1902 - Enquête diocésaine sur l'usage du breton à Ergué-Gabéric - GrandTerrier

1902 - Enquête diocésaine sur l'usage du breton à Ergué-Gabéric

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Une enquête de l'évèque de Quimper sur la pratique de la langue dans ses paroisses, dans un contexte où l'église et les congrégations sont la cible d'Emile Combes, ministre de l'Intérieur et des Cultes, lequel se bat également contre les langues régionales.

Les différentes pièces sont conservées aux Archives Diocésaines de Quimper sous la cote 4F17 et ont fait l'objet d'un dossier sur le site Internet du diocèse : http://diocese-quimper.fr/bibliotheque/.

La paroisse d'Ergué-Gabéric se distingue par une position bien tranchée sur la dominance de la langue bretonne, et sur son trait d'humour quand il est question d'un enfant né à Paris qui seul serait capable de suivre son catéchisme en français.

Autres lectures : « Jean Hascoët, recteur (1897-1908) » ¤ « CHUTO Pierrick - IIIe République et Taolennoù, tome I » ¤ « 1900 - Demande préfectorale de déclassement du recteur par trois républicains » ¤ « 1902 - Documents sur la fermeture de l'école Notre-Dame de Kerdévot » ¤ 

Présentation

Dans son livre « IIIe République et Taolennoù », Pierrick Chuto [1] présente cette contestation locale de la loi Combes qui voudrait imposer l'abandon du breton au catéchisme et à l'église : « L’évêque diligente une enquête dans les trois cent dix paroisses du diocèse. Les recteurs bretonnants font souvent preuve de mauvaise volonté pour remplir ce questionnaire jugé inquisitorial. »

Et il ajoute : «  À Penhars, sur les trente enfants âgés de neuf à dix ans qui sont inscrits au catéchisme paroissial, trois seulement sont capables d’apprendre le catéchisme en français. À Plomelin et Pluguffan, aucun enfant n’en est capable, alors qu’à Ergué-Gabéric, un seul (né à Paris) le peut. ».

Le questionnaire de l’Évêché contenait 6 questions : 1° Enfants en première communion (Ergué-Gabéric : 63, âgés de 10 ans) ; 2° Combien comprennent facilement le français ? (E.-G. : "un, né à Paris") ; 3° Combien ne comprennent que le breton ? (E.-G. : 180 enfants au total de plus de 9 ans) ; 4° Combien comprendraient un catéchisme en français ? (E.-G. : "5 ou 6") ; 5° Y-a-t il plusieurs types de catéchisme (E.-G. : "un seul catéchisme, Breton") , 6° Instructions paroissiales en français ou en breton ? (E.-G. : "en Breton seulement").

Le recteur Jean Hascoêt qui est connu pour ses positions de défense de l'église et des congrégations religieuses contre les actions des gouvernements de la République, est ici un peu provoquant dans sa réponse : comment peut-on penser qu'un jeune natif d'Ergué-Gabéric veuille maitriser la langue française ? A l'extrême rigueur s'il est né à Paris cela est envisageable. Et donc, à Ergué-Gabéric, en 1902, la communication, au niveau de la paroisse et des séances de catéchisme, se fait exclusivement en Breton, mot que le recteur orthographie avec une majuscule.

 

Le compte-rendu de l’enquête dans la Semaine Religieuse est un peu plus nuancé, que ce soit au niveau des 310 paroisses, ou celui du nombre des enfants et paroissiens : dans 95% des paroisses le catéchisme est majoritairement en breton et les instructions paroissiales sont à 63%, et si l"on rapporte aux nombre d'enfants ou paroissiens les chiffre sont respectivement de 70% et 62%.

Et la conclusion est celle-ci : « La langue bretonne s'impose nécessairement, et vouloir la proscrire ce serait équivalemment interdire l'instruction religieuse dans ce beau et chrétien diocèse ».

L'archiviste Jean-Louis Le Floc'h [2] et Fanch Broudic ont étudié les documents de l'enquête et ses suites politiques. Le 9 janvier 1903, Emile Combes prononce 31 suppressions de traitement de prêtres finistériens, avec comme motif « usage abusif de la langue bretonne ». Étonnamment Jean Hascoët échappe à cette sanction.

Transcription

Questionnaires

Communiqué de l’Évêché. - I. QUESTION DE LA LANGUE BRETONNE. Monseigneur l’Évêque prie MM. les Curés et Recteurs de bien lui fournir, dans le plus bref délai possible, les renseignements suivants :

1° Quel est le nombre exact des enfants de 9 et 10 ans qui sont appelés, d'après les nouveaux règlements, à suivre dans la paroisse les catéchismes de première communion ?

2° Combien y en a-t-il parmi eux qui soient capables d'entendre facilement et avec fruit le catéchisme français ?

3° Quel est le nombre de ceux qui, connaissant un peu la langue française, ne pourraient abandonner le catéchisme breton, sans sérieux détriment pour leur instruction religieuse.

4° Combien en compte-t-on qui sont absolument incapables d'apprendre un autre catéchisme que le catéchisme breton ?

5° Sans parler des répétitions particulières faites à quelques enfants, y a-t-il dans la paroisse deux catéchismes, l'un donné en breton et l'autre en français ? Quel est le nombre respectif des enfants qui les fréquentent ?

6° Les instructions paroissiales se font-elles en breton ou en français, ou bien encore dans l'une et l'autre de ces langues ?

 

Réponses du recteur

Ergué-Gabéric.

Réponses à la question de la langue Bretonne.

1° aucun de 9 ans - 63 de 10 ans.

2° un, né à Paris.

3° 180 c'est-à-dire tous les enfants des 9 consommées

4° 5 ou 6

5° un seul catéchisme, Breton

6° en Breton seulement

Ergué-Gabéric le 18 octobre 1902

(signature Jean Hascoët)

Originaux

Annotations

  1. Pierrick Chuto, passionné d'histoire régionale, auteur de nombreux articles (Le Lien du CGF, La Gazette d'Histoire-Genealogie.com ... ) et de livres sur les pays de Quimper et du Pays bigouden : § [ses publications] . La dernière parution est « Bien-aimée Marie-Anne avec de belles lettres d'amour de son arrière-grand-père à sa promise. [Ref.↑]
  2. Le Floc’h Jean‐Louis : Né le 4‐12‐1920 à Plonivel (Plobannalec), fils de Jean‐Louis et Corentine Paul ; études primaires à Plobannalec, Plonéour‐Lanvern, Pont‐Croix, séminaire de Lesneven et Quimper ; 29‐06‐1946, prêtre, vicaire au Faou ; 20‐08‐1948 vicaire à Douarnenez ; 01‐08‐1961, aumônier diocésain ACI à Brest ; 28‐12‐1965, vicaire général, archidiacre (Quimper, Quimperlé), chanoine honoraire et directeur des Œuvres ; 06‐06‐1969, cesse d’être directeur des Œuvres ; 1970, aumônier UnCMRS et ensuite REPSA ; 01‐01‐1973, accident de voiture (cure marine à Douarnenez) ; retiré à l’évêché, prend en charge les archives historiques ; 1976, vice‐président de la Société archéologique du Finistère ; 1977, vice‐official ; 1996 se retire à la maison de Missilien, Quimper ; décédé le 8 mai 2009, enterré à Plobannalec. Source : Archives diocésaines de Quimper. [Ref.↑]



Thème de l'article : Buhez ar gomun - Le breton dans la vie publique

Date de création : Août 2017    Dernière modification : 24.08.2017    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]