Modèle:CrimeGourmelen993 - GrandTerrier

Modèle:CrimeGourmelen993

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<i>Le présient</i>. - Vous entendez, Lizen ? <i>Le présient</i>. - Vous entendez, Lizen ?
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 +Lizen, d'un mouvement de tête affirmatif, montre qu'il est d'accord.
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 +M. le docteur Lagriffe, directeur de l'asile départemental, a examiné le jeune Tanguy au point de vue mental. C'est le fils d'un alcoolique. Il est, néanmoins, d'un esprit vif, éveillé, avec la mentalité d'un enfant de son âge avec un discernement normal. Tanguy est normalement constitué au point de vue physique et moral. Cerveau malléable, sensible aux bons comme aux mauvais conseils.
 +
 +<i>Me Alizon</i>, éfenseur de Tanguy. - Selon vous, docteur, cet enfant aurait aussi bien suivi un bon conseil. Il peut donc être la victime de Lizen ?
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 +<i>Le témoin</i>. - C'est mon sentiment.
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 +<center><b>Les enquêteurs</b></center>
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 +M. Jean Cabellan, adjudant de gendarmerie à Quimper, fait un lumineux exposé de l'enquête qu'il fut appelé à mener sur cette affaire.
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 +M. Richard, commissaire de police mobile à Rennes, fait le récit de son intervention, avec l'assistance de ses adjoints, MM. Le Gall et Le Poulennec. Il donne un détail à retenir. À la ferme, après le crime, quelqu'un dit qu'un râteau de la maison était resté à une centaine de mètres u cadavre et qu'on pourrait croire, dans le pays, que cet instrument avait été l'arme du crime.
 +
 +- Il faut le ramasser, déclara Lizen, car un chasseur pourrait y laisser tomber le sang d'un perdreau ou d'un lièvre, et ce ne serait pas pour arranger les choses.
 +
 +Tant de cynisme ne devait pas servir ses calculs.
 +
 +M. Jean-Marie Quéméré, 30 ans, meunier à Quennec'haï, en Elliant, déclare que la victime était un très brave homme.
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 +<center><b>M. Louis Bourbigot</b></center>
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 +Voici venir à la barre un des principaux témoins, M. Louis Bourbigot, 31 ans, cultivateur à Niverrot, en Ergué-Gabéric, le patron des deux jeunes accusés. Il avait passé ce dimanche à la chasse. En rentrant chez lui, il apprit la mort de Gourmelen par Laurent Le Grand, cultivateur à Menez-Niverrot, celui-là même qui, nous venons de le dire, constata le crime le premier. Le soir venu, comme si de rien était, Lizen et Tanguy accompagnèrent le témoin et sa femme dans le champ où était étendu le cadavre. Lizen demanda même, en approchant, où le cadavre pouvait bien être. C'est assez dire qu'il ne témoigna aucune émotion.
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 +<i>Le président</i>. - Lizen vous donnait-il satisfaction ?
 +
 +- Il était depuis plus de six mois à mon service, assez courageux en ma présence, mais lent au travail quand je n'étais pas là.
 +
 +<i>Le président</i>. - Cependant, on ne le goûtait pas dans le pays ?
 +
 +- Il faut dire qu'il était fanfaron, cantard. Il prétendait que ses parents, à Fouesnant, étaient riches, qu'ils y possédaient pour habitation une maison magnifique à trois étages, et que son père, au surplus, possédait plusieurs bateaux ...
 +
 +<i>Le président</i>. - Et puis ?
 +
 +<i>Le témoin</i>. - Il me disait parfois qu'il voulait aller tuer sa maîtresse. Il était violent, impulsif.
 +
 +<i>Le président</i>. Et Tanguy ?
 +
 +- Je n'ai que de bons renseignements à donner sur lui. S'il est mis en liberté, je ne demande qu'une chose : c'est de le reprendre tout de suite à mon service. Je serais heureux qu'on me le rende.
 +
 +<center><b>Importants témoignages</b></center>
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 +Voici d'importants témoignages qui ont beaucoup aidé à l'arrestation du coupable. Ce sont des chasseurs qui se trouvaient dans les champs d'Ergué-Gabéric à l'heure du crime et à proximité : M. René Le Roux père, 45 ans, cultivateur à Kerdévot, et les jeunes Jean Le Roux et Jean Rannou, âgés de 15 ans.
 +
 +Ils venaient de passer, au cours e leur battue, sur les terres du moulin, précisément sur le champ où Gourmelen travaillait. Il était près de 15 heures. Ils adressèrent en passant quelques mots au journalier, lui demandant s'il y avait du gibier dans la contrée. Sur une réponse négative de Gourmelen, le groupe descendit la pente, laissant cet homme tranquille appuyé sur sa houe, dans une position de repos. Il ne fallait qu'une dizaine de minutes à Lizen pour se rendre rapidement de la ferme sur le mamelon où se trouvait Gourmelen. C'est là qu'il se rendit tout droit, et circonstance heureuse pour l'enquête, pendant le trajet, les chasseurs le virent passer à distance.
 +
 +- « Tiens, dit l'un des enfants, voilà Tambour! », voulant désigner par là un autre jeune homme du pays.
 +
 +- « Non, rectifia le second, ce n'est pas Tambour, c'est Jean-Louis ! »
 +
 +En effet, c'était bien Jean-Louis Lizen qui montait vers sa victime.
 +
 +Tambour, c'était Pierre Le Cam, 30 ans, domestique à Kergariou, en Elliant, qui s'avance précisément comme témoin. Il raconte que le jour du pardon de Kerdévot il était tombé dans un fossé, au retour, complètement ivre. Lizen vint à passer, le dépouilla du peu d'argent qu'il possédait et lui administra une volée de coups de trique, dont il se ressentit pendant quinze jours.
 +
 +<i>Le témoin</i>. - Et encore, il voulait que je paie un litre !
 +
 +<i>Le président</i>. - Pourquoi l'avez-vous frappé, Lizen ?
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 +<i>Lizen</i>. - Nous étions en querelle au sujet 'une jeune fille.
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 +<i>Le président au témoin</i>. - Vous avez été soupçonné d'avoir commis le crime ...
 +
 +<i>Le Cam</i>. - Oui, et je demande même 200 francs de dommages-intérêts ! (Hilarité).
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 +<center><b>M. Huitric</b></center>
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 +Le dernier témoin entendu est M. Huitric, 30 ans, cultivateur à Niverrot, chez lequel Gourmelen prenait pension.
 +
 +-

Version du 1 novembre ~ miz du 2020 à 00:27

Le même jour, Lizen, projetant de voler cet argent, dit à Tanguy : « Gourmelen et bon à faire ... », ce à quoi Tanguy répondit : « Si tu veux ». Dans la suite, Lizen tenta de dévaliser Gourmelen, qui passait pour porter toujours sur lui ses économies ; mais celui-ci ne quittant pas son veston pour travailler, il ne put y arriver. Il décida alors de le tuer. Le samedi 11 octobre dernier, Lizen dit à Tanguy qu'il ferait « le coup » le lendemain pendant que Gourmelen travaillerait à l'arrachage des pommes de terre. Tanguy acquiesca.

Le dimanche 12 octobre, dans la matinée, Lizen vérifia si Gourmelen travaillait bien dans le champ. L'après-midi, après avoir aidé avec Tanguy à charger un tombereau de pierres, il l'envoya reporter sa fourche chez son patron et lui recommanda de revenir vite le rejoindre, en se tenant, pour faire le guet, ans le chemin qui longe le champ.

Lizen s'approcha de Gourmelen qui travaillait et lia conversation avec lui. Il prit la houe qui était posée à terre et arracha lui-même quelques pieds de pommes de terre pour mettre Gourmelen en confiance.

Au bout de quelques minutes, apercevant Tanguy qui, monté sur le talus, lui indiquait par signe que personne ne venait, Lizen porta à Gourmelen, alors que celui-ci était baissé, un violent coup de houe qui l'atteignit au front. Gourmelen tomba sans pousser un cri. Comme il remuait encore, Lizen lui porta sauvagement d'autres coups de houe. Ayant constaté que Gourmelen était enfin mort, Lizen fouilla ses poches et s'empara de son argent.

Il rentra ensuite chez son patron et, dans le hangar qui lui servait de demeure, il compta la somme volée : 1.660 francs, a-t-il déclaré, et commença une lettre pour sa maîtresse. Quant à Tanguy, après avoir sur le talus fait signe à Lizen que personne ne venait, il s'était aussitôt enfuit pour ne pas assister au crime et était revenu chez son patron, où il s'était mis à jouer avec les enfants et avait pris une collation.

Lizen et Tanguy ont reconnu les faits.

L'autopsie a établi que Gourmelen, frappé de plusieurs coups avec violence, avait succombé à une fracture du crâne.

Lizen a été condamné pour vol le 2 juillet 1929 à 15 jours de prison avec sursis. Il se représente comme peu travailleur, dépensier et vantard.

Tanguy n'a pas d'antécédents judiciaires. Orphelin de père et sa mère malade, étant hospitalisée depuis cinq ans, il est pupille de l'assistance publique. De bons renseignements sont fournis sur son caractère et ses habitudes au travail.

Les débats

Une nombreuse assistance, qui occupe déjà l'enceinte réservée au public, aurait, comme hier, déferlé aux abords des portes latérales si la gendarmerie ne faisait bonne garde.

Au banc des accusés, Lizen, la figure dégagée, a bonne mine et sourit. Il est élégamment vêtu : chemise et col couleur chair d'une fraîcheur impeccable ; cravate à la mode dans le même ton ; pull-over gris ; trench-coat mastic. Sous le beau jeune homme endimanché, on devine la gouape du faubourg. On sent le « dessalé » qui est sorti de son village.

Tout petit, à ses côtés, un enfant de 14 ans, Tanguy, ratatiné sur lui-même. Le gamin donne l'impression d'un petit écolier qui craint d'être interrogé parce qu'il ne sait pas sa leçon.

Le président demande à Lizen de faire le récit des faits, mais l'accusé dit qu'il ne s'en souvient plus. On lui rappelle son crime par le détail et la préméditation ressort à chaque pas. Il reconnait volontiers avoir entrainé le petit Tanguy dans cette équipée.

Le président : Et vous Tanguy, pourquoi avez-vous docilement suivi Lizen ?

Tanguy : Je le craignais. Il me menaçait. Il m'avait dit qu'il voulait acheter une revolver. J'avais peur.

Le président : Vous lui serviez de secrétaire. Vous aviez plus d'instruction que lui et c'est vous qui écriviez ses lettres, sous sa dictée ?

- Oui.

Lizen est originaire de Fouesnant, mais il a eu une existence assez nomade et on le trouve employé dans des verreries de la région parisienne et en Normandie. Il a déjà été condamné à 9 jours de prison pour port d'arme prohibée, rixe et vol.

André Tanguy est un jeune pupille de l'assistance publique, originaire e Ploudalmézeau. Il n'a pas fait parler de lui, à part quelques gamineries de jeune âge.

Les témoins

M. le docteur Renault, médecin-légistes à Quimper, expose que, le 12 octobre, il fut appelé à procéder à l'examen médico-légal du cadavre de François Gourmelen. Le lendemain, à l'hospice, il pratiqua l'autopsie et releva de nombreuses blessures dont six à la tête, avec éclatement du rocher, huit fragments en étoile. La branche montante droite du maxillaire inférieur était fracturée. Lésion des vaisseaux du cou par les fragments du maxillaire inférieur. Gros épanchement sanguin au cou. Plaie ronde de la région frontale droite. Ecchymoses sur le côté de la tête.

Les blessures n'intéressaient que la face et le crâne. La mort avait dû être très rapide.

Le praticien estime qu'un premier coup a été porté au front. Etourdi, Gourmelen sera tombé à terre. La tête reposant sur le sol et y prenant appui, reçu alors le coup mortel sur le côté.

Le présient. - Vous entendez, Lizen ?

Lizen, d'un mouvement de tête affirmatif, montre qu'il est d'accord.

M. le docteur Lagriffe, directeur de l'asile départemental, a examiné le jeune Tanguy au point de vue mental. C'est le fils d'un alcoolique. Il est, néanmoins, d'un esprit vif, éveillé, avec la mentalité d'un enfant de son âge avec un discernement normal. Tanguy est normalement constitué au point de vue physique et moral. Cerveau malléable, sensible aux bons comme aux mauvais conseils.

Me Alizon, éfenseur de Tanguy. - Selon vous, docteur, cet enfant aurait aussi bien suivi un bon conseil. Il peut donc être la victime de Lizen ?

Le témoin. - C'est mon sentiment.

Les enquêteurs

M. Jean Cabellan, adjudant de gendarmerie à Quimper, fait un lumineux exposé de l'enquête qu'il fut appelé à mener sur cette affaire.

M. Richard, commissaire de police mobile à Rennes, fait le récit de son intervention, avec l'assistance de ses adjoints, MM. Le Gall et Le Poulennec. Il donne un détail à retenir. À la ferme, après le crime, quelqu'un dit qu'un râteau de la maison était resté à une centaine de mètres u cadavre et qu'on pourrait croire, dans le pays, que cet instrument avait été l'arme du crime.

- Il faut le ramasser, déclara Lizen, car un chasseur pourrait y laisser tomber le sang d'un perdreau ou d'un lièvre, et ce ne serait pas pour arranger les choses.

Tant de cynisme ne devait pas servir ses calculs.

M. Jean-Marie Quéméré, 30 ans, meunier à Quennec'haï, en Elliant, déclare que la victime était un très brave homme.

M. Louis Bourbigot

Voici venir à la barre un des principaux témoins, M. Louis Bourbigot, 31 ans, cultivateur à Niverrot, en Ergué-Gabéric, le patron des deux jeunes accusés. Il avait passé ce dimanche à la chasse. En rentrant chez lui, il apprit la mort de Gourmelen par Laurent Le Grand, cultivateur à Menez-Niverrot, celui-là même qui, nous venons de le dire, constata le crime le premier. Le soir venu, comme si de rien était, Lizen et Tanguy accompagnèrent le témoin et sa femme dans le champ où était étendu le cadavre. Lizen demanda même, en approchant, où le cadavre pouvait bien être. C'est assez dire qu'il ne témoigna aucune émotion.

Le président. - Lizen vous donnait-il satisfaction ?

- Il était depuis plus de six mois à mon service, assez courageux en ma présence, mais lent au travail quand je n'étais pas là.

Le président. - Cependant, on ne le goûtait pas dans le pays ?

- Il faut dire qu'il était fanfaron, cantard. Il prétendait que ses parents, à Fouesnant, étaient riches, qu'ils y possédaient pour habitation une maison magnifique à trois étages, et que son père, au surplus, possédait plusieurs bateaux ...

Le président. - Et puis ?

Le témoin. - Il me disait parfois qu'il voulait aller tuer sa maîtresse. Il était violent, impulsif.

Le président. Et Tanguy ?

- Je n'ai que de bons renseignements à donner sur lui. S'il est mis en liberté, je ne demande qu'une chose : c'est de le reprendre tout de suite à mon service. Je serais heureux qu'on me le rende.

Importants témoignages

Voici d'importants témoignages qui ont beaucoup aidé à l'arrestation du coupable. Ce sont des chasseurs qui se trouvaient dans les champs d'Ergué-Gabéric à l'heure du crime et à proximité : M. René Le Roux père, 45 ans, cultivateur à Kerdévot, et les jeunes Jean Le Roux et Jean Rannou, âgés de 15 ans.

Ils venaient de passer, au cours e leur battue, sur les terres du moulin, précisément sur le champ où Gourmelen travaillait. Il était près de 15 heures. Ils adressèrent en passant quelques mots au journalier, lui demandant s'il y avait du gibier dans la contrée. Sur une réponse négative de Gourmelen, le groupe descendit la pente, laissant cet homme tranquille appuyé sur sa houe, dans une position de repos. Il ne fallait qu'une dizaine de minutes à Lizen pour se rendre rapidement de la ferme sur le mamelon où se trouvait Gourmelen. C'est là qu'il se rendit tout droit, et circonstance heureuse pour l'enquête, pendant le trajet, les chasseurs le virent passer à distance.

- « Tiens, dit l'un des enfants, voilà Tambour! », voulant désigner par là un autre jeune homme du pays.

- « Non, rectifia le second, ce n'est pas Tambour, c'est Jean-Louis ! »

En effet, c'était bien Jean-Louis Lizen qui montait vers sa victime.

Tambour, c'était Pierre Le Cam, 30 ans, domestique à Kergariou, en Elliant, qui s'avance précisément comme témoin. Il raconte que le jour du pardon de Kerdévot il était tombé dans un fossé, au retour, complètement ivre. Lizen vint à passer, le dépouilla du peu d'argent qu'il possédait et lui administra une volée de coups de trique, dont il se ressentit pendant quinze jours.

Le témoin. - Et encore, il voulait que je paie un litre !

Le président. - Pourquoi l'avez-vous frappé, Lizen ?

Lizen. - Nous étions en querelle au sujet 'une jeune fille.

Le président au témoin. - Vous avez été soupçonné d'avoir commis le crime ...

Le Cam. - Oui, et je demande même 200 francs de dommages-intérêts ! (Hilarité).

M. Huitric

Le dernier témoin entendu est M. Huitric, 30 ans, cultivateur à Niverrot, chez lequel Gourmelen prenait pension.

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