Les billets hebdos de l'actualité du GrandTerrier - GrandTerrier

Les billets hebdos de l'actualité du GrandTerrier

Un article de GrandTerrier.

Revision as of 25 décembre ~ kerzu 2020 à 11:15 by GdTerrier (Discuter | contributions)
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Chaque semaine, un nouveau billet annonçant un ou plusieurs articles sur le site GrandTerrier.

Une compilation des billets est publiée en fin de trimestre sous la forme des chroniques du Bulletin Kannadig.

Anciens billets hebdos : [Actualité, archives]

Les anciennes affichettes : [Accroches à la une]

Modifications d'articles : [Journal des MàJs]


Sommaire

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1 Nedeleg laouen deus Kerrouz

Billet du 25.12.2020 - « Hetiñ a ra skipailh GrandTerrier Nedeleg laouen deoc’h » - « Le GT vous souhaite un joyeux Noël avec ce houx de Kerrous ! ».

Le sort de l'excavation minière de Kerrous est désormais fixé pour les quelques décennies à venir : un réservoir alimenté tout l'hiver par les eaux de l'Odet sera déversé en période d'étiage vers l'affluent quimpérois du Steir en amont de l'usine de production d'eau potable du Trohéir en Kerfeunteun.

Et en guise de remerciements aux gabéricois, le site a été transformé avec un petit sentier damé de randonnées, un parking pour les voitures, des plantations d'arbres, un point de vue protégé aux abords du réservoir. Voir dans l'article détaillé les photos et vidéo décrivant le site depuis la première zone d'extraction jusqu'à son aménagement actuel.

Un panneau bilingue a été également réalisé avec ces titrages : en français « Ancienne carrière de Kerrous. Propriété du Département. Commune d'Ergué-Gabéric » et en breton « Mengleuz kozh Kerrouz. Per'hentiezh an Departatamant. Kumun an Erge-Vras ». On fera abstraction de la belle faute du tout premier paragraphe en français à propos du dernier tir de mine en mai 2017.

Comme l'inauguration du site est datée de la 2e semaine de décembre, on pourrait penser à un Noël attendu et espéré localement depuis un certain temps, avec un paquet cadeau illustré des boules rouges du houx qu'on trouve sur le site.

Mais le vrai cadeau de Noël sera sans doute le prochain, en 2021, lorsque le sentier de randonnée sur la berge gabéricoise de l'Odet sera ouvert depuis le nouveau parking de Kerrous jusqu'au site de Meil-Poul en amont. Et si une passerelle est créée les promeneurs pourront faire une boucle en revenant par le GR 38 qui court sur la berge quimpéroise.

Le sentier gabéricois existe déjà (en vert ci-contre), mais il demande à être repensé à certains endroits pour pouvoir être praticable même par temps des crues bouillonnantes de la plus belle rivière de France.

 


Image:square.gifImage:Space.jpgArticle plus détaillé : « Ancienne carrière de granulats et site naturel de Kerrous

2 Interrogations vaccinales en 1851

Billet du 19.12.2020 - Les réponses au questionnaire du Comité départemental d'hygiène du Finistère par le maire d'Ergué-Gabéric et un médecin : grand merci à Pierrick Chuto pour nous avoir communiqué ce dossier conservé aux Archives Départementales du Finistère.

La variole du latin "variola" qui signifie « petite pustule » est une maladie infectieuse d'origine virale, très contagieuse et épidémique, et très ancienne. En Bretagne elle n'est éradiquée qu'en 1955 (dernière épidémie à Vannes), mais c'est au XIXe siècle qu'elle a le plus frappé et que les campagnes vaccinales ont commencé.
Le vaccin antivariolique découvert par l'anglais Edward Jenner n'est introduit en France qu'à partir de 1820. Et en 1851 le Comité départemental d'hygiène du Finistère organise auprès des médecins une « enquête sur la marche de l'épidémie variolique » et de son traitement à Quimper et dans les communes avoisinantes.

Pour Ergué-Gabéric le maire Pierre Nédélec, cultivateur à Kergoant, est invité à répondre à ce questionnaire. A priori il est bien initié à la pratique médicale, car, avec sa fille, il a une longue pratique de soins aux animaux et aux personnes atteintes de la rage ou d'hydrophobie, et en 1877 il sera même inculpé pour exercice illégal de la médecine.

Il donne tout d'abord les chiffres bruts de contamination sur le territoire gabéricois : « Il n'y a eu aucun cas en 1850. Il y en a eu 14 du 1er janvier 1851 jusqu'au 27 avril 1851. Sur les 14 personnes atteintes, neuf sont décédées. Toutes les victimes avaient plus de 20 ans, l'une d'elles avait 56 ans. La période où il y a eu plus de malades est celle des hommes de 20 à 25 ans. »

Les questions abordent le sujet des effets des vaccins : « La maladie a atteint plusieurs enfants qui avaient été vaccinés depuis moins de 10 à 12 ans. ». Qu'il nuance par « Les enfants vaccinés ont moins souffert et la maladie était moins grave. Dans un village il y avait 4 enfants dont 3 avaient été vaccinés, il n'y a eu d'atteint de la petite vérole que celui qui n'avait pas été vacciné. ». Et le médecin Jean Natten (si l'on lit bien sa signature en bas de son témoignage) confirme les faits : « À Ergué-Gabéric j'ai observé six enfants inoculés et quatre ont une variole confluente. ».

À noter que la formule « petite vérole » est l'expression populaire désignant la variole. Et, dans le cas d'une variole dite confluente, les pustules forment une plaque uniforme sur le visage ou le corps.

  L'épidémie variolique touche les enfants, mais aussi les « vieilards », ou du moins à un âge où, à Ergué-Gabéric en 1851, on était vieux après 50 ans : « Il est mort une femme âgée de 56 ans, et un homme âgé de 54 ans [...]. Un habitant de ma commune, qui avait eu la petite vérole à l'âge de 14 ans, en a été atteint de nouveau au mois de février 1851 ; il est âgé de 54 ans. Il a été très gravement malade mais il est bien actuellement. »

La mortalité due à la variole, d'après Pierre Nédélec, est nulle pour l'année 1850, et de 9 décès constatés pour les 4 premiers mois de 1851, ce qui ferait environ 25 pour l'année entière. Si l'on se réfère à la mortalité annuelle globale d'Ergué-Gabéric, elle est quand même à peine supérieure à la moyenne pondérée de 50 décès, mais en augmentation pour atteindre 72 morts en 1852.

Ergué-Gabéric connaitra une vague plus importante de variole en 1881 avec une surmortalité annuelle globale de 113 décès, qui sera suivie d'une campagne vaccinale efficace, pour faire disparaître progressivement le fléau de nos campagnes.

Avant 1850 il y a eu aussi trois pics de mortalité : 1832, 1837 et 1849. Parmi les 102 décès de 1849, quelques-uns sont peut-être varioliques, mais c'est surtout l'année funeste d'une autre vague épidémique, le choléra-morbus, qui a touché toute l'Europe, et qui s'est répandu dans la basse-Bretagne par ses ports sardiniers. Et les années 1832 et 1837 sont aussi marqués par la précédente pandémie de choléra.

En savoir plus : « 1850-1851 - Enquête sur la marche de l'épidémie variolique

3 Kervéady et sa maison de maître

Billet du 12.12.2020 - Des archives notariales donnant une photographie de la propriété rurale de Kerveady, composée d'un métairie et d'un manoir (désigné aussi sous le terme de "maison de maître"), ceci avant sa vente par adjudication en 1868.

En cette moitié du XIXe siècle, les propriétaires fonciers de Kervéady sont Mr et Mme Pelle-Desforges, à savoir Fortuné Louis Marie (1817-1877) commerçant brestois ou « représentant du commerce » natif de Morlaix, et son épouse quimpéroise Désirée Anne Marie Morvan (1818-1884), officiellement séparés « quant aux biens » en 1866 mais « débiteurs solidaires ».

Les époux y ont habité : « propriétaires et commerçants, demeurant ordinairement à Ergué-Gabéric, présentement à Brest » ; « la jouissance - par le fermier - de la maison de maître et la réserve de terrain que mon mari s'était conservée ainsi que le jardin ». Mais en 1859-68 Désirée Morvan en est la vraie propriétaire comme l'atteste la correspondance incluse dans le dossier avec son notaire Maitre Lesneven.

Mais dans le contexte de séparation d'avec son mari et du fait que ses enfants sont encore jeunes, ses revenus sont inférieurs à ses dépenses. C'est sans doute la raison des nombreuses prises d'hypothèque sur sa propriété de Kerveady : dette maternelle en 1856, crédit bancaire en 1859, prêts d'un pâtissier-confiseur, d'un aubergiste et d'un gendarme à cheval en 1866.

Et par ailleurs elle demande à son notaire d'augmenter les rentes annuelles des fermiers et de les forcer à faire les réparations nécessaires. Elle s'intéresse aussi à la valorisation des bois et obtient du fermier de Kerveady le rachat de 22 pins maritimes (on notera le terme qu'elle utilise pour désigner cet arbre : « prussier » qui pour le dictionnaire Littré est le « nom vulgaire, dans le département du Finistère, du pin maritime, que l'on croit y avoir été apporté de la Prusse  »).

  Les 20 hectares de Kerveady sont composés de « métairie, maison de maitre (couverte en ardoises), terres chaudes, terres froides, prairies, courtils, jardins et bois ». Les numéros de parcelles étant référencés, on constate que le lieu-dit entier détaillé dans le cadastre est concerné :

Tout le monde conseille à Désirée Morvan de vendre son bien, mais elle est réticente : « je ne voudrais convertir en bien le peu de bien qui me reste qu'après la liquidation complette de ses affaires de crainte qu'on ne tracasse à ce sujet ». Elle y consent néanmoins en fin d'année 1868, le notaire Lesneven faisant apposer des affiches grands formats et trois insertions réglementaires dans le journal « L'impartial du Finistère » pour une mise à prix à 12.000 francs.

A cette date Kerveady est affermé à Hervé Caugant (ses enfants nés entre 1858 et 1868 y sont déclarés), ce pour un bail courant jusqu'en 1874. On ne connait pas le nom du propriétaire foncier qui remporte la mise aux enchères de 1868. Dix ans plus tard, le cultivateur Jean-Louis Thépaut rachète les lieux et s'y installe comme cultivateur.

En savoir plus : « 1859-1868 - Hypothèques et vente du manoir et métairie de Kervéady

4 L'architecture de la cité de Ker-Anna

Billet du 05.12.2020 - Une vidéo de 5 minutes 30 qui présente de façon didactique la spécificité de la vieille cité ouvrière de Ker-Anna, sous l'angle de son architecture innovante et via l'interview d'Henri Le Gars, né en 1923, occupant des lieux pendant 45 années et aujourd'hui âgé de 97 ans.

La construction de la cité de Keranna a été organisée par l'industriel René Bolloré et son architecte nantais René Ménard en 1918-19 afin de loger les salariés de la papeterie voisine d'Odet, à savoir essentiellement les contremaitres et agents de maitrise.

Cette cité dite ouvrière est une des plus anciennes du département, et son modèle architectural était précurseur pour l'époque. Le journaliste Frédéric Lorenzon s'est penché en septembre dernier sur l'originalité de cette réalisation dans son émission « Archi à l'ouest » sur Tébéo.

Grâce à de très belles vues aériennes à hauteur de drone et par un temps ensoleillé de fin d'été, on y découvre 18 maisons, certaines logeant deux familles : « On est sur l'adaptation de la maison traditionnelle bretonne, sur un schéma qui se reproduit, puisque les maisons sont presque toutes identiques. On a évidemment le granite qui est la pierre locale, des encadrements en pierre de taille. On voit certaines entrées qui ont un arc en plein cintre, tout ça est typique des maisons telles qu'on peut les voir un peu partout dans la campagne. »

Olivier Hérault du Conseil d'Architecture, d'Urbanisme et de l'Environnement explique l'originalité du lieu : « Ce qui est intéressant est qu'elle crée vraiment un dialogue entre l'espace commun, partagé, et l'espace individualisé, plus personnel.  ».

 

Le vétéran des habitants de Ker-Anna, 45 ans dans la rangée nord, témoigne et illustre l'utilisation du terre-plein au centre du U formé par les maisons en tant qu'espace commun : « Avec les gosses de mon âge, à l'époque, on se retrouvait tous à jouer au ballon entre les tilleuls. On faisait un but, et on jouait là, alors que le terrain de foot du patronage était disponible en bas, c'était comme ça que ça se passait. ».

La progression de l'espace commun au privé se passe comme suit : tout d'abord un espace commun en pelouse, puits et tilleuls, puis un petit jardin privé, ensuite la maison d'habitation au loyer modéré ou gratuit, et par l'arrière une deuxième rangée de jardins plus personnels et plus utilitaires., et enfin les dépendances excentrées pour ranger ses outils et éventuellement garer sa voiture.

Le côté moderne de cet habitat est indéniable : « Pour moi ça correspond à une vraie problématique d'aujourd'hui, une sorte de dualité, à la fois on voudrait un extérieur et on n'a pas le temps ou on n'a pas envie de s'en occuper. Ici finalement l'espace à gérer est très faible, et pourtant on peut profiter d'un espace très grand. »

En savoir plus : « La cité de Ker-Anna, émission 'Archi à l'Ouest' sur Tebeo

5 Domaines congéables et régime féodal

Billet du 30.11.2020 - Pétition demandant le rétablissement des domaines congéables en Basse-Bretagne, suite à leur suppression en août 1792, sous forme manuscrite (Médiathèque de Quimper) et imprimée (BnF), déterminante pour le rétablissement de ce régime de fermage le 9 brumaire de l'an VI.

Le régime des domaines congéables, appelé aussi convenancier, est le contrat d'affermage appliqué systématiquement pendant l'ancien régime en Basse-Bretagne pour toutes les tenues agricoles, les propriétaires fonciers étant généralement nobles.

Ces contrats avec des variantes locales (ceux d'Ergué-Gabéric étant précisés « à l'usement de Cornouaille ») prévoient pour le domanier le paiement d'une redevance convenancière annuelle, généralement en nature (en mesures de céréales), l'exécution de corvées, et optionnellement une taxation dite « champart » sur les récoltes. Et en contrepartie, le propriétaire doit payer des droits réparatoires couvrant les améliorations des édifices quand il est amené à congédier son domanier.

À la révolution, de nombreux membres du tiers-état breton réclament la suppression du régime des domaines congéables, car « il participe de la nature des fiefs ».

Moins revendicatif, l'article 8 du cahier de doléances du Tiers-Etat d'Ergué-Gabéric, rédigé en 1789, demande simplement la conversion du régime convenancier en redevance censive simple, c'est-à-dire sans les corvées (et sans les impôts sur les récoltes) et sans le paiement des droits réparatoires : « Que les aides coutumières soient supprimées, toutes corvées déclarées franchissables, le fief anomal ou domaine congéable converti en censive. »

En août 1792 une loi nationale décrète finalement la suppression des convenants dans les départements du Finistère, Morbihan et Côte-du-Nord, ceci pour permettre «  l’abolition du régime féodal ». Cette mesure déclenche cette présente pétition adressée aux députés de la Convention par des « Citoyens Propriétaires & autres Habitans de la Commune de Quimper ».

Certains arguments sont un peu spécieux, voulant prouver l'existence du Domaine congéable bien avant l'arrivée du système féodal : « ces pratiques immémoriales dont l'origine se perd dans les siècles les plus reculés de la Nation Bretonne ».

D'autres raisons sont exposées : le droit de propriété, les pertes fiscales, le dynamisme agricole ... et même la corruption d'un certain député abolitionniste du Morbihan, propriétaire terrien, qui voudrait par l'abolition échapper aux paiements de droits réparatoires conséquents.

Les signataires sont des notables républicains de Quimper, des négociants, avoués ou commerçants, dont certains sont des propriétaires terriens qui se sont enrichis par les ventes adjudicataires des biens nationaux confisqués aux nobles.

 


Certains pétitionnaires, dont certains sont francs-maçons, sont liés à la commune d'Ergué-Gabéric : Mermet dit « notable » est le demi-frère de Mermet « le Jeune » (nouveau propriétaire du château du Cleuyou) ; Jean-Baptiste Laurent Le Breton, membre du Directoire du District, docteur en médecine en charge des épidémies locales (dont celle d'Ergué-Gabéric en 1786) ; René Bolloré est le syndic à Locmaria, ancêtre des Bolloré qui développeront la papeterie d'Odet quelques décennies plus tard.

Mais aucun habitant d'Ergué-Gabéric ne donne sa signature, ceci très certainement du fait que les nouveaux notables de la commune sont tous agriculteurs, et qu'ils ont souffert en tant que domaniers des effets néfastes des domaines congéables (redevances seigneuriales et aspects arbitraires des congéments).

Ils préfèrent certainement l'abolition des convenants, lesquels vont subsister tout au long du 19e siècle avec une hostilité maintenue entre domaniers et fonciers, avant de disparaître définitivement en 1947 grâce à une loi à l'initiative du député communiste finistérien Alain Signor.

En savoir plus : « 1792-1797 - Pétition quimpéroise contre l'abolition des domaines congéables »

6 Manoir et moulin nobles en 1730-53

Billet du 21.11.2020 - Manoir du Griffonès, moulin et villages voisins situés sur l'éperon du Stangala, domaine noble et roturier des seigneurs de Coat-Caric relevant du fief du roi : étude et transcriptions des documents d'archives de la Chambre des comptes de Nantes sous la cote B2012.

Trois générations des seigneurs de Coat-Caric sont au 18e siècle les propriétaires fonciers du domaine de Griffonez dépendant du fief du Roi : Pierre Lesparler (<1655-1727), René Corentin Lesparler (<1690-1721) et le chevalier Jean Marie Charles Lesparler (1720-1750). Le titre de Coat-Caric leur est attribué par le manoir éponyme en Plestin-les-Grèves (Côte-d'Armor), mais cette branche réside dans le château de la Bouexière en Pleyben, acquis par le mariage de leur aïeul en 1640.

Deux liasses de documents, datés de 1730 et 1752, conservés aux Archives départementales de Loire-Atlantique, attestent du contour de leur propriété suite aux décès de René Corentin Lesparler et René Corentin Lesparler, par les déclarations de leurs veuves respectifs (Marie Sébastienne Bizien et Marie Anne Charlotte de Marigo).

Vraisemblablement Pierre de Lesparler a hérité à la fin du 17e siècle de la propriété de Griffonez des seigneurs de Grassy, la description des biens concernés et des droits seigneuriaux afférents étant identiques. Les lieux concernés sont le manoir de Griffonez, Kerberon, Kernoaz, le moulin à eau, Quélennec bihan (ce dernier village étant en partie morcelé : « le tiers est au fief du sieur abbé de Landevennec »).

Pour le moulin à eau de Griffonez, placé sur l'Odet en crontrebas et désigné aujourd'hui sous le toponyme de Meil-Poul, ses dimensions précises sont données en pieds : « de long trante sept pieds, de franc traize et demy et de hautteur six et demy », à savoir 12 mètres de longueur, 4,5 de largeur et seulement 2,1 de hauteur.

Les lieux sont décrits avec cette précision : « toutes les maisons des dits manoir, domaine et moulin cy-devant sont couverts de gleds » (chaume). Le manoir est composé de « maisons, crèches, grange », et l'on notera que le pré-inventaire établi en 1972 pour le Patrimoine Culturel de Bretagne mentionne sur le bâtiment principal et l'étable au nord plusieurs ouvertures à « piédroits chanfreinés », et également un linteau de l'étable avec une date gravée 1608 ou 1628, ceci correspondant sans doute à une extension entreprise du temps des Grassy, prédécesseurs des Coat-Caric.

L'ensemble est réputé être possédé « prochement en partie noblement et en autre partie roturièrement du Roy », ou plus précisément « qu'il ny en a de noble que le dit manoir de Griffones et le moulin et les autres estant biens roturiers » Les impôts spécifiquement levés sur les biens nobles (chefrente, droits de moutte, foy et hommage, champart ...) ne sont pas dus pour les villages de Kerberon, Kernoaz et de Quélennec où les domaniers ne doivent que la rente au titre de « domaine congéable à l'usement de Cornouaille  ».

A la suite des aveux ou rapports de succession de 1730 et 1752, le receveur du roi confirment la validité des déclarations des deux veuves, en précisant bien que le domaine de la sénéchaussée de Quimper est aliéné respectivement au comte de Toulouse et au duc de Penthièvre (père et fils) qui sont les derniers gouverneurs de Bretagne avant la Révolution française.

  Bâtisse manale de Griffonès :

Moulin de Griffonès, dit de Meil-Poul :


* * *

La semaine dernière, il était question d'une vidéo d'une noce bretonne filmée en 1912 : on nous a fait la remarque que le film laisse à penser qu'il faisait un temps estival (ombrelles, chapeaux de soleil, feuilles des arbres). En excluant les mariages hors saison, le nombre des mariages possibles est considérablement réduit : cf. la liste dans l'article.

En savoir plus : « 1730-1753 - Manoir et dépendances de Griffonez, propriété des Coat-Caric La Bouexière »

7 Des noces filmées en 1912

Billet du 14.11.2020 - On continue le travail collectif d'analyse des vidéos d'autrefois. Sur celle de la semaine dernière, datée de 1922, le garde-chasse Léonus a été identifié, mais pas encore les pitres assoiffés, ni les ouvriers diplômés. Sur celle-ci il s'agit de trouver le nom des mariés et le lieu des noces.

Ce film du musée Albert Kahn, montrant une noce bretonne en milieu rural au début du 20e siècle, est une rare archive qui a déjà été projetée et présentée à Ergué-Gabéric par Claude Arnal de la Cinémathèque de Bretagne en juin 2003.

Dans ce court-métrage la première scène est l'arrivée des noceurs en chars-à-bancs sur un chemin rural, précédée d'un couple de sonneurs de biniou et bombarde. Il semble que ce chemin bordé d'un tas de pierres soit le virage de Pont-Banal de la route de Saint-Joachim, avec une prise de vue en léger surplomb depuis la côte menant au bourg d'Ergué-Gabéric. Les deux sonneurs, dont les figures sont cachées par l'ombre de leurs chapeaux, arrivent à pied, et une vingtaine de chars-à-bancs défilent ensuite, ce nombre attestant de l'importance des familles des mariés.

La deuxième scène est la sortie de la messe de mariage : les invités en habits de noces remontent le cimetière qui entoure l'église paroissiale, passant le long du presbytère et de l'ossuaire. Jeunes, femmes et hommes franchissent allègrement l'échalier et se rassemblent sur la rue, avec en arrière-plan la rue de la fontaine, la future maison Nédélec à gauche (actuellement en 2020 en cours de reconstruction).

Le chrono précis du film, selon le compteur défilant en bas d'écran sur la vidéo, est le suivant :

1.Image:Space.jpg00:00Image:Space.jpgàImage:Space.jpg00:17Image:Space.jpg: Générique

2.Image:Space.jpg00:18Image:Space.jpgàImage:Space.jpg01:20Image:Space.jpg: Arrivée des sonneurs et des charabans

3.Image:Space.jpg01:21Image:Space.jpgàImage:Space.jpg03:00Image:Space.jpg: Sortie de messes près de l'ossuaire

4.Image:Space.jpg03:01Image:Space.jpgàImage:Space.jpg07:34Image:Space.jpg: Danses à la ferme

5.Image:Space.jpg07:35Image:Space.jpgàImage:Space.jpg07:44Image:Space.jpg: Générique de fin

La scène finale est une longue série de danses en rondes et en quadrettes, traditionnellement deux femmes et deux hommes. Aujourd'hui les seules danses à 4 danseurs sont plutôt rares, mais à la fin du 19e siècle et au début du 20e, la gavotte est toujours dansée en quadrettes en pays glazik, et non en couple ou en chaine.

Les sonneurs de bombarde et biniou ne sont pas filmés, et les danseurs se déploient sur une cour de ferme, avec une maison d'habitation et son muret de jardin en second plan, et des appentis agricoles sur le côté gauche. Ce corps de ferme ressemble à l'entrée de Kerellou, non loin du bourg, mais ce village ne semble pas avoir hébergé une famille de mariés de l'an 1912.

 

Les habits traditionnels brodées des noceurs, hommes et femmes, dénotent une certaine opulence, mais à ces noces les plus pauvres ne sont pas oubliés. Pour preuve les enfants en sarreaux larges et « boutou koad » (sabots de bois) qui regardent le ballet costumé.

Au total 20 noces ont été célébrées en 1912 à Ergué-Gabéric, et pour l'instant aucune n'a été identifiée pour être celle qui ont l'honneur des caméras. Parmi les plus importants, on notera le mariage le 5 novembre de Eouzan et Reine Rolland, fille et fils de contremaitre et mécanicien de la papeterie Bolloré. Le jeune entrepreneur René Bolloré, « ami du marié » et témoin du mariage, aurait pu demandé une prestation cinématographique, mais à ce jour rien ne permet de localiser la scène dansée à Odet.

Les autres mariages dont les bans sont publiés concernent principalement des fils et filles d'agriculteurs, de journaliers et domestiques, et quelques artisans (charron, boulanger, meunier) : cf. la liste dans l'article détaillé. Les familles les plus influentes sont potentiellement à Lenhesq (Hostiou), Keranroux-Kerrous (Signour), Lezebel (Guillou), le bourg (Le Roux), le moulin de Kergonan (Troalen) ...

Un appel est lancé : si vous reconnaissiez vos ancêtres et/ou le lieu des noces, nous vous serions reconnaissants de le faire savoir ; on garde au frais une bouteille millésimée de cidre pour célébrer l'évènement mémorial.

En savoir plus : « Noces Bretonnes à Ergué-Gabéric en 1912, Film du musée Albert Kahn »

8 Un film d'antan pour un centenaire

Billet du 07.11.2020 - La nouvelle période de confinement pandémique se prête bien, comme la précédente, au travail collectif d'analyse cinématogra-phique : voici une vidéo mise en ligne par la Cinémathèque de Bretagne. La semaine prochaine nous étudierons un court-métrage de 1912.

Cette vidéo N&B de 14 minutes a été filmée le 8 juin 1922 dans l'enceinte de l'usine à papier Bolloré d'Odet : une belle fête populaire où tout le monde, notables et ouvriers-ères, semble s'amuser. C'est un bon complément à la collection des 55 cartes postales du photographe quimpérois Joseph Villard. Sur les clichés on peut voir d'ailleurs voir les caméras 35 mn présentes sur les lieux de la fête, mais on ignore le nom du cinéaste professionnel sollicité par Rene Bolloré pour immortaliser les évènements de la fête.

Les scènes filmées sont essentiellement festives : les invité(e)s en costumes traditionnels, les danses bretonnes en quadrettes, couples ou chaines, les deux célèbres sonneurs de biniou et de bombarde, les démonstrations des gymnastes de la clique des Paotred, les hommes et les femmes sur les manèges, les conciliabules et pitreries alcoolisées ...

Le chrono détaillé du film, selon le compteur défilant en bas d'écran sur la vidéo, est le suivant :

1.Image:Space.jpg18:49Image:Space.jpgàImage:Space.jpg19:30Image:Space.jpg: Les spectateurs, hommes et femmes en habits traditionnels, les jeunes Paotred

2.Image:Space.jpg19:31Image:Space.jpgàImage:Space.jpg22:27Image:Space.jpg: La remise des diplômes par René Bolloré

3.Image:Space.jpg22:28Image:Space.jpgàImage:Space.jpg24:48Image:Space.jpg: Les danses

4.Image:Space.jpg24:49Image:Space.jpgàImage:Space.jpg25:05Image:Space.jpg: Les sonneurs Fanch Gaillard et François Bodivit

5.Image:Space.jpg25:06Image:Space.jpgàImage:Space.jpg25:40Image:Space.jpg: Suite des danses

6.Image:Space.jpg25:41Image:Space.jpgàImage:Space.jpg29:52Image:Space.jpg: Foule, manèges, vaisselle, hommes aux chapeaux

7.Image:Space.jpg29:53Image:Space.jpgàImage:Space.jpg30:17Image:Space.jpg: Gymnastes

8.Image:Space.jpg30:18Image:Space.jpgàImage:Space.jpg30:17Image:Space.jpg: Invités, garde-chasse et deux soiffards

Parmi les nombreux danseurs, on reconnait bien Corentin Heydon avec son béret et Corentin Coré, tous deux moniteurs des gymnastes des Paotred Dispount. Pour ce qui concerne les 12 femmes et les 11 hommes décorés par le patron René Bolloré, leur identification n'a pas encore été menée ; chacun(e) reçoit deux diplômes enroulées et la boite de la médaille commémorative du centenaire (la médaille proprement dite du travail était épinglée par le préfet, cf. les cartes postales Villard).

Un appel à la reconnaissance de tous les participants à la fête est lancé afin que les générations à venir puissent reconnaitre leurs ancêtres papetiers (cf. vignettes d'arrêts sur image de l'article).

Pour l'animation des danses, deux sonneurs cornouaillais, à savoir Fanch Gaillard (1876-1922) à la bombarde et François Bodivit (1887-1963) au biniou, donnent un véritable concert adossé à une haie près du manoir. Gaillard, ménétrier musicien

  de profession à Quimper, décédé en décembre peu de temps après sa prestation à Odet, est surnommé « Fri toull » (nez creux). Bodivit est natif de Clohars-Fouesnant et son père, François aussi, décédé en 1900, a été également un "binaouer" très réputé.

Et on se demande bien aussi qui pouvaient être les deux pitres assoiffés qui clôturent la vidéo et qui sollicitent en boissons le garde-chasse Alain-Yves Léonus.

En savoir plus : « La fête du centenaire des papeteries Bolloré en 1922, film muet noir et blanc »

9 Une affaire criminelle à Niverrot

Billet du 01.11.2020 - Où il est question de casseurs de pierres sur la nouvelle route de Kerdévot à Niverrot, d'un horrible assassinat en plein champ de pommes de terre et d'un procès en assises d'un jeune domestique délinquant qui écope d'une peine de 15 ans de travaux forcés.

Ce livre « Faits divers en Bretagne - 2e saison » rassemble les chroniques radiophoniques de 2018-2019 sur France Bleu Breizh Izel composées et lues par le journaliste Louis Gildas, et consacrées aux affaires judiciaires des siècles derniers en Bretagne.

La quatorzième chronique de cette deuxième saisie, avec comme sujet une affaire criminelle gabéricoise datée de 1930, a été diffusée quotidiennement sur l'antenne pendant la semaine du 17 septembre 2018 :

Les longs articles ci-dessous publiés dans les journaux « L'Ouest-Eclair », « La Dépêche de Brest » et « Le Petit Breton » sur cette affaire illustrent parfaitement la misère et la violence en milieu rural pendant la première moitié de 20e siècle, au travers notamment des égarements des plus jeunes.

Les premiers articles de 1930 sont titrés « Le crime d'Elliant » parce que les premiers secours sont demandés par le maire d'Elliant, le décédé étant employé par le détenteur du moulin de Quénéhaye situé sur la rive elliantaise, mais le champ de ce moulin où a été commis le meurtre est bien de l'autre côte du ruisseau sur le territoire d'Ergué-Gabéric. Les articles suivants relatent l'affaire comme l'assassinat d'Ergué-Gabéric et l'Ouest-Eclair publie même la photo du village de Niverrot où sont domiciliés la plupart des protagonistes. Et l'acte de décès est bien déclaré dans ce village gabéricois.

L'accusé Jean-Louis Lizen, âgé de 19 ans, natif de Fouesnant de parents miséreux, est domestique pour 200 francs par mois (300 pendant la moisson) dans une ferme de Niverrot, après avoir été ouvrier verrier dans la région rouennaise. Le 12 octobre 1930 il tue à coups de houe un ouvrier agricole, casseur de pierres à l'occasion (tout comme son agresseur), et lui dérobe ses 1660 francs d'économies. Pour commettre son délit, Lizen avoue avoir bu un litre de vin rouge et de l'eau-de-vie de cidre.

Le co-accusé est André Tanguy, 14 ans, est également domestique dans la même exploitation agricole de Niverrot. Orphelin d'un père alcoolique et avec une mère épileptique hospitalisée, il  est  pupille

  de l'Assistance publique (renvoyé de l'orphelinat Massé pour indiscipline) et placé dès ses 12 ans dans la ferme de Niverrot. Quand il était petit, son père l'obligeait à aller mendier son pain.

Leur victime, le journalier François - ou plutôt Fañch - Gourmelen, est logé à Niverrot, a 56 ans et est qualifié de vieillard. Méfiant, il porte ses économies sur lui, dans son veston. Casseur de pierres pour le remblaiement de la nouvelle route de Kerdévot à Niverrot, il est aussi employé par le meunier de Quénéhaye comme journalier et ramasseur de pommes de terre. Il est présenté comme « une physionomie plutôt sympathique. très sobre, il acceptait rarement à boire - il buvait de l'eau - ce qui, à certains points de vue, le faisait passer pour un original dans un pays où l'on ne recule pas devant la bolée.  »

Ce qui frappe à la lecture des comptes-rendus d'interrogatoires et d'audiences d'assises, c'est le fossé social qui existe entre d'une part les domestiques, jeunes et vieux, et leurs patrons agriculteurs d'autre part. Les premiers sont désignés par leurs patronymes - Lizen, Tanguy et Gourmelen -, très souvent sans leurs prénoms, et jamais sans les "Monsieur" qui caractérisent leurs patrons. Les domestiques et journaliers travaillent tous les jours, y compris le dimanche jour de crime, matin et après-midi, alors que leurs employeurs sont ce jour-là en sortie de chasse. Les domestiques sont logés très modestement, soit par exemple celle du meurtrier : « la grange où, près des tas de paille, se trouvait sa chambre. ».

Au procès d'assises le jury a longuement délibéré, et n'a pas manqué de constater la culpabilité avec vol et préméditation de Jean-Louis Lizen qui aurait dû écoper de la peine de mort.

Mais le jugement relève des circonstances atténuantes qui, en temps normal, transforme la peine de mort en travaux forcés à perpétuité. Mais ici les jurés convainquent le président de réduire la peine à quinze ans, le célèbre avocat Jean Jadé ayant déclaré que «  son hérédité a pesé certainement sur son geste meurtrier » et demandé de faire « la part des responsabilité de la société dans l'abandon dont Louis Lizen a été l'objet depuis sa naissance ». Et notamment le fait qu'il a été « jeté dès l'âge de 13 ans, dans une de ces verreries de la Seine-Inférieure où trop d'enfants se livrent à un travail épuisant dans une lamentable promiscuité morale. ».

Son jeune complice André Tanguy dont la faute est d'avoir le guet avant l'agression est acquitté. Le journaliste du Petit Breton ajoute : « Il y a, incontestablement, beaucoup à faire, au point de vue social, pour arrêter la jeunesse dans la voie du crime. C'est une tâche à laquelle il convient de suite de s'attacher. Le temps presse. ».

En savoir plus : « L'assassinat crapuleux d'un casseur de pierres à Niverrot, journaux de 1930-31 », « GILDAS Louis - Faits divers en Bretagne - 2e saison »

10 Des rentes dues à la Légion d'honneur

Billet du 24.10.2020 - Grâce aux documents de privatisation en 1807, on savait déjà que 6 villages gabéricois avaient été intégrés dans le domaine de la Légion d'honneur. Aujourd'hui on en sait plus sur cette intégration de 1802 via les rapports de dotation retrouvés aux Archives départementales.

Ces villages situés à l'est de la commune font partie avant la Révolution d'un fief noble inscrit au domaine royal, à savoir le domaine de Kergestin. Après le décès de Jean du Fou, en juin 1492, le domaine de Kerjestin passe dans les mains de sa fille Renée. Cette dernière s’était mariée la même année à Louis de Rohan, seigneur de Guéméné, et transféra le bien à la famille de Rohan-Guéméné, puis aux Rohan-Gié.

Ces derniers étant les chefs de la résistance protestante bretonne à la fin du 16e siècle, les terres de Kerjestin sont confisquées par la Ligue et intégrées au « Domaine de la Couronne ».

Et tout naturellement elles font partie de la dotation au domaine agricole de la Légion d'Honneur créé par Napoléon Bonaparte en 1802. Cela veut dire que pendant 5 ans, de 1802 à 1807, les fermiers exploitants des lieux doivent payer une rente à l'Ordre de la Légion d'Honneur représenté par sa cohorte n° 13 qui couvre les départements du Morbihan, Finistère, Côtes-du-Nord, Ille-et-Vilaine, Mayenne et Maine-et-Loire.

Les revenus, en céréales et en argent, que versaient les « fermes d'Etat » servent à entretenir les hospices, les écoles de jeunes filles de la Légion d'Honneur et à payer les pensions des décorés.

Grâce d'une part aux archives des Domaines de Quimper datées de début 1804 en pluviôse et ventôse de l'an 12 et aux documents de ventes en 1807-1808 (cf. articles séparés) d'autre part, on sait que 12 tenues gabéricoises étaient inscrites dans le sommier ou rentier de la Légion d'honneur du département du Finistère :

  1. Tenue à Quenec'h Deniel - 2. Autre tenue à Quenec'h Deniel
3. Un convenant à Kermoisan - 4. Des prairies à Lezouanac'h
5. 6. 7. 8. 9. Cinq tenues à Keranroué
10. 11. Deux convenants à Kerjestin/Keristin
12. Le moulin de Meil-Faou

Les cinq lots complémentaires gérés par le bureau de l'enregistrement et des domaines de Quimper sont situées sur la commune voisine de Saint-Evarzec, notamment Kermorvan et Keridran de l'autre côté de la rivière du Jet.

La nature des rentes dues par les fermiers d'Ergué-Gabéric et de Saint-Evarzec est essentiellement en nature (3 céréales : froment, seigle, avoine) et accessoirement en argent. Les quantités de céréales sont mesurés soit en grands boisseaux, appelés ici « combles », ou en « rases ». Les sommes d'argent, dues notamment pour l'impôt dit des « corvées », sont valorisés en livres et sols, mais à la fin de document de prise de possession les totaux sont exprimés en francs et centimes.

À l'exception du moulin du Faou, toutes les tenues sont dites être « à domaine congéable », régime convenantier et seigneurial maintenu en Bretagne à La Révolution. Le moulin du Faou qui est « en ruine » est tenu à ferme.

Le document de 1804 précise aussi la date officielle de la dotation au domaine de la Légion d'honneur, le 25 septembre 1802, à savoir un an avant le début de l'an 12 : « le 6 vendémiaire dernier et ceux échus pendant l'an 11 qui n'avaient pu être recouvrés avant la réception de la dite instruction appartenaient à la Légion ». Il est rappelé que les rentes versées éventuellement par erreur au trésor public pendant cette période doivent être restituées à la cohorte N° 13.

Se révélant inefficaces et ruineuses au niveau national, les cohortes et le domaine de la Légion d'honneur seront démantelés dès 1807 et les propriétés foncières généralement revendues à leurs exploitants. Les six villages d'Ergué-Gabéric ne feront pas exception, ils n'auront été affectés au domaine de la Légion d'honneur que pendant 5 ans, de 1802 à 1807.

En savoir plus : « 1802-1807 Le domaine gabéricois de l'Ordre national de la Légion d'honneur »

11 Militant et passeur de mémoires

Billet du 17.10.2020 - Une biographie familiale paternelle et maternelle, basée sur des extraits de journaux ou revue, une fiche dans le dictionnaire ouvrier et social Maitron, ainsi que l'épreuve du diplôme du brevet d'histoire-géo de 2012, pour la compréhension des évènements de l'année 1936.

La biographie de René Huguen a l'honneur de figurer dans le dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, plus communément appelé « Le Maitron » (du nom de son initiateur Jean Maitron). Après avoir été instituteur, son parcours militant est le suivant : secrétaire des Jeunesses communistes des Côtes-du-Nord (Côtes-d’Armor) en 1944 ; adjoint au maire de Saint-Brieuc (1947-1953) ; directeur de cabinet du député-maire communiste René Cance (1956-1959), assistant parlementaire du député communiste François Leizour. En 1936 Il participe aux manifestations de soutien au Front populaire, est fait prisonnier par les troupes allemandes en 1940, est très actif dans l’organisation de l’aide aux enfants espagnols, et crée le journal Ouest-Matin avec Henri Denis. Retraité, il se plonge dans l’étude de l’œuvre du romancier Louis Guilloux qu'il a côtoyé, et publie des monographies sur le parlementaire Alexandre Glais-Bizoin.
Il demeure fidèle au PCF. Il quitte Ergué-Gabéric avant ses 10 ans, son père ayant été embauché comme cheminot en région parisienne, puis à Saint-Brieuc. Il n'oublie pas pout autant ses origines et y revient, notamment en 1936 comme il s'explique dans le journal « Le Parisien » le 14.07.2012. Cet été des congés annuels payés décrétés par la loi du 20 juin, il part en famille chez ses grands-parents à Lestonan, où tout le village est employé à l'usine de papier Bolloré. « Pour la première fois, ces ouvriers s'arrêtaient de travailler sans perte de salaire, raconte-t-il. Je revois mon oncle ivre de joie levant le poing en criant : Vive Blum ! » Parmi les images qui restent gravées dans sa mémoire, celle de ces familles assises, parfois inconfortablement, sur le pas de la porte. « Ils ne faisaient rien, ils savouraient simplement le moment, en discutant, décrit René. Les gens se rendaient aussi visite, on mangeait des gâteaux bretons, c'était une fête permanente. »

Son père Jean-René est né en 1900 à Stang-Odet, le hameau isolé près de la papeterie d'Odet et d'où était sa grand-mère paternelle Françoise Philippe. Le grand père Jean-Louis (1863-1926) est « ouvrier papetier » sur les actes d'état-civil. L'oncle Yves-Marie, décédé en 1979, est également ouvrier papetier, celui que son neveu décrit dans le journal « Le Parisien » comme criant « Vive Blum ! ».

En 2012, basée sur un article similaire de souvenirs dans « Le Télégramme », l'épreuve du diplôme national du  brevet d'histoire-

  géographie inclut deux questions relatives à 1936 :

Question 3 (document 3) :

  • a) À quel groupe social appartient René Huguen ? 0,5 point
  • b) Comment la population française accueille-t-elle, selon son témoignage, les avancées sociales liées au temps libre ? Justifiez votre réponse en relevant deux éléments du texte. 2 points

Du côté de sa mère Marie Jeanne Le Meur, née Cuzon, René Hugen se souvient de la maison de Croas-Spern de ses grands parent. Sa grand mère Marie Jeanne Cuzon et son grand-père Laurent Le Meur habitent au bord de la route de Croas-Spern une petite maison qui a été rasée en 1996.

Il se souvient : « Au bout d’un jardinet protégé de la route par une haie d’aubépine, se tient l’antique maison au toit fatigué. Le couple Le Meur habite là, moyennant quelques travaux périodiques demandés par les propriétaires de Saint-Joachim. Ah! comme je me sens bien en ces jeunes années, sur cette terre battue où courent souvent les poules, entre ces meubles rustiques dressés sur des cales inégales ; comme je me sens bien à cette grande table à l’intérieur de laquelle Grand-Mère range pain, farine et beurre ou dans l’âtre, chauffant mes petits pieds au-dessus des cendres chaudes ! Et lorsque Grand-Père rentre de sa dure journée de cantonnier et qu’il applique sa barbe piquante sur mon front en lançant fièrement: "Ar goas !" (jeune homme). ».

Ce Laurent Le Meur, cantonnier, est aussi le grand père de Jean Le Reste, ce dernier l'ayant retrouvé sur une photo de 1915 d'un groupe d'ouvriers de la mine d'antimoine de Kerdévot et ayant également célébré sa mémoire : « Je garde le souvenir d’un homme attachant qui, me prenant par la main, tenant un "crepig" de l’autre, m’amenant chercher des noisette. Le matin, quand il partait travailler sur les routes je le vois avec ses marteaux et son coussin (pour se protéger les genoux). »

En savoir plus : « René Huguen (1920-2017), enfant gabéricois, militant communiste et passeur de mémoires »

12 Bulletin poétique et automnal n° 51

Billet du 10.10.2020 - La présente compilation rassemble toutes les chroniques gabéricoises du troisième trimestre 2020 qui ont été publiées chaque semaine sur le site Internet Grandterrier.net, l'envoi postal dans les chaumières se faisant la semaine prochaine.

Jean-Marie Déguignet (1834-1905) et Adolphe Paban (1839-19xx), deux poètes différents ne s’appréciant pas, ouvrent et ferment ce présent bulletin des articles publiés sur le site du Grand Terrier au cours de l’été 2020.

Á la suite du cahier de poésie de Déguignet, c’est la tentative de suicide de ce dernier qui est abordée, par le biais de coupures de presse et du texte de ses mémoires.

Les sujets suivants sont datés du XVIe au XVIIIe siècle : un très beau parchemin signé Kersulgar pour Kernaou en 1540, les mentions d’un sergent féodé à Mezanlez dans un rentier initié par François Ier, l’héritage local des Sévigné mère et fils, et enfin les bannies pour les ventes de Kervéguen juste avant la Révolution.

On reste au village à Kervéguen au XIXe siècle, en relatant les baux des deux métairies dès 1859, l’incendie dans une chaumière en 1887, suivi de l’émigration de ses fermiers à Chantenay près de Nantes.

En 1887 c’est l’affaire d’affaire d’homicide à Kerfréis qui fait la une de la presse et pour laquelle on révèle les éléments d’enquête et de dossier judiciaire pour comprendre le verdict d’acquittement.

Pour le XXe siècle, la photo de classe de CP à l’école publique de Lestonan ravive le souvenir de ces jeunes retraités d’aujourd’hui.

Et, pour finir, un article sur le circuit touristique du Stangala en 1930 et un poème écrit en 1894.


Image:square.gifImage:Space.jpgLire le bulletin en ligne : « Kannadig n° 51 Octobre 2020 »

 

Pour évoquer à la fois les couleurs de l’automne et la journée de la misère du 17 octobre, rien ne vaut une citation de notre poète Déguignet : « On pourrait croire que le mot fougère a été mis pour rimer avec misère. Mais la rime est juste et vraie : j'ai couché pendant six ans sur la fougère, ne voulant pas tendre la main pour avoir de la paille »


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