Quatre moulins à farine et un moulin à papier du côté d'Odet - GrandTerrier

Quatre moulins à farine et un moulin à papier du côté d'Odet

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Catégorie : Patrimoine
 Site : GrandTerrier

Statut de l'article :
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§ E.D.F.

Sommaire

Autres lectures : « La création de la manufacture d'Odet » ¤  « Le Bigoudic et le canal d'Odet » ¤ 


1 Le premier canal

Sur ce relevé de 1835 il apparaît que le canal ne fait pas 1500 mètres de longueur comme il est indiqué dans tous les documents. En faisant une mesure de la zone sur une carte IGN on trouve moins de 500 mètres. Le canal est implanté beaucoup plus prés de la rivière afin de permettre sa captation à un niveau correct. Il ne semble pas y avoir eu d’écluse et l’on se trouve à plus de 1000 mètres du site de l’ancien moulin de Coat-Piriou avec lequel il ne peut donc pas y avoir de confusion.

Le premier bief n’est en fait qu’un simple ruisseau. Il est creusé dans la terre très prés de la rivière. Il en reste des traces assez visibles bien qu’il soit en partie comblé. En 1835 la propriété le MARIE se limite au canal comme le montre le trait pointillé marron. Le pont est visible du point de détournement et les restes d’une retenue d’eau font encore barrage et sont encore visibles dans la rivière (point A)

Le canal que nous connaissons actuellement a donc été construit après 1835 et a nécessité de nombreuses acquisitions de terrains le long de la rivière. Mais quand cette construction a-t-elle eu lieu ? Ce nouveau canal est rendu indispensable par l’énergie importante nécessaire au fonctionnement des nouvelles machines. C’est peut-être à ce moment que d’autres partenaires se sont associés à Nicolas le Marié.

Cette nouvelle donnée permet aussi de mieux comprendre la rapidité de la mise en fonction du moulin par la réduction des travaux engagés. Au démarrage l’entreprise se réduit sans doute en 1822 à un moulin et un bief de longueur et de débit réduit. L’ancien bief a l’aspect d’ un large fossé maçonné du coté opposé à la rivière et à quelques mètres de celle-ci. Il est très visible en plusieurs endroits jusqu’au hangar de tennis (pour situer l’ouvrage : on aperçoit le pont en blanc au fond haut droit de l’image). Le doute n’est pas possible car un fossé n’aurait aucune fonction aussi prés de l’Odet.

2 Le grand canal

Dans son discours, pour le centenaire de l'usine en 1922, l'Abbé André-Fouet évoque la construction du canal comme une oeuvre de titan mais sans en nommer les constructeurs. Voici cet extrait :


A cette époque, dans nos régions, on utilisait bien peu la houille blanche comme moteur industriel : ce fils voulut faire coup double en s'en servant pour fonder une papeterie. La chute d'eau était à créer: pour l'obtenir, il fallait détourner l'Odet sur une longueur de 1.5oo mètres. Par bonheur, il ignorait le verset de nos saints livres : nec coneris contra . ictum fluvi; n'essayez donc pas de briser un fleuve. Faire exploser des milliers de kilogrammes de roc; par des déblais, remblais, terrassements, mettre en mouvement des milliers de mètres cubes de terre; ces bouleversements, il les exécute, sourd aux plaintes des sylphes et aux gémissements des seuls habitants, les elfes et les lutins. De là ce canal, aujourd'hui aux rives ombragées, doit avec une indomptable énergie il poursuivit l'achèvement. Travaux de géant, même si on les compare aux travaux plus gigantesques encore, réalisés depuis cinq ans à Cascadec, car il faut tenir compte de l'époque, des ressources en argent, en explosifs, en outils dont on disposait alors. En vérité, si je taisais le génie de Nicolas LE MARIÉ, les pierres parleraient pour moi.

Sur l’extrait de carte IGN, le canal est représenté en trait rouge continu. Il commence au barrage-écluse à l’emplacement de l’ancien moulin de Coat-Piriou. Sa longueur totale est de 1500 mètres.

  • La photo ci-contre donne les proportions et aide à comprendre l’importance de l’œuvre.
  • Le canal est très long et aussi très large (environ 7 à 8 mètres). Il est maintenant envahi par les plants et les arbres, mais ses berges permettent une agréable promenade de chaque coté.
  • Il commence en amont à l’emplacement de l’ancien moulin de Coat-Piriou auquel il emprunte le bief.
  • Une écluse de taille respectable en permet l’alimentation. Une autre écluse à balanciers permet de remonter le niveau de la rivière au niveau du barrage. Elle est maintenant démontée.

3 Au 19e siècle

Il est difficile de situer exactement le début de la construction du canal ainsi que la fin. Car il a fallu trouver un concepteur du projet et le concevoir, acquérir ou échanger les terrains, trouver les bâtisseurs et les contremaîtres, construire un accès, construire le canal.

En ce qui concerne le début des travaux et sans préjuger de l’endroit origine de ceux-ci, nous savons que le Moulin de Coat-Piriou est encore habité en 1858. Le canal nécessite sa destruction ! C’est donc le petit canal qui assure la production de l’énergie encore à cette époque.

Sur la carte ci-dessus nous voyons en 1835 quelles étaient les limites (en tirets marron ) de la propriété de Nicolas le Marié. Pour construire le nouveau canal il doit acquérir ou échanger les parcelles concernées sur le tracé prévu.

Sur la carte ci-dessous les points rouges indiquent le tracé du canal à patir du Moulin de Coat-Piriou dont il emprunte d'ailleurs le début du bief.

Représentons le tracé du canal sur la vue ci-dessous afin de déterminer quels sont les propriétaires concernés.

Nous ne possédons aucune donnée sur l'identité des bâtisseurs du canal. Peut-être des artisans de l'usine qui habitaient le hameau de Keranguéo.

Les propriétaires concernés par les achats de terrains nécessaires au canal ont été relativement nombreux (cf ci-dessous). C’est donc plus de 20 hectares de terres (au minimum) que doit acquérir Nicolas le Marié pour construire le nouveau canal : cela ne s’est sans doute pas fait en un jour !

4 Moulin et écluse

On remarque que Hervé Rolland, cultivateur du hameau du Cresquer est le principal propriétaire concerné. Sa ferme près de la chapelle du Kresker se situe juste en face du moulin de Coat-Piriou à Briec. Il n’habite donc pas au moulin.

Le dernier Meunier de Coat-Piriou semble être Hervé Illiou, son dernier enfant est né en 1858. Par la suite , on ne relève aucun autre acte pour ce lieu. Ce qui semble normal car la construction du canal rend nécessaire la destruction du moulin situé à cheval sur l’emplacement.

Vue de l’écluse où débute le canal sur l’emplacement du bief du moulin de Coat-Piriou.

 

Le barrage qui supportait un système à balanciers pour rehausser le niveau de l’eau et augmenter la retenue.

Le canal vu du pont. Au premier plan se situait le moulin à cheval sur le bief. Des pierres de taille, sous les arbres, à gauche situent approximativement l’emplacement du bâtiment. On notera la présence d'une borne repére du nivellement national sur le montant droit(coté odet) de l'écluse .Elle date de 1928 et indique une altitude de 66,94 mètres.

 

Cette petite maison est visible sur le cadastre de la page précédente. Elle se situait en face du moulin à droite du pont. Après son achat par l’entreprise le Marié-Bolloré, elle fut utilisée pour loger des bûcherons employés à l’entretien de ces lieux très boisés. L'un des derniers occupants permanents et sa femme fut Jean Perrot encore actuellement à la maison de retraite de Lestonan.

5 Chemins ruraux en 1914

L’histoire de la papeterie nous apprend qu’en 1881 la production d’énergie, de la vapeur en l’occurrence, est assurée par une chaudière en remplacement de la grande roue. Il faut aussi alimenter en eau la chaudière qui produit la vapeur. Le ruisseau du Bigodic était peut-être suffisant pour la grande roue, mais avec les besoins d'énergie croissant l'apport du canal ne fut pas négligeable.

Alors quelle est l’utilisation de l’eau du grand canal ? En plus de son apport énergétique, l’eau est un composant essentiel à la production de la pâte à papier, et ce en quantité de plus en plus importante.

Ce texte sur l'évolution de l'usine durant la guerre de 14 peut justifier la construction du grand canal

La guerre survient. Malgré les difficultés d'approvisionnement, l'usine se développe. On y construit une centrale électrique à vapeur, le matériel est en quasi-totalité renouvelé et les bâtiments délabrés remplacés par de nouvelles constructions plus fonctionnelles. Une deuxième machine à papier est également installée.

Nous avions situé la construction du grand canal après 1865 en se basant sur la dernière présence d’habitants au moulin de Coat-Piriou ou au moins y ayant eu des enfants car le grand canal emprunte le bief et a nécessité la destruction du moulin. Aucun document ou relation ne permettait d’avancer une date précise !

C’est la découverte et l’étude de documents des archives municipales (plans et textes) sur la modification des chemins ruraux en 1914 qui nous redonnent un état des lieux en particulier pour cette zone du moulin de Coat-Piriou. Une donnée importante pour la chronologie et qui nous avait échappée est la présence d'une borne géodésique sur le montant gauche de l'écluse. Elle date de 1928 !

  • Voir la fiche géodésique de cette borne :[1]
  • On peut ainsi réduire la fourchette de la période de construction du canal à 1914/1928 soit 14 ans.
 

Le projet de modification du chemin N°19 dit de Coat-Piriou : Chemins ruraux N°19 de Coat-Piriou

Le moulin de Coat-Piriou en 1914

Constat :

  • En 1914 le moulin existe toujours avec son bief et sans écluse
  • René Bolloré père ou fils ont déjà achetés des terrains puisque les parcelles 261,262 et 265 sont en leur possession.
  • Il n’y a pas de représentation du canal sur cette carte.

Conclusion : Le grand canal a été construit après 1914.

6 Le vieux moulin oublié

Autre document mentionnant un "vieux moulin" : sur cet extrait du cadastre on note la présence de 3 parcelles : 252, 253 et 254, nommées : Liors ar GOZ VEIL : le courtil du vieux moulin ! Les deux points de couleur orange marquent approximativement l’entrée et la sortie d’un ancien bief non représenté sur la carte de 1835.

Sur ces deux photos on remarque l’entrée du bief et plus bas, la sortie. Quelle était le nom de ce moulin disparu depuis des siècles sans doute ?

Sur la rive droite, du coté de Landudal, il existe deux hameaux ayant pu donner leur non à cette antique bâtisse :

  • Ty ouront
  • Gougastel
  • Mais aussi le Cresquer dont le propriétaire Hervé Rolland est le même que celui de l’endroit.

On remarque aussi qu’un chemin desservait directement ce lieu à partir de Keranguéo. Madame Pétillon âgée de 87 ans en résidence à Lestonan nous dit que ce moulin est celui de KERSAVIOU de la commune de Landudal. Vers 1680-1700 il est tenu par Jan GOURTAY et sa femme Marie DONEAS. En 1697 une veuve PERON marguerite et son fils Yves COADIC y résident. La carte de Cassini nous l’indique plus loin en amont !

 

7 Petit pont et écluse de délestage

Le pont en bois qui a été rénové récemment, permet seulement le passage des piétons (c’est un sentier de grande randonnée qui se poursuit vers Landudal). Les piliers en pierres de chaque cotés semblent d’origine mais l’on peut supposer que les dimensions, surtout en largeur, devaient certainement permettre le passage de charrettes vers le moulin.

C’est un très bel endroit !

 

Une autre vue du canal vers l’amont .

Une écluse de délestage à un endroit proche de l’Odet. C’est le mauvais état de ces mécanismes qui interdit de remettre le canal en eau afin d’en assurer le nettoyage.

8 Les matériaux de construction

En observant les parois de part et d'autre du canal, on est amené à se poser quelques questions sur les conditions de construction du canal.

  • A-Ancien bief du moulin de Coat-Piriou à partir de l'écluse jusqu'au pont
    • Côté droit : petites pierres maçonnées jusqu'à l'emplacement de l'ancien moulin où subsiste un mur en pierre de tailles sur quelques 5 métres puis mur de béton coffré.
    • Côté gauche : un mur granuleux qui semble en béton ? C'est possible puisque ce matériau est utilisé depuis 1830-40 sous forme "banché" c'est à dire "coffré ".
    • Il ne semble pas que des maçons de la commune soient capables de mettre en oeuvre cette technique même aprés 1865 !
 
Le mur de gauche , support du chemin
Le mur de gauche , support du chemin
 Les trois matériaux au départ
Les trois matériaux au départ
  • B-Aprés le pont et presque jusqu'à la route
    • Côté droit : une surface continue fait d'une plaque de béton d'environ 20 cm d'épaisseur d'un seul tenant avec des traces de planches de coffrage. Il n'y a pas de pierres derrière.
    • Coté gauche : de gros rochers empilés de façon rudimentaire. Ils semblent provenir de la pente de Stang-Luzigou d'où il a suffit de les faire rouler !Ils empêchent la dégradation par l'eau. Un mur de pierres surplombe pour retenir le remblai du chemin .
 
 La plaque de béton en continu prés de la petite écluse plus haut
La plaque de béton en continu prés de la petite écluse plus haut
 La partie de mur en pierres de tailles
La partie de mur en pierres de tailles
  • C-Une soixantaine de mètres avant la route
    • Côté droit des moellons de grosses pierres taillées qui pourraient provenir d'une ancienne construction . Un coffrage de béton rudimentaire les surmonte mais est écroulé par endroits?
  • D-Aprés le pont
    • On retrouve le béton à droite et les grosses pierres à gauche sur quelques mètres.
  • Qui a pu organiser la mise en oeuvre de ces différentes techniques parfois très modernes pour l'époque ?
  • Le béton d'Odet

D'anciens employés de la papeterie disent qu'il était courant de réparer le canal avec un béton fait de "machefer", résidus de la chaudiére, qui remplaçait sable et cailloux et de ciment. Est-ce aussi le matériau de construction d'origine ? et qui a mis au point cette technique peu coutumière ?

 
Les grosses pierres en réserve pour le coté gauche
Les grosses pierres en réserve pour le coté gauche

Ce schéma du canal en coupe résume les informations récoltées sur le terrain :

 
 Structure proposée pour le canal
Structure proposée pour le canal

9 Le moulin de Moguéric

Il se situe sur la commune de Briec en face et à droite de la papeterie sur la rive droite de l’Odet. Un pont permet d’y accéder.

Sur l’extrait de Carte IGN ci-dessus il peut y avoir confusion entre les bâtiments de la papeterie et l’emplacement de l’ancien moulin qui, en principe, n’existe plus.

Ce moulin est souvent cité dans l’histoire de la papeterie en particulier par Laurent Huitric dans son entretien du mardi 15 décembre 1998.

« Dans le four à pain de chez MARGUERITE, on cuisait du pain noir deux fois par semaine. Puis tant que le four était chaud, on y faisait "kraser" de l'avoine afin qu'il soit plus facile à moudre. Ceux de "MEIL MOGUERIC" y amenaient leur grain ; ce grain séché passait entre des meules qui ne faisaient que l'effleurer pour en faire une farine d'avoine dont on était grand consommateur à l'époque. On y a amené parfois du grain de TREGOUREZ. »

« Pour les 25 ans de patronat de Monsieur BOLLORE, en 1929, il y eut un grand festin sous des tentes dans la prairie de MEIL MOGUERIC. Il y avait beaucoup de monde, plus de 1.000 personnes, tout le personnel d'ODET et de CASCADEC, le personnel cadre de TROYES. Ceux-ci eurent en plus une balade aux GLENANS. Les enfants des écoles furent aussi invités et animèrent ce festin par des chants, des danses et des sketches. »
 

Ce texte a le grand intérêt de nous permettre de situer au 20éme siècle l’acquisition du moulin par l’entreprise Bolloré. Le cadastre de 1835 d’Ergué-Gabéric ne comporte aucune parcelle faisant référence au moulin. La prairie MEIL-MOGUERIC se trouve certainement sur la rive droite de l’Odet.



Thème de l'article : Monographie d'un lieu-dit de la commune d'Ergué-Gabéric

Date de création : mai 2006    Dernière modification : 20.11.2012    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]    Source : travaux d'Henri Chauveur