Les blessures de Jean-Marie Déguignet et de Clément VI - GrandTerrier

Les blessures de Jean-Marie Déguignet et de Clément VI

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Sommaire

Dans ses mémoires, Jean-Marie Déguignet évoque les suites d'une piqure d'abeille à l'âge de 5 ans qu'il compare à une blessure à la tête de Clément VI au 13e siècle.
Clément VI (Fresque de la chapelle Saint-Martial du palais des papes)

Autres lectures : « F. Enigmes à élucider (ex site .org) » ¤ « Les séjours de Jean-Marie Déguignet à l'hospice de Quimper » ¤ « DÉGUIGNET Jean-Marie - Histoire de ma vie, l'Intégrale » ¤ « DÉGUIGNET Jean-Marie - Mémoires d'un Paysan Bas-Breton » ¤ « DÉGUIGNET Jean-Marie - Mémoires d'un paysan bas-breton (Revue de Paris) » ¤ « ISTIN Jean - Le moulin de Meil Poul » ¤ 

1 Présentation

Jean-Marie Déguignet, qui n'avait que cinq ans et qui habitait avec ses parents dans un penn-ty à Quélennec en Ergué-Gabéric, se fit une plaie profonde à la tempe gauche, alors qu'il était pourchassé par un essaim d'abeilles près du Moulin du Poul.

Il attribue sa capacité de mémoire à cette blessure, et se compare au 4e pape d'Avignon, Clément VI (1291-1352) : « J’ai vu dans l’histoire qu’un de nos papes, Clément VI, eut le même accident, et, par cette raison, il eut, dit-on, un esprit extraordinaire ».

Ce fait divers n'est pas relaté dans les biographies de Clément VI et restait pour nous une énigme. Jusqu'au jour où un lecteur érudit du GrandTerrier ne lise le livre Sophisme du philosophe Jean Buridan , dans une édition commentée de Joël Biard, et qu'il consulte le Bulletin de la Société de l'Histoire de Paris et de l'Île-de-France de 1875. On y découvre là cette double rencontre entre un théologien-pape et un philosophe instigateur du scepticisme religieux.

L'histoire peut se résumer par un dialogue en latin lors d'une visite du pape à Paris recevant une liste d'universitaires parisiens « proposés pour des bénéfices » :

Le pape demanda :

  • « Où est donc mon ami Buridan ? » (Ubi est amicus meus Buridanus)

Ses conseillers lui dirent :

  • « Père, il s’est inscrit le dernier par humilité devant votre Sainteté » (Pater, ipse posuit se in ultimo in humilitate ad vos)

Et il leur répondit :

  • « Laissez-le venir à nous à Avignon » (Veniat ad nos in Avinionem).

Quand Buridan se présenta, le pape lui dit :

  • « Pourquoi as-tu frappé le pape ? » (Tu quare percussisti papam).

Et il répondit :

  • « Père, j’ai frappé un pape, mais je n’ai pas frappé le pape (Pater, papam percussi, sed non percussi papam) ».
 

Buridan prétend en fait l'avoir frappé avant qu'il ne soit pape, qu'il s'appelait encore Pierre Roger, et qu'il était un de ses jeunes condisciples parisiens. Les deux hommes se seraient disputés les faveurs d'une jeune femme, et Buridan aurait frappé violemment le futur pape à la tête. Celui-ci, « perdant tout son sang, en aurait eu le cerveau purgé, et aurait de ce fait acquis une fabuleuse mémoire ».

2 Textes des mémoires

Mémoires éditées en 1998-2001 :

Chapitre III La vie au Guelenec (1838-1848), page 33-35, Intégrale.

Seuls les veines du cou et quelques petits mouvements des lèvres indiquaient que je n'étais pas encore tout à fait un cadavre. Cependant, dans la matinée du cinquième jour, mon esprit qui avait tant couru même après les essaims et les couriquets revint se reposer dans les lobes de ma cervelle qui avait cessé de fermenter ...

Cependant, si cette inconsciente abeille me causa tant de maux et de désagréments, elle contribua à faire développer mes facultés mentales d'une façon extraordinaire que la science phrénologique explique fort bien du reste. L'histoire nous parle d'un pape Clément VI si je ne me trompe, à qui arriva en sa jeunesse le même accident qu'à moi, ou du moins eut la tempe gauche trouée comme la mienne. Et de là vint qu'il eut un esprit supérieur en son temps ...

Si ce développement accidentel de mes facultés mentales n'a pas servi à me donner la fortune, ni même une existence matérielle convenable, il a servi à me procurer bien des moments d'agréments intellectuels et moraux durant mon existence agitée.

 

Revue de Paris 1905 :

Chapitre XI - JÉRUSALEM

La seule pensée que j’étais à Jérusalem suffisait pour me bouleverser, d’autant plus que je ne voyais rien à Jérusalem de tout ce qu’on m’en avait raconté autrefois et de ce que j’avais lu dans mon petit livre breton. J’ai déjà dit, je crois, que grâce à un accident qui m’arriva au moulin du Poul, en Ergué-Gabéric, vers l’âge de cinq ans, mon crâne ne s’était pas complètement fermé ; une sorte d’ouverture très sensible m’est toujours restée dans la tempe gauche, par laquelle de nouvelles idées ont pu pénétrer en chassant peu à peu les premières qu’on y avait logées. J’ai vu dans l’histoire qu’un de nos papes, Clément VI, eut le même accident, et, par cette raison, il eut, dit-on, un esprit extraordinaire. Je suis certain que ça n’a été que grâce à cet accident que j’ai pu commencer, à l’âge où tous les autres crânes se ferment pour toujours, à avoir de nouvelles idées et à me rendre compte de toutes les choses de ce monde.

3 Sources documentaires

4 Annotations



    Thème de l'article : Ecrits de Jean-Marie Déguignet

    Date de création : Décembre 2013    Dernière modification : 7.12.2013    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]