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Les billets hebdos de l'actualité du GrandTerrier

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Sommaire

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1 Fin de l'Union sacrée en 1919

Billet du 22.07.2017 - Merci à Jean-François Douguet d'avoir présenté ce magnifique entre-filet républicain dans son livre sur la Grande Guerre et à Pierrick Chuto pour avoir relevé cet épisode local dans le contexte de l'opposition "blancs - rouges" très marquée dans notre région cornouaillaise.

L'article du journal « Le Finistère » daté du 15 septembre 1919 rend compte du conflit entre les républicains voulant célébrer une fête commémorative de la Grande Guerre dans l'esprit de l'Union sacrée et le recteur Louis Pennec qui fait interdire le bal au nom de la morale chrétienne.

L'Union sacrée est le nom donné au mouvement de rapprochement politique qui a soudé les Français de toutes tendances politiques ou religieuses lors du déclenchement de la Première Guerre mondiale, et qui est ici mis à mal par les positions antagoniques des clans laîcs et catholiques.

Cette cérémonie patriotique eut lieu le dimanche 9 novembre 1919 à Ergué-Gabéric : « une fête des Poilus organisés par les démobilisés de la commune. Fête réussie en tous points ... ». Sauf le bal qui était prévu pour combler « leur désir d'être à la joie ce jour-là ».

En fait les organisateurs ont demandé naïvement au recteur de venir procéder à une cérémonie religieuse en l'honneur des disparus. Et sa réponse est cinglante : « Le service religieux ne sera célébré qu'à la condition que le bal n'eût pas lieu »

Le recteur va « jusqu'à juger de façon très inconvenante les paroissiennes qui assisteraient au bal ». La formulation est assez volontairement ambiguë pour que le terme d'inconvenance puisse s'appliquer aussi bien au recteur, aux paroissiennes dévergondés ou au bal lui-même.

Le journal républicain remarque en conclusion que le recteur aurait pu être plus flexible du fait que ses trois vicaires (*) ont été mobilisés, et sous-entend en quelque sorte que son intransigeance est due au fait que lui-même personnellement n'a pas connu le front.

Et la conclusion de l'article est plutôt sibylline : « Singulière façon de perpétuer l'union sacrée cimentée au front ! Insister serait cruel ...  »

Quand le recteur Louis Pennec décède en 1943 il aura droit à une nécrologie dithyrambique : « en 1914, recteur à Ergué-Gabéric, et c'est là, qu'en 1935, à l'occasion de ses noces d'or, Monseigneur l'Evêque voulut récompenser sa prudence, sa charité, sa douceur et son zèle sacerdotal, en lui conférant la mosette de doyen honoraire !  ». De l'art de concilier le zèle et la douceur !

 

Quant à la mosette, il s'agit de cet élégant petit manteau couvrant les épaules que l’ecclésiastique peut porter fièrement à titre honorifique.

Image:Right.gif En savoir plus : « Interdiction du bal des poilus et intransigeance du recteur Pennec, Le Finistère 1919 », « Louis Pennec, recteur (1914-1938) »

(*) : Jean-François Douguet donne page 77 les noms des trois vicaires (Corentin Breton, Théophile Madec, François Le Gall) dans un extrait d'interview dans le journal paroissial : « Les vicaires ne tardèrent pas à être mobilisés et le recteur dût seul assurer le service de la paroisse. Monsieur Breton, mobilisé à Quimper, peut quelquefois rendre service pour le ministère dans la paroisse. Monsieur Le Gall, après avoir été réformé, fut successivement auxiliaire à Fouesnant, à Edern, à Morlaix. Monsieur Madec put rarement aider au service de la paroisse en raison de ses obligations militaires. Le bedeau lui-même fut quelquefois mobilisé. »

2 Un saint, son cantique et sa statue

Billet du 15.07.2017 - Saint patron de la paroisse d'Ergué-Gabéric, il est l'enfant natif du village de Kerrouz, au bord de l'Odet, avant d'être appelé à l'abbaye de Landévennec par saint Guénolé. Il n'est donc pas étonnant que notre Guénhaël trouve sa place au panthéon du monachisme breton.

C'est l'archiviste diocésain et chanoine Jean-Louis Le Floc'h qui communiqua à Fanch Morvannou cette copie manuscrite du cantique de saint Guinal, conservée aujourd'hui sous la cote 8N2-1-017, en lui précisant qu'elle est « transcrite manifestement par un enfant ». Nous en publions aujourd'hui le facsimile.

Il n'y a ni date, ni signature, ni indication du timbre sur lequel le cantique était chanté. Le texte court, un refrain et 5 strophes, est une demande au saint pour être protégé de tout dommage et toute méchanceté, ce pour les malades, les enfants, les jeunes gens, le bétail, et finit par un « Gant e sikour, Satan morse Ne c’hello trec’hiñ tud Erge » (Avec son aide, Satan jamais Ne pourra vaincre les habitants d'Ergué).

Signalons aussi un extrait d'un autre texte d'une comptine ou cantique quimpérois publié dans Feiz ha Breiz en 1926  : « Roomp amzer Da Wennole, Da zont d'ar gêr, Eus an Erge, Da zont d'ar ger eus an Erge, Gant Gwenêl e ziskib neve neve »
  (Donnons du temps à saint Gwenolé, en revenant à la maison, depuis Ergué, en revenant d'Ergué à la maison, avec Gwenael son nouveau disciple).

Saint Gwennaël, nommé aussi Guénaël, Vinel, Guenault et Guinal, alors qu'il vivait son enfance à Ergué-Gabéric, aurait été remarqué à Quimper par saint Guénolé, le fondateur de l'abbaye de Landévennec, et l'aurait désigné comme son disciple et successeur. Outre son rôle de deuxième abbé de Landévennec, la vie du saint ermite a été remplie de nombreux voyages avant de se fixer jusqu'à sa mort dans le dernier ermitage à Locunel en Lanester.



Une grande statue de saint Guinal/Guénaël sera sans doute bientôt dressée à la Vallée des Saint de Carnoêt. Une souscription est en cours et gageons que les donateurs gabéricois du lieu de naissance du saint sauront compléter la mise qu'ont déjà constituée les nombreux généreux souscripteurs de Lanester où le saint est également adoré.

Au 12.07.2017 il ne manque plus que 34% des 15.000 euros nécessaires pour réaliser le projet. Cliquez ci-contre, et vous pourrez, même pour 10 euros, être le compagnon de cette grande aventure populaire.

L'association de la Vallée des Saints étant reconnue d'intérêt général à caractère culturel, tout don est déductible des impôts (articles 200 et 238 bis du CGI, 66% pour un particulier et 60% pour les entreprises).

Image:Right.gif Articles pour en savoir un peu plus : « Cantique de saint Guinal d'Ergué-Gabéric », « Guinal, 115e statue de La Vallée des Saints, Le Télégramme 2017 », « Saint Gwenhaël (6e siècle) », « MORVANNOU Fañch - Saint Guénaël »

Nota : cet été la statue monumentale d'un autre saint bien connu à Ergué-Gabéric va été réalisée à Carnoët : sant Alar. On en reparlera.

3 Mémoires Kannadig en balades

Billet du 08.07.2017 - « La mémoire. Qu'est cette mémoire ? C'est ta richesse, ton avoir. C'est tout ce que tu peux et pourrais imaginer. C'est aussi le rêve. » Philippe Métayer, L'Orpailleur de Blood Alley, Montréal, Le Cercle du Livre de France, 1974.

Pour nos premières balades historiques en ce second trimestre 2017, nous avons exploré le lieu sauvage et méconnu de la vallée du Stangala. En commençant par une randonnée sur la crête de Griffonez, dans les grottes de Toul-ar-veleien, près du monstre de Beg-a-grip. En poursuivant par un voyage dans le temps au manoir noble voisin du 15e au 17e siècle.

Ensuite on lira avec plaisir le journal du voyageur brestois Jean-François Brousmiche qui a sillonné le Finistère en 1829-31 et qui y décrit le moulin à papier d’Odet et le manoir de Lezergué.

Après, on se baladera du côté des îles avec GwenAël Bolloré producteur d’un film qui a fait date dans l’histoire du cinéma breton. Et on analysera le projet de fabrique de pâte hors sol de son père René en 1923.

Du côté des écoles, on s’intéressera d’une part à la pompe et aux conditions d’hygiène de l’école communale en 1929, et d’autre part aux épidémies de rougeole, dysenterie et teigne dans les écoles du bourg de 1908 à 1921.

Pour ce qui concerne l’inventaire des églises et chapelles lors du Concordat entre 1804 et 1814, les curés desservants de la paroisse doivent répondre aux questionnaires diocésains.

En plein 19e siècle, Déguignet a dévoilé dans ses mémoires la curieuse légende du chat noir ; aujourd’hui un conteur contemporain, Maurice Poulmac’h, la narre joliment en langue bretonne.

La chapelle de Kerdévot sera peut-être aussi pour vous un lieu de promenade estival : on vous propose un jeu d’énigme pour égayer votre visite. Et on en profite pour révéler la localisation d’un exemplaire du vieux cantique de Kerdévot, celui de 1712 : il est conservé à l’abbaye de Landévennec.

Et enfin pour finir notre balade, nous vous révélons ce qu’on considère comme un vrai scoop : la plus vieille mention d’Ergué réputée datée du 12e siècle est sans doute apocryphe.

 

Pour le prouver on est allé à la source photographier les originaux du trésor des chartes à Paris.

Lecture en ligne du bulletin trimestriel, avec fichier pdf pour l'impression en recto-verso : « Kannadig n° 38 Juillet 2017 »

4 Rendez-vous du côté de Kerdévot

Billet du 01.07.2017 - « Eürus bras a cavan, habitantet Ergue, Da veza, dre preferanç dan oll dud ar c'hontre, Enoret demeus un Ilis quer caër ha quer santel, Mammen an oll miraclou ha graçou eternel » (Je vous trouve bien chanceux, habitants d'Ergué, d'être honorés d'une église si belle et si sainte)

Antoine Favé, vicaire d'Ergué-Gabéric, avait révélé en 1891 dans le bulletin annuel de la Société Archéologique du Finistère l'existence de ce cantique spirituel en breton, « Notre cantique se trouve parfaitement daté, et c'est lui-même qui nous dit qu'il fut composé onze ans après l'accident du 2 février 1701 : donc il est clair qu'il est de 1712 ».

Ce qui suit est l'analyse des éditions originales du cantique : on avait déjà communiqué l'existence d'une version incomplète dans les collections numérisées des Archives du Diocèse de Quimper et Léon, et aujourd'hui nous publions la version complète conservée à l'abbaye de Landévennec. Pour l'une et l'autre, il s'agit des feuilles volantes imprimées des 56 strophes du cantique de 1712 et des deux additions dont Antoine Favé avait indiqué l'existence sans en fournir le texte.

Antoine Favé, à la fin de son article sur l'ancien cantique dans le Bulletin annuel de la Société Archéologique du Finistère, écrivait : « Des additions furent faites quelques années plus tard à cet intéressant cantique ... ».

Le document imprimé dont disposait le vicaire est bien celui des feuilles volantes retrouvées, un magnifique tiré à part sans mention d'éditeur et datant du 18e siècle de par ses caractères typographiques. Les deux additions sont bien là en pages 7 et 8, et les 56 strophes à l'orthographe un peu vieillotte sont bien réparties à l'identique sur les 7 premières feuilles.

En fait on dispose bien de deux exemplaires, l'un à l'abbaye de Landévennec sous la cote 010.70 (facsimilé publié sur fv.kan.bzh), l'autre aux archives diocésaines de Quimper. Le premier est complet avec ses 8 feuillets, le deuxième est un peu écorné et ne présente que 4 feuilles (1-2 et 7-8).

Bernez Rouz a relevé l'existence d'une version publiée ultérieurement dans les années 1870 par la maison d'édition Kerangal, avec une orthographe plus moderne et des strophes revues (notamment les strophes 55 et 56). L'originalité de cet exemplaire est la dédicace d'éditeur aux accents royalistes, sous la forme d’un appel à prier pour Henri V, Comte de Chambord.

Par ailleurs, le cantique de Kerdévot est aujourd’hui chanté sur un autre air (« Laudate Mariam », et non le « Santez Mari » du vieux cantique) et avec des paroles complètement différentes. L'auteur de cette version moderne est Jean Salaun qui la composa en 1881. Mais le cantique moderne est court et conventionnel, alors que celui de 1712 est plus authentique et riche d'anecdotes (Duguay-Trouin, retable, peste ...).

 

En savoir plus : « Cantic Spirituel e gloar an Itron Varia Kerdevot ha diou addition »


NOTA-BENE: la chapelle de Kerdévot sera ouverte pendant l’été 2017 ; les dimanches et jours de fêtes, des bénévoles vous y accueilleront pour échanger et agrémenter vos visites.

L’association GrandTerrier y sera présente le vendredi 14 juillet toute la journée et prroposera un jeu d’énigmes sur 7 éléments patrimoniaux notables de la chapelle, ainsi que des exemplaires de ses chroniques trimestrielles, et, si cela vous intéresse, des facsimilés imprimés du cantique de Kerdévot..

Sur le site GrandTerrier on trouvera le questionnaire en ligne et la possibilité de trouver le mot-mystère de 7 lettres, en 2 parties (article + nom), représentant le terme breton de la peste qui fit
des ravages à Elliant et qui fut arrêtée par ND de Kerdévot : « Aet eo - -    - - - - - a Elliant » (la peste est partie d'Elliant), Villemarqué, Barzaz Breiz.

Pour vous aider il y a même un jeu de taquin qui fonctionne sur ordinateur PC, tablette ou smart-phone : un petit clic "sec", et non "glissé", sur une des vignettes près du carré noir pour réussir le casse-tête.

En savoir plus : « Un jeu à base d'énigmes pour une visite guidée de la chapelle de Kerdévot »

5 Voyages à Odet et à Lezergué

Billet du 24.06.2017 - « C’est en flâneur que j’ai couru mon cher pays (...) tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, j’ai porté mes pas au hasard », Jean-François Brousmiche, Avertissement, Voyage dans le Finistère en 1829, 1830 et 1831, Quimper, éd. Morvran, 1977, tome I, page 2.

Percepteur à Lambezellec et secrétaire de l’Intendance sanitaire de Brest, Jean-François Brousmiche a tenu un journal lors de ses pérégrinations dans le finistère. Ses notes ont été recopiées en 1889 par son fils Édouard sous le titre « Voyages dans le finistère en 1839, 1830 et 1831 », puis reproduites par la Société Académique de Brest dans son bulletin de 1890-91 en tant qu’ « Une promenade dans le Finistère, il y a soixante ans ». Enfin elles sont rassemblées par l’éditeur Morvran en deux volumes en 1977 ; le premier titre est repris mais avec le mot « Voyage » au singulier comme celui de Jacques Cambry en 1794.

Jean-François Brousmiche est bien sûr passé par Quimper et ses environs bucoliques. Dans l'édition de 1977, à la page 257 du second tome, on peut lire une belle description du manoir de Lezergué : « Il n'est pas de vallées fraîches, ombreuses où coulent les rivières et les moindres ruisseaux ..., chacun veut orner la solitude qu'il s'est choisie ... Il convient à Ergué-Gabéric de voir la ruine moderne de Lezergué, dont l'escalier à double rampe est digne de remarque ... Le site où elle est placée est admirable, et les arbres que l'on y voit encore sont suffisants pour l'abriter et prêter du charme au séjour que l'on y établierait. »

Page 255, une courte note sur la papeterie Le Marié, qu'il localise par erreur à Kerfeunteun, alors qu'elle se trouve à Odet en Ergué-Gabéric, et qui produit sa pâte grâce à des cylindres, et non des pilons : « Il en est un (moulin à papier) surtout dont les produits sont de qualités supérieures ... Des eaux, d'une étonnante pureté, contribuent aussi à donner plus de blancheur aux divers papiers que confectionne cet établissement, papiers bien supérieurs à ceux des autres fabriques du finistère : ils peuvent même lutter avec les produits des manufactures des autres parties de la france. Cette usine placée sur l'Odet, qu'un médiocre filet d'eau met en mouvement, appartient à monsieur Lemarié de Quimper.  »

 

En 1794-95, dans son Voyage finistérien, Jacques Cambry identifie également un moulin à papier sur la commune de Kerfeunteun en amont du moulin du Duc : « On trouve une papeterie dans Kerfuntun, sur le Steyr ».
Il est probable que Broumiche qui admirait l’esprit « judicieux » et « éclairé » de Cambry s'en soit légèrement inspiré. En tous cas, en 1831, la papeterie créée et fondée en 1822 par Nicolas Le Marié est décrite par Brousmiche comme la plus performante de la région.
Fiches bibliographiques pour en savoir plus : « BROUSMICHE Jean-François - Voyage dans le Finistère en 1829-1831 »,
« CAMBRY Jacques - Voyage dans le Finistère en 1794-95 »

6 Solidarités îliennes et celtitudes

Billet du 17.06.2017 - En 1852, sur une île perdue au large du Finistère, une épidémie abat tout le troupeau de moutons, et les pêcheurs peinent à rapporter de quoi nourrir leurs familles. Moïra, accusée de sorcellerie, s'inspire des idées des îliens en provoquant un naufrage pour piller l'épave ...

Ce livre est un très bel ouvrage composé par deux sœurs passionnées de cinéma, rassemblant une sélection de 102 films tournés en Bretagne et représentatifs des multiples facettes de la région. Parmi ceux-ci, les 4 pages (p. 74-77 du chapitre "Les îles, un monde à part") consacrées au film « Les Naufrageurs » réalisé en 1958 par Charles Brabant et produit par Gwenn-Aël Bolloré : « Lorsque, confrontés à l'imminence d'une famille, les îliens cherchent une solution, c'est tous ensemble qu'ils décident de commettre un crime en provoquant un naufrage ».

Outre sa femme, Renée Casima, dans le rôle de la jeune sorcière Moïra, Charles Vanel figure au casting du film. Aujourd'hui, le film fait partie du catalogue de Tamasa-Distribution qui dispose des droits pour le distribuer dans les salles de cinéma. Mais le film n'a pas encore été édité en vidéo pour une diffusion VOD ou DVD.

Interrogé par André Espern, Gwen-Aël Bolloré présente son film ainsi : « Les Naufrageurs, c'est une île qui s'appelle Blaz-Mor [1] , une île qui ressemble étrangement à Ouessant, à Sein, c'est plus haut que les Glénan, une île. Et comme ils n'ont rien à croûter, ils font les naufrages. »

Un roman, inspiré par le scénario du film, a également été écrit par Gwen-Aël Bolloré et publié aux Editions de la Table Ronde : « Moïra la Naufrageuse ». Mais le sujet du livre est développé de façon très différente du script du film de Charles Brabant. Notamment pour le lieu (village Blaz-mor [*] et non l'île imaginaire), pour les personnages, uniquement 3 dans le livre (Yannick, Louise et Moïra), pour la noirceur de Moïra la sorcière dans le roman, et plus ambigüe dans le film, et enfin pour la morale de solidarité ilienne dans le film alors que le livre est bien plus inspirée de légendes celtiques.

Deux mois avant la sortie officielle du film du 28 janvier 1959, une projection historique fut organisée dans la ville de Quimper, sans doute dans la grande salle de l'Odet-Palace (ou alors au Bretagne qui s'appelait le Gradlon avant 1965), avec un grand vin d'honneur pour 27 personnalités invitées nominativement.

On trouvera dans l'article référencé le facsimile de l'invitation avec l'identification des 27 noms qui sont soit des proches de la

 


famille du producteur Gwenaël Bolloré, soit les personnes impliquées dans la réalisation du film, soit des personnes influentes du monde de la presse (Paris-Match, Journal du dimanche, Bretagne à Paris) et du cinéma.

Le photographe Etienne Le Grand (né en 1911-12 d'un père photographe d'origine gabéricoise) présent pendant le tournage du film à Kerity, et 22 de ses négatifs sont conservés au Musée de Bretagne de Rennes, présentant les acteurs et les prises de vue lors du naufrage du bateau à Kerity-Penmarc'h : Site Internet du Musée de Bretagne.

Les scènes photographiées sont celles prises sur le site de Kerity-Penmarc'h avec les acteurs principaux (Charles Vanel, Renée Cosima ...), et le bâteau qui sera volontairement naufragé sur les rochers. Les deux dernières photos de la collection sont prises à la nuit tombée.

Dans le film-interview d'André Espern, le producteur et scénariste Gwenn-Aël décrit son rôle dans le tournage du naufrage : « Dans le scénario le bateau qui ne voyait plus les feux, devait s'écraser du côté de Penmarc'h. Quand on a été pour tourner, personne ne voulait prendre la barre, parce que le type était seul. Tout le monde s'est tourné vers moi, car c'est moi qui avais écrit le scénario. Je me suis déguisé en marin hollandais, avec des bottes et une casquette, et puis j'ai été droit sur les cailloux, il y avait un peu de mer. C'est très impressionnant, puisqu'avec une barre franche, résister à la tentation de tourner la barre pour éviter les cailloux, c'est dur pour un marin. »

En savoir plus : « BLANCHARD Nolwenn et Maria - La Bretagne au cinéma », « 1958 - Première mondiale du film Les Naufrageurs à Quimpe », « Etienne Le Grand, clichés du tournage du film "Les Naufrageurs" de Gwenn-Aël Bolloré », « ESPERN André - Gwenn-Aël Bolloré, l'homme crabe »


Note : [*] Blaz signifiant à la fois « goût » ou « saveur », mais aussi « odeur » - dans un sens péjoratif (mauvaise odeur), et Mor signifiant « mer », la traduction du nom de l'île peut ainsi être double et présenter la même ambiguïté que ses habitants : « le goût de la mer » où « l'odeur (mauvaise) de la mer ». Cette dualité, voire cette opposition, est très présente dans le film. Source : Wikipedia.

7 Flambées épidémiques scolaires

Billet du 10.06.2017 - Les déclarations de maladies épidémiques en 1908, 1917 et 1921 par un instituteur d'école et un médecin à l'attention du préfet et de l'inspection académique, avec les effets déjà constatés sur place et les différentes recommandations d'éradication.

Les deux premières lettres proviennent de l'instituteur de l'école publique du bourg, M. Tanguy, qui signale à son administration en 1908 des cas de grippes et de rougeole, et en 1917 il confirme l'existence de cas graves de dysenterie. La troisième lettre est une prise de position argumentée et motivée du médecin quimpérois Charles Colin qui dresse un tableau de l'épidémie de teigne en 1921 dans les écoles gabéricoises.

En 1908 la grippe et la rougeole touchent 30 élèves de l'école des garçons du bourg, et certainement aussi de nombreux autres dans les autres écoles du bourg et de Lestonan. La consigne pour la rougeole est de respecter « les prescriptions visant les maladies épidémiques en évinçant les élèves malades ».

En septembre 1917 l'ensemble des habitants de la commune est affecté par une épidémie: « Des cas de dysenterie graves se sont en effet produits à Ergué-Gabéric. La maladie s'est déclarée il y a près d'un mois. Il y a actuellement une cinquantaine de malades dans toute l'étendue de la commune. Sept décès sont déjà survenus dont deux au bourg. »

Cette endémie mortelle est probablement la conséquence de conditions sanitaires insuffisantes, et une contamination de l'eau potable des puits ou des sources. L'école des garçons au bourg ne compte qu'une victime, mais par contre l'école des filles à l'est du bourg, dans un « quartier qui laisse beaucoup à désirer au point de vue de l'hygiène », est bien plus touché et l'institutrice adjointe y est contaminée. Deux médecins militaires venus de Lorient doivent venir sur place, et après diagnostic ils demandent le « licenciement » de l'école des filles, c'est-à-dire sa fermeture provisoire.

En 1921, le docteur Colin rédige un rapport au préfet dans lequel il rend compte de ses constats où il s'est rendu suite à une alerte épidémique de teigne : « À l'école libre des filles du bourg, j'ai trouvé un cas de teigne, chez la jeune SALAÜN Marguerite. À l’École publique des garçons de Lestonan, autre cas chez le jeune MOIGNE (Michel). »

Au-delà des recommandations sanitaires usuelles de propreté corporelle, Charles Colin défend l'idée des « patères numérotées » dans les écoles : « La teigne se propage souvent dans les écoles par le changement de coiffures, soit par jeu, soit parce que les coiffures sont jetées en désordre les unes sur les autres et que dans le brouhaha de la sortie de classe les élèves les interchangent. »

  Cours d'hygiène infantile en Picardie en 1917 :

Il conclut par « J'espère que si ces prescriptions sont bien et intelligemment appliquées, nous ne tarderons pas à voir enrayée l'épidémie menaçante ». Malheureusement cela ne sera pas suffisant, car en 1927, à l'école des filles du bourg, on constatera une réapparition de la teigne.

En savoir plus : « 1908-1921 - Epidémies de grippe, rougeole, dysenterie et teigne dans les écoles »




Addendum au sujet scolaire de la semaine dernière :

Nous avons complété la bio de Judicaël Gloaguen, instituteur de Lestonan de 1926 à 1929, puis au Bourg.

Et notamment sur ses idées anti-militaristes qui donnèrent lieu à son inscription au Carnet B du Ministère de l'Intérieur, car « pouvant troubler l'ordre public en s'opposant à la mobilisation nationale ».

Est-ce sa blessure au combat en septembre 1914 dans la Somme qui en fit un pacifiste ?

En savoir plus : « 1929 - Carnet B et enquête sur un instituteur aux idées anti-militaristes », « Judicaël Gloaguen et épouse, directeur et institutrice de 1926 à 193x »

8 Hygiène et propreté à Lestonan

Billet du 03.06.2017 - « J'ajoute qu'au cours de mon entretien avec M. le Maire j'ai demandé à celui-ci s'il y avait lieu de se plaindre de M. Gloaguen en tant qu'instituteur. Il m'a répondu négativement ... Chaque année il remporte de beaux succès au certificat d'études et aux Bourses. »

Tel qu'on peut le lire dans ce dossier de 1929 conservé aux Archives Départementales (2 O 409), le préfet Charles Vatrin, pour son dernier poste dans le Finistère avant sa retraite, est sollicité pour raisonner les protagonistes d'un conflit autour d'une pompe défaillante et qu'il faudrait réparer :

Image:Right.gif La municipalité et le maire sont agacés contre les requêtes de l'instituteur, « vu les exigences continuelles de M. Gloaguen et les ennuis occasionnés par lui depuis son arrivée dans la commune », lui demandent de « réparer à ses frais les dégâts occasionnés à cette pompe », et suggèrent son transfert dans une autre commune.

Image:Right.gif L'instituteur, « un maître consciencieux, travailleur, qui conduit son école avec allant et qui prend à cœur l'intérêt de ses élèves », voudrait améliorer les conditions d'hygiène de son école.

Image:Right.gif L'inspecteur académique prend fait et cause contre ce qu'il ressent comme une injustice : « cette délibération du Conseil municipal est un acte d'ingratitude qui très sincèrement me fait de la peine ».

Image:Right.gif Le président de l'association mutualiste « Solidarité du Finistère » demande l'annulation de la délibération municipale formulant des « appréciations injustifiées ».

En fait ces échanges sur le conflit autour de la pompe à eau, apporte des informations intéressantes sur les conditions d'hygiène et d'organisation à l'école de Lestonan en cette première moitié de 20e siècle :

Image:Right.gif Le poêle, assurant le chauffage de chaque classe, fonctionne au charbon. En 1928 M. Gloaguen obtient de la mairie un nouveau poêle, mais par contre le 10 février il essuie un refus de réapprovisionnement de charbon, car les conseillers ont estimé que 200 kg par an et par classe étaient suffisants, aussi bien à Lestonan que pour les classes de Mme Borrossi au bourg.

Image:Right.gif La propreté de l'école passe par le renouvellement de peinture et la « désinfection » des classes et du logement de l'instituteur. Le conseil municipal parle de « luxe », lésine sur le nombre de couches de peinture et se plaint des dépenses engagées.

Image:Right.gif Une pompe permet d'amener de l'eau aux robinets affectés à la toilette des enfants : ce n'est pas une simple pompe à main car la dernière panne est due à « à un mauvais état de la soupape du piston ». Elle est sensible au froid car l'instituteur doit faire « un grand feu » pour la dégeler, ce qui fait fondre le « le tuyau de plomb ».

Image:Right.gif Le rapport de l'inspecteur stipule que « l'eau est nécessaire à la toilette des enfants, à Lestonan peut être plus qu'ailleurs car les épidémies y sont fréquentes ». Ce point, souligné au crayon bleu, est sans à imputer à un quartier où la pauvreté est plus marquée que dans le reste de la commune.

  Image:Right.gif La volonté de bien faire son métier d'instituteur sans se mêler « de questions politiques » est notée également par l'Inspecteur qui ajoute qu'il « ignore d'où en est venue l'initiative », ne croyant pas en celle du maire républicain de gauche, Jean-Louis Le Roux, lequel est normalement un défenseur de l'école laïque.

Il faut dire que ces années 1927-29 sont troublées par un autre dossier, celui de la création de l'école confessionnelle de Lestonan par René Bolloré. Les Gloaguen sont bien sûrs opposés à cette nouvelle école, ainsi que Mme Lazou, directrice de l'école des filles de Lestonan.

Au delà de considérations politiques, les critiques à l'égard des Gloaguen sont sans doute issues de simples considérations personnelles, avec peut-être la mésentente avec son instituteur adjoint Jean Lazou.

In fine, M. Gloaguen ne sera pas transféré ailleurs malgré le désir de la municipalité. Le maire républicain Jean-Louis Le Roux ne sera pas réélu, étant battu par des opposants conservateurs. En 1931 les Gloaguen seront nommés à l'école des garçons du Bourg en remplacement des Le Coant et le couple Lazou prendra la direction de l'école communale de Lestonan.

En savoir plus: « 1929 - Conflit entre l'instituteur de Lestonan et la municipalité au sujet d'une pompe »

9 Caverne d'Ali-Baba à Beg-a-grip

Billet du 26.05.2017 - Les chemins balisés du Stangala ignorent complètement cet endroit bucolique que seuls quelques anciens se remémorent avec beaucoup d'émotion, tellement ils y ont crapahuté quand ils étaient enfants ; le lieu est pourtant accessible et vaut le détour.

La grotte des curés, couramment appelée « Toul ar veleien » depuis le 19e siècle de Jean-Marie Déguignet, servait d'abri pour les curés réfractaires de la Révolution et le « Grip » est l'évocation de l'animal fabuleux du lieu éponyme de Griffonès. Nous vous proposons d'y aller avec le concours des explications et d'un reportage photos inédit.

Le point de départ est le bout du chemin balisé de Griffonez depuis le parking d'Ergué-Gabéric. Ce chemin aboutit à un double promontoire dominant la vallée de l'Odet qui coule en contrebas vers la ville de Quimper. Le premier point de vue était autrefois le début d'un chemin qui descendait de façon abrupte en direction de l'Odet et du moulin de Meil-Poul. Le deuxième plateau est plus large et le point de vue vaut une visite, mais il cache un site encore plus impressionnant.

À vous de le découvrir maintenant ; il faut continuer sans l'aide d'un chemin tracé au cordeau, en restant sur la crête, direction nord-ouest. Au début, le côté praticable est plutôt coté Briec, jusqu'à un endroit où la crête rocheuse est coupée par un grand passage (cf photos de l'étape 1). On se croirait au col de Roncevaux, mais sans le risque d'être attaqué.

Pour continuer la balade, longez toujours la crête, cette fois côté Quimper-Kerfeunteun et vous pourrez admirer les parois rocheuses, les cavités et la grotte dite « Toul ar velien », le trou où les curés anti-constitutionnels se réfugiaient à la Révolution. L'endroit est vraiment enchanteresse (photos étape 2). L'une des cavités est assez profonde pour qu'on s'y glisse.

Jean-Marie Déguignet, dans ses mémoires datées de la deuxième moitié du 19e siècle, a évoqué ce lieu : « Dans cette grotte qu'on appelle toujours Toul ar Veleien (le Trou des Prêtres), on peut se loger facilement et largement et on y serait à  l'abri  des  visites

  importunes car il faut avoir de la hardiesse, de l'adresse et de l'agilité pour arriver jusque-là. Il faut même connaître le secret d'Ali Baba. »

Mais la balade n'est pas terminée, il faut toujours progresser vers le bout de la crête, et vous arrivez bientôt sur un petit promontoire. Contrairement aux premiers plateaux entourés d'arbres, celui-ci permet de voir très loin à 360 degrés, à gauche les versants opposés de Kerfeunteun et à droite sur les prairies de Briec et le pylône de Tréouzon (étape n° 3).

Et enfin les derniers mètres, tout au bout de la crête, une surprise vous attend, un beau rocher qu'on croirait qu'il a été sculpté pour représenter un animal légendaire : cf photos de l'étape n° 4. Certes le rocher ressemble plus à un gros chien qu'à un lion ailé, mais le toponyme évoque bien la légende du griffon :

Image:Right.gif « beg » : "pointe ou embouchure", issu du moyen breton bec est comme son homologue français bec, mais au sens plus restreint, un emprunt au gaulois becos (Source Deshayes).

Image:Right.gif « grip » : ancien français grip, du latin gryphum emprunté au grec, évoquant le griffon, animal fabuleux mi-aigle, mi-lion (Jean Tosti). Grippy, griffon animal fabuleux, génie soit mauvais, soit bon (dictionnaire celtique de Jean-Baptiste Bullet).

Selon la légende, l'animal logeait dans une grotte près de Griffonès (celle des curés réfractaires ?) et terrorisait le voisinage. Chaque mois on devait lui apporter une jeune fille pour sa nourriture. Le griffon fut finalement tué par un seigneur voisin qui ne supportait pas de voir sa promise livrée à l'affreuse créature.

En savoir plus: « Découverte de la grotte des curés dite "Toul ar veleien" à la pointe de Beg-a-grip »

10 Des enquêtes concordataires

Billet du 20.05.2017 - “Enquêtes de 1804 à 1814 sur l'état de la paroisse, du personnel ecclésiastique, de l'église et des chapelles”, Collections numérisées. Documents conservés aux Archives Diocésaines de Quimper et Léon, mis en ligne sur le site Internet diocese-quimper.fr

Il s'agit de cinq enquêtes émises par les services diocésains auxquels doivent répondre les curés desservants d'Ergué-Gabéric, sur les revenus et les charges de leurs églises et chapelles.

Les deux curés sont respectivement François Pennec jusqu'en 1809 et au-delà son remplaçant Jean-Guillaume Le Bescou. Le premier est directeur du petit séminaire de Plouguernevel au moment de la Révolution et s'oppose à la Constitution civile du clergé. Il doit émigrer en pays espagnol et à son retour, en raison de « ses talents et sa moralité », est nommé recteur d'Ergué-Gabéric en 1802.

Les positions réfractaires aux autorités révolutionnaires exprimées par Le Bescou lui génèrent plus de soucis. Il est arrêté et détenu plusieurs fois au château de Brest. En 1797, alors qu'il est en transit à la maison d'arrêt de Quimper avant d'être déporté à Rochefort et Madagascar, il s'échappe en pleine nuit avec 5 autres prêtres. Il est réintégré après le Concordat, en 1804, comme desservant de St-Evarzec, puis Ergué-Gabéric en 1810.

La taille de la paroisse, « environ 2000 âmes, environ 1500 communiants », est un peu surévaluée car les recensements donnent plutôt 1800 habitants. On peut aussi s'interroger sur la différence de 500 entre le nombre d'âmes et de croyants : sans doute l'addition des jeunes enfants pas encore en âge de communier et les non-catholiques minoritaires.

D'après Le Bescou, la situation financière de la paroisse n'est pas florissante : « Les chapelles de St-Guénolé et St-André sont onéreuses à la fabrique », « Le produit des offrandes est insuffisant pour remplir les charges ».

Le cas particulier du presbytère est intéressant : « Ici il y a un presbitère, il n'appartient pas à la commune, il y a cependant un acte d'obligation de vendre et d'acheter signé de part et d'autre ». En fait le presbytère avait été vendu en 1796, comme biens nationaux à l'instar des chapelles et propriétés nobles, et en 1804 le propriétaire Salomon Bréhier confirme qu'il continue à affermer cette bâtisse à la commune, et qu'il s'engage prochainement à la revendre.

Au début du 19e siècle, le statut sur l'église et les 6 chapelles de la paroisse est le suivant :

Image:Right.gif L'église paroissiale, dédiée à St-Guinal, « pour ainsi dire à une extrémité de la commune » nécessite quelques réparations en 1814.

Image:Right.gif Dès 1804 trois chapelles) sont en ruine : St-Gildas (ou Loqueltas), St-Joachim (à côté de Lezergué) et Ste-Apolline (à côté de Kerdudal-Sulvintin). Les deux  dernières  ont  été  ven-

  dues à la Révolution à des propriétaires privés, et pour ce qui concerne St-Gildas le curé-desservant a un doute.

Image:Right.gif Trois chapelles sont opérationnelles : St-André, St-Guénolé et Kerdévot. Les deux premières sont réputées avoir été vendues à la commune : « Les 3 autres, m'a-t-on dit, avoient été vendues. La commune elle-même avoit acheté deux,  » (en fait sur les actes de vente aux enchères de St-André et St-Guénolé figurent deux gabéricois qui sont sans doute des prête-noms en délégation de la collectivité).

Image:Right.gif La chapelle de Kerdévot est aussi achetée, mais un doute est entretenu sur la nature du mode d'acquisition  : « la 3e avoit été achetée par un particulier pour la commune, de ses propres deniers, ou comme disent plusieurs, des deniers de la commune. ».

François Le Pennec demande en 1804 dans sa réponse aux services épiscopaux d'organiser la restitution à la communauté : « Il y a dans la commune une chapelle pour l'ouverture de laquelle soupire toute la commune et même tout le canton, et celui qui l'acheta est content de la rendre gratis ».

Cette restitution de Kerdévot sera effective en 1807 par « acte déposé au secrétariat de l'évêché ». Et en 1809, dans un document authentifié, le maire rétablira la vérité sur l'origine des fonds qui ont servi à l'achat de 1794 : tous les paroissiens ont versé leur dons lors d'une quête communale et paroissiale pour garder leur lieu de culte.

En savoir plus: « 1804-1814 - Enquêtes diocésaines sur l'état de la paroisse d'Ergué-Gabéric »

11 Une fabrique de pâte hors sol

Billet du 13.05.2017 - Un échange de lettres à entête entre le papetier d'Odet René Bolloré et le préfet du Finistère pour une demande d'ouverture d'une fabrique de pâte à papier à proximité de la ville de Quimper. Dossier conservé aux Archives Départementales du Finistère.

Dans l'objectif d'étendre les activités des papeteries d'Odet et de Cascadec, l'entrepreneur René Bolloré a le projet en 1923 de créer une fabrique de pâte à papier en aval de l'usine d'Ergué-Gabéric, le long de la rivière de l'Odet, à l'entrée de la ville de Quimper. Il en fait la demande à J. Deismars, préfet du Finistère de 1921 à 1925. Cette initiative, qui ne sera pas concrétisée à notre connaissance, lève un certain nombre de remarques et de questionnements :

Image:Right.gif Le lieu tout d'abord est « "La Forêt" sur la rive droite de la rivière l'Odet à proximité de la ville de Quimper » : il s'agit donc de la rive de l'Odet, aujourd'hui dans le quartier dit de l’hippodrome, et jusqu'au début du 20e siècle en bordure sud du domaine du très beau manoir en ruines de la Forêt. Le plan joint indique les parcelles concernées, avec une localisation probable de l'usine projetée sur les bâtiments de la parcelle 851. René Bolloré en était-il devenu propriétaire, ou allait-il les louer ?

Image:Right.gif Le mode de fabrication de la pâte reste très traditionnel, « au moyen de matières usagées (drilles, vieux chiffons, etc ...) par lessivage alcalin », c'est-à-dire par le malaxage de ballots de chiffons, et non de bois, de paille ou de vieux papier. Le lessivage alcalin indique un traitement à base de soude.

Image:Right.gif Les réserves administratives du préfet et de l'inspection du travail ne sont pas excessives : le classement en catégorie 3 en terme de risques d'insalubrité d'une part, et d'autre part les recommandations particulières en termes de « cabinets d'aisances », de fourniture d'eau et de vestiaires au personnel.

Image:Right.gif En demandant l'avis des autorités locales, le préfet ne s'adresse qu'au maire d'Ergué-Gabéric, où est le siège et l'usine principale de fabrication du papier, et non à celui de Kerfeunteun où est projetée la production de la pâte. Par  ailleurs  l'inspecteur

 
[ "Croquis du manoir de La Forêt en 1843 ; longtemps en ruines, complètement détruit vers 1942, domaine s'étendant jusqu'aux rives de l'Odet ]

du travail et des établissements classés, basé à Lorient, donne également un avis favorable. Il est étrange que l'enquête n'ait pas inclus des considérations de risques de pollution de la rivière en amont de la préfecture, alors que quatre ans plus tôt les esprits s'étaient un peu échauffés sur l'efficacité des déversoirs d'Odet.

Nous ne savons pas les raisons exactes de l'abandon du projet de cette fabrique de pâte à papier à Kerfeunteun. Une des raisons est sans doute le maintien des chiffonneries d'Odet et de Cascadec, avec ses cylindres lessiveurs et raffineurs, à proximité des machines à papiers. Peut-être il y eut également d'autres complications administratives de nature à empêcher sa mise en œuvre.

Toujours est-il que les chiffons continuèrent à arriver à Odet jusqu'au années 1950 et le bâtiment de la chiffonnerie de préparation de la pâte fut un lieu emblématique aussi important que les cylindres et des machines à papier.

Marianne Saliou se rappelle : « Du temps de ma mère, les femmes amenaient leurs enfants travailler à l'usine. A la chiffonnerie, ils pouvaient ramasser les chiffons. On gagnait plus ainsi, parce qu'on était payé à la tâche. C'était dur de ce temps là. A la chiffonnerie, les femmes coupaient la corde avec des hachettes. ».

Et Marjan Mao, à la chiffonnerie d'Odet pendant 41 ans, complète : « Quand les lessiveuses étaient bien remplies, on avait du mal à les remuer avec le bâton. Elles étaient très grandes, ce n’était pas facile de remuer les chiffons. On allait dedans, les pieds, les mains, on se mettait à genoux. ».

En savoir plus: « 1923 - Projet d'une fabrique de pâte à papier Bolloré à La Forêt en Kerfeunteun »

12 Lieu noble, sauvage et féminin

Billet du 10.05.2017 - Une enquête documentaire sur un lieu noble très isolé, dominant la vallée du Stangala, sur une terre de légendes avec au départ une « griffonne », puis une mystérieuse « Alix de Griffonez », et enfin les avouantes Françoise de Kergadalen et Françoise de Grassy.

Le griffon, cet animal fabuleux au corps de lion et aux ailes d'aigle, donne son nom au lieu-dit « Griffonez ». La terminaison /ez/ pourrait être en breton une marque de féminin et désignerait donc une « griffonne ». Celle-ci logeait dans une grotte et terrorisait le voisinage. Chaque mois on devait lui apporter une jeune fille pour sa nourriture. La griffonne fut finalement tuée par un seigneur voisin qui ne supportait pas de voir sa promise livrée à l'affreuse créature.

En 1426, lors de la Réformation des fouages, c'est-à-dire de la validation des exemptions fiscales des métayers détenteur d'un domaine noble, le Manoir de Griffonez est détenu par la dame Alix de Griffonez et exploité par « Hervé Le Livec, métayer à Alix de Griffonez, noble, exempt ».

En 1451, 1626 et 1636, dans les aveux cotés ADF-A85, le manoir et le domaine incluant un moulin et plusieurs villages voisins sont respectivement présentés noblement par Riou de Lesmais, Charles du Parc , et enfin « Charles de Grassy et Françoise Kergadallen sa compagne », lesquels sont les parents de Françoise de Grassy, l'héritière de 1680.

Dans le papier terrier de 1680 l'ensemble est présenté et signé par Françoise Degrassy, « damoiselle, dame de Launez », et donne des informations sur un domaine tenu « prochement et noblement du Roy » :

Image:Right.gif Le manoir de Griffonez, terre légendaire du(de la) griffon(ne), est situé sur le promontoire de la vallée du Stangala « soubz terre froide  » au milieu de « soixante dix huict journaux remplis de rochers et vagues  ».

Image:Right.gif Le manoir tenu en domaine congéable, est habité et exploité par François de Chalony lequel paie une rente annuelle à sa propriétaire noble.

Image:Right.gif Le moulin de Griffonès connu aussi sous le nom de « Meil Poul » est exploité par Allain Le Bronnec.

 
"Moulin à eau du dit Griffonnes sur la rivière d'Odet" en 1902


Image:Right.gif Les villages proches déclarés également en domaine congéable dans le domaine Degrassy sont Kernoaz ou « Querernoaz » et Kerberon, orthographié ici « Quiverberen ».

Image:Right.gif Le village de Quélennec bihan est détenu par le meunier Allain Le Bronnec pour ce qui concerne la maisons et les terres agricoles en fief royal de Françoise Degrassy, et pour ses terres froides par l'abbé de Landévennec, ce dernier ayant les terres de Quélennec bras et la chapelle de St-Guénolé voisine.

Image:Right.gif L'héritage de Françoise de Grassy, dont la famille est connue comme détentrice au 17e et 18e siècle du chateau de Keranmoal en Landrévarzec, est déclaré par «  la succession de deffunte dame Françoise de Quergadalen, vivante dame de La Motte sa mère décédée en l'an mil six cents soixante quatre ».

Image:Right.gif Il existe deux Françoise de Grassy, la première née avant 1643, l'autre née en 1663 et filleule de la première. Cette dernière ayant seulement 17 ans en 1680, il est plus plausible que la demoiselle « advouante » soit son aînée car son frère Charles est sieur de La Motte.

En savoir plus: « 1426 - Exemptions gabéricoises à la Réformation des fouages », « 1475-1636 - Adveux de Griffones extraicts de l'inventaire de Kempercorentin », « 1680 - Papier terrier du lieu et manoir noble de Griffonez »

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