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Les billets hebdos de l'actualité du GrandTerrier

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Version du 14 septembre ~ gwengolo 2019 à 15:40

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Chaque semaine, un nouveau billet annonçant un ou plusieurs articles sur le site GrandTerrier.

Une compilation des billets est publiée en fin de trimestre sous la forme des chroniques du Bulletin Kannadig.

Anciens billets hebdos : [Actualité, archives]

Les anciennes affichettes : [Accroches à la une]

Modifications d'articles : [Journal des MàJs]


Sommaire

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1 Interventions pour restaurer un clocher

Billet du 14.09.2019 - En janvier 1837, le conseil de fabrique demande en langue vernaculaire une aide financière au roi Louis-Philippe pour couvrir les dépenses de reconstruction du clocher de l'église paroissiale St-Guinal terrassé par la foudre, ultime étape d'une campagne de lobbyisme politique.

Cette lettre en breton présente ainsi le contexte afin d'obtenir les subsides nécessaires à la restauration : « "Aotrou Roue, Ar bloavez 1836 a zo bet, e gwirionez, leun a drubuillou evidom. Gwall glaharet om bet o klevout oh bet-c'hwi teir gwech war-bouez beza drouglazet hag an avel e-neus diskaret tour iliz ar barrez d'an eil e viz c'hlouevrer ... » (Sire le Roi. L'année 1836 a été, en vérité, pleine de soucis pour nous. Avec une grande douleur, nous avons appris que vous avez été trois fois sur le point d'être assassiné et le vent a abattu la tour de notre église paroissiale le second jour de février).

Constatant l'habileté de la lettre, dans sa version traduite en français, la générosité royale abonde une somme de 300 francs à verser au curé d'Ergué-Gabéric. Mais en parallèle des actions en lobbyisme politique ont été menées par les gabéricois auprès du conseil général, de la préfecture, de l'évêché, des ministres, pour pouvoir mettre en exécution la reconstruction du clocher de l'architecte Bigot et de l'entrepreneur L'Haridon.

Grâce au dossier préfectoral conservé en série V « Cultes 1800 - 1907 » aux Archives Départementales du Finistère (cf les documents originaux et les transcriptions en fin d'article), on en sait un peu plus sur ces démarches et sur les circonstances qui ont décimé le clocher en plein bourg le 2 février 1836, « par l'effet d'une tempête d'autant plus redoutable que le fluide électrique y présidait ».

On apprend notamment que la chute des pierres du clocher n'a fait aucune victime : « Ce sinistre aurait sans doute occasionné des malheurs incalculables, si la providence n'avait veillé sur nous. C'était l'heure de la grande messe de la fête, qui, fort heureusement, se célébrait ce jour-là, à la chapelle de Kerdevot, située à une distance d'environ une lieue du bourg. »

Les dégâts matériaux sont considérables : « Ce clocher de forme pyramidale a été renversé et sapé jusqu'à sa base ». La tornade n'a laissé aucune chance de survie, non plus, aux deux cloches : « L'une des cloches a été brisée en plusieurs morceaux, la seconde est fendue de manière à ne rendre aucun son ».

 
Les travaux de restauration incluent leur remise en service : « Les deux cloches brisées seront refondues, chacune d'elles pèse 260 kilogrammes à 1fr 90c le kilo, prix moyen, eu égard au déchet de la veille matière »

On dispose du devis détaillé de l'entrepreneur L'Haridon, maître-maçon à Pleyben, sur les plans de l'architecte départemental et diocésain Joseph Bigot. Certes on peut regretter « une élévation moindre que l'ancien clocher », mais la nouvelle tour est solide, et les nouvelles pierres taillées sont extraites de la carrière locale de Crec'h-Ergué, car « les pierres en provenance et notamment celles avec moulures, ont été généralement brisées ».

Quant aux aides publiques pour financer les travaux, ce n'est pas la lettre en breton au roi Louis-Philippe début 1837 qui a permis de récolte, mais une lettre pétition du 3 avril 1836 au ministre de la Justice et des Cultes signée des membres du conseil municipal : « Ce désastre a plongé les habitants dans la consternation, en songeant à l'impossibilité où ils se trouvent de porter d'eux-mêmes, un remède à un si grand malheur ... Notre seul espoir, en coopérant autant que nos moyens nous le permettent, est en vous, Monsieur le Ministre, et dans le conseil général du département. »

Le ministre garde des sceaux, Paul-Jean-Pierre Sauzet, répond personnellement en demandant au préfet d'instruire le dossier. Son successeur à la justice, Jean-Charles Persil, accordera 500 francs sur les fonds de l'Etat et la même somme sera votée par le conseil général, via le député Jean-François Le Gogal de Toulgoët. Mais localement les habitants feront mieux en donnant au total 1100 francs.

En savoir plus : « 1836-1837 - Lettres et archives relatives à la chute du clocher St-Guinal et sa restauration »

2 Patrimoine naturel de Kervreyen

Billet du 07.09.2019 - Wikipedia : « Un arbre remarquable est un arbre repéré pour diverses particularités. Il relève donc d'un patrimoine par sa rareté, ses dimensions, sa position, son âge ou encore sa force symbolique. Le patrimoine en question est naturel, culturel, paysager ... »

Dans la série « patrimoine naturel », voici une petite collection de photos présentant l'if, le chataignier, le platane et la « fontaine du roi soleil » se trouvant au village de Kervreyen.

Cet immense platane déploie ses branches et son tronc noueux sur le bord du chemin menant à Kervreyen, près d'un petit étang ou zone humide en eau pendant l'hiver, et fait de l'ombre à une fontaine toute proche.

On peut également admirer près du pignon ouest de la maison principale de Kervreyen un très bel if, remarquable et plus que centenaire également ; et sur  le  chemin, à  gauche  en  montant

  vers Krevreyen, un châtaignier avec un tronc au diamètre impressionnant ; et enfin dans le bois jouxtant Kernaou un hêtre majestueux (cf. la galerie de photos des arbres dans l'article).

La fontaine de Kervreyen, toujours en eau, est communément appelée la « fontaine du roi soleil » car un soleil est gravé sur sa pierre intérieure.

En ce mois de septembre 2019, la fontaine est bien visible, après un défrichage des orties et des herbes folles. La pierre arrondie en arc au-dessus de la source est en place, et des pierres ouvragées en aval bloquent l'eau, tout en laissant le filet s'écouler vers la zone basse humide.

De part et d'autre d'autres pierres sont tombées, et il serait intéressant de compléter le puzzle de l'ouvrage.

Les anciens des villages avoisinants se rappellent de ce lieu comme d'un endroit rafraîchissant par grande chaleur. Et ils se souviennent aussi qu'entre la fontaine et le petit étang le cresson était abondant et apprécié.

En savoir plus : « Un platane avec sa fontaine, et autres arbres remarquables de Kervreyen »

3 Sommier des comptes des émigrés

Billet du 31.08.2019 - Ouverture du chantier d'analyse de l'affaire des biens nationaux confisqués aux nobles gabéricois ayant fui leurs terres à la Révolution pour s’exiler à l'étranger : pour démarrer un tableau global de la situation est proposé, des analyses détaillées devant être publiées prochainement.

À titre donc d'illustration, un gros registre inédit, dit « n° 122 de l'inventaire », constitué pour Ergué-Gabéric de 57 folios recto-verso et conservé aux Archives Départementales du Finistère sous la cote 1 Q 2403.

Ce sommier comptable a pour but de noter toutes les dépenses et recettes enregistrées pendant la période de séquestre des biens nationaux nobles confisqués aux nobles exilés à l'étranger, ce avant les adjudications aux enchères, les dons, amnisties, cessions privées ou adjonctions au domaine agricole de la légion d'honneur.

Plus de 90 lieux - manoirs, métairies et fermes - confisqués sont inventoriés, pour lesquels sont indiqués le nom du noble émigré propriétaire foncier, le tenancier « à domaine » ou « à ferme » avec le montant de la rente, les impôts payés aux nouvelles autorités, les remboursements de dépenses, les dates de vente, de dons et de la main-levée finale.

Le registre est basé sur un classement et une répartition sur les six familles nobles émigrées, les Lamarche père et fils détenant plus de la moitié des lieux (55 sur un total de 90) :

Image:Right.gifImage:Space.jpgDerval : Joseph Derval, seigneur de Kergoz en Plomeur, héritier des Kersulgar de Mézanlez, lieutenant au régiment du roi, est émigré en Angleterre à la Révolution et exécuté en 1795 à Vannes. Dans les actes d'adjudication ce sont les sœurs de Joseph, Pauline

  et Angélique, qui sont considérées comme les propriétaires. Les lieux détenus sont le manoir de Mezanlez, lequel échoit par adjudication au citoyen Jean-Marie Le Roux, le moulin de Mezanlez, Kergonan, Bohars, Kergamon, Ruebernard et Lostanquiliec.

Image:Right.gifImage:Space.jpgRohan : Les Rohan-Guéméné : Henri-Louis-Marie de Rohan, prince de Guéméné, a émigré en Suisse, puis en Allemagne, puis dans l'armée autrichienne, mais les terres des Rohan autour de Kerjestin leur avaient déjà été confisquées lors des événements de la Ligue pour être intégré au domaine du roi. Les lieux séquestrés sont situés à l'est de la commune : Keranroué, moulin du Faou, Kermoisan, Keriou. Tous ces lieux ne sont pas privatisés, mais constituent désormais le domaine agricole de la légion d'honneur comme l'indique le registre : « donné à la légion d'honneur suivant lettre du directeur général du 13 pluviôse an 12 ».

Image:Right.gifImage:Space.jpgDonge : L'émigré du vicomté de Donges n'est pas précisément identifié : s'agit-il d'un Kerhoent, héritier de Guy-Marie de Lopriac († 1764), comte de Donges, marquis d'Assérac et seigneur de Botbodern ? En tout cas il s'agit bien ici du domaine de Botbodern, localisé ici à Ergué-Gabéric, mais en réalité à Elliant, et ses tenues à Kerdilès et Kerdévot.

Image:Right.gifImage:Space.jpgGeslain : Marie-Hyacinthe Gélin, engagé comme officier chouan dans l'armée de Cadoudal, mort à Quimperlé en 1832, est le propriétaire foncier noble du domaine de Pennarun. Les lieux confisqués sont le manoir et le moulin de Pennarun, de nombreuses dépendances au bourg, et les villages de Boden, Squividan, Loqueltas, Kerellou. Le manoir est attribué au citoyen Vinoc de Quimper à la vente aux enchères.

Image:Right.gifImage:Space.jpgLamarche père et fils : François-Louis de La Marche, le père, est émigré et décédé sur l'île de Jersey en 1794 et Joseph-Louis-René de La Marche, le fils, est exilé sur l'île Grande-Terre de la Guadeloupe. Ils seront amnistiés, à titre posthume pour le père, et certains biens resteront dans la famille de La Marche. Les lieux séquestrés sont le manoir de Lésergué (une fiche très laconique dans le registre, si ce n'est « à Lamarche fils » du fait de l’amnistie), les ruines de Kerfort, la tenue et le moulin de Kernaou (adjugé à Jean-Marie Leroux), la tenue de Kervreyen (acquise par Simon Mermet), et 50 autres lieux.

Image:Right.gifImage:Space.jpgTintigniac : François-Hyacinthe de Tinténiac, émigré à Londres fin octobre 1794, où il a rejoint son fils Vincent (un officier chouan surnommé le « loup blanc », mort à l'issue du débarquement anglais de Quiberon) et sa fille Anne-Josephe, est le propriétaire foncier noble du manoir et moulin du Cleuyou. Sont également confisqués le manoir de Kerampensal, la métairie à couteaux (Coutilly) et la tenue de Sulvintin.


En savoir plus : « 1793-1805 - Sommier des comptes ouverts avec chaque émigré pour les biens nationaux »

4 Nuances de Glaz et Bleu Kerdévot

Billet du 24.08.2019 - Il ne reste plus qu'une semaine et demie pour aller à la chapelle de Kerdévot admirer la belle exposition photos « Glaz an Erge Vras », 30 grands tirages concoctés par le photographe quimpérois Bernard Galéron sur le thème du « Glaz », ce fameux bleu-vert breton naturel et multiforme.

Le cœur de cette expo Galéron, avec ses portraits en costumes et certains paysages du pays glazik, a déjà été exposé en 2018 à Quimper. Pour l'été 2019 à Kerdévot, une douzaine de portraits de figures locales et d'éléments de patrimoine proche a enrichi ce thème de la couleur « glaz » en breton recouvrant tous les bleus, et aussi le vert de la nature : la mer sous tous les temps, les volets bleus et les pelouses ou les arbres sont tous « glaz » (par contre une peinture verte est « gwer »).

Avec la palette de bleus, verts et gris, on a affaire à un véritable exercice de style, comme si c'était un cahier de tendances pour une collection de mode.

Présentées comme des tableaux sur des chevalets, les 34 photos au format A1 ont été imprimées dans le studio du photographe sur du papier toilé grâce à une grosse imprimante aux 9 cartouches d'encre. L'impression est ensuite tendue sur un cadre de bois pour un résultat impressionnant ; on peut même commander un exemplaire de chaque photo - sans le chevalet - pour un prix tout à fait raisonnable.

Les figures locales portraitisées en lien avec Ergué-Gabéric sont Hervé Jaouen (l'écrivain habitant à proximité), Ursula et Werner Preissing (les propriétaires du manoir du Cleuyou), Bernez Rouz (le journaliste bretonnant), Jean Billon (le chanteur de kan-ha-diskan et de gwerz), les mains malaxant un pain bara-bio.

Les paysages ou éléments exposés du patrimoine du territoire gabéricois sont la chapelle, le chêne et la fontaine de Kerdévot, le Stangala (la rivière d'Odet et la pointe de Griffonez), le calvaire de Stang-Luzigou.

Et on notera enfin qu'à Kerdévot c'est le bleu qui prime : toutes les portes, grilles, fenêtres de la chapelle et de la sacristie ont tous un même bleu tendre qui a l'honneur de figurer au catalogue des 72 couleurs historiques des Peintures Malouinières, une entreprise bretonne spécialisée dans les peintures à l'huile pour le patrimoine.

Le bleu « Kerdevot - J02 » n'est ni un bleu « La Royale - J04 », plus foncé, ni un « bleu de Paris - J01 », tirant sur le vert, et encore moins un vulgaire bleu marine.

 


La présentation dans le catalogue en est très poétique : « Dans le gris du granit, la vie de Finistère n'a de roche que le nom. Kerdevot réveille la rocaille et la mousse qui s'ennuient. L'éternité frémit, elle a vu la lueur. ».

La valeur numérique du Bleu Kerdevot peut être définie par le triplet hexadécimal #3286cc ou par le code couleur RVB 50 134 204, ce qui donne visuellement à l'écran :
        
En savoir plus : « Bernard Galéron, exposition 'Glaz an Erge Vras' à Kerdévot » et « Le bleu Kerdevot »

5 Photos et munificence à Odet-Lestonan

Billet du 17.08.2019 - Les archives académiques des inspections dans les écoles privées de Sainte-Marie et Saint-Joseph de 1928 à 1937 et les photos du photographe Etienne Le Grand collectées lors de la préparation en 2010 de la fête des 80 ans de l'école organisée par Gwenaël Huitric.


L'école privée des filles de Lestonan a été inaugurée et bénie le 28 septembre 1928 en présence de son fondateur René Bolloré et de l'évêque de Quimper Adolphe Duparc. Comme l'écrit le journal diocésain : « La population tout entière était massée dans la cour, admirant l'école merveilleusement décorée. Ce n'était partout que fleurs, banderoles et guirlandes, disposés avec un goût très sûr. ».

Le photographe quimpéroise Etienne Le Grand, natif du hameau Menez-Groas où est construite l'école, est venu sur place pour immortaliser l’événement, comme l'attestent les 6 clichés suivants retrouvés dans les archives familiales locales et exposés lors de la fête des 80 ans en 2010 :

Image:Right.gifImage:Space.jpg photo 1 - Le patron René Bolloré accueillant respectueusement l'évêque à la descente de sa voiture.

Image:Right.gifImage:Space.jpgphoto 2 - L'évêque Monseigneur Duparc saluant la population en entrant dans l'école.

Image:Right.gifImage:Space.jpgphoto 3 - Le clergé de dos devant les enfants, et un homme sur une échelle posant une croix.

Image:Right.gifImage:Space.jpgphoto 4 - Les petites filles ayant fait leur première rentrée coiffées d'une couronne de fleurs.

Image:Right.gifImage:Space.jpgphoto 5 - La procession des enfants, du clergé et des notables dans la cour.

Image:Right.gifImage:Space.jpgphoto 6 - La cérémonie dans la grande salle de classe tout enguirlandée.

En savoir plus : « Photos de l'inauguration de l'école Sainte-Marie en 1928 »

Autre témoignage, le dossier conservé aux Archives Départementales du Finistère, sous la côte ADF 1 T 1471, et comportant 34 documents, incluant en plus des années 1928-29 les inspections jusqu'en 1937 à chaque changement de directeur ou de directrice.

Contrairement aux décennies précédentes (cf. billet de la semaine dernière), la loi Goblet de laïcisation des écoles privées est devenue moins restrictive dans les années 30, car désormais l'éducation nationale autorise la présence de religieuses et de frères dans les classes et à la direction des écoles confessionnelles.

Ainsi à Lestonan, les écoles privées de filles et de garçons érigées en 1928-29 à Lestonan par  René Bolloré,  patron  des  papeteries

 

d'Odet, sont dirigées respectivement par la congrégation religieuse des Filles du Saint-Esprit et par les frères de l'Instruction chrétienne de Ploërmel fondée par l’abbé de La Mennais.

Les rapports d'inspection suite à l'ouverture des deux écoles sont très élogieux : « les trois classes lesquelles réalisent les conditions de confort les plus modernes », « notez que les classes sont dotées du chauffage central », « l'école est pourvue de 6 cabinets de 1 m 10 de profondeur, de 6 urinoirs avec fosse septique », « établissement qui fut tout simplement construit avec munificence » (grande générosité) ...

Les déclarations d'ouverture sont faites par les directrices et directeurs, tous d'obédience religieuse et dont l'état de formation et de service est fourni. Les sœurs sont formées à Saint-Brieuc, et les frères de Ploermel ont du passer leur noviciat. Les frères forment une congrégation laïque masculine, ce qui veut dire qu'ils sont affectés à l'enseignement, mais n'ont pas le statut de prêtre.

La première directrice est Francine Le Rest, née au Folgoët en 1903 : « à Saint-Brieuc chez les Sœurs du Saint-Esprit où j'ai fait mon éducation de 1919 à 1923. ». L'Inspecteur primaire rend ainsi un avis quant à la compatibilité de son statut religieux avec l'exigence d'éducation laïque : « elle satisfait aux conditions d'âge, de capacité, de laïcité, de nationalité, de moralité exigées par la loi. »
Le premier directeur est Grégoire Salaün, né à St-Goazec en 1903, études achevées en 1929, prénom de religion Euchariste-Marie. Il restera à Lestonan jusqu'en 1931 et quittera la communauté de Ploermel en 1941.

Les autres directeurs et directrices de 1931 à 1937 sont :

  • 1931 : Jean-François Guiriec, né à Lopérec en 1899
  • 1932 : Jeanne Daëron, née à Plonévez-du-Faou en 1910
  • 1935 : Monique Kerjean, assistée de Mlles Meudec et Malléjac
  • 1936 : François Nédellec, né à Lambézellec en 1898
  • 1937 : Jeanne Bodolec, née à Langolen en 1910

Jusqu'en 1934 l'école Sainte-Marie est déclarée sans pensionnat. Lors de l'inspection d'octobre 1935, un dortoir est signalé et les effectifs sont les suivants : « Nombre d'élèves inscrits : 73, présents; 72. Nombre d'internes 23, dont 13 demi-pensionnaires. ».

En savoir plus : « 1928-1937 - Inspections académiques d'ouverture des écoles Ste-Marie et St-Joseph »

6 La laïcité selon la loi Goblet

Billet du 10.08.2019 - Les rapports d'inspections de rentrées scolaires à l'école privée des filles du bourg d'Ergué-Gabéric à l'occasion des changements des directrices laïques, dans des conditions d'occupation militaire des locaux en 1914 et de fermeture de l'école en 1916 pour cause d'illégalités et d'insalubrité.

En 1912-1919, après les agitations des années 1902-1905 - fermeture de l'école confessionnelle tenue par les sœurs de la congrégation du Saint-Esprit -, la loi de René Goblet du 30 octobre 1886 est appliquée pour le contrôle de l'activité scolaire de l'unique école primaire privée d'Ergué-Gabéric. Aucune religieuse n'est sensée y exercer le métier d'institutrice, les maîtresses sont obligatoirement des jeunes femmes laïques.

Les rapports d'inspections systématiques contiennent les dossiers des institutrices accédant au poste de directrice, laquelle est assistée de deux ou trois institutrices adjointes. Leur âge (21 ans au minimum), leur diplôme obligatoire de capacité (à savoir le brevet élémentaire), et leurs domiciles et activités précédentes (elles ne peuvent pas être religieuses) sont vérifiés pour établir le bordereau d'autorisation d'exercer et d'ouvrir l'école à chaque rentrée de septembre.

Ces jeunes institutrices sont en l’occurrence :

Image:Right.gifImage:Space.jpgMelle Donnard (avant 1912).

Image:Right.gifImage:Space.jpgAdèle Guiziou (1912 à 1915) : 21 ans en 1912.

Image:Right.gifImage:Space.jpgMarie Gourret (1915 à 1916) : 22 ans en 1915.

Image:Right.gifImage:Space.jpgAmélie Le Berre (1916 à 1917) : 26 ans en 1916, la première candidature d'Anne Rannou (déjà institutrice adjointe) est refusée car elle n'a que 20 ans en septembre 1916, et les deux autres institutrices en poste ont respectivement 16 ans et 17 ans.

Image:Right.gifImage:Space.jpgEuphrasie Hélou (1917 à 1918) : 39 ans en 1917, a exercé auparavant le métier de professeur de français à Lublin en Russie.

Image:Right.gifImage:Space.jpgMonique Kerjean (1918 à 1919) : 34 ans en 1918, a déjà été directrice à Montesson (Seine-et-Oise) et à Audierne.

À la rentrée de 1914 une surprise attend la directrice Adèle Guiziou : « J'ai l'honneur de vous informer que l'école libre des filles d'Ergué-Gabéric étant occupée militairement ne peut procéder à l'ouverture de ses classes ». La guerre entre la France et l'Allemagne ayant été déclarée le 3 août, l'école privée du bourg d'Ergué-Gabéric est réquisitionnée pour la mobilisation locale des soldats bretons.

Heureusement une solution est trouvée pour accueillir provisoirement les élèves : « J'ai trouvé un local composé de deux salles attenantes sises au bourg dans lesquelles j'ai l'intention d'ouvrir les classes jusqu'à cessation de l'occupation de notre établissement par les soldats ».

En 1916 de multiples rebondissements émaillent la rentrée à l'école privée : la directrice se déclare démissionnaire, une institutrice déjà en poste âgée de 20 ans propose sa candidature, l'école ouverte illégalement doit fermer.

En octobre une deuxième inspection relève une anomalie grave : « La fosse d'aisance se trouve dans le jardin, qui est lui-même séparé de la cour par un mur. Les urines et les matières fécales s'y déversent par trois ouvertures percées obliquement dans ce mur ;

 

à la base de la fosse se trouve une autre ouverture par laquelle les excréments s'écoulent dans une sorte de 2e fosse en terre et à ciel ouvert ... », ce qui entraîne une nouvelle fermeture pour motifs sanitaires.

Et enfin, en novembre, l'inspecteur relève une autre anomalie : l'école n'a pas déclaré son pensionnat, en évoquant maladroitement a posteriori l'existence d'une simple « pension de familles ». La nouvelle directrice Amélie Le Berre doit demander la reconnaissance officielle de ses deux dortoirs d'élèves internes.

Les effectifs d'élèves accueillies dans l'école privée sont relativement importants, et supérieurs à ceux de l'école publique, comme l'écrit le maire à l'Inspecteur primaire en 1916 : « 67 enfants à l'école publique. 107 à l'école privée », ce qui fait une répartition de 50 élèves dans chacune des deux classes.

Près de la première classe, une grande pièce est réservée au réfectoire, « La cour est vaste et close. Les classes et le préau sont convenablement installés ». La capacité d'accueil des dortoirs à l'étage est également précisée dans les rapports d'inspection : 37 écolières dans l'un (obligation de deux surveillantes) et 16 dans l'autre (une surveillante).

Les postes de surveillantes des dortoirs, de la cour et du réfectoire étaient tenus vraisemblablement par les religieuses (dont la sœur Félicienne présente à l'école depuis 1898), car l'obligation de personnel laïque de la loi Goblet n'était applicable qu'aux postes d'institutrices. Le rôle « de la religieuse qui appuie et corrige ses déclarations » comme vraie autorité masquée artificiellement par les maîtresses d'école, est même relevé par l'Inspecteur de l'enseignement primaire.


En savoir plus : « 1912-1919 - L'école primaire privée des filles du bourg en période de guerre »

7 Les têtes sculptées "rastas" de Kerdévot

Billet du 03.08.2019 - La flèche supérieure du clocher de Kerdévot reconstruit en 1702 après sa chute « à cause du tonnerre et un tourbillon de vent » en février 1701, est dotée de quatre têtes sculptées très expressives, aux « mèches de la peur » (traduction littérale de dreadlocks).

Dans son registre, le recteur de la paroisse précise ainsi les circonstances de l'accident : « Le jour de la chandeleur, environ sept heurs du matin. Le tonnerre et un tourbillon de vent sapérent la tour de la chapelle de notre Dame de Kerdevot par la chambre des cloches et les mate(riaux) de la Dite tour tomberent en partie sur François le Gonidec comme il estoit prés d'entrer dans (l'église) pour entendre l'office Divin. »

L'ancien cantique « Itron Varia Kerdevot » composé onze ans après en conserve le souveir : « Breman eus bet unnec vloas da Vouel or Chandelour, Gant curun hac avel-foll e voa couezet an tour. Ma voa surprenet un den, allas ! dindan ar vein. Daouzec carrat assuret a voa couet var e guein. » (Maintenant il y a eu 11 ans à la fête de la Chandeleur A cause du tonnerre et du vent fou, le clocher tomba, Un homme hélas, fut surpris par les pierres Douze charretées au moins étaient tombées sur son dos).

Les 4 statues sont placées sur chaque face de la flèche au-dessus de la chambre des cloches. On pourrait faire un rapprochement avec des « blochets » aux quatre coins d'un transept représentant

  généralement les quatre évangélistes, mais ici aucun attribut ne permet de reconnaître un personnage biblique.

Ce ne sont pas non plus des gargouilles ou des « crossettes  » placées habituellement en bas des rampants de pignon, ou des masques plats de protecteurs car leurs têtes sont ici entières et même représentées avec leur coiffure et grosses mèches de cheveux. De part et d'autre des quatre têtes et légèrement en-dessous on peut voir des masques dits « grotesques ».

AU SUD, côté calvaire : cette tête est assortie d'une moustache en forme de guidon, d'une avancée frontale arrondie de couvre-chef, et de mèches de cheveux apparentes à l'arrière.

À L'OUEST, entrée principale : face au parvis cette tête est imberbe, les longues mèches au vent, et doit plus subir les intempéries, car les joues sont garnies de lichen.

AU NORD, long de la route : la tête, comme son vis-à-vis du sud, a une belle moustache, ses dreadlocks étant par contre plus nouées avec un bandeau avant central semblable à un casque de cycliste.

À L'EST, côté du toit : la tête est imberbe, la bouche et les joues formant une grimace, les mèches cachant les oreilles et l'avancée en pointe d'un couvre-chef ressemblant à une casquette médiévale.

Qui représentent donc ces quatre statues ? Des personnalités locales de l'époque comme le recteur Ian Baudour, le fabricien Hervé Le Masson, les nobles Geslin de Pennarun, de La Marche de Lezergué, ou alors des figures imaginées par les sculpteurs et placées si haut que personne ne peut en fait les admirer : les zooms d'appareil photos n'ont pas encore été inventés.

En savoir plus : « Les quatre têtes sculptées du clocher de la chapelle de Kerdévot »

8 Domaine royal de Kroas-ar-Gac

Billet du 27.07.2019 - Une ancienne tenue en lisière de Quélennec autour du calvaire dit « Croix du Gac », via l'acte de dénombrement A87 des Archives Départementales du Finistère et son inscription au registre papier terrier de 1682 de la Chambre des Comptes de Nantes conservé aux Archives Nationales.

Les anciens, dans les années 1980, avaient gardé la mémoire d'un calvaire qui aurait été réalisé par un dénommé Le Gac avant qu'il soit détruit sous Louis-Philippe pour restaurer la chapelle voisine de Saint-Guénolé : « On dit que sans enfant l'homme aurait légué tous ses biens dans le coin » (article de Laurent Quevilly, Ouest-France 17.06.1987).

Heureusement la piéta du calvaire a été conservée sur place, protégée encore aujourd'hui dans son abri de pierres. Par contre aucun écrit n'avait jusqu'à aujourd'hui été trouvé pour authentifier l'héritage du sieur Le Gac.

Dans le registre du papier terrier de 1682, on vient de découvrir que ce Le Gac était, il y a bien longtemps, le propriétaire de toutes les terres autour du calvaire, et à la réformation du domaine en 1682 cette « terre autrefois apellée la tenüe du Gac » est déclarée comme tenue « prochement soubz le Roy notre sire ». En fait, en 1447, soit 230 ans plus tôt, un dénommé Guiomarch Le Gac déclarait détenir au Quélennec des terres dépendant de l'abbaye de Landévennec pour lesquelles il payait des droits seigneuriaux.

Au total ce sont plus de 50 parcelles de terres pour moitié cultivables (« terres chaudes ») ou incultes (« terres froides ») qui constituent cette tenue, réparties entre les villages habités de Quélennec, Pennaneac'h, Beg-ar-Menez, et la rivière d'Odet, incluant donc également les lieux-dits de Vruguic (noté « ar bruguer ») et Stang-Odet.

Les surfaces des parcelles sont mesurées pour la plupart en cordées, pour les plus grandes en journaux : en moyenne elles font 200 cordées, soit 2,5 journaux, c'est-à-dire 120 ares ou 1,2 hectare. Ce qui donne une surface totale de la tenue du Gac d'environ 60 hectares. Un champ « Parc ar croas » de près de 700 cordées (420 ares) est signalé à proximité du calvaire.

Toutes les terres sont situées de part et d'autre du « chemin dudit lieu à la dite croix du gac », le dit lieu étant d'une part Quélennec, et par ailleurs Pennaneac'h car le calvaire est placé à égale distance des deux villages. Les cinq personnes qui déclarent l'héritage de Le Gac sont domiciliées à Quélennec pour quatre d'entre elles, et la cinquième à Kerveady.

 

Détenteurs d'une ancienne dépendance d'un domaine noble distant, les propriétaires de la tenue du Gac en 1682 doivent payer une rente annuelle de 28 sols tournois au « seigneur et dame de Baregan, à chacun terme de la Chandeleur payable à Querdevot au dit Ergué ».

Les autres servitudes et devoirs sont désormais dus au roi : « roture et simple obéissance, devoirs de lods, ventes et rachats, droit de chambellenage, foy hommage, et suitte de cour et moulin ».

En savoir plus : « 1682 - Déclaration et sentence royale pour l'ancienne tenue de la croix du Gac »

9 Saint Guénolé ou saint Guénaël ?

Billet du 20.07.2019 - Au sommaire cette semaine : la transcription par Norbert Bernard de la copie de 1751 de l'acte de dénombrement A87 des Archives Départementales du Finistère, la lettre réponse de Fañch Morvannou sur saint Guénolé conservée aux Archives Municipales de Quimper, et l'inscription au registre papier terrier de 1680-82 de la Chambre des Comptes de Nantes conservé aux Archives Nationales.

Un presbytère au bourg, mais aussi un jardin à Pennarun, et deux prés sacrés entre Keranroux et Tréodet, tels étaient les biens déclarés par la paroisse dans le cadre de la Réformation du domaine royal lancée par Colbert.

Ces biens déclarés par la paroisse comme « tenus du roi » sont considérés en 1681 comme des biens roturiers, comme plusieurs dizaines biens fonciers gabéricois à la fin du 17e siècle. Contrairement au traitement des biens nobles, le roi n'exige pas du roturier un véritable hommage seigneurial, mais simplement les « devoirs d'obéissance », la « suite de cour » (justice royale), le paiement des droits de rachat et pour certains la chefrente que les nobles doivent aussi pour leurs domaines ou fiefs.

En l’occurrence, pour le presbytère paroissial, les rentes sont exonérés, mais par contre une obligation royale d'ordre ecclésiastique est ajoutée, à savoir les « prières et oraisons ». Les biens déclarés par le « général » (assemblée paroissiale) de la paroisse sont la maison du presbytère au bourg, le jardin voisin près du manoir noble de Pennarun, et enfin deux « prés fauchables » plus éloignés, à la lisière quimpéroise entre Keranroux et Tréodet et détenus depuis au moins l'an 1570.

C'est au sujet de ces deux prairies que Norbert Bernard s'est adressé en décembre 2001 au linguiste et historien Fañch Morvannou [1], car les parcelles sont déclarées au nom d'un saint mystérieux : « Sant Quenoe », et une chapelle en ruines est réputée être attenante aux prés.


Fañch Morvannou lui répond « Ce Sant Quenoe m'intrigue. Cela peut être une transcription de Sant Guenole. », mais « avec deux accidents : 1) perte du l, 2) transcription (fautive) du G en Q », et par ailleurs il existe bien une autre chapelle Saint-Guénolé distante de 5 km.

Sur l'acte A87 recopié en 1751, le copiste hésite manifestement avant d'écrire « Sant Quenoe », recouvrant une version rayée qui semble être « Sant Quenré ». Cette transcription

  en Quenoe est confortée par le registre du papier terrier consultable aux Archives Nationales à Paris sous la côte P//1689 dans sa mouture de 1680-82 (cf écriture cursive ci-après).


Mais la réponse de Fañch Morvannou est surprenante car centrée uniquement sur saint Guénolé, alors qu'il a publié un ouvrage savant sur saint Guenaël qui est une autre possibilité toponymique.

En effet le lieu où sont situés les deux prés est réputé être le lieu de naissance de saint Guenaël, abbé successeur de Guénolé à Landévennec et saint patron de la paroisse d'Ergué-Gabéric. On dit qu'il y avait là une fontaine consacrée et une belle croix dédiée à saint Guénaël (cf croquis ci-contre du chanoine Abgrall).

Le nom du saint est localement orthographié « Sant Guinal » à Ergué-Gabéric, et on peut donc supposer que le Q de Quenoe peut aussi cacher soit le G de Guinal, soit celui de Guénolé. Ensuite on sait que Guenaël est aussi orthographié Guenault/Guenaut, ce qui n'est pas éloigné d'un Quenoe au e final muet. « Affaire à suivre » écrivait Fañch Morvannou dans sa lettre à Norbert Bernard en décembre 2001.

En savoir plus : « 1681 - Inventaire des biens tenus roturièrement du Roi par la maison presbiteralle »

10 Haute noblesse à plèbe nobiliaire

Billet du 13.07.2019 - « Nous avons, pour combler les lacunes des montres militaires et des enquêtes de réformations, une troisième source, constitué par les aveux et dénombrements ou les minus de rachats », Nathalie Calvez, Repérage de la population noble, page 17.

La noblesse en Basse-Cornouaille aux XVème et XVIème siècles, Université de Bretagne Occidentale, Mémoire de maîtrise de 1990, sous la direction de Jean Kerhervé. Ce mémoire de plus de 300 pages soutenu par Nathalie Calvez en juin 1990 est un travail remarquable méconnu qui donne une description inspirée et documentée de la noblesse des années 1400-1600 en basse Cornouaille bretonne : « Quiconque se promène en Bretagne, en prenant son temps, peut constater la présence de nombre de portes ouvragées, de bâtiments plus cossus que ne devraient l'être les corps de ferme habituels, qui dénotent noble, le "manoir". La Bretagne n'est-elle d'ailleurs pas réputée pour cela ? Or, il n'y aurait pas eu de manoirs sans nobles ... ».

Le territoire analysé est toute la pointe sud-ouest du département actuel du finistère, des paroisses occidentales de Plogoff à Penmarc'h jusqu'au territoire d'Ergué-Gabéric à l'est de Quimper (cf carte de la page 6 ci-contre).

Le plan du mémoire, à la fois précis et didactique, est construit en trois parties : I. Caractères généraux  ; II. Les niveaux de noblesse : La haute noblesse, La moyenne noblesse, Petite noblesse et plèbe nobiliaire ; III. Un certain mode de vie (cf sommaire détaillé en ligne). Il permet d'expliquer les caractéristiques sociales de l'époque et de donner des exemples au travers des transcriptions inédites à partir de documents d'archives pour la plupart de 1480-1540 conservés aux archives départementales de Nantes.

Pour ce qui concerne Ergué-Gabéric, les nobles sont cités à de nombreuses reprises, notamment aux pages suivantes :

Image:Right.gifImage:Space.jpgPages 7 et 147 : Les jardins et courtils, présents dans les aveux, laissent supposer qu'il existe une culture maraîchère. Description : « Le manoir de Quenechgongar, o les maisons, estaige, parc, court, jardrins, vergers, courtilz ». Source : A.L.A. B 2012/8, Ergué-Gabéric, Aveu de Jehan de Bennerven, folio 1 recto.

Image:Right.gifImage:Space.jpgPage 73 : En 1460, au décès de son père, Jean du Fou, miseur de Quimper, puis chevalier, conseiller et chambellan du roi, hérite à

 

Ergué-Gabéric du manoir de Kerjestin, alors à ferme, et des villages de Keranroes, Kerriou, Kermoysan et Kernech-Daniel. Dans le chapitre « La haute noblesse », la grande famille de Rohan est largement représentée en basse-Cornouaille, et on peut y inclure aussi la paroisse d'Ergué-Gabéric car le domaine local de Kerjestin de Jean du Fou passe dans l'escarcelle des Rohan après 1492.

Image:Right.gifImage:Space.jpgPage 123 : Charles de Coettanezre dans un aveu de 1540 par son curateur Alain de Pennisquin pour le manoir de Lezergué « o ses maisons, courtils, creches, cours, étables, colombier, moulin, pourpris, jardins, rues, sartraycis et bois de haute futaie et de taillis et revenants, terres chaudes et froides » dont le revenu annuel est de trois livres, auquel il faut ajouter 63 livres pour la métairie et toutes les autres tenues, et le revenu de sa charge d'une vingtaine de livres, soit un total de moins de 100 livres.

Image:Right.gifImage:Space.jpgPage 178 : les nobles exercent également dans le clergé séculier, généralement ce sont de petits nobles qui exercent la prêtrise. Par exemple « Missire Yves Le Guen, prebstre », possessionné à Lestonan en Ergué-Gabéric. Aveu rendu par Pierre de Kerfors en 1540.

L’intérêt du mémoire pour Ergué-Gabéric est essentiellement dans le travail de transcription de 11 documents d'archives datés de 1464 à 1541, aux cotes B2011, B2012 et B2013 des « Aveux et dénombrements de la sénéchaussée de Quimper ». Quand on sait la difficulté de déchiffrer ces pièces anciennes, les 44 pages de transcriptions sont très précieuses (cf. fac-similés dans l'article).

Ces documents sont des descriptions de leurs manoirs et tenues gabéricoises pour leurs propriétaires nobles, à savoir François de Lysiard pour Kergonan en 1540, Caznevet Kerfors pour le dit lieu en 1488 et 1493, Pierre de Kerfors en 1539, Jehan Kersulgar en 1500, Jehan de Bennerven pour Cnechcongar en 1463, 1483, 1493 et 1540, Charles de Coattanezre pour Lesergue en 1540, Thomas Kermorial pour Melenec en 1541.

En savoir plus : « CALVEZ Nathalie - La noblesse en Basse-Cornouaille aux XVème et XVIème siècles »

11 Les chroniques de l'été grandterrien

Billet du 06.07.2019 - Le présent bulletin rassemble les chroniques gabéricoises du 2e trimestre 2019 publiées chaque semaine sur le site Internet Grandterrier.bzh, 32 pages au format papier A5 agrafées et envoyées par la poste dans les chaumières sympathisantes.

Pour commencer, un article sur le trésor d’orfèvrerie cultuelle datant de l’époque XIV et siècle suivant.

Puis, deux articles scolaires, l’un à propos de l’obligation d’instruction primaire après la loi de 1833 et l’autre sur l’imbroglio du projet d’une école mi-publique mi-privée à Saint-André en 1929.

Les deux sujets suivants concernent les militants et résistants communistes à Lestonan, à savoir les Lazou, Le Louet et Le Herpeux.

Ensuite les sports, le foot et le vélo, dans une vidéo inédite, et les fêtes sonorisées de la St-Jean et St-Pierre selon Déguignet.

Quelques documents d’archives datés de 1790-1837 sont également analysés : les arrestations et interrogatoires d’un jeune sorcier turbulent, la cession du presbytère à la commune et fabrique après la Révolution, et enfin la réquisition des parcelles de bois à fabriquer des sabots pour cause de pénurie et spéculations.

Et enfin, le bulletin de ce trimestre se finit en chanson : il s’agit des différentes versions d’un chant breton d’un conscrit de 1840 qui exhorte Notre-Dame de Kerdévot à le protéger avant qu’il ne parte en Algérie combattre les Maures.

Que l’été et le soleil 2019 brillent pour tout le monde !

* * *

Un jeu pédagogique estival a été ajouté au bulletin et devrait permettre d’animer les visites guidées de la chapelle de Kerdévot pendant tout l’été.

Le principe est simple : c'est un jeu de piste de 7 étapes de découverte des richesses du lieu dont il faut trouver les pays d’origine ou de référence, pour réviser tranquillement nos connaissances géographiques en dehors de tout programme scolaire.

Les pays en question sont dans le désordre : FLANDRE, ITALIE, PRUSSE, PAYS DE GALLES, ESPAGNE, VIETNAM, BRESIL.

 


Visionner le bulletin : « Kannadig n° 46 Juillet 2019 »

Jouer en ligne : « Un jeu à base d'énigmes pour une visite guidée de la chapelle de Kerdévot »

12 De Lestonan jusqu'au maquis de l'Argonne

Billet du 29.06.2019 - LE LOUET (Mathias), Je viens de la part de Fernand. Récits de la Résistance et de prison 1941-1944, édité à compte d'auteur par J. Le Louët (Saint-Evarzec), achevé d'imprimé en février 2004 sur les presses des Impressions du Sagittaire (Cesson-Sévigné)

Dans ce livre édité par sa veuve Jacqueline, Mathias Le Louët (1921-1987) raconte ses souvenirs d'enfant de Lestonan et de jeune adulte entré dans la résistance, de son arrestation en mars 1943 comme pro-communiste, de son procès et détention dans différentes geôles du gouvernement de Vichy, et enfin de son évasion et passage dans le maquis en 1944.

Né à Briec, il arrive très tôt avec ses parents à Ergué-Gabéric : « J’avais trois ans lorsque mon père trouva de l’embauche, comme manœuvre, à la papeterie d’Odet (Bolloré), fabrique de papier à cigarettes, située à une dizaine de kilomètres de Quimper. Mes parents se rendirent acquéreurs d’une modeste petite maison de deux pièces et d’un petit jardin d’environ quatre cents mètres carrés situé dans le village de Lestonan, sur la commune d’Ergué-Gabéric. »

Son regard de futur militant social lui fait noter une injustice constatée localement dans les années 1926-27 : « Deux ans après, M. Bolloré, le potentat de la papeterie, fit construire à ses frais, sur un terrain lui appartenant, deux écoles libres, l’une pour les garçons, l’autre pour les filles. Il mit en demeure ses ouvriers d’y inscrire leurs enfants pour la rentrée d’octobre. Un seul ouvrier refusa. Il était athée et, chose rare à l’époque, marié civilement. Il était sourd et muet. Malgré son infirmité et ses grandes qualités professionnelles, il fut licencié le jour de la rentrée scolaire.  »

Par la force des choses Mathias Le Louët intègre l'école publique de Lestonan : « Quant à moi, mes parents furent donc contraints de m’envoyer à l’école privée. Je n’y restai qu’un an. En effet, dans le courant de l’année, Bolloré avait acheté deux nouvelles machines et congédié un certain nombre de manœuvres, devenu personnel en surnombre. Mon père faisait partie de cette charrette de licenciés. »

Il se lie avec le couple d'instituteurs laïques : « M. et Mme Lazou étaient deux pédagogues extraordinaires, doués chacun d’une grande conscience professionnelle. Ils étaient aimés, estimés et respectés de toute la population. Une ou deux fois par semaine, M. Lazou organisait à titre bénévole des cours du soir pour les jeunes

 

agriculteurs. » Lieutenant dans l'armée françaises, Jean Lazou est tué au combat lors de l'offensive allemande de 1940.

Mathias Le Louët est arrêté en mars 1943 dans un rendez-vous avec un policier qui lui délivre un mot de passe falsifié d'agent résistant de liaison : « Il me demanda du feu et, après qu’il eut allumé sa cigarette, me dit : "Je viens de la part de Fernand". C’était le mot de passe convenu. »
Fernand est le pseudo de René Le Herpeux, résistant et gendre de Francine Lazou. Cette dernière est interpellée également.

Emprisonné et interrogé, il signe une reconnaissance d'activités communistes, alors qu'il ne s'était encarté jusqu'à présent qu'au mouvement du Front National de lutte pour la libération. Il est condamné à deux ans de prison, et Francine Lazou à un an.

Il connaîtra successivement les prisons de Vitré, Poissy, Melun, Châlons-sur-Marne. Les colis en provenance de Lestonan sont les bienvenus, notamment grâce à Anne-Marie Combot, épouse Manach, venue remplacer sa sœur Francine Lazou comme institutrice à l'école primaire de Lestonan : « Si vous n'avez pas encore acheté de Sarcoptol, ce ne sera pas la peine de me l'expédier. Par contre je n'ai plus de plumes et si Madame Manach y pense, elle sera bien aimable de me mettre quelques-unes dans mon prochain colis. »

Après son évasion et une période près de Sainte-Ménéhould dans le maquis de l'Argonne Marnaise, il revient à Lestonan en octobre 1944 : « Tous les habitants du village manifestèrent leur joie, même ceux, peu nombreux (deux ou trois je crois), qui avaient eu l’impudence de dire à mes parents après avoir appris mon arrestation : "C’est bien fait pour lui, il n’avait pas besoin d’être communiste". »


En savoir plus : « LE LOUET Mathias - Je viens de la part de Fernand »

13 La loi Guizot d'instruction primaire

Billet du 22.06.2019 - « La loi du 28 juin 1833 dispose dans son article 9 que toute commune est tenue soit par elle-même, soit en se réunissant à une ou plusieurs communes voisines, d'entretenir au moins une école primaire élémentaire », Comité d'Instruction Primaire de Quimper, 1841.

Cette loi proposée par François Guizot, ministre de l'Instruction publique, et qu'il contribua activement à mettre en place, précède celles de Jules Ferry. Un des textes majeurs de la monarchie de Juillet, il impose que chaque commune doit, dans les six ans qui suivent, devenir propriétaire d'un local d'école, et loger et entretenir un ou plusieurs instituteurs.

En réalité il faudra attendre 1856, date d'ouverture de l'école communale de filles, pour cela devienne réalité à Ergué-Gabéric, car l'instruction primaire n'est pas une priorité communale, comme le démontrent les nombreux atermoiements municipaux :

Image:Right.gifImage:Space.jpgDès le 1er septembre 1833 le ton est donné : « Le Conseil municipal pense qu’une instruction primaire serait inutile dans cette commune, voyant la proximité de Quimper, et surtout notre bourg ne se trouvant pas au centre de la commune. »

Image:Right.gifImage:Space.jpgL'argument de la localisation est important car le débat autour d'un projet de translation du Bourg vers le quartier de Lestonan divise la population de la commune.

Image:Right.gifImage:Space.jpgEn mai 1834 le maire consent, toujours comme réponse à la loi du 28 juin 1833, à mettre le salaire annuel d'un instituteur de 183 francs dans le budget communal.

Image:Right.gifImage:Space.jpgEn 1841 le conseil est réticent à s'associer aux communes de Kerfeunteun et Ergué-Armel pour la construction d'une maison centrale : « Est d'avis de conserver les fonds que la commune a en caisse, pour y construire plus tard une maison d'école. »

Image:Right.gifImage:Space.jpgEn fin d'année le comité d'instruction primaire de Quimper, devant le refus gabéricois de s'associer, rappelle la loi, et enjoint le maire à nommer un instituteur ou une institutrice qui sera, si refus d'obtempérer, nommé et affecté d'office aux élèves de la commune d'Ergué-Gabéric.

Image:Right.gifImage:Space.jpgEn novembre 1847 le conseil informe le préfet que la commune est désormais prête financièrement pour la construction ou la location d'une maison d'école, mais recommande d'éviter que le bâtiment ne soit « placé au milieu de la masse des cabarets de la commune et dans une position qui n'en permettrait l'accès qu'à une faible part de la population ».

 

Image:Right.gifImage:Space.jpgEn 1848 le conseil prend acte de l'approbation de leur nouveau choix de maison d'école au bourg par le préfet, et le mois suivant du rejet préfectoral pour raisons de préférence d'un déplacement hors du bourg.

Image:Right.gifImage:Space.jpgEn janvier 1849 le conseil s'émeut de la tentative de pression du préfet sur le maire, comme s'il voulait leur faire « revivre l'enfer du déplacement du bourg chef-lieu de la commune » en plaçant ailleurs la nouvelle école.

Image:Right.gifImage:Space.jpgEn 1850, le comité quimpérois d'instruction primaire demande à l'inspecteur d'académie d'intervenir suite à une nouvelle délibération : « le conseil municipal d'Ergué-Gabéric exprime le vœu qu'il soit établi dans cette commune une école mixte dont la direction serait confiée à des sœurs. »

On ne peut pas dire que cette dernière position, défendue de manière lapidaire comme un « avantage réel dans l'institution des sœurs », bien qu'elle ne soit pas interdite par « l'instruction publique et la liberté de l'enseignement » de 1833, n'est pas vraiment dans l'esprit de la loi Guizot.

En savoir plus : « 1833-1850 - Positions municipales sur la loi Guizot d'instruction primaire »


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