Place ou avenue Guy Autret (1599-1660) de Lezergué et de Missirien * - GrandTerrier

Place ou avenue Guy Autret (1599-1660) de Lezergué et de Missirien *

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[modifier] La grande place de Guy Autret

Billet du 10.12.2016 - À la lecture d'un précédent billet, la municipalité se demande si une place de la commune d'Ergué-Gabéric ne serait pas préférable à une avenue pour honorer ce personnage du 17e siècle. Le maire tient à préciser que ce ne sera "ni une petite place ni un parking". Les propositions des gabéricois seront examinées en conseil municipal extraordinaire 5 semaines avant l'inauguration officielle le 01.04.2017.

Cette semaine nous versons au dossier dix sept lettres transcrites et publiées en 1940 par Daniel Bernard dans le Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, ainsi que quatre lettres inédites trouvées par le même auteur et dont les originaux de la main de Guy Autret (cf ci-contre) sont conservés aux Archives Départementales du Finistère.

Parmi les 17 premières lettres publiées, il nous semble intéressant de commenter la quatrième datée de 1641 dans laquelle Guy Autret fait part à sa nièce de l'envoi d'une robe et jupe, d'une coiffe et d'un parement de dentelle. L'original de la lettre est introuvable à ce jour, sans doute toujours conservé dans des archives familiales auxquelles Daniel Bernard a eu accès.

Cette lettre envoyée le 10 décembre de Rennes, où Guy Autret est en déplacement pour ses divers procès, à Quimper à l'attention de l'une de ses nièces par alliance, Guillemettte Beaujouan, épouse Kerescant, commence par :

 
« je vous envois la robe et la jupe (bien faite à la hâte) de ma niepce du plessix ». La robe est donc pour la sœur de Guillement, à savoir Yvorée, dame de Plessis, pour qu'elle puisse la porter le 13.12 à la grande foire de St-Corentin à Quimper.

Jacques du Haffond de Kerescant, mari de Guillemette et procureur du roi à Quimper, est aussi un lointain cousin de Guy Autret, et ils sont régulièrement en correspondance pour des affaires de succession. Kerescant est une terre noble de l'ancienne paroisse Plonivel, aujourd'hui Plobannallec-Lesconil, non loin de la propriété bigoudène de Guy Autret (Kergoz).

Guy Autret fait également parvenir une coiffe à sa nièce Guillemette, qu'il appelle mademoiselle car il s'en était occupé avant son mariage, lors du décès de l'ancien procureur de Quimper Jean Beaujouan. Cette coiffe n'est bien sûr pas la coiffe bigoudène qu'on connaît aujourd'hui, car elle n’est devenue haute qu’au XXe siècle dans l'entre deux guerres.

Et le courrier mentionne aussi l'envoi d"une « cravate ou collet à la mode tost près, petit collet, bandeau et bouts de manches de batiste et à languetes ». Ces accessoires de mode devaient être très appréciés par la jeune noblesse quimpéroise et bigoudène. On note comme parement ces pièces en « batiste  », c'est-à-dire en toile de lin très fine en provenance du Cambrésis ou pays de Cambrai.

  Un autre détail de la lettre fait référence à un évènement historique national : « L'on dit que la dentel s'en va deffandu et de mesme que la dantel d'argent ». Pendant le règne de Louis XIII, l'usage de la dentelle était synonyme de frivolité mondaine, et l'église catholique qui voulait conserver les ornements pour ses autels et habits ecclésiastiques demanda qu'elle soit interdite par ailleurs. En 1629 un édit de proscription de la dentelle fut publié, mais les fans de mode bravèrent l'interdit.

Et Guy Autret, en 1641, s'en moque même : « on a mins pour tant une petite à la plessix, quitte pour l'hoster quand l'édit sera venu ». Quant au type de la dentelle mise sur la robe de la dame du Plessis, il est vraisemblable qu'elle fut classiquement de fils de soie, et non d'argent. Et peut-être, avons nous là une dentelle "précurseuse" de la dentelle dite « bigoudène » !

Le prix de tous ces accessoires et travaux d'assemblage de la couturière est également mentionné pour « quinze livres dix huit sols », ce qui ferait à raison d'une livre de 1641 pour 16,1 euros un prix total actuel de 256 euros. Guy Autret évoque aussi que, hors les frais de transport, il dut payer un « teston », soit 10 sols ou une demi-livre, pour que le porteur attende les quelques heures nécessaires pour finir la robe.

En savoir plus : « Lettre du 10 décembre 1641 de Guy Autret à Mademoiselle de Kerescant (Bernard, IV) », « 1642 - Quatre nouvelles lettres inédites de Guy Autret, transcriptions Daniel Bernard », « 1640-1648 - Lettres de Guy Autret seigneur de Lezergué, travaux Daniel Bernard »

[modifier] Enfin une avenue Guy Autret

Billet du 19.11.2016 - La municipalité gabéricoise a décidé de nommer officiellement le 1er avril 2017 une grande avenue en l'honneur de l'un de ses plus illustres habitants, à savoir Guy Autret (1599-1660). D'ici là, chacun peut proposer la rue, ancienne ou nouvelle, la plus adaptée.
Pour la circonstance, nous versons au dossier les 51 lettres écrites entre 1635 et 1659 par le gentilhomme historien gabéricois, lesquelles ont été étudiées par le Comte de Rosmorduc et rassemblées dans un ouvrage titré « Guy Autret, correspondant de Pierre d'Hozier ». Pour améliorer la lisibilité des missives par un lecteur d'aujourd'hui, nous avons reproduit le texte de la transcription en remplaçant, quand nécessaire, des lettres u en v, certains i par des j et en rectifiant la calligraphie de la lettre s.

Et cette semaine, on s'intéressera à cinq de ces lettres, datées de 1638 à 1643, où Guy Autret cite son voisin quimpérois Nicolas Caussin, et le recommande chaudement à son correspondant Pierre d'Hozier.

C'est le 26 décembre 1637 que les lecteurs de la Gazette apprirent que « Le père Caussin a été dispensé de sa Majesté de ne plus la confesser à l’avenir » et qu'il devait s'exiler au fin fond d'une province profonde, c'est-à-dire à Quimper. Même si quelques rumeurs de la discorde entre le confesseur du roi et le ministre de celui-ci, le cardinal Richelieu, couraient déjà dans Paris, cette nouvelle fit scandale.

Son exil imposé à Quimper va même donner à Jean de La Fontaine la matière pour sa fable du Chartier embourbé : « C'était à la campagne près d'un certain canton de la basse Bretagne, Appelé Quimper-Corentin. On sait assez que le Destin adresse là les gens quand il veut qu'on enrage : Dieu nous préserve du voyage ! ».

À son retour d'exil, Nicolas Caussin décrira son triste sort en des termes peu avenants pour les Quimpérois :
Image:Square.gifImage:Spacer.jpg« J’ai été comme dégradé, livré par mes frères, envoyé dans un exil très rude, parmi des barbares, et aux extrémités de la France [dans] le lieu le plus rude et le plus fâcheux qu’on puisse imaginer »,
Image:Square.gifImage:Spacer.jpgAinsi relégué « à la dernière maison de la province », il ne voit que « déserts et rochers », et la population « articule on ne sait quels sons barbares plutôt qu'elle ne parle. »

À la lecture des citations ci-dessus, on comprend mieux pourquoi Guy Autret, dans ses lettres au correspondant de la Gazette, présente le séjour du père Caussin comme un fait notable important. Les deux intellectuels ont de plus le même mépris pour le cardinal Richelieu, et Guy Autret pousse présente son alter-ego comme un homme bon : « C'est un bon home & à mon advis selon le cœur de Dieu, qui ayme tous les bons et hait tous les mechantz. » (23 février 1643).

Guy Autret ne manque pas non plus d'ironie lorsqu'il considère l'exil lointain dont fait l'objet le jésuite, assimilant la Bretagne à une contrée peuplée d'Indiens d'Amérique : « Je ne puis nier que nostre langage m'escorge la luete et que dans nos isles il ne  se 

 
(Portrait du père Caussin, Galerie illustrée de la Compagnie de Jésus)

troeuve des demi sauvages, aussi nous a t on envoyé le père Caussin, come si l'on avoit voulu releguer parmi les Hurons ou les Hiroquois » (8 février 1638).

Il s'associe également par solidarité à l'exilé politique : « Je ne puis comprandre coment vous pouvés vous donner paine pour un miserable bas breton relegué à Kempertin, aussi bien que le pere Caussin. » (17 juin 1638).

Dans son isolement quimpérois, le père Caussin réclame une plus grande rapidité d'envoi des dépêches du correspondant parisien de Guy Autret : « Le pere Caussin, au quel je faisois hier lire la vostre, me dit que si vous changiés le jour de vos depeches ... et ainsi vos lestres ne seroint vieilles que de 8 Jours quand elles me seroint rendues, au lieu qu'à presant elles le sont ordinerement de quinse » (25 août 1641).

On sait même que le père Caussin ne rentra à Paris qu'entre mars et septembre 1643, soit plus de 5 mois après le décès de Richelieu que Guy Autret surnomme le « deffunt Armand », car en février les deux hommes se voient toujours à Quimper. En septembre Guy Autret se plaint que, dans la capitale, il n'est plus aussi avenant : « si j'estois à Paris ...si le bon pere Caussin & Mr de St-Germein ne me bannisoint de leur conversation, on me verroet plus souvant chés eux ».

En savoir plus : « Témoignage de Guy Autret sur l'exil du père jésuite Nicolas Caussin à Quimper », « 1635-1659 - Lettres de Guy Autret seigneur de Lezergué, travaux Rosmorduc », « ROSMORDUC Le Gentil Georges (comte de) - Guy Autret »