Les cloches du Centenaire d'Odet en 1922 par Théodore Botrel - GrandTerrier

Les cloches du Centenaire d'Odet en 1922 par Théodore Botrel

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Catégorie : Patrimoine
+ Mémoires des Papetiers
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§ E.D.F.
En 1922 une grande commémoration de son centenaire fut organisée à la papeterie Bolloré d'Odet et au programme du repas de fête des chansons par Monsieur Théodore Botrel [1] en personne.

Dans ses bagages, le barde breton amena une composition de 40 vers dont le refrain était « Chantez, chantez, cloches du Centenaire ».

En voici le texte - nous n'avons pas encore retrouvé la musique -, accompagné de quelques explications et annotations.

Autres lectures : « La médaille de P.V. Dautel pour le centenaire Bolloré en 1922 » ¤ « La plaque inaugurale de la manufacture de papiers d'Odet en 1822 » ¤ « La création de la manufacture d'Odet » ¤ 

Sortie de la Messe du Centenaire
Sortie de la Messe du Centenaire

[modifier] 1 Présentation

Théodore Botrel [1], auteur-compositeur-interprète, notamment de « La Paimpolaise », est né en 1868 à Dinan. Dès 18 ans il commence à composer des chansons qui n'ont pas un grand succès.

En 1893 le directeur d'un café-concert à Paris lui propose le remplacement d'un artiste absent en l'annonçant comme « Le chansonnier breton, Théodore Botrel [1], dans ses œuvres ». Son tour de chant dut avoir un certain succès car, quelques jours plus tard, il y est engagé à raison de cinq francs par soir. Pour rendre ses prestations plus réalistes, il revêt le bragou-braz, ce costume breton qui l'identifiera à jamais. Il y chantera « La ronde des châtaignes », « Les pêcheurs d'Islande », puis « La Paimpolaise » ...

Un jeune débutant, tout frais de Toulon, s'intéresse à cette Paimpolaise et la met à son répertoire. Ce débutant s'appelle Félix Mayol, le futur interprète du « Temps des Cerises » et des « Feuilles mortes ». La Painpolaise allait assurer la gloire, et de Mayol, et de Botrel [1], et allait rester au répertoire du premier jusqu'à sa mort en 1941.

De cette Paimpolaise jusqu'à sa mort survenue en 1925, Botrel [1] compose des centaines de chansons ayant pour thèmes l'amour, la vieillesse, les charmes, la misère... du pays breton. Se sont insérés dans le lot des chants patriotiques, des chansons pour relever le moral des troupes, des prières, de petits mélodrames, des fêtes patronales, des commémorations ...

La chanson des « Cloches du Centenaire » des papeteries Bolloré en 1922 fait partie du lot. Ce fut sa première sortie à son retour de sa grande tournée au Canada, ainsi qu'en témoigne L'Ouest-Eclair du 30 mai :

 

Théodore Botrel [1] se présenta à Odet dans la matinée du jeudi 8 juin, les festivités commençant dès 8:30 avec l'arrivée du personnel de Cascadec, puis la messe à la chapelle à 9H, les courses à pied à 10H, les décorations à 11H, et enfin le déjeuner de 11:30 à 15H. Pendant ce repas il fut mis à contribution pour l'interprétation de ses oeuvres, et bien sûr cette chanson composée pour l'occasion : « En ce jeudi de Sainte Pentecôte ... »

Gwenaël Bolloré dans son livre sur le « Voyage en Chine » de son grand-père nous a légué en annexe le texte de la chanson. Elle fut également éditée sous forme de feuille volante, soit par exemple l'édition Bargain (cf les feuillets ci-après). On notera dans ces deux éditions le léger contresens dans la traduction et explication du terme breton « Penn-Ti » [2].

Le texte de la chanson est à la gloire des patrons successifs de l'entreprise depuis la création du moulin à papier en 1822 : le fondateur Otrou [3] Le Marié, le Docteur Bolloré, et les générations des Réné Bolloré, sans oublier dans la dernière strophe leurs compagnes et épouses.

Les 4 générations d'entrepreneurs papetiers sur la médaille du Centenaire. De droite à gauche : Nicolas Le Marié (1797-1870), Jean-René Bolloré (1818-1881), René Bolloré (1847-1904), René Bolloré (1885-1935)

[modifier] 2 La chanson

Les Cloches du Centenaire
I

En ce jeudi de Sainte Pentecôte,
Clocher nouveau si breton, si joli.
Quels hosannahs, d'Odet jusqu'à la Côte
Lances-tu donc ainsi vers l'infini ?
Oiseaux de bronze, en votre nid de pierre,
Au vieux pays par Corentin [4] béni,
Chantez, chantez, cloches du Centenaire,
Les bons Bretons que l'on fête aujourd'hui !

II

Chantez, d'abord, l'Ancêtre vénérable,
Le fier Penn-Ti [2], cœur d'or et front d'airain,
Qui, tel un dieu de l'immortelle Fable
Força le Fleuve à tourner son moulin,
Chantez celui qui sut toujours se faire
Le confident, l'ami de l'ouvrier :
Chantez, chantez, cloches du Centenaire,
Le Fondateur, otrou [3] Le Marié !

III

Mais, lui parti, le navire en dérive
Mettra le cap sur un écueil certain
Si, par miracle, un pilote n'arrive
Bon matelot, doublé d'un médecin !
Et Dieu suscite un gâs du Finistère,
Un homme juste et de tous adoré :
Sonnez, sonnez, cloches du Centenaire,
Chantez, chantez le Docteur Bolloré !

IV

Chantez aussi les fils après le père,
Les petits-fils après le bon aïeul :
Un Bolloré jamais ne désespère
Car les berceaux consolent du cercueil
Le Cascadec [5] surgit ainsi de Terre,
Et les René succèdent aux Renés :
Chantez, chantez, cloches du Centenaire,
Les Derniers-nés dignes de leurs aînés !

 

V

De chacun d'eux célébrez la compagne
Puisque la Grâce à la Force s'unit
Comme aux landiers de la douce Bretagne
L'ajonc, toujours, fleurit le dur granit.
Et, pour finir, laissez la voix du barde
S'unir, profane, à vos accents sacrés :
Sonnez binious ! sonnez cloche et bombarde
À l'Avenir de tous les Bolloré !


Théodore Botrel,
Odet, 8 juin 1922.


[modifier] 3 Annotations

  1. Jean-Baptiste-Théodore-Marie Botrel (1868-1925), est un poète-compositeur-interprète français, auteur des chansons La Paimpolaise, Le Mouchoir rouge de Cholet et Ma p'tite Mimi. Théodore Botrel s'installa à partir de 1905 à Pont-Aven où il sera inhumé. [Ref.↑ 1,0 1,1 1,2 1,3 1,4 1,5]
  2. Littéralement « bout de maison », désignant les bâtisses, composées généralement d'une seule pièce, où s'entassaient avec leur famille les ouvriers agricoles et journaliers de Basse-Bretagne (Revue de Paris 1904, note d'Anatole Le Braz). Le penn-ty est un journalier à qui un propriétaire loue, ou bien à qui un fermier sous-loue une petite maison et quelques terres. L'appellation est donc synonyme d'une origine très modeste, et non de « chef de famille » comme cela est noté dans certaines éditions du poème. [Ref.↑ 2,0 2,1]
  3. An Aotrou, « le monsieur », désigne un maitre, une personne au rang social élevé, à qui on doit respect. Dans une paroisse rurale de Basse-Bretagne, seul le recteur (an Aotrou Person) et un ou deux notables biens établis avaient droit à ce titre. [Ref.↑ 3,0 3,1]
  4. Saint Corentin fut selon la tradition le premier évêque de Quimper. C’est l’un des sept saints fondateurs de Bretagne continentale. [Ref.↑]
  5. La papeterie de Cascadec (commune de Scaër), d'abord louée en 1893, sera acquise par les Bolloré et sera aussi une usine importante dans la fabrication du papier à cigarettes OCB. [Ref.↑]


Thème de l'article : Contes et chants populaires

Date de création : Mars 2012    Dernière modification : 17.09.2017    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]