La vente de presbytère n'est pas systématique pendant la Révolution française. En effet le 20 décembre 1790, un décret soustrait de la vente des biens de l'Église, chaque fois que cela est possible, un logis convenable servant de presbytère au prêtre de chaque paroisse ainsi qu'un demi arpent de terre utilisé comme jardin.
Mais, au départ du recteur en exil à Prague, le logis presbytéral gabéricois reste vide et pour cette raison l’aliénation est mise en exécution le 25 prairial de l'an 4, c'est à dire le 13 juin 1796 : « l'estimation par experts est ordonnée pour fixer le prix auquel il doit être aliéné, tant en revenu qu'en capital sur le pied de la valeur de 1790 » (sur le pied de : "d'après des ressources évaluables à cette date", c'est-à-dire hors inflation et dépréciations ultérieures).
Le document d'estimation donne des précisions sur la valeur patrimoniale non négligeable du bien confisqué :
« couverte en ardoises, elle a cinquante six pieds de longueur dans sa longère du midi laquelle est percée d'une porte et huit fenêtres » : des ardoises plus cossues qu'un toit de chaume, et une bâtisse de plus de 15 mètres.
« À l'ouest de la maison principale, intérieurement à la même cour, est construite une écurie en mêmes matériaux que la maison » : à l'endroit du garage actuel.
« Au midi de la cour est un jardin de quinze cordes d'étendue » : un petit verger de moins de 1000 m2.
« Sur la limitte vers Quimper de la commune d'Ergué Gabéric et bordant la rivière d'Odet, entre Tréodet et Keranroux est une prairie de deux journaux » : une prairie d'un hectare (laquelle hébergeait une statue de saint Gwenaël qui sera rapatriée au presbytère bien plus tard).
Après le calcul à partir des revenus annuels de la valeur du capital, sur la base des taux de conversion de l'époque (x18 et x22), Vincent Leblond de St-Aubin, expert nommé par le directoire de Quimper, aboutit à un chiffre de 1790 livres, arrondies à 1790 francs au moment de la vente (normalement un franc vaut 1 livre et 3 deniers).
Ce qui surprend c'est la précipitation dans laquelle la cession du presbytère est opérée : l'autorisation administrative le 13 juin, l'estimation sur place une semaine après, et la vente entérinée le 25 juin, sans enchères publiques comme lors des autres attributions de biens nationaux communaux. Le soumissionnaire de l'autorisation administrative est l'acquéreur lui-même, et ce dernier, Salomon Bréhier, contresigne lui-même le document d'estimation de son collègue avoué expert Vincent Leblond.
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François Salomon Bréhier, né le 20 octobre 1760 à St-Ronan (Quimper), d'une famille originaire de la Manche, a l'habitude des aliénations de biens, ayant lui-même rédigé des documents d'expertise pour la plupart des chapelles et des biens nobles de la commune. C'est un notable quimpérois influent, initié à la loge maçonnique de La Parfaite Union, qui exerce les professions de procureur au présidial de Quimper et d'avoué (avocat expert des tribunaux).
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La semaine prochaine, nous examinerons, avec des documents inédits, ce qu'il est advenu du presbytère après son aliénation en 1796.
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