à ne rien faire, en vacances en quelque sorte. Ceux qui étaient payés à l'heure ont été tous débauchés. » Il a témoigné aussi, pour y avoir participé, de la façon dont la production est repartie sur les deux sites.
Les articles collectés dans le journal Ouest-France de 1944 à 1949 confirment aussi des difficultés de trouver des matières premières (charbon, produits chimiques, chiffons), notamment ce reportage complet paru le 23 septembre 1946 : « La production industrielle a donné à M. Bolloré, directeur des usines d'Odet, avis de l'attribution de charbon, en quantité suffisante pour permettre une exploitation tout à fait normale. » C'est le résistant François de Menthon, ministre de l’Économie nationale, en visite officielle à Cascadec-Odet en ce mois de septembre 1946, qui a permis cette attribution de charbon et accéléré la reprise d'activité. Une démarche administrative interne a aussi été nécessaire, car le patron historique René Bolloré est décédé en 1935 et ses fils n'ont pas vraiment pris avant-guerre les rênes de l'entreprise. La veuve de René Bolloré, remariée en 1940 au chirurgien André Soulas, en est restée la gérante. L'avis Ouest-France publié en septembre 1944 officialise la passation des pouvoirs au fils aîné René-Guillaume : « Par décision de l'Assemblée générale de la Société à responsabilité Les Papeteries René Bolloré, dont le siège social est à Odet commune d'Ergué-Gabéric (Finistère), réunie le 30 août 1944, M. René-Guillaume BOLLORÉ est nommé Gérant de la dite Société pour une durée de 5 années en remplacement de Mme SOULAS, démissionnaire. » Deux augmentations de capitaux ont été aussi nécessaires en décembre 1946 (de 23 à 65 millions de francs) et en juillet 1949 (180 millions) pour « Les Papeteries René BOLLORÉ », toujours organisée en Société à responsabilité limitée. Les chiffres de production sont représentatifs de la période : la production annuelle de papier des deux usines est de 3.800 tonnes en 1938, moins de 1.000 tonnes de 1941 à 1945, 2.000 en 1946 et 3.000 en 1947. Il y avait seulement 50 employés à Odet de 1941 à 1945, pour atteindre en 1947 : 350 à Odet et 650 à Cascadec. En 1948 on note deux décès importants qui marque la fin d'une époque : Léonie Bolloré, centenaire et mère du patron historique d'avant-guerre, et le contremaître chef de fabrication Pierrot Éouzan à l'âge de 63 ans. |
En 1948 et 1949 les journalistes rencontrent et citent régulièrement Gwenaël Bolloré, le directeur général des usines, son frère René-Guillaume étant basé à Paris. Et notamment lorsqu'il organise pour la première fois en avril 1948 le tournoi de football des deux papeteries sur le terrain d'Odet. Et il est aussi en position de négociateur face aux grèves de la C.G.T. à la fin 1939 à Cascadec. Il faut dire que ce syndicat s'était déjà penché sur le sort des vieux en organisant une souscription en novembre 1946. Trois ans après, les revendications sont salariales, notamment le rehaussement des primes de logement, de rendement et de panier. Des arrêts de travail ont lieu au service de façonnage à Cascadec, alors qu'Odet ne connaît aucune action de ce genre. Les journalistes d'Ouest-France notent une progression du syndicat concurrent C.F.T.C. lors des élections syndicales des années 1947 et 48. Le journal appelle même à la fin du conflit et fait paraître une mise au point de la Direction sur les avantages déjà accordés au personnel papetier. La C.G.T. de Cascadec se résoudra à une reprise normale du travail en décembre 1949. |
[modifier] Transcriptions
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1944 OF, 28 sept 1944 :
1946 OF, 16 sept 1946
OF, 23 sept 1946
OF, 21 nov 1946
OF, 30 dec 1946
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1948 OF, 19 fev 1948
OF, 8 mars 1948
OF, 23 avril 1948
1949 OF, 10 mai 1949
OF, 6 juillet 1949
OF, 10 nov 1949
OF, 18 nov 1949
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[modifier] Coupures de presse
Ouest-France 1944-1949 | |||||
[modifier] Annotations
Thème de l'article : Revue de presse Date de création : Avril 2023 Dernière modification : 27.06.2023 Avancement : [Développé] |