Feuillet 1
Ponts et chaussées. Département du Finistère. Service hydraulique. Subdivision de Quimper. M. Audoc, subdivisionnaire. M. Crepin, ingénieur ordinaire. M. Leport, ingénieur en chef. N° d'ordre du registre : 198. À Quimper, le 24 Septembre 1919
Bassin de l'Odet. Rivière d'Odet. Polices des cours d'eau. Moulin à papier. Commune d'Ergué-Gabéric.
Réclamation de M. Laÿrle, Président de la Société de pêche de Quimper. Rapport du subdivisionnaire.
Par lettre du 22 Août dernier, M. Laÿrle, Président de la Société de pêche deQuimper, expose que la rivière l'Odet (région du Sangala) est dépeuplée de truites et de saumons par suite du déversement dans cette rivière de produits toxiques provenant de la papeterie d'Odet. Il demande que l'on vérifie :
1° - Si le barrage de la papeterie d'Odet est actuellement à son niveau légal.
§ 2° - Si cette usine possède et se sert de bassins ...
2° - Si cette usine possède et se sert de bassins de décantations en nombre suffisant et de tous moyens utiles pour éviter le jet dans la rivière de produits toxiques d'eau non clarifiés, de résidus organiques fermentant après obsorption de l'oxigène dissous dans l'eau.
Nous nous sommes rendus sur les lieux le 22 Septembre à l'effet d'instruire cette demande. Nous avons vu le barrage de prise d'eau de l'usine et les bassins de décantation en service. Le représentant de M. Bolloré, usinier nous a montré les plans des travaux projetés et nous a donné sur place toutes les explications nécessaires.
Il résulte de cette visite des lieux et de cette conversation :
1° que toutes les eaux de l'Odet, à 1 km 600 environ en amont de l'usine, sont dérivées dans un canal à flanc de coteau par un barrage en maçonnerie formant déversoir, sur toute la largeur de la rivière. Ce déversoir très ancien dont la crête doit constituer le niveau légal, à défaut de règlement d'eau, n'a pas été surélevé par des ouvrages permanents. Cependant nous avons constaté qu'on avait posé sur cette crête une rangée de blocs de pierre irrégulière de 20 à 30 cm de hauteur, non jointifs.
2° que l'usine possède et se sert de bassins de décantation. Ces bassins servant à la clarification des eaux résiduaires provenant des digesteurs. Elles sont chargées des impuretés enlevées aux chiffons lavés et contiennent quelques traces de soude. Les eaux chlorées venant des appareils de blanchiment
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Feuillet 2
ne seraient pas déversées dans la rivière. Elles seraient recueillies soigneusement et le chlore récupéré. Ce système n'a pas été modifié depuis la guerre. Il ne doit pas être absolument efficace quoique le représentant de l'usinier nous ait déclaré que l'on ait pêché encore cette année des truites et des saumons immédiatement en aval de l'usine. Les bassins ne sont pas assez important et les eaux résiduaires sont rendues à la rivière avant d'être absolument clarifiées (1). M. Bolloré, propriétaire de l'usine s'est rendu compte de l'imperfection des dispositifs d'épuration actuellement employés ; il doit prochainement améliorer cette situation. Le projet qu'on nous a montré comporte la construction de bassin de décantation (système Desrumeaux [1] ) occupant une surface d'au moins 1.400 m2. Ces bassins seront divisés en compartiments par des cloisons disposés en chicane. Avant leur sortie, les eaux auront eu le temps de déposer toutes leurs impuretés.
§ En résumé, nous estimons ...
En résumé, nous estimons :
1° - que le niveau légal du barrage de l'usine n'a pas été modifié d'une façon permanente mais qu'il est surélevé, aux basses eaux, par la pose sur le déversoir de blocs de pierre non jointifs et qu'il y a lieu d'inviter l'usinier à cesser cette façon de faire.
2° - qu'actuellement les dispositifs d'épuration semblent insuffisants, qu'une analyse des eaux épurées à leur arrivée à la rivière pourrait seule élucider cette question dont se préoccupe actuellement l'usinier puisqu'il projette la construction de nouveaux bassins de décantation.
Le Conducteur Subdivisionnaire, signé : AUDIC.
Avis de l'ingénieur ordinaire.
Nous partageons dans l'ensemble l'avis du Subdivisionnaire et nous proposons :
1° - de faire connaître à M. Bolloré qu'il est formellement interdit de surélever un barrage sans autorisation même provisoirement et par des moyens de fortune.
2° de faire procéder aux frais de l'usinier (en période de basses eaux de préférence) par les soins du laboratoire départemental à une analyse des eaux rejetées à la rivière après épuration, afin de pouvoir mettre, s'il y a lieu, l'usinier en demeure de préfectionner son système de décantation sous peine d'interdiction de déverser à la rivière ses seaux résiduelles.
Quimper, le 27 Septembre 1919. L'ingénieur Ordinaire, signé : CREPIN. Vu et adopté par l'Ingénieur en chef soussigné. Quimper, le 30 Septembre 1919, signé : LEFORT.
((1) Ce ne serait qu'en les analysant à leur sortie de ces bassins qu'on pourrait vérifier qu'elles ne contiennent réellement comme l'assure l'usinier ni chlore, ni autres produits toxiques en quantité appréciable.
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Feuillet 3
Eaux-&-Forêts. 15e conservation. Inspection de Lorient. Lorient, le 26 Novembre 1919.
L'Inspecteur des Eaux-&-Foorêts à Monsieur Bolloré, Papeteries de l"Odet, Quimper.
Monsieur,
J'ai l'honneur de vous accuser réception de votre lettre du 19 courant, à laquelle je n'ai pas pu répondre plus tôt parce que je n'étais pas encore en possession du certificat d'analyse, délivré en duplicata par le Laboratoire Départemental à cette même date du 19.
Je vous adresse une copie de ce certificat.
§ Si aucune poursuite ne peut se baser ...
Si aucune poursuite ne peut se baser sur des constatations qui sont antérieures au 19 Octobre dernier ...
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Feuillet 4
Analyses N° 1000, 1001, 1002. Duplicata.
Station agronomique de Quimper et Laboratoire Départemental du Finistère fondé en 1873 au Lézardeau.
Échantillons des eaux de l'Odet envoyés le 6 octobre 1910 par M. Laÿrle, Villa Bellevue, Président de la Société de Pêche, à Quimper.
N° 1 - Eaux d'amont. N° 2 - Sortie des bassins. N° 3 - 50 m en aval.
§ Composition par litre ...
Composition par litre ...
NOTE. - Les eaux n° 2 et 3 se sont enrichies en sels solubles dans une très faible proportion, ne pouvant nuire aux poissons. Elles ne contiennent pas de chlore libre, toxique. - Les eaux, chimiquement, ne sont pas dangereuses. - En suspension, elles tiennent des fibres végétales en quantité non négligeable et qui, peut-être, pourraient être la cause d'une gêne sérieuses pour la respiration branchiale des poissons, par obstruction des branchies. Un bonne décantation des eaux résiduaires est nécessaire.
Quimper, le 19 Novembre 1919. Le Directeur de la Station agronomique de Quimper et du Laboratoire Départemental. Signé : VINCENT.
Pour copie conforme : Lorient, le 25 Novembre 1919. L'inspecteur des Eaux-et-Forêts. Signé : Fatou.
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