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Les billets hebdos de l'actualité du GrandTerrier

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Sommaire


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1 Les énigmes culturelles de l'été

« Et moi, je te dis que tu es Pierre et que, sur cette pierre, je bâtirai mon Église ... Je te donnerai les clés du royaume des cieux  » [Matthieu, 16, 18-19]

Billet du 10.08.2012
Billet du 10.08.2012

Il fait enfin un magnifique temps estival sur la Bretagne, c'est l'heure de la détente et de la farniente. Nous proposons donc un petit jeu pour occuper les méninges, à savoir localiser un élément méconnu de notre patrimoine, ce d'après une photo. À vous de jouer !

Où se trouve donc la statue de ce saint Pierre à la bouille hilare et portant les clefs du paradis ?

Les indices suivants peuvent vous aider à résoudre l'énigme :

  • La niche de la statue est tellement haut perchée que personne ne la remarque habituellement.
  • Le saint a une vue imprenable sur une vallée faiblement colorée, face à une côte et un virage en épingle à cheveux.
  • Cet ouvrage sculpté n'a été placé ni sur un manoir, ni sur une église ou chapelle, ni sur un bâtiment communal.
  • Le bâtisseur de l'édifice était mobile du fait de sa profession, on l'appelait même le « commissionnaire ».
  • Le saint aurait pu être, du moins localement, le patron des coureurs cyclistes.

Vous avez trouvé ? Vous avez besoin d'indices supplémentaires ? Ouvrez vite l'article ci-dessous pour proposer votre réponse.

Image:Right.gif En savoir plus : « La question Histoire & Patrimoine de l'été 2012 »

Autre terrain d'énigmes à résoudre : l'héraldique ou science des blasons. Mercredi dernier, le service Patrimoine et Communications de la commune d'Ergué-Gabéric organisait en l'église Saint-Guinal une 2e conférence sur héraldique gabéricoise.

L'historien Paul-François Broucke, qui avait déjà fait un brillant exposé à Kerdévot il y a quelques semaines, était réinvité pour présenter ses travaux sur les blasons connus et méconnus de l'église paroissiale et l'histoire locale de leurs détenteurs.

Et c'était très intéressant car Paul-François a fait avancer les travaux de recherches historiques démarrés par Norbert Bernard en inventoriant notamment toutes les traces héraldiques de l'église, pas seulement les blasons de Lezergué sur la maitresse-vitre, mais également les lisières de deuil formées d'écussons en haut de la nef, les sablières, les blasons taillés en bosse, la pierre à enfeu des Kerfors avec leur greslier et les blasons des familles en alliance, la pierre tombale des Liziart reconstituée dans les moindres détails, les aveux attestant d'autres blasons sur la verrière sud, et des bancs ou pierres des Kersulgar, Kerfrez-Crec'hcongar, Pennarun ...

Image:Right.gif Autant d'informations qui préfigurent une future publication passionnante !


2 Le retour des crucifix enlevés

« Personne n'ignore que, par suite des mesures prises par notre gouvernement sectaire et maçonnique, les crucifix ont été enlevés des écoles ... »

Une partie du trésor religieux d'Ergué-Gabéric : une croix et 6 chandeliers, objets classés Monuments Historiques en 1954, photographiés en 1994 par le photographe Jos de Chateaulin Billet du 03.08.2012
Une partie du trésor religieux d'Ergué-Gabéric : une croix et 6 chandeliers, objets classés Monuments Historiques en 1954, photographiés en 1994 par le photographe Jos de Chateaulin Billet du 03.08.2012

Nous avons déjà publié des documents sur la fermeture de l'école des religieuses, la carte postale d'un gendarme assistant à l'inventaire des biens de l'Eglise, la gwerz de protestation écrite en breton par la communauté catholique locale, les mémoires anti-cléricales de Jean-Marie Déguignet, mais pas encore les témoignages bien trempés sur le retour des crucifix en 1907.

La « procession de réparation » est relatée dans un article du Progrès de Finistère du 29 mai 1907, sous la forme d'un courrier d'un paroissien d'Ergué-Gabéric signant « Un Erguéen ».

Les paroissiens vinrent nombreux au bourg pour cette manifestation religieuse : « Dès mon arrivée au bourg, une foule compacte circulait déjà autour de l'église. Le son de la cloche annonce que les vêpres vont commencer ; on se presse d'entrer dans l'enceinte, car l'église quoique vaste, ne pourra contenir toutes les personnes présentes ... ».

Devant la menace d'une nouvelle action laïque et anti-cléricale, le ton du paroissien est menaçant : « Les temps ont changé, certes, mais le cœur des Erguéens est resté le même, on les trouvera constamment sur la brèche, pour la défense de leur foi et de leurs intérêts religieux. (Quand on nous dira) que la Foi est morte, de cent poitrine sortira ce cri, celui de tout breton catholique : " plutôt mourir que de faillir " ».

En savoir plus : « Une procession pour le retour des crucifix, Le Progrès du Finistère 1907 »

Nota n° 1 : Avant l'enlèvement des crucifix des écoles en 1905, le Parlement de 1880 avait déjà demandé la suppression des crucifix placés dans les salles d'audience des tribunaux. Ce qui fait qu'aujourd'hui, dans l'église paroissiale St-Guinal, est exposé un crucifix enlevé d'un tribunal sur ordre des autorités républicaines en 1880-90 et rétrocédé en 2009 sous forme de don à la paroisse par une ancienne famille quimpéroise et gabéricoise.

Nota n° 2 : Quel contraste avec la fête des écoles organisée quelques jours plus tard à l'école des garçons du bourg  : « M. Le Guay, propriétaire du Cleuyou, ancien président d'une section de la Ligue de l'Enseignement, a fait une très intéressante causerie dans laquelle, après avoir parlé de Jules Ferry, il a donné d'excellents conseils aux enfants. Puis il a amusé son auditoire par des morceaux de phonographe habilement intercalés entre des récitations et des chants exécutés par les élèves » (« La fête des 25 ans de la fondation des écoles laïques, Le Finistère 1907 » ¤ )


3 À la recherche du moulin perdu

« Le jeudi 17.11.2005 je me rends sur les lieux en tenue adéquate ... à la recherche des traces du moulin disparu de Crec'h Congar », Henri Chauveur

Billet du 27.07.2012
Billet du 27.07.2012

C'est le début d'une quête d'aventuriers, à l'aide des cartes du vieux cadastre, jusqu'au « bosquet où il subsiste encore quelques pierres et l'endroit où devait se situer le barrage au dessus du ruisseau. ».

Un document de 1736, trouvé récemment aux Archives Départementales du Finistère, nous en apprend un peu plus sur la disparition du moulin.

La première propriété déclarée dans ce document est « le lieu et manoir noble de Creongard avec la meterie, apartenances et dependances, situé en la paroisse d'Ergué-Gaberic ». Il est vraisemblable que ce manoir et lieu noble de Creongard (aka Crec'h Congar ou Kenec'hcongar) était sur les hauteurs du lieu connu aujourd'hui sous le toponyme Pennervan.

Dans le vallon en contrebas de Pennervan, le moulin est quant à lui désigné sous le double nom de Crec'h-Congar et de Pennervan : « Le moulin dépendant du dit manoir appelé le moulin de Benerven autrement Creongard ». C'est en 1733 que le moulin avait arrêté définitivement de fonctionner : « presentement chommant estant tombé en ruine depuis environ trois ans et ne meritant pas d'estre relevé par raport au peu de mouteaux qui en sont sujets ».

Ces mouteaux étaient les paysans et roturiers locaux qui devaient venir moudre leur grain au moulin. Malheureusement les nombreux moulins concurrents voisins (Kerelan, Cleuyou, Coutily, St-Denis), toujours en activité, ont mis en faillite celui de Crec'h Congar.

Le document nous permet également de saluer Laurent Quevilly, le journaliste-correspondant d'Ouest-France des années 80, et ses seigneurs de Kerhoant (Nord-Finistère) qui détenaient le moulin, et d'apprendre aussi qu'un seigneur de Lezergué, chevalier de St-Lazare, avait fait main basse sur les ruines du moulin.

En savoir plus :


4 Le bain forcé de deux nemrods

« Il fut un vaillant chasseur devant l’Éternel ; c’est pourquoi l’on dit : comme Nimrod, vaillant chasseur devant l’Éternel. Il régna d’abord sur Babel Érec, Accad et Calné, au pays de Schinear », Genèse 10

« Projet d'une statue à élever à Odilon Nimrod », Honoré Daumier
« Projet d'une statue à élever à Odilon Nimrod », Honoré Daumier

Dans l'édition du 7 mars 1908 du Progrès de Finistère on trouve une chronique humoristique localisée à Ergué-Gabéric et signée « Yan Goaper ». Il s'agit sans doute d'un pseudonyme, car le terme « Goaper » désigne en région quimpéroise quelqu'un de moqueur. Jean-Marie Déguignet en fit même un bretonnisme avec transposition et orthographe à la française : « Les bretons, étant menteurs, blagueurs, trompeurs, gouapeurs ...  ». Derrière Yan Goaper se cache peut-être l'abbé François Cornou, fondateur et directeur du journal.

Le journaliste se penche sur un accident somme toute banal : deux chasseurs gabéricois se promenant le long d'un ruisseau affluent du Jet tombent à l'eau dans un trou profond de deux mètres et sont secourus par un brave cultivateur qui les avait vus « disparaître inopinément ».

Mais le style est là : des personnages bien campés, des dialogues fournis, un lieu précis sur la commune (« Toul-ar-Gurun entre les moulins de Pen-ar-Marc'hat et du Faou), des interjections françaises et bretonnes bien placées (« mil seiz batimanted ..... logod »), et même via l'expression « les deux nemrods » une allusion biblique à l'archétype du chasseur et au bâtisseur de la tour de Babel.

Une autre mention biblique « Mais que de pêches miraculeuses ne fait-on pas au Grand-Ergué ! » fait référence à un entrefilet dans le journal 3 jours plus tôt : le bedeau avait pêché dans le Jet un « énorme saumon blanc » !

La conclusion est « Quel pays extraordinaire tout de même ! ».

En savoir plus : « Chroniques nautiques gabéricoises de Yan Goaper, Le Progrès du Finistère 1908 »

Billet du 20.07.2012


5 Lettres de Lezergué en 1644-45

« 14 contrats de mariage de père en fils, 350 ans de chevalerie, les pères considérables dans les guerres de Bretagne, et bien marqués dans l'histoire »

La marquise de Sévigné, musée Carnavelet
La marquise de Sévigné, musée Carnavelet

Voilà comment la marquise de Sévigné décrit la généalogie de son mari breton, Henri de Sévigné, dans une lettre du 04.12.1668 au comte de Bussy.

Tout le monde connait Marie Ratupin de Chantal, mariée en 1644 au marquis breton de Sévigné. Elle devint veuve à vingt-cinq ans en 1651, quand son époux fut tué lors d’un duel contre le chevalier d’Albret pour les beaux yeux de Mme de Gondran, leur amante. Fréquentant les salons de l'époque, se divertissant de tout, Marie de Sévigné eut des échanges épistolaires avec ses contemporains et avec sa fille. Ses nombreuses lettres ont été publiées et sont devenues l'archétype du badinage du 17e siècle.

Elle fut remarquée dès son mariage par l'épistolier gabéricois, Guy Autret, seigneur de Lezergué, généalogiste et écrivain, notamment quand ce dernier évoque l'origine noble de son mari breton, dans une lettre de fin août 1644 : « Je me rejouis de la bone rencontre du baron de Sevigné, qui est bien de l'une des antienes maisons de nostre province et en laquelle il y a eu des grands biens & pourois dire plus de cent mille livres de rente ». Et il conclut par ce commentaire et cette requête à son correspondant Pierre d'Hozier : « Si ceste damoeselle de la quelle je vous prie de m'escrire le nom & les armes & la genealogie, est aussi riche & d'aussi bone maison que son mary, ils auront de quoy paroestre en la Cour  ».

Dans une deuxième lettre datée de 1645, soit un an après son mariage, Guy Autret remarque l'esprit et les goûts de la marquise : « (Le Marquis de Molac) me montroet hier des missives d'amour et des vers qu'il avoet faits pour les plus belles dames de la province & particulierement pour madame de Sevigné, aveq les reponces de la mesme dame & plus de 300 vers de sa façon & de son esprit, qui themoignent qu'elle a bon esprit et qu'elle est de tres belle humeur ».

Dans la première lettre de 1644, on notera aussi le passage sur le compte-rendu du voyage d'Henriette de France, Reine d'Angleterre, que Guy Autret fit parvenir à Théophraste Renaudot pour être publié dans la Gazette : « J'ay receu la vostre du 14 de ce mois & je vois par l'article qui est dans la Gazette que vous avés prins la paine de montrer ma relation à Renaudot. Je vous aye envoié une seconde plus ample du depuis, laquelle aura encore peu servir au dit Renaudot ».

En savoir plus :

Billet du 14.07.2012

6 Patrimoine et langue vernaculaires

« Petit patrimoine ou patrimoine vernaculaire : l'ensemble des constructions ayant eu, dans le passé, un usage dans la vie de tous les jours », Wikipedia

Billet du 07.07.2012
Billet du 07.07.2012

En 1934, René Hostiou, agriculteur à Pennanec'h, est conseiller municipal dans l'équipe du maire Pierre Tanguy. En contrebas de sa propriété, en plein milieu du quartier de Stang-Venn, formé récemment des maisons des ouvriers de la papeterie d'Odet proche, il demande à la commune de construire « un lavoir et une fontaine pour les habitants du quartier de Stang-Venn ».

Et ensuite René Hostiou, dans l'esprit de défense des intérêts du village, propose au maire et à la municipalité d'acheter la parcelle de 100 m2, « inscrit au plan cadastral sous le numéro 161.P de la Section B », pour la somme de 300 francs de l'époque, soit 205 euros de 2012. Cette acquisition est entérinée par le conseil municipal du 24 mai 1934.

Ce lavoir est situé à la source du ruisseau de la vallée de Stang-Venn, ruisseau qui va cheminer jusqu'au Bigoudic et l'Odet, le long du chemin que les anciens appelaient « Goarenn ar Ster ».

Cet endroit aujourd'hui caché de la vue, menacé de disparition, devrait être considéré comme un élément du petit patrimoine de notre commune. Il mériterait un grand nettoyage ; les enfants du quartier qui aimaient cet endroit l'avaient démarré en 2007.

Il faudrait aussi sans doute remettre une toiture légère sur les bases des poteaux encore debout, et la figure locale de 1934, René Hostiou, en serait honorée !

En savoir plus : « 1934 - Acquisition communale du terrain du lavoir et fontaine publiques de Stang-Venn »

Dans une logique très proche de défense du patrimoine, signalons que le conseil municipal a officialisé en séance du 04.06.2012 l'adoption de la charte « Ya d'ar brezhoneg » (Oui à la langue bretonne). L'évènement a été signalé dans les colonnes du Télégramme : « " Nous nous engageons à atteindre le niveau 2 de la charte dans un délai de trois ans ", a précisé Pierre-André LeJeune. Pour ce faire, la ville mettra en place des panneaux bilingues aux entrées de la commune, optera pour le bilinguisme systématique pour toute nouvelle signalétique et renouvellement de plaques de rue, enverra des cartons d'invitation bilingues, présentera un éditorial bilingue dans le magazine municipal, continuera à soutenir la filière bilingue et l'initiation au breton, promouvra les cours de breton pour adulte, réalisera une enquête sur la connaissance du breton par le personnel communal, financera des actions de formation au breton pour ce dernier, enregistrera un message bilingue sur le répondeur de la mairie ».

7 De l'austérité à la fantaisie !

« Austérité, s.f. : politique visant à restreindre la consommation par divers moyens, comme la restriction du crédit ou l'aggravation fiscale »

"Ce bulletin n'est nullement austère, il est plutôt fantasque !"
"Ce bulletin n'est nullement austère, il est plutôt fantasque !"

Et oui c’est déjà le sixième été du bulletin trimestriel Kannadig, né en 2007. À l’époque, on avait choisi un format intérieur noir et blanc, un peu austère, sans doute par souci de discrétion et d’économies.

Aujourd’hui il était temps d’ajouter un petit peu de fantaisie et de couleurs. Des 3 colonnes rigides de l'édition originelle, on en a gardé seulement deux et libéré de l’espace pour les photos et les encarts.

Pour l’impression papier en couleurs du présent numéro 19, c’est encore un essai, ce n’est pas le luxe ultime, car on cherche activement une formule qui allierait le prix modique, le plaisir du toucher et des yeux, et un poids inférieur à 100 g pour les envois postaux.

On aura la solution pour le numéro 20 en septembre prochain, c’est promis !

Sinon, profitez bien des articles du 2e trimestre. Avec notamment l’appel à préparation du centenaire des Paotred-Dispount, un texte enflammé de Jean-Marie Déguignet contre les machines à couper les bras des papetiers, le classement en monument historique du buffet d’orgue de 1680, un nouveau document relatif à l’octroi communal, l’évocation des Cloches du Centenaire de 1922 par Théodore Botrel, les photos du taxi Citroën Rosalie le héros du casse du S.T.O., des droits d’étalage contestés à Kerdévot ...

Téléchargement et lecture du bulletin : « Kannadig n° 19 Juillet 2012 »

Billet du 30.06.2012

Nota: l'envoi à domicile des bulletins par voie postale se fera courant de la semaine prochaine, au plus tard le prochain weekend, si toutefois il ne fait pas trop chaud ...

8 La papeterie Bolloré au 19e siècle

« Il y a deux ou trois ans un individu ayant travaillé dans cette fabrique me disait que la veille on avait encore coupé les bras à dix ouvriers d'un coup »

Le texte de Jean-Marie Déguignet, aux observations datées de 1897-1898, en pages 514 et 515 de l'Intégrale des « Mémoires d'un paysan bas breton », est véritablement un morceau choisi très savoureux.

Après avoir introduit son sujet par une anecdote mettant en scène un milliardaire américain, puis évoqué l'inventeur de l'expression populaire « Tonnerre de Brest » (non ce n'est ni Hergé, ni le capitaine Haddock), et enfin glissé un dialogue entre un voisin et un ancien ouvrier de la papeterie, il nous présente avec ironie et passion le palais enchanté de la fabrique de papier d'Ergué-Gabéric, avec « des machines à couper les bras ».

Et c'est une scène digne des Temps modernes de Charlie Chaplin : « Je voyais des machines tourner partout, en dehors, en haut, en bas, à droite et à gauche ». Il décrit ensuite la fabrication entièrement automatique du papier, depuis les broyeuses de pâte, jusque les machines à découper, en passant par le plateau de fer et les cylindres sécheurs.

Mais c'est quand il évoque les milliardaires exploiteurs et les ouvriers « impassibles, paisibles, avachis, le ventre vide, en haillons » que son style s'amplifie, les phrases s’allongent, le rythme s'accélère ...

Et, en fil conducteur, la belle image de ces machines à couper les bras « qui tournent jour et nuit au profit de quelques millionnaires et milliardaires et semblent rire en leur mouvement perpétuel et se moquer de ces autres pauvres machines en chair et en os qui restent crever de faim en les regarder tourner ».

Un texte qui restera très certainement dans les annales : « Déguignet face aux machines de la papeterie Bolloré à la fin du 19e » ¤ 

On en profite pour publier et annoter deux documents inédits relatifs à la famille Bolloré à la fin du 19e siècle. Le premier daté de 1865 mettant en scène le premier patron Bolloré en succession du fondateur Nicolas Le Marié : le docteur Jean-René Bolloré qui signe du double nom « Le Marié & R. Bolloré ». Le deuxième document : une lettre de 1888 signée de la veuve du précédent, une patronne également et une Bolloré de son nom de jeune fille.

En savoir plus : « 1865 - Demande de réparation du chemin vicinal par Le Marié-Bolloré » ¤ 
« 1888 - Le mandat-poste de la veuve du docteur Bolloré au préfet du finistère » ¤ 
Billet du 22.06.2012

9 Nommé recteur au Grand Terrier

« Le 2 nov. 1781 le procureur fait apposer les scellés sur les meubles laissés au presbytère par le recteur Gallois nommé au "Grand TERRIER" (sic) »

Le numéro 37 de la magnifique revue trimestrielle « Kaier ar Poher » du Centre Généalogique et Historique du Poher vient de sortir cette semaine, et on y découvre notamment un article de Goulven Péron super bien documenté qui intéresse Ergué-Gabéric à plus d'un titre.

L'article de 9 pages a pour sujet « Le clergé de Laz de 1754 à 1800 - Messires Gallois et Jacob », lequel Joseph-Emmanuel Gallois sera nommé recteur d'Ergué-Gabéric en 1781. Ce recteur de Laz, au caractère pas commode, se décrivait lui-même comme « licencié de Sorbonne » ou encore « licencié en théologie de la faculté de Paris ».

Quand il quitte Laz pour le « Grand Terrier » - formulation en altération de Grand-Ergué ou an Erge-Vras en breton désignant autrefois la paroisse d'Ergué-Gabéric et inscrit sur la carte de Cassini de 1750-1790 -, on pose les scellés sur le presbytère pour éviter la fauche.

Mais l'après-midi même, le recteur tout juste installé au Grand Terrier, se rend illico à Laz, descend de son cheval, et se précipite au presbytère :

« Il monte au cabinet du levant et brise les scellés. Il remplit ensuite une grande valise de sacs d'argent, de papiers divers, et s'en retourne à cheval à Ergué. Craignant peu l'autorité publique, il revient le lendemain, et embarque d'autres biens. Le procureur ne peut que constater l’infraction : c'est un crime grave et une procédure criminelle sera engagée ».

En savoir plus : « PÉRON Goulven - Le clergé de Laz de 1754 à 1800 » ¤  Billet du 16.06.2012

Nota : C'est bientôt l'heure du « Kannadig an Erge Vras » et de son édition papier en clôture du 2e trimestre de publications d'articles sur le site Internet du Grand Terrier. À la vue de la qualité de la revue « Kaier ar Poher », nous nous demandons si, avant la fin de l'année, on ne devrait pas passer aussi à la quadrichromie. À suivre !

10 L'octroi communal au 19e

« Arrête de délibérer et délivre un octroit municipal dont le produit sera employé jusqu'à parfait paiement à l'acquisition du presbytère », Conseil, 1806.

Placard affiché dans les lieux publics en 1857
Placard affiché dans les lieux publics en 1857

Dans les Echos d'avril 2008 le PDG de Cofiroute affirmait que ce n'était pas parce que les droits d'octroi avaient été abrogés par Anne de Bretagne, morte en 1514, qu'il ne fallait pas penser à réintroduire des barrières de péages sur le réseau routier breton ! ! !

L'histoire s'est naturellement déroulée bien autrement : l'octroi taxant l'entrée des marchandises dans les villes était perçu directement par les municipalités. Cette pratique perdura jusqu'à l'Assemblée Constituante de 1791 qui la supprima, puis le Directoire la rétablit en 1798. Et ensuite au 19e siècle les grandes villes furent autorisées à taxer certaines marchandises entrantes, surtout les boissons alcoolisées, et c'est en 1943 que l'octroi fut définitivement supprimé par le gouvernement de Pierre Laval.

Fin 2003 l'historienne et archiviste Nathalie Calvez a réalisé une excellente étude sur les dessous des droits d'octroi à Ergué-Gabéric au 19e siècle, publiée sous la forme d'un article très documenté dans un cahier de l'association Arkae.

La plupart des documents étudiés et cités sont aujourd'hui rassemblés, transcrits et publiés sur GrandTerrier : délibérations de conseils municipaux, placards de publication du règlement et tarif d'octroi, décret impérial ... Avec un petit inédit : la réponse négative en 1838 écrite et signée de la main du Ministre de l'Intérieur de l'époque. Qu'on se rassure : l'octroi perçu sur les boissons sera rétabli en 1857 et maintenu jusqu'en 1921.

En savoir plus : « 1806-1921 - L'histoire de l'octroi à Ergué-Gabéric au 19e siècle‎‎ » ¤ « 1838 - Refus d'autorisation de l'octroi sur les boissons par le ministre de l'Intérieur » ¤ 

Billet du 09.06.2012

11 Placître et fabrique de Kerdévot

« Je prie Monsieur le préfet de vouloir bien me donner son avis avant le 8 septembre prochain jour de la fête. Depuis un tem(p)s (im)mémorial on perçoit ce droit, le plat-citre appartient à Mr Mahé propriétaire », 1840.

Marchands ambulants à Kerdévot, Eugène Boudin, 1855-57 Billet du 02.06.2012
Marchands ambulants à Kerdévot, Eugène Boudin, 1855-57 Billet du 02.06.2012

René Laurent, maire, déforme l'orthographe du mot « placître » en « plat-citre », mais il sait compter et gérer les comptes de sa commune. Dans sa lettre du 14 août 1840 adressée au préfet et contenant quelques autres fautes, il demande son approbation pour la collecte des droits d'étalage des marchands ambulants le jour du pardon de Kerdévot.

Le préfet, le baron Boullé, reformule la demande, corrige les fautes d'orthographe, et souligne les points suivants :

Image:right.gif Seul le gouvernement est habilité à approuver les tarifs. Ceux-ci sont joints à la lettre, mais non conservés à ce jour. On peut les imaginer similaires à ceux de la chapelle Ste-Anne de Fouesnant en 1852 : « Dix centimes par mètre carré pour les charrettes, les chars à banc, les baraques ou tentes, les barriques, les tables ou bancs, les voitures, et les étals sur le sol. Cinq centimes pour chaque marchand ambulant ou étalagiste qui n'occupera pas la superficie d'un mètre carré ».

Image:right.gif Les revenus des droits d'étalage devraient alimenter la caisse de la fabrique plutôt que celle de la commune. À ce propos, bien que le maire affirme que les droits étaient perçus « depuis un tem(p)s (im)mémorial », ils ne sont pas mentionnés précisément dans les comptes de la fabrique de Kerdévot de la fin du 18e siècle, à moins qu'ils n'entrent dans la catégorie des « offrandes, oblations, vœux, testaments, hardes, gilets, poullets, cochons, bleds, beurres et autres présents ».

Image:right.gif Il est étrange que la fabrique ou la commune puisse percevoir les droits d'étalage sur le placître qui est la propriété privée de François Grégoire Mahé. Cette appartenance privée d'un placître est aussi exceptionnelle, et date de plusieurs siècles car elle n'est pas mentionnée dans les documents relatifs aux Biens Nationaux à la Révolution. Elle est par contre confirmée dans un document de 1855, un décret impérial qui érige le lieu de Kerdévot en église succursale et chapelle de secours, et qui authentifie la donation à la fabrique du placître par « les sieur et dame Mahé ».


En savoir plus : « 1840 - Droits d'étalage sur le placître de la chapelle de Kerdévot‎‎ » ¤ « 1788 - Compte de Jean Le Pouppon, fabrique de Kerdévot » ¤ « 1855 - Décret impérial pour l'érection de Kerdévot en chapelle de secours » ¤ 

12 Préparation du centenaire

« Les jeunes gens y font de la gymnastique, du football, apprennent à jouer de la trompette et sont exercés au tir à la carabine », Commissaire, 1923.

2013 sera l'année du centenaire des « Paotred Dispount », dont les bases ont été fondées en juillet 1913 par l'abbé Louis Le Gall. À l'époque, il s'agissait de l'association des Enfants ou des Chevaliers de Notre-Dame de Kerdévot aux activités gymnastique et musicales ...

Au retour de l'abbé de la Grande Guerre, la Société devint les « Paotred Dispount » ou « Les Sans Peur », proposant des activités sportives et de préparation militaire, le football devenant plus tard sa principale discipline.

Pour retracer ce siècle d'histoire, les Paotred recherchent d'autres photos, documents, coupures de journaux, films, objets collectors, maillots, survêtements. Une exposition est prévue au printemps 2013, la publication d'un recueil également. S'adresser directement à François Bosser, André Huitric et Laurent Huitric, ou par mail à paotred100at.giforange.fr

Le site GrandTerrier s'associant à cette initiative, nous rassemblerons toutes nos pièces d'archives et photos collectées sur ces 100 ans d'histoire locale. Nos toutes dernières trouvailles sont :

  • Le journal officiel du 23 septembre 1919 où fut publiée la création de l'association « Les Sans Peur ».
  • Une photo de 1931 de la clique musicale à Kerdévot et un article de l'Ouest-Eclair pour l'inauguration du patro de Keranna.
  • Le papier à entête de la Société des Paotred-Dispount en 1932 avec logo et cachet (visibles sur l'affiche ci-contre).

En savoir plus : « Les Paotred-Dispount depuis 1913 : archives, photos, témoignages *‎‎ »

Billet du 26.05.2012

13 Une Rosalie perdue de vue

« J'ai été interrogée à domicile par deux officiers de la Gestapo : "Votre voiture nous a fait des cochonneries à la préfecture !"  », Catherine Balès.

Le taxi héros du Casse du STO de 1944
Le taxi héros du Casse du STO de 1944

De nombreux témoignages ont déjà salué le rôle du taxi d'Hervé Balès qui transporta les 40.000 dossiers du STO de Quimper jusqu'au four à pain d'Ergué-Gabéric où ils furent brulés, privant les occupants de leurs fiches pour organiser des assignations forcées de travailleurs en Allemagne.

Suite au récit de Jean Le Corre, participant au célèbre casse, une incertitude demeurait sur la marque du véhicule. Le doute est désormais levé par le travail d'Hervé Yves Balès, second fils d'Hervé Balès, qui a retrouvé dans les papiers familiaux les photos du véhicule. Ce n'est pas une Renault, c'est bien une Citroën, et il s'agit d'une Rosalie avec ses chevrons impressionnants sur la calandre avant.

La suite des aventures du taxi est racontée par Catherine Balès, née Le Dé et épouse d'Hervé, car ce dernier était absent au moment des faits (capturé pendant la guerre dans la poche de Dunkerque, il était prisonnier dans un stalag en Autriche) : « J'ai démenti : "Oh non Monsieur, ce n'est pas possible !". Et on a visité le garage où la voiture était garée, près du magasin et de notre logement. Le garage n'était pas visible de l'appartement qui donnait sur l'église, la porte du garage n'était jamais fermée, et la pente du terrain permettait en plus de laisser rouler la voiture, passer devant le café Heydon (actuellement la "capitale"), puis démarrer "en prise" juste avant le cimetière de Pennarun et direction Quimper ! ... ».

À son retour de captivité en juin 45 Hervé Balès a repris sa voiture pour faire le taxi. Il était très sollicité pour les trajets du Bourg du Grand Ergué à Quimper. Avec ses 7 places régulières et les 3 à 4 places supplémentaires des enfants c'était un véritable mini-bus. Les anciens du Bourg se rappellent de ces virées où, jeunes à l'époque, ils étaient entassés dans le taxi dans la joie et la bonne humeur.

En savoir plus : « Le grand taxi populaire du casse du STO en 1944‎ »                         Billet du 19.05.2012


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