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Les billets hebdos de l'actualité du GrandTerrier

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Chaque semaine, un nouveau billet annonçant un ou plusieurs articles sur le site GrandTerrier.

Une compilation des billets est publiée en fin de trimestre sous la forme des chroniques du Bulletin Kannadig.

Anciens billets hebdos : [Actualité, archives]

Les anciennes affichettes : [Accroches à la une]

Modifications d'articles : [Journal des MàJs]


Sommaire

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1 Voyage d'un carme à Kerfors en 1674

Billet du 24.03.2018 - Il faudra plus qu'un billet pour rendre compte de l'oeuvre poétique et « satyrique », des voyages et indignités du frère Alexandre de Saint Charles Borromée, un ouvrage dans la Pléiade sera peut-être nécessaire, avec les annotations présentant les éléments de contexte historique.

Jusqu'à présent nous connaissions cette relation de voyage grâce à l'historien Arthur de La Borderie qui fit publier en 1884 deux courts extraits dans l'Anthologie des poètes bretons du 17e siècle d'Olivier de Gourcuff, sous le chapitre « Voiage du Père Alexandre de Rennes à Brest, et son retour ».

Nous avons transcrit intégralement l'original de cette pièce, conservé dans le fonds des Carmes des Archives départementales de Rennes, à savoir 1538 vers de 8 pieds sur 27 pages d'un cahier cousu de 27 pages calligraphiées d'une très belle écriture.

L'auteur est un frère carme, Alexandre de Saint Charles Borromée de son nom de religion, étudiant en théologie au couvent des carmes de Ploermel en 1669. Après quelques remontrances de la part de ses supérieurs, il est au couvent de Dol en 1672 et à Rennes en 1673. À la fin décembre 1673 il part de Rennes pour quelques mois en voyage en basse-Bretagne jusqu'à Brest.

Il part en voyage car sa position de frère des Carmes est très discutée par les autorités de son ordre, du fait d'indiscipline, falsification de signature de révérend, port d'épée et de pistole, déplacement non autorisé, vers et chansons « satyriques ». En mai 1672 sa lettre de défense est signé « Très humble et plus soumis religieux, Carme indigne ». Mais cette résignation ne suffira car d'autres accusations seront postées contre lui avant son départ, notamment une accusation de geste déplacé sur une carmélite.

Il quitte Rennes le 20 décembre 1673 exactement, et parcourt à pied, cheval et bateau, s'arrêtant dans des monastères ou des gîtes offerts par des hôtes généreux tout au long de ces étapes : Mordelles, Plélan-le-Grand, Beignon, Ploermel,Vannes, Auray, Port-Louis, Hennebont, Quimperlé, Quimper, Pont-l'Abbé, Quimper, Langolen (Trohanet), Quimper, Locronan, Lanvaux, Brest, Le Releck-Kerhuon (Lossulien, Keréon), Landerneau, Daoulas, Lopérec (Keranhoat), Irvillac (Trounevezec), Hanvec (Kerviler), Quimper, Ergué-Gabéric (Kerfors), Langolen (Trohanet), Ergué-Gabéric (Kerfors, Kerdévot), Quimper, Edern (La Boissière), Briec (Kerobezan, Sainte-Cécile), Laz (Trévarez), Gourin (Tronjoly), Motreff (Brunolo), retour Rennes vraisemblablement courant juin 1674.

La datation est rendue possible par les nombreux événements rapportées qui ponctuent ses rencontres, notamment l'enterrement du chanoine Vincent de Kerouartz à Daoulas le dimanche des rameaux, et la difficile introduction du nouveau recteur Marc Tanguy à Edern.

  Le double passage par Ergué-Gabéric est marqué par une relation presque fraternelle avec Jean de La Marche, seigneur de Kerfors qu'il rencontre lors de l'aller vers Brest, et chez qui il séjourne à son retour au moment du pardon de Kerdévot une semaine après Pâques.

Les vers à la gloire du seigneur de Kerfors (page 8) : « J'y vy, ah ! l'illustre que c'est Jan de La Marche, arrest, arrest, Quoique j'en parle dans la suitte Il ne faud pas que je le quitte À ce moment sans l'embrasser, Je t'embrasse sans me lasser Mille et mille fois mon La Marche Tu auras bien part en ma parche, Mes vers rendront ton nom connu Lorsque le temps sera venu ».

Le pardon de Kerdévot (page 22) : « De ce lieu nous nous transportons Pour voir ce grand amas de monde Qui dans ce lieu ce jour abonde ; Un nombre de processions Font icy leurs incessions ; Je me souviens de trois ou quattre, Que je nommeray pour m'ébattre : Ellian, et Landrevarzec, Les deux Ergué, surtout Briec, Qui vient enseignes déployées ».

Ce qui frappe dans le récit du frère Alexandre tout au long de sa villégiature, c'est la part importante accordée aux ripailles et libations : « Si je voulois faire rappord De la vie qu'à Kerfors on meine Tout le long de cette sepmaine D'un an je ne serois au bout On mange, boit, joüe, somme tout ».

Globalement le poète n'est pas avare de compliments sur ses hôtes gentilshommes, prêtres, abbés ou militaires, mais ce n'est pas toujours le cas, on le sent très libre dans ses appréciations, parfois mêmes œcuméniques comme au fort Louis près de Lorient : « Ce capitaine valeureux, Me fournit son lit, et sa table, Jamais huguenot plus aimable ».

Cette liberté de ton fait que le document versifié apporte indiscu-tablement un éclairage inédit et non encore exploité sur la Bretagne du 17e siècle.

* * *

En savoir plus : « ST CHARLES BORROMÉE Alexandre (de), Le voiage de Rennes à Brest et son retour », « GOURCUFF Olivier (de) - Anthologie des poètes bretons du 17e siècle »

2 Déboutements à la Réformation de 1680

Billet du 17.03.2018 - En 1660 Colbert lance la Réformation du domaine royal en Bretagne, c'est-à-dire la vérification des déclarations des sujets du roi, roturiers ou nobles, vis-à-vis de propriétés incluses dans le domaine du roi et pour lesquelles sont dus des droits et impôts divers.

Les déclarations pour Ergué-Gabéric ont pour but aussi la validation des prééminences, de droits de justices et de coutumes, de ligence ou de suites pour les terres incluses dans chacun des domaines nobles revendiquant les rentes de leurs domaniers.

En analysant les sentences des commissaires de la Réformation du gros registre des comptes de la Chambre des comptes de Nantes, on remarque à Ergué-Gabéric de nombreux déboutements partiels, notamment sur les droits de coutumes, voire sur des droits de justice seigneuriale. On n'est pas loin de la fin de l'Ancien Régime, 109 années avant la Révolution Française.

Pour essayer de comprendre un peu, on a analysé les cas intéressants et différents de deux seigneurs de manoirs et domaines voisins : Guy de Charmoy pour Lezergué, et Jan de La Marche pour Kerfors.

Le déclarant du domaine de Lezergué, est l'héritier et cousin de Guy Autret, à savoir Guy de Charmoy, « sieur de Kerarret ». Ses successeurs seront au 18e les de La Marche, de la même famille que ceux de Kerfors.

Le seigneur de Lezergué prétend disposer encore en 1680 de prééminences très conséquentes au sein de l'église paroissiale, avec tombes, armoiries, bancs privés, lisières, ainsi que des droits dans d'autres chapelles. Et même « un droit de haulte basse et moyenne justice et patibulaires aux facultés de s'exercer sa juridiction et justice sur les hommes et vassaux de la dite terre ».

Il pousse le bouchon jusqu'à déclarer en droits de coutumes des contrats très restrictifs pour ses domaines, contrairement à ce qui se fait normalement dans le cadre du domaine congéable en Cornouaille.

Le résultat ne se fait pas attendre, les autorités en charge de la Réformation du domaine royal prononcent un double déboutement : « le dit de Charmoy sieur de Kerarret a esté débouté du droit de hautes moiennes et basses justices et de celuy de coustumes », ce qui implique l'interdiction des poteaux de justice et l'annulation de certains droits abusifs.

  La décision de déboutement des droits de justice et de coutumes sera contestée par les successeurs de Guy de Charmoy, mais sans succès avéré. La décision de la Réformation du domaine royal servira pour la reprise de certaines mouvances comme le Mélennec et Poulduic au 18e siècle par leurs détenteurs roturiers, en l’occurrence Lizien et Pétillon, qui obtiendront leur indépendance vis-à-vis du fief de Lezergué et le droit de payer leurs rentes directement au roi.

En savoir plus : « 1680-1682 - Papier terrier et déboutement de réformation du domaine de Lezergué »

La déclaration du domaine de Kerfors et de ses dépendances est faite par Jan de La Marche « de la succession de deffunct Escuyer Yves Delamarche seigneur de Kerfors son père ».

Il déclare aussi des prééminences pour sa maison de Kerfors, notamment en l'église paroissiale : « une tombe enlevée estant en voute et arcade », et dans la chapelle de Saint-Guénolé.

Ces prérogatives de noblesse ne semblent pas contestées par les commissaires chargés de la réformation du domaine du roi. Par contre Jan de La Marché est débouté de « tous les droits de greffes, ligences, mouvances » qui seront désormais « réunis au domaine de sa majesté sous sa garde royale ».

Par rapport à Lezergué, la sentence de déboutement de Kerfors est complètement différente, mais à terme cela se terminera de la même façon, à savoir le démantèlement du domaine noble.

En savoir plus : 1680-1682 - Papier terrier et déboutement de réformation du domaine de Kerfors »

La semaine prochaine, en lien avec le précédent seigneur de Kerfors, il y aura comme un scoop éditorial : l'oeuvre inédite et complète intitulée « Le voiage d'Alexandre de Rennes à Brest, et son retour de Brest à Rennes » avec des détails sur l'amitié de Jan de La Marche et un frère carme, poète « maudit » du 17e siècle.

* * *
En ce qui concerne le billet de la semaine dernière, merci à Christian Cabellic, grand connaisseur du passé fondateur de la paroisse d'Ergué-Gabellic, pour nous avoir rappelé que le combat de Caznevet de Kerfors avait été également raconté par Louis Le Guennec dans son « Histoire de Quimper Corentin et son canton », et pour nous avoir dévoilé son conte de Bretagne pour les enfants sur le même sujet.

3 Les exploits de Caznevet de Kerfors

Billet du 10.03.2018 - Louis Le Guennec a raconté maintes fois cette légende du griffon ou dragon ailé du Stangala qui fut vaincu par Mahonec, jeune noble amoureux de la commune de Cuzon, mais une variante locale purement gabéricoise prétend que le vrai héros se prénommait Caznevet ...

On tire cette information notamment d'une évocation très bien documentée de l'animal le plus mystérieux du bestiaire légendaire breton dans un livre publié initialement en 2010 et réédité en 2017 par les éditions des Montagnes Noires, « Le dragon en Bretagne, mythes et symboles » de Claire Arlaux.

Et parmi les nombreux exemples, les gargouille et sablières de la chapelle de St-Guénolé, et la légende du griffon du Stangala :

Image:Right.gifImage:Space.jpgPage 27 : « Dans une végétation luxuriante, des soldats observent avec envie un gibier fantastique, oiseaux, dragons et même des dauphins. Des têtes de dragons ornent aussi les embouts des blochets (Chapelle saint Gwennolé d'Ergué-Gabéric, XVIe siècle). »

Image:Right.gifImage:Space.jpgPage 82 : « Deux légendes au moins signalent des dragons aux portes de Quimper dans les gorges du Stangala qui dominent l'Odet. Un éperon rocheux y est nommé ar Griffonez, la griffonne, mais c'est bien de dragons qu'il s'agit à Cuzon comme à Ergué-Gabéric. Dans l'ancienne paroisse de Cuzon, le jeune Mahonec est amoureux d'une jeune fille de Penhoat ... » (cf. les articles sur cette légende racontée par Louis Le Guennec).

Image:Right.gifImage:Space.jpgPage 83 : « Le petit dragon immortalisé sur la chapelle du Quélennec à Ergué-Gabéric »

Image:Right.gifImage:Space.jpgPage 84 : « Une variante se raconte quelques kilomètres plus loin sur le territoire d'Ergué-Gabéric. C'est un chevalier de la paroisse, Caznevet de Kerfors, qui vient à bout du dragon du Stangala. En guise d'exorcisme, la bête a pris place sur un rampant de la chapelle du Quélennec qui domine l'Odet.  » (Louis Le Guennec a aussi raconté cette histoire dans « Histoire de Quimper Corentin et son canton », ainsi que Christian Cabellic dans un joli conte de Bretagne).

 
Si le jeune et pauvre gentilhomme de Kermahonet en Cuzon peut être le héros et vainqueur du dragon du Stangala, on peut penser que le chevalier gabéricois Caznevet de Kerfors fût également capable d'un tel exploit guerrier. Ce dernier a vraiment existé, il est présent à la montre militaire de Carhaix de 1481, où il pose « en brigandine », une armure très souple qui permet d'abattre une bête diabolique d'un trait d’arbalète.

De plus les Kerfors ont fondé la chapelle de St-Guénolé au village du Guélennec, peut-être en souvenir de l'exploit de l’aïeul : « connoist estre fondateur d'une chapelle construite en la dicte parroisse en l'honneur de Monsieur Sainct Guenolay pour avoir icelle esté bastie en son fond par la concession de ses prédecesseurs, et avoir un escusson taillé en bosse dans le pignon occidantal au dessus la principalle porte d'icelle et estre fondé de mettre et aposer ses armes en tous endroitz d'icelle. » (déclaration de réformation du domaine royal en 1680).

Et enfin, la chapelle de St-Guénolé est à proximité immédiate de l'éperon du Griffonez comme on peut le voir sur la carte établie par le commandant Ernest Debled en 1935.

En savoir plus : « ARLAUX Claire - Le dragon en Bretagne, mythes et symboles », « LE GUENNEC Louis - Histoire de Quimper Corentin et son canton », « CABELLIC Christian - Le combat de Canezvet de Kerfors contre le griffon du Stangala »

4 Une vie papetière depuis ses 12 ans

Billet du 03.03.2018 - « J'ai gardé un excellent souvenir de "chez Bolloré". Je me suis plu pendant mes 35 ans à Odet, le travail était intéressant, pas trop physique, je travaillais souvent une paire de ciseaux dans chaque main. »

En novembre 2013, alors qu'il avait 87 ans, Jean Guéguen était invité au manoir d'Odet au nom du groupe Bolloré par la cadreuse et réalisatrice Mylène Mostini d'ITV pour participer avec Jean Cognard à la réalisation d'un film de témoignages d'anciens de la papeterie, ce dans le cadre de la future commémoration des 200 ans de l'entreprise familiale.

En attendant la projection de cette vidéo lors de l'événement et grande fête du bicentenaire en 2022, voici la transcription de quelques extraits, pour rendre un hommage à ce grand passeur de mémoire inter-générationnelle décédé le 24 février 2018 dans sa 92e année.

En 1938, alors qu'il n'a que 12 ans, il a un seul rêve : travailler à la papeterie, et son maître lui obtient, en récompense de sa réussite au certificat d'étude, une visite des bâtiments où l'on préparait la pâte et confectionnait le papier : « C'est comme ça que j'ai visité l'usine, des piles raffineuses, à la centrale électrique, à la chaufferie, et aux machines à papiers mêmes. J'avais bien aimé la visite et me suis dit que j'aimerais bien travailler là plus tard. Et c'est ce qui s'est produit, après une période de 6 ans comme employé à la boulangerie paternelle. ».

Pendant 35 ans au laboratoire, de 1948 à 1983, il a pu suivre les différents types de fabrication de l'usine :

Image:Right.gifImage:Space.jpgle papier à cigarettes : « la charge, c'est-à-dire la quantité de carbonate de chaux ou d'autres produits chimiques qu'on mettait dans le papier pour qu'il brûle assez facilement. On avait plusieurs différences de papiers, du papier non combustible qui n'avait aucune charge et qui s'éteignait tout de suite. C'était d'ailleurs un papier que les bretons aimaient beaucoup car ils étaient toujours en train de tirer sur leurs mégots, ça devait être de l'OCB numéro 4 et non du 8. »

Image:Right.gifImage:Space.jpgle papier carbone : « Je devais contrôler aussi les eaux, pour voir si elles n'étaient pas trop colorées. Surtout quand on faisait du papier carbone coloré. Des fois il arrivait qu'à Quimper ils disent que "chez Bolloré" ils sont en train de faire du papier noir, du vert, du rouge ... »

Image:Right.gifImage:Space.jpgle papier condensateur : « Pour ce papier vers 1965 un autre directeur technique a été nommé, M. Caro, qui a demandé à travailler dans nos salles, ce qui fait qu'on a déménagé et on est allé travaillé dans ce qu'on appelle la rue Doaz, ce mot voulant dire pâte en breton. »

Puis vinrent en 1983 :

Image:Right.gifImage:Space.jpgle regret et la tristesse de tout arrêter : « J'ai toujours été cantonné dans ce milieu labo, ça ne bougeait pas beaucoup,

 

c'était toujours les mêmes contrôles qu'on faisait. Mais malgré tout, ça a été très dur de voir l'usine fermer. »

Image:Right.gifImage:Space.jpget le plus beau des cadeaux : « j'ai pu avoir aussi la médaille du centenaire que j'ai gardée bien précieusement, cette médaille qu'avait eu ma grand mère en 1922. C'est grâce à un collègue que je l'ai eue : quand les bureaux d'en bas ont fermé, les bureaux de Jean Le Gall, Jean Ascoêt a trouvé plusieurs médailles du centenaire, et il m'en a offert une. La grande médaille qui fait 6 cm de diamètre, sur laquelle sont gravées les 4 patrons. »

En savoir plus : « Souvenirs de 'chez Bolloré' depuis les 12 ans de Jean Guéguen en 1938 », « Nécrologie (Télégramme) »

Deux extraits audios ci-contre (cf. les transcriptions dans l'article) :
  • 01 : grand-père cocher de Mme Bolloré et grand-mère aux "pilhoù"
  • 05 : visite de l'usine en 1938 après la réussite au certificat d'études

5 Une reine poursuivie par Cromwell

Billet du 24.02.2018 - Cette semaine les facsimilés de deux numéros de 1644 de la Gazette de Renaudot, l'un de la Bibliothèque municipale de Lyon, l'autre de la BnF-Gallica, pour lesquels Guy Autret de Lezergué fournit le récit du débarquement en Bretagne d'une reine d'Angleterre.

Extrait de la Gazette datée du 6 août 1644
Extrait de la Gazette datée du 6 août 1644
L'auteur gabéricois évoque le double reportage de la Gazette dans une lettre qu'il adresse à son correspondant Pierre d'Hozier depuis sa résidence de Lezergué : « J'ay receu la vostre du 14 de ce mois & je vois par l'article qui est dans la Gazette que vous avés prins la paine de montrer ma relation à Renaudot. Je vous aye envoié une seconde plus ample du depuis, laquelle aura encore peu servir au dit Renaudot » (publiée par le comte de Rosmorduc page 83 dans son ouvrage de 1899 sur ses correspondances).

Les gazettes ont été créées en 1631 par Théophraste Renaudot avec l'appui du ministre d'État Richelieu. Les deux articles sont publiés respectivement les 6 et 31 août 1644, le premier dans les pages Gazette n° 93, le second dans les Extraordinaires n° 103. La Gazette fait 8 pages au total avec une quinzaine d'informations brèves de quelques paragraphes chacune. Les Extraordinaires, par opposition aux Nouvelles ordinaires qui sont le 3e type de gazette, incluent deux à trois compte-rendus beaucoup plus longs. Contrairement aux Extraordinaires qui ne contiennent aucun décor hormis la lettrine de début de texte, les titres des Gazettes et des Nouvelles ordinaires incluent une vignette avec respectivement les lettres stylisées G et N.

En 1644 les gazettes sont généralement datées et envoyées le samedi à ses abonnés, avec quelques numéros complémentaires en semaine. La pagination et la numérotation des gazettes, suivant leur nature, se font chaque an en démarrant par le n° 1 au début de janvier. Ainsi le 6 août 1644 deux numéros, le n° 92 et le n° 93 de l'année 1644, sont publiées aux pages 629-632 et 633-640, l'un pour les Nouvelles Ordinaires, l'autre pour la Gazette. Pour cette dernière la vignette est estampillée d'un G et de cette maxime : « guidée du ciel, j'adresse et par mer et par terre ».

Le texte de Guy Autret pour l'article du 6 donne bien le contexte historique de ce voyage : « De Brest, le 26 Juillet 1644. La Reine d'Angleterre est aujourd'hui arrivée en cette ville sur un vaisseau Holandois, monté de quarante pièces de canon : contre lequel le Vice-Amiral du Parlement de Londres a tiré 80 coups de canon ». En effet, Henriette Marie, sœur de Louis XIII, mariée avec le roi anglais Charles Ier, est en fuite avant que son époux ne soit exécuté lors de la première révolution anglaise menée par Oliver Cromwell.

 
Extraordinaires de la Gazette datée du 31 août 1644
Extraordinaires de la Gazette datée du 31 août 1644

La reine d'Angleterre vient d'accoucher d'une fille à Oxford avant d'embarquer : « Elle est tellement incommodée de ses couches ». La légende, non rapportée dans la Gazette, dit aussi que, face aux canons ennemis des Parlementaires anglais, elle demanda à son capitaine : « Quand vous ne pourrez plus me défendre, tuez-moi. ». En tout cas, la gazette précise que, débarquée gràce à une chaloupe de Dinan, elle n'est pas vraiment rassurée dans un premier temps : « Toute la coste estant en armes, l'obligea de faire mettre un mouchoir au haut d'un baston. »

Dans le deuxième article du 31 août, après un rappel de l'accostage très mouvementé, c'est un véritable article « people » que nous produit avec force détails Guy Autret, à savoir la tournée d'une star internationale qui « fut fort bien receue par toute la Noblesse & le peuple »:

Image:Right.gifImage:Space.jpgà Brest, par la Damoiselle de Rohan, ses Officiers, et René de Rieux.
Image:Right.gifImage:Space.jpgà Chateaulin, par l’évêque de Cornouaille et les députés de Quimper.
Image:Right.gifImage:Space.jpgà Quimper, par les sieurs de Kerharo, de Talhoet et du Botilieau, ainsi que Julien Furic, sieur du Run, qui lui fit une « belle harangue ».
Image:Right.gifImage:Space.jpgà Rosporden, par René de Rieux, ancien évêque de Leon.
Image:Right.gifImage:Space.jpgà Hennebont, Vannes et Nantes, par le marquis de Molac, gouverneur de Quimper et de Dinan.

A chaque étape de nombreux carrosses accueillent la Reine et sa cour, et le marquis de Molac met à sa disposition un « carrosses à six chevaux. Le voyage se poursuit hors la Bretagne, en passant par Angers, Saumur, Amboise et Tours, jusqu'à Bourges où l'attend le prince de Condé.

Henriette Marie restera en France, ne reverra plus jamais le roi son mari, et se retirera au couvent de la Visitation de Chaillot où, après sa mort, Bossuet prononcera une de ses plus célèbres oraisons.


En savoir plus : « Le voyage en Bretagne d'Henriette Marie, reine déchue d'Angleterre, La Gazette 1644 », « Lettre du 29 août 1644 de Guy Autret à Pierre d'Hozier (Rosmorduc, XXI) »

6 Mine du Rouillen près du Cleuyou

Billet du 17.02.2018 - « Depuis très longtemps on a constaté l'existence du terrain houiller de Quimper ; les premières fouilles furent faites en 1752, vers le chemin de Coray, par M. Mathieu de Noyant ; ces travaux, dont il ne reste que des traces, ... », Alphonse-Adolphe Rivière, 1838

Cette semaine, des documents conservés aux Archives Départementales du Finistère sur la reprise des recherches minières entre le préfet, le ministre de l'Intérieur et l'Ingénieur en chef des mines, lequel ne manque pas de rappeler l'existence du puits du Cleuyou "foncé" par son oncle Christophe Mathieu à l'est du futur bassin houiller de Quimper.

Dans ces documents d'octobre 1812, Pierre-Joseph Mathieu, l'ingénieur en chef des mines sollicité par le préfet du finistère, présente l'historique de la partie sud-est du bassin houiller : « Les premières fouilles furent faites il y a 60 ans, vers le chemin de Coray par Mr Mathieu de Noyant son oncle ». L'oncle en question se prénommait Christophe et était un ingénieur très actif, avec son père Jacques et ses deux frères, dans le développement des mines du nord de la France au 19e siècle.

Christophe Mathieu est qualifié de Noyant car, devenu propriétaire des mines de Noyant dans l'Allier, il s'y est établi. En 1752 il est mandaté par la Compagnie des mines de Basse-Bretagne, propriétaire des mines de Poullaouen et des premières galeries du Cluyou et de Cuzon, pour apporter son savoir-faire en technique de foncage de puits.

Alphonse-Adolphe Rivière écrira en 1838 à propos du puits du Cluyou : « ces travaux, dont il ne reste que des traces, furent à peine poussés à quelques mètres. » Certains auteurs parlent de 67 m, notamment Alain Le Grand dans son « Quimper-Corentin en Cornouaille » et Bernard Mulot dans un article de la revue « Penn ar Bed », mais nous n'avons pas trouvé les documents d'archives qui en attestent.

Dans le rapport de 1812, l'ingénieur Bonnemaison quant à lui décrit les lieux : « Le terrain est inégal dans sa surface, dans l'est un affleurement a lieu au dessus du moulin du Cluyou, il est déposé en se relevant contre le granit émétique auquel il se joint par un dépôt glaiseux et constitue le penchant d'un côté incliné au pied duquel coule l'Odet. Un dépôt se trouve au milieu de la route de Coray, tantôt terreux, charbonneux, tantôt glaiseux, charbonneux, blanchâtre accompagné et envelopé des noyaux et des boules de poudingue psammilique. »

Cette description de boules de poudingue, c'est-à-dire ces gros galets sédimendaires en pleine terre charbonneuse au milieu de la route de Coray, est une bonne explication pour le toponyme précis du lieu-dit « Rouillen ». En effet ce terme « Ruillen » est sans doute issu de "Ruihañ ou Ruilhal" qui veut dire "rouler" en français. De plus il est attesté que ce lieu, juste au-dessus du château du Cleuyou, le tronçon de route était appelé au 19e siècle « chemin noir du Cleuyou » ou « chemin de la terre noire autrement dit le Ruillen ».

Les géologues Alphonse-Auguste Rivière, Yves-Alain Fuchs et Bernard Mulot ont dressé des plans et cartes géologiques de l'endroit sus-mentionné dans le cadre de leurs études du bassin

  houiller de Quimper :
Image:Square.gif A. Rivière, Etudes géologiques 1838 :
Image:Square.gif Y. Fuchs, revue Penn ar Bed 1953 :
Image:Square.gif B. Mulot, revue Penn ar Bed 1975 :

En 1829, suite aux travaux de recherche sur ce bassin, la concession royale est accordée, ce avec un périmètre délimité au sud par le pont du Cluyou et le moulin des couleurs de Locmaria : « Cette concession, dont l'étendue superficielle est de deux cent vingt-trois hectares, est limitée ainsi qu'il suit : Au midi, par le cours de l'Odet, depuis le moulin des Couleurs jusqu'au pont du Cluyon ; À l'ouest, par une ligne droite, allant du pont du Cluyon au bourg de Cuzon ; ... ».

En fait le filon ne sera vraiment exploité que dans sa partie nord, c'est-à-dire à la mine de Kergogne sur les terres de Kerfeunteun, laquelle sera déclarée en faillite en 1844.

En savoir plus : « 1812-1829 - Un bassin houiller délimité à l'est par le puits et dépôt du Cluyou », « MULOT Bernard & FUCHS Yves-Alain - Les bassins houillers du Finistère », « RIVIERE Alphonse-Auguste - Études géologiques faites aux environs de Quimper »

7 ZAC, RN et chantiers gallo-romains

Billet du 10.02.2018 - En travaillant sur la partie "archéologique" des futures annales du GrandTerrier, en particulier pour mieux comprendre la période antique gallo-romaine à Ergué-Gabéric, on a été amené à rassembler et analyser les rapports et compte-rendus scientifiques de fouilles.

Il s'agit notamment des fouilles récentes menées près des ZAC ou de l'échangeur de la RN 165 au Rouillen, dont les rapports scientifiques sont publiés sur le site Internet du Service Régional de l’Archéologie de Bretagne, et commentés dans les inventaires du bulletin annuel de la Société Archéologique du Finistère ou dans le livre-référence de Jean-Paul Le Bihan / Jean-François Villard.

Tout d'abord il y a Paul du Châtellier, auteur en 1889 d'un inventaire des monuments finistériens des temps préhistoriques à la fin de l'occupation romaine, qui note pour Ergué-Gabéric : « Au Boden, camp retranché, appelé Cos-Castel. À l'intérieur, on trouve des fragments de tuiles et de poteries romaines. Une meule a été trouvée, dans un chemin près de ce camp. À droite de la route de Quimper à Coray (ancienne voie romaine), à 8 km 80 au delà de l'embranchement de la Croix-Rouge, restes de retranchements. À la rencontre de deux routes, en face de l'auberge de la Croix-Rouge, on voit des tuiles à la surface du sol.  ». À l'heure actuelle aucune fouille scientifique n'a été menée du côté du supposé camp retranché romain de Cos-Castel à Boden.

Par contre, à la Croix-Rouge, en 2007 lors de l'extension de la ZAC, il y a eu un chantier archéologique mené par Jean-François Villard : « si l'on se base sur ce faisceau de présomptions, il semble que l'on ait affaire à la Croix-Rouge à un petit établissement antique ». La nature gallo-romaine du site est renforcée par la découverte d'un gobelet à anse bien conservé : « un petit vase presque complet au profil inédit... Ce gobelet pose un problème d'identification. Par sa technique de réalisation et par sa pâte, nous serions tenté d'intégrer ce récipient au corpus des productions antiques. ... Sous toutes réserves, c'est donc plutôt une datation gallo-romaine que nous retenons pour ce vase. »

Si l'on retourne quelques années antérieures, il faut noter la fouille très importante de Ty-Névez-Kerveguen qui a permis d'étudier la structure exacte de la voie romaine Quimper-Carhaix : « Nous avons pu étudier un tronçon de voie antique dont l'état de conservation est assez exceptionnel ». De plus une pièce de monnaie, en l’occurrence un sesterce du IIe siècle, est trouvée par la suite à proximité du chantier de fouilles.

En 1987, après les chantiers de 1985 qui ont mis en évidence des fossés de l'age de fer et des habitats du haut moyen âge, Jean-Paul Bihan intervient sur le secteur nord de la Salverte, à l'occasion d'aménagements industriels et hôteliers, et relève la présence de deux fossés gallo-romains en U, parallèles et distants de 3,50 m, suivis sur près de 40m. De plus des pièces exclusivement gallo-romain sont découvertes sur place : « D. 37 en céramique sigillée de la fin du   IIe   siècle   après   J.-C.,

 
balsamaire en verre de type Isings 82 du IIe ou IIIe siècle (expertise J.Y. Cotten), jatte à bord rentrant en céramique commune, complète mais brisée sur place ». Le cliché ci-contre de cette jatte du Ier siècle après J.-C. a été publié dans le livre référence «  Archéologie de Quimper, Au temps de l'empire romain ».

En 1988 Hervé Kerebel mène des fouilles à Bussizit-Huella, tout près également de la Salverte, avant la construction d'une aire de lavage de camions : « cette fouille nous aura permis d'étudier partiellement un site agricole modeste de l'environnement immédiat de la ville de Quimper au second siècle après J.-C. ».

Le site de Tréodet est visité en 2008 suite à un signalement sur le chantier de réalisation d'un parking et révèle des vestiges de sols en terre battue et de base de murets, des fragments de tuiles du Ier et IIe siècle et de céramiques : « Cette découverte, fortuite et trop tardive, ne put faire l'objet d'aucune intervention raisonnée ». Le lieu, situé bien en amont du pont du Cleuyou sur le Jet, était peut-être un franchissement de l'Odet d'est en ouest.

En 2011, lors d'une intervention archéologique par Jean-Paul Le Bihan et Jean-François Villard avant l'ouverture de la zone d'activité du Squividan, un tronçon de voie antique secondaire y est découvert : « Un diagnostic effectué sur les hauteurs de Squividan dominant la vallée de l'Odet avant son confluent avec le Jet mit en évidence des structures rurales gallo-romaines ».

Les fouilles de Squividan ont mis en évidence un long tronçon antique d'une voie perpendiculaire à la route antique de Quimper à Carhaix. On y a trouvé également des traces d'activité : des enclos isolés, deux fours à sécher les grains, des tuiles et céramiques. Ceci conforte la densité de la campagne autour de Quimper au temps de l'Empire romain.

En savoir plus : « Les chantiers archéologiques gabéricois localisant des établissements gallo-romains », « CHATELLIER Paul (du) - Les époques préhistoriques et gauloises dans le Finistère », « LE BIHAN Jean-Paul - Fouille de sauvetage de Ty-Nevez-Kerveguen », « Intervention archéologique à Salverte-Nord en 1987, fossés gallo-romains », « VILLARD Jean-François - Diagnostic archéologique à la ZAC de la Croix-Rouge », « KEREBEL Hervé - Fouille de sauvegarde de Bossuzit-Huella », « VILLARD Jean-François - Vestiges et paysage rural antique de Squividan », « LE BIHAN Jean-Paul & VILLARD Jean-François - Archéologie de Quimper, tome 2 »

8 Sortie du film Les Naufrageurs

Billet du 03.02.2018 - Enfin, ce film culte noir et blanc, produit et scénarisé en 1958 par un gabéricois, Gwenn-Aël Bolloré, est disponible en DVD en vente en ligne par StudioCanal / Universal Pictures pour le prix de 10 euros environ et pour satisfaire notre bonheur de cinéphiles nostalgiques.

Synopsis du film : en 1852, sur une île bretonne où sévit la famine, Moïra brise le fanal qui signale les écueils. Un navire chargé de vivres vient s'y briser. Il est pillé et les survivants sont massacrés. Seul Gilles échappe à la tuerie : il est caché par Louise qui s'est éprise de lui. La jeune orpheline Moïra, rejeté par les îliens, est amoureuse du jeune pêcheur Yann. Un prêtre et un policier du continent viennent sur place et assistent au dénouement ...

Interrogé par André Espern, Gwenn-Aël Bolloré, qui à l'époque était vice-président des papeteries Bolloré, présente ainsi ce film de 1958 dont il est le scénariste et producteur : « Les Naufrageurs, c'est une île qui s'appelle Blaz-Mor, une île qui ressemble étrangement à Ouessant, à Sein, c'est plus haut que les Glénan, une île. Et comme ils n'ont rien à croûter, ils font les naufrages. »

Blaz signifiant à la fois « goût » ou « saveur », mais aussi « odeur » - dans un sens péjoratif (mauvaise odeur), et Mor signifiant « mer », la traduction du nom de l'île peut ainsi être double et présenter la même ambiguïté que ses habitants : « le goût de la mer » où « l'odeur (mauvaise) de la mer ». Cette dualité, voire cette opposition, est très présente dans le film.

Dans le film-interview d'André Espern, Gwenn-Aël Bolloré décrit son rôle dans le tournage des scènes du naufrage : « Dans le scénario le bateau qui ne voyait plus les feux, devait s'écraser du côté de Penmarc'h. Quand on a été pour tourner, personne ne voulait prendre la barre, parce que le type était seul. Tout le monde s'est tourné vers moi, car c'est moi qui avais écrit le scénario. Je me suis déguisé en marin hollandais, avec des bottes et une casquette, et puis j'ai été droit sur les cailloux, il y avait un peu de mer. C'est très impressionnant, puisqu'avec une barre franche, résister à la tentation de tourner la barre pour éviter les cailloux, c'est dur pour un marin. »

Le film est présenté dans le chapitre « Les îles, un monde à part » de la sélection « La Bretagne au cinéma » de Nolwenn et Maria Blanchard, du fait du thème de la grande solidarité îlienne contre les autorités civiles et religieuses du continent, désigné comme étant « la Grande Terre ».

  La plupart des scènes ont été filmées sur le site de Kerity-Penmarc'h-Lesconil, sur les plages avoisinantes et dans un village construit pour l'occasion près du calvaire de Tronoën. Le manoir de Kerlut en Plobannalec est loué pour l'hébergement de l'équipe de tournage. Le photographe quimpérois Etienne Le Grand fils est présent lors du tournage et ses clichés sont aujourd'hui conservés du Musée de Bretagne de Rennes.

Le réalisateur Charles Brabant (1920–2006), grand scénariste et réalisateur, a signé de nombreux films et téléfilms entre 1952 et 1989, dont « La Putain respectueuse » et « Les Aventuriers du Mékong ».

Les acteurs principaux sont l'« Apollon de l'année 1939  » Henri Vidal (jouant Yann Le Coeur), le « comédien exemplaire » Charles Vanel (le vieux Mermez) et l'indochinoise Dany Carrel (Louise). René Cosima qui a épousé en 1957 Gwenn-Aël Bolloré, joue le rôle de Moïra la sauvageonne.

Hormis les scènes alimentant l'intrigue et les paysages du bord de mer, on notera avant tout des scènes ethnologiques de dévotion religieuse, avec des cantiques chantés en breton dans une vieille église ou en procession sur les dunes derrière croix et bannières.

Pour se faire une idée du film, voici quatre courts extraits proposés par le site Internet www.cinema-musique.org :


En savoir plus : « BRABANT Charles - Le film Les Naufrageurs »

9 De l'Art poétique et panégyrique

Billet du 27.01.2018 - « Dans ces écrits loyaux qui tombent de ma plume | J'étouffe mes ennuis et brave l'amertume. | Et j'écoule mes jours en cette compagnie - Sans honte, sans regrets, sans aucune envie. », Strophe 18 du Petit Panégyrique de Jean-Marie Déguignet

Le cahier manuscrit n° 20 de Jean-Marie Déguignet, publié en 2001 dans l'édition intégrale de ses mémoires « Histoire de ma vie » et en 1999 dans l'édition partielle « Rimes et révoltes », contient un magnifique poème que l'auteur présente sur un mode presque humoristique : « Maintenant je vais adresser un petit panégyrique à mes écrits, mes seuls amis qui me consolent un peu de l'ennui et de la misère dans mes vieux jours. ». Généralement un éloge panégyrique est prononcé en l'honneur d'un personnage adulé, mais ici en l’occurrence l'auteur n'a trouvé aucun autre modèle à honorer.

Et il nous délivre pas moins de 54 quatrains ou strophes de 4 vers, avec une métrique de vers alexandrins, soit 12 pieds incluant généralement une césure au 6e pied. Les rimes de chaque quatrain sont plates ou suivies, c'est-à-dire de type AABB, alternant ou non les rimes féminines avec e muet et les masculines :

C’est à vous, mes écrits, qu’aujourd’hui je m’adresse,
Vous les consolateurs de ma triste vieillesse.
Vous êtes mes enfants, enfants infortunés,
Comme moi en ce monde, vous êtes ignorés.</small>

Les 6 premières strophes font le parallèle de destin entre ses écrits et sa propre vie : vont-ils être dévorés par les rats et pourrir comme des grimoires ? À partir de la 7e strophe, les « franches vérités » de ses écrits sont opposées aux messages mensongers, stupides, inutiles des Évangiles chrétiens :

Tandis que des écrits comme les Évangiles,
Faits pour voler les sots, berner les imbéciles,
Tous ces écrits menteurs, stupides, libertins,
Sont fort recommandés comme écrits divins,

Aux strophes 11 et 12 il cite in-extenso entre guillemets Nicolas Boileau, l'auteur de « L'Art poétique », dans son Épitre n. 9 sur le thème du beau et du vrai. Mais Déguignet ajoute « Tu parles bien mon vieux et met en exergue sa fausseté lorsque Boileau fit l'éloge du grand Louis le quatorzième.

« Rien n’est beau que le vrai : le vrai seul est aimable ;
Il doit régner partout, et même dans la fable.
De toute fiction l’adroite fausseté
Ne tend qu’à faire aux yeux briller la vérité. » (Boileau)

Dans les strophes 18 et suivantes, il se sert de ses « loyaux écrits » qui lui permettent, dit-il, de voyager au temps des premières civilisations anciennes : « Par ces enfants chéris issus de ma mémoire Je parcours le ciel, la terre et l'histoire ». Après l'évocation des dieux mythiques, son voyage se termine par une description du Paradis qui se termine en strophe 41 : « Ce bouge inventé par le bandit Jésus ».

Les strophes suivantes sont une une sorte d’apothéose didactique sur le sens de la vie : « Voilà comment je vis d'une seconde vie Grâce à mes écrits, à ma philosophie.  ». Sa philosophie repose essentiellement sur la critique de la métempsychose de Lucrèce et Pythagore qui affirment que l'âme existe en dehors du corps :

    Dessin de Christophe Babonneau, BD du paysan bas breton, T1 :

Ceux-là ont confondu l'âme et la matière.
Dans ce petit monde il n'y a que poussière
Toujours se décomposant et se recomposant
Formant de tous les êtres la vie et le mouvement.

Aujourd'hui ce poème a l'honneur d'être inscrite comme œuvre majeure dans une Anthologie de la Poésie française. Son auteur,. Christian Tanguy, né en 1961 dans une ferme finistérienne, a publié en 2013 cette anthologie de référence, « Florilège », où se relaient quelques 700 poèmes de 250 poètes francophones .

Certains de ces poèmes sont connus de tous, comme « L'Invitation au Voyage » de Charles Baudelaire ou « Le Dormeur du val » d'Arthur Rimbaud, mais les autres, ancrés dans la poésie de l'âge baroque ou dans celle des poètes maudits, n'ont été que rarement réimprimés. L'anthologie inclut sept poètes bretons seulement, à savoir Gérard Le Gouic, René-Guy Cadou, Georges Perros, Max Jacob, Paol Keineg, Victor Segalen, Tristan Corbière, et Jean-Marie Déguignet.

Par ailleurs les premières strophes de ce poème plein d'énergie invocatoire est aussi traduit en anglais par Linda Asher et fait la couverture des nouvelles « Memoirs of a Breton Peasant » :

To you, my writings, do I address these words today,
You consolers of my sad old age.
You are my children, luckless children,
Like me in this world, you are ignored.

En savoir plus : « L'art poétique selon Jean-Marie Déguignet dans son panégyrique à ses écrits », « TANGUY Christian - Florilège, anthologie de la Poésie française », « DÉGUIGNET Jean-Marie - Memoirs of a Breton Peasant »

10 Statues de saints en 1942 et 2017

Billet du 20.01.2018 - Lors de la dernière journée du patrimoine, les services municipaux du patrimoine avaient orchestré le retour de statues de la chapelle Saint-André après leur restauration. En 1942, 75 ans plus tôt, c'est le recteur Gustave Guéguen qui procédait à une opération similaire.

En cette rentrée 2017, il s'agissait de quatre très vieilles statues en bois polychrome du 17e siècle, à savoir les trois évangélistes saints Marc, Mathieu et Luc, et la martyre sainte Barbe. L'état de ces statues était très préoccupant : bois rongé par endroit, des bouts de membres (pouce ou main) manquants, et des marques de vrillettes ou de moisissures apparentes.
Entre décembre 2016 et octobre 2017, ces 4 statues ont fait l'objet d'une très belle restauration par les professionnels experts de l'Atelier Régional de Restauration de Kerguehennec / Bignan (56). Le 14.09 les œuvres d'art datées du 17e siècle sont revenues à la chapelle juste avant la fête du patrimoine.
Les témoignages de Gilles Man-toux et Hélène Champagnac de l'atelier régional apportent un éclairage sur les difficultés de leur tâche : « Les quatre statues sont taillées dans du châtaignier, lequel par son tanin, crée un répulsif pour les insectes xylophages. Cela a permis aux statues de saint Mathieu, saint Marc, saint Luc, et sainte Barbe d'être moins sensibles à la détérioration » ; « Nous n'avons pas remplacé les mains coupées de sainte Barbe car aucun document ne nous permet de connaître leur position, leur forme ni ce qu'elles tenaient. Ce sont des œuvres originales sculptées dans une bille de bois par un artiste. Ce ne sont pas des séries comme on en trouve au XIXe siècle. »

Les quatre statues ont été remises en place et fixées sur leur piédestal, en position haute, et les saints, comme ils le faisaient jadis, accueillent les visiteurs qui entrent dans la nef de part et d'autre de la porte sud de la chapelle. Sainte Barbe à gauche, saint Marc à droite, et en face sur le mur nord saint Luc côté occidental et saint Mathieu côté autel.

Article 1 : « Les retables lavallois et les statues anciennes de la chapelle St-André »

  À Ergué-Gabéric, dans les années 1930-50, tout le monde connaissait Laouic Saliou, originaire du quartier de Keranna,
qui était un sculpteur et ébéniste de talent et qui a réalisé de nombreuses statues visibles dans les chapelles gabéricoises. Parmi celles-ci il y le saint Jacques qu'on honore à la chapelle de Saint-André, car la fontaine proche lui est consacré.

Dans cet entrefilet du journal « Le Progrès du Finistère » daté du 1er août 1942, on apprend les conditions dans lesquelles la statue fut bénie sur place lors du pardon de la chapelle. La chapelle en question est dite de sainte Anne, car, certes plus connue sous le nom de chapelle Saint-André, elle bénéficie d'une double invocation. Et le pardon principal avec procession avait lieu le jour de la sainte Anne, en l’occurrence le 26 juillet.

En 1942 il s'agit de bénir « une nouvelle statue de S. Jacques destinée à la fontaine nouvellement restaurée », en remplacement d'une statue de pierre qui ornait la niche de la fontaine de saint-Jacques, halte des pèlerins du Tro-Breizh ou vers St-Jacques de Compostelle. La statue de Laouic sera ensuite mise à l'abri des convoitise sur l'autel de la chapelle.

Le cérémonie se passe ainsi : « Après les vêpres, la statue fut bénite et portée en procession jusqu'à la fontaine où M. Duvail, fabricien, la déposa dans sa niche. Là, quelques prières furent récitées par l'officiant, M. l'abbé Aulnette, du diocèse de Nantes. »

Le recteur qui officie est Gustave Guéguen, que tout le monde appelait familièrement « Gustav  », et on l'imagine très fier et très inspiré lors de cette cérémonie, alors qu'il n'est nommé à Ergué-Gabéric que depuis quelques mois.

Article 2 : « Bénédiction de la statue St-Jacques à St-André, Progrès du Finistère 1942 »

11 Armes et lettres patentes royales

Billet du 13.01.2018 - Cette semaine, la transcription complète de trois documents d'archives : un acte prônal de 1634, des lettres patentes authentiques du roi Louis XIII en 1638 et le registre du Parlement de Bretagne en 1639, le tout pour les droits de prééminences du sieur Guy Autret à Ergué-Gabéric.

Le premier document, daté du 5 mars 1634 et qualifié d'acte prônal car lu pendant les annonces qui suivent l'homélie du prêtre, authentifie sous le seing de deux notaires royaux le consentement des prérogatives du seigneur local Guy Autret par une assemblée de paroissiens. Il s'agit de l'original en papier parcheminé à l'encre pâlie et difficile à déchiffrer. L'acte est lu lors du prône de la grande messe dans l'église paroissiale pour accorder au seigneur de Lezergué « le droict d'avoir ses armes en la victre de la chapelle de saint Guehnollé, et costé de l'évangile en la dicte esglise paroissiale d'Ergué Gabellic ».

À « la dicte grande messe célébrée par messire Allain Le Balch curé de la dicte parroisse assistoit grand nombre des habitants » et pas moins de 45 paroissiens mettent leur noms pour autoriser les armoiries locales à la chapelle de St-Guénolé et « remettre les armes et bancq de la seigneurie de Lesergué au lien ou ils estoient auparavant » dans l'église paroissiale.

Les deuxième et troisième documents sont constitués des lettres patentes royales reçues en août 1638 et de leur mise en exécution par le Parlement de Bretagne le 12 janvier 1639. La lisibilité est facilitée car ce ne sont pas des originaux, mais des copies ultérieures du 18e ou 19e siècle et conservées aux Archives Départementales du Finistère.

Dans ses lettres patentes commençant par un tonitruant « Louis par la grâce de Dieu Roy de France et de Navarre à tous présents et à venir salut.», le roi Louis XIII formule lui-même ses intentions : « voulant favorablement traiter notre cher et bien aimé Guy Autret sieur de Missirien et de Lezergué, chevalier de notre ordre de St Michel », « suffisamment informé que la terre seigneurie qu'il possède par succession immémoriale de ses prédécesseurs, est belle et bien bâtie, noble et des plus anciennes de l'Evesché de Cornouaille en notre province de Bretagne », « ornée de tous droits de haute moyenne et basse justice, colombier, garennes, moulins, domaines, ... intersignes de noblesse. Voulant encore en faveur dudit sieur de Missirien augmenter les honneurs et dignités de la terre ».

La décision royale est très généreuse : « donnons octroyons et accordons de par ces présentes signées de notre main tous et tels droits honorifiques et prérogatives et prééminences qui nous appartiennent en l'église paroissiale d'Ergué Gabellie, et en la chapelle de St Guénolé situé en la même paroisse hors l'église paroissiale, avec tout pouvoir de faire mettre ses armoiries, blasons et enseignes de noblesse au dedans et au dehors des dites église et chapelle au lieu plus éminent, tant en vitres, lisières qu'en bosse, en tous endroits que bon lui semblera ».

La formule finale consacrée « Car tel est notre plaisir » conclut la lettre royale, suivi de la mention « Par le roy » et du nom et signature du surintendant des finances, à savoir Claude Bouthillier.

Toute lettre patente, préparée par le Conseil du roi et contresignée par un secrétaire d'état, doit être scellée de cire verte du grand sceau royal et faire ensuite l'objet d'un décret d'exécution. Dans l'extrait de registre d'exécution par le Parlement de Rennes en janvier 1639, on note bien la description précise du sceau apposé sur les lettre d'août 1638 : « un grand sceau de cire verde à laqs de soye rouge et verde ». Les « laqs » sont les lacets colorés qui attachent le sceau au bas du parchemin.
 

Tous les blasons des Autret (10 bandes d'argent et azur) et de leurs prédécesseurs de Lezergué (croix potencée) et Coatanezre (trois épées), ont bien été mis dans le tympan de la maitresse-vitre de l'église paroissiale, entourés du collier jaune de l'ordre de Saint-Michel dont Guy Autret était chevalier. Sur le tout dernier blason Coatanezre qui est resté dans son état d'origine, on distingue même nettement la coquille dite de Saint-Jacques sur le collier.

La décision royale d'octroyer à Guy Autret les prérogatives appartenant à la couronne est conditionnée par le fait « que les armes du Roy seront mises au plus hault lieu de la principalle vitre de la dite église étant au grand authel aux frais du dit demandeur ».

Nous aurions donc du y trouver le motif armorial des trois fleurs de lys surmontées d'une couronne royale, faite également de fleurs de lys. Or le timbre supérieur de la couronne n'est pas très net et le blason est écartelé en 4 parties, en 1 et 4 des fleurs de lys (remplacés par 3 morceaux noircis de vitrail), et en 2 et 3 par des hermines : ces armes sont celles de Claude de France (1499-1524), reine et épouse de François 1er. Par ailleurs le blason est bien entouré du collier de l'ordre royal de chevalerie de Saint-Michel.

Par contre, au 2e rang on voit à gauche deux blasons surmontés de vraies couronnes ducales au motif feuillu, sans collier de Saint-Michel. À gauche les armes, en mi-parti des fleurs de lys et des hermines, sont celles de la duchesse Anne de Bretagne, mère de Claude de France, et à droite il s'agit du blason historique « D'hermine plain » du duché.

Lorsque le Parlement de Bretagne examine début 1639 la validité des lettres royales, il reprend les autres pièces d'archives, à savoir l'acte des « 28e mars et 17e avril 1499 touchant la haulte justice du manoir de Lezergué », un don de tabernacle du 25 février 1635 par Guy Autret et sa femme Blanche de Lohéac, un autre prônal de novembre 1638 confirmant le consentement des paroissiens, et deux actes prônaux datés L'arrêt reprend aussi la contestation locale d'Yves de La Marche du manoir voisin de Kerfors et de Jan de La Lande établi à Kergonan en Ergué-Gabéric également.

La conclusion du Parlement de Bretagne est sans appel : « La cour a ordonné et ordonne que les dictes lettres seront enregistrées au greffe de la cour pour en jouir l'impétrant d'icelles bien et duement suivant la volonté du Roy »

En savoir plus : « 1634-1639 - Acte prônal, lettres patentes du Roi, registres du Parlement et prééminences »

12 Édifiante soulographie électorale

Billet du 06.01.2018 - Merci à Pierrick Chuto de nous avoir communiqué ce rapport circonstancié décrivant avec un brin d'ironie les excès de consomma-tion d'alcool lors d'une réunion électorale tenue au bourg d'Ergué-Gabéric et sponsorisée par le candidat conservateur et les curés de la paroisse.

Cela se passe en plein climat d'interdiction des congrégations religieuses, juste avant la loi de séparation des églises et de l'état, une époque où, en Bretagne, les catholiques conservateurs et les républicains laïcs se disputent quotidiennement et de façon encore plus exacerbée lors des campagnes électorales.
En 1901 déjà, aux élections au conseil général, se présente le conservateur Henri de Beauchef de Servigny, « jeune avocat dynamique, ambitieux et riche » (cf le livre "IIIe République et Talennoù" de Pierrick Chuto) dans le canton de Quimper : à Ergué-Gabéric on vote massivement pour lui et, à la surprise générale, il gagne contre son opposant républicain Jules Soudry, proche d’Hémon.

En 1902 il se représente aux élections législatives contre Louis Hémon (lequel sera élu dès le premier tour avec 7519 voix contre 6959) dans la 1ère circonscription de Quimper. Le 11 avril 1902 le candidat Servigny est en visite au bourg d'Ergué-Gabéric pour une réunion électorale publique pendant laquelle sont distribués alcools et cigares.

Le compte-rendu, conservé dans le fonds Soudry des Archives Départementales, est dressé par « un passant attardé au bourg d'Ergué-Gabéric », un sympathisant républicain dénommé Nouille qui raconte à son conseiller général le « scandale de hier », à savoir comment la libation de la réunion publique s'est poursuivie dans tous les débits de boisson entourant l'église paroissiale.

La consommation de boissons est impressionnante : « Le vin rouge, le vin blanc, l'eau de vie coulèrent en abondance » ; « Les rafraichissements circulèrent de nouveau avec des paquets de cigarettes et de cigares » ; « Maintenant on dédaignait le vin et le cidre, c'était le cognac qui avait la   préfé-

 
rence » ; « quelques gosses de 15 à 16 ans qui, peu accoutumés à de pareilles ingurgitations de liqueurs rouler sur la route » ; « Le malheureux vint s'affaler sur une pierre du cimetière pour cuver son vin » ; « un mendiant qui avait fraternisé trop souvent avec la divine bouteille protestait de son dévouement à l'honorable candidat en criant d'une voix avinée : " Vive M. Servigny !! " ».

Et cela est bien dans la logique politique du candidat : « Pour atteindre son but M. de Servigny trouva que le plus sûr moyen était de s'adresser au ventre de ses invités : "Hémon, dit-il, a voté pour l'augmentation du prix des boissons, moi je suis absolument contre et je demanderai la suppression de cette loi". »

Les responsables gabéricois sont désignés par le dénommé Nouille : « ces messieurs, les curés », c'est-à-dire le recteur et le vicaire de la paroisse. Ce dernier est même désigné par un début de phrase rayé, l'auteur préférant finalement le pluriel. Le recteur est Jean Hascoet celui qui s'était opposé à la fermeture de l'école des sœurs, et le vicaire François Nicolas sera en 1904 accusé de prononcer en chaire des sermons bien marqués politiquement. En 1902 le témoin républicain dénonce « comment l'argent des curés s'évanouit en fumée et en boissons pour la cause sacrée ».

En conclusion, le rapporteur ironise encore une fois : « Ca a été une bonne soirée en l'honneur de Bachus  ».

En savoir plus : « 1902 - Le scandale arrosé de la réunion publique du candidat conservateur Henri de Servigny »

13 Les chroniques de début d'année

Billet du 01.01.2018 - « Annum novum faustum & felicem », « Bloavezh mad, laouen hag eurus », Une joyeuse et heureuse nouvelle année !

La formule consacrée est en latin cette année. Et ça tombe bien car le premier article du bulletin trimestriel porte sur un cartulaire rédigé en latin nous éclairant sur les fondateurs d’Ergué-Gabéric, alias Gabellic.

Ensuite, si nous remontons aux premiers siècles de notre ère, nous avons la fameuse voie romaine de Carhaix fréquentée par des attelages gallo-romains qui faisaient une pause à l’une des quatre pierres milliaires gabéricoises.

Toujours en latin cette notice qui authentifie un don de cire pour Kerdévot en 1439. Par contre à partir de 1448 les actes de Kerfors sont en français mais n’en restent pas moins difficiles à déchiffrer.

Les articles suivants évoquent des traces et reflets d’or au Stangala dès 1506, des terres confisquées aux hérétiques en 1592, un testament généreux pour une domestique en 1845, une escroquerie franc-maçonne au 18e siècle.

Et pour continuer ce sommaire à la Prévert, on signalera la très belle statue de granite de Sant Alar inaugurée début octobre, le livre des aventures d’Auguste Chuto qui se bat contre les Diables Rouges de la République, et aussi les cartes communales de 1860, 1920 et 1950. Et enfin, véritables cerises sur le gâteau, les bulles de cette bande dessinée mettant en scène l’enfance du paysan bas-breton Jean-Marie Déguignet.

Et les annales promises pour 2018, me direz-vous ? Pas de panique, elles arrivent ! Leur contenu est arrêté, la rédaction des articles est bien avancée, et on a trouvé l’œuvre d’art de la page de couverture dans la hôte du père Noël. On va bientôt lancer les revues croisées et contacter un éditeur.

Et pour finir, encore une formule magique : « Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin », un slogan de municipalité qu’on prendrait bien à notre compte. TOUS ENSEMBLE donc derrière le GrandTerrier !

 
Lecture en ligne du bulletin trimestriel, avec fichier pdf pour l'impression en recto-verso : « Kannadig n° 40 Janvier 2018 »

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