L'enseignement d'un professeur d'agriculture vu par un "potr-saout" - GrandTerrier

L'enseignement d'un professeur d'agriculture vu par un "potr-saout"

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Dans l'extrait ci-dessous Jean-Marie Déguignet a 17 ans et est embauché par un professeur d'agriculture comme « potr saout » [1] (vacher) dans une ferme expérimentale à Kerfeunteun.

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Autres lectures : « Espace Déguignet » ¤ « CORNETTE Joël - Histoire de la Bretagne et des Bretons » ¤ « La victoire du fils de Pod Saout, Le Télégramme 1983 » ¤ « Recueil des bretonnismes de Jean-Marie Déguignet » ¤ 

1 Présentation

 

2 Morceau choisi

Page 126 de l'Intégrale des Mémoires d'un paysan bas-breton :

Vacher à Kermahonnec (1851-1854)

En ce temps-là, il était venu un Monsieur à Kerfeunteun comme professeur d’agriculture pour apprendre aux Bretons l’art de cultiver la terre. Mais les paysans se souciaient peu alors d’apprendre quoi que ce soit en agriculture ni ailleurs. La vieille routine, pas autre chose. Quelques-uns des vieux cultivateurs passaient par la ferme du professeur quelquefois pour regarder les instruments nouveaux, qu’ils n’avaient jamais vus, et regarder les ouvriers travailler. Mais ils s’en allaient en haussant les épaules, et en disant qu’ils auraient à en donner des leçons à ce professeur. Ils voyaient bien qu’il y avait là de belles prairies, bien égouttées et irriguées, des champs de trèfle, de gros choux et des rutabagas, mais tout ça coûtait plus qu’il ne valait, et d’abord les bêtes bretonnes n’avaient pas besoin de ces choses-là pour vivre, pas plus que les hommes n’avaient besoin du pain blanc, de la viande et des légumes, toutes choses alors inconnues dans nos campagnes. Bref, les paysans n’en voulurent pas du tout des enseignements agricoles de ce monsieur. Si c’eût été un paysan encore ! Mais un monsieur à chapeau haut et qui ne savait pas parler breton pouvait-il être cultivateur ? Allons donc ! Les paysans ne pouvaient admettre qu’un monsieur de la ville pût savoir couper la lande, retourner une motte de terre, faucher, moissonner, charger du fumier dans la charrette, râteler les fossés, tracer un sillon avec la charrue en bois à avant-train, modèle Triptolème [2], les seules choses nécessaires selon eux pour être bon cultivateur. De la science agricole, ils n’en avaient cure. Ce n’était pas avec des livres qu’on pouvait faire de l’agriculture

 

Page 127

Le dimanche, quand j'allais à la messe de neuf heures à Quimper, je passais aussi par Kermahonnec Kerfeunteun où était ce professeur d"agiculture. Je restais longtemps regarder les instruments aratoires de tous genres que je n'avais jamais vus, et dont je ne ne savais même pas le nom. Je regardais les champs de trèfle, les rutabagas, les gros choux et autres fourrages inconnus pour moi.

Une fois, voyant la porte de l'étable ouverte, je voulus voir les vaches dont on disait des merveilles, que chacune d'elle donnait autant de lait et de beurre qu'une demi-douzaine de pauvres petites vaches auxquelles on de donnait jamais rien à manger durant l'été que ce qu'elles trouvaient à brouter dehors, et un peu de paille sèche l'hiver. Je vis en effet que ces vaches ...


3 Annotations

  1. Le terme Potr-saout est considéré aujourd'hui comme un bretonnisme (cf. étude d'Hervé Lossec) car très utilisé en français en Bretagne. De « paotr » pour le garçon, et « saout » pour les vaches, soit donc le garçon vacher. À noter que lorsque le métier de surveillance des troupeaux de vaches fut assuré par des clôtures électriques, celles-ci étaient appelées « paotr-saout electrik ». [Ref.↑]
  2. Triptolème : prêtre original de la déesse Déméter, dans la mythologie grecque. Déméter donna à Triptolème une charrue en bois et des grains de blé pour aller enseigner l’agriculture aux mortels. [Ref.↑]




Thème de l'article : Ecrits de Jean-Marie Déguignet

Date de création : Février 2015    Dernière modification : 14.02.2015    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]