Le voyage touristique à Jérusalem du permissionnaire Jean-Marie Déguignet en 1856 - GrandTerrier

Le voyage touristique à Jérusalem du permissionnaire Jean-Marie Déguignet en 1856

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<small>Histoire de ma vie. L'intégrale des Mémoires d'un paysan bas-breton. An Here, 2001.</small> <small>Histoire de ma vie. L'intégrale des Mémoires d'un paysan bas-breton. An Here, 2001.</small>
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-<spoiler id="996" text="Un jour, ce brave Arménie, qui était aussi un chrétien ...">Un jour, ce brave Arménie, qui était aussi un chrétien, nous demanda si nous ne serions pas contents d'aller faire un tour à Jérusalem, il se chargerait de nous y conduire à ses frais. On peut penser si nous étions contents ! Aller à Jérusalem, quel est le chrétien orthodoxe ou hétérodoxe qui ne serait pas content d'aller voir Jérusalem ? Seulement, je dis à l'Arménien que pour nous, soldats, la chose serait difficile, car nous serions obligés d'avoir une permission qui nous serait probablement pas accordée.+<spoiler id="996" text="Un jour, ce brave Arménie, qui était aussi un chrétien ...">Un jour, ce brave Arménie, qui était aussi un chrétien, nous <ref>Déguignet effectue son voyage organisé par l'Arménien en compagnie d'un camarade affecté comme lui au dépôt d'Ahoutpacha en Crimée : « <i>J'y avais trouvé un bon camarade, beaucoup plus ancien que moi, bon enfant, toujours content mais sans instruction. C'était aussi un pauvre paysan comme moi.</i> ». </ref> demanda si nous ne serions pas contents d'aller faire un tour à Jérusalem, il se chargerait de nous y conduire à ses frais. On peut penser si nous étions contents ! Aller à Jérusalem, quel est le chrétien orthodoxe ou hétérodoxe qui ne serait pas content d'aller voir Jérusalem ? Seulement, je dis à l'Arménien que pour nous, soldats, la chose serait difficile, car nous serions obligés d'avoir une permission qui nous serait probablement pas accordée.
-« Ne vous inquiétez pas de ça, dit-il, la permission vous l'aurez. ...+« Ne vous inquiétez pas de ça, dit-il, la permission vous l'aurez. Je connais votre officier comme je connais tous les officiers français et turcs qui sont ici, ce sont tous mes amis, et même quelque peu mes obligés. La paix est signée, les troupes de Crimée vont commencer à évacuer le pais. Mais ils en auront pour longtemps. Or, je sais par vos officiers supérieurs d'ici que vous autres les petits dépôts, les infirmiers, les ouvriers d'administration et des intendances, resterez ici jusqu'à ce que les dernières troupes de Sébastopol soient passées. C'est-à-dire au moins deux mois encore, sinon davantage, par conséquent vous avez le temps de faire le voyage de Jérusalem ; une permission de dix ou douze jours vous suffira ! Ayant à peu près réglé mes affaires, je partirai avec vous. Nous allons justement profiter du passage des vapeurs russes qui vont passer dans quelques jours, conduisant les pèlerins là-bas. Seulement, il faudra aller en civil, car en soldats français, les Russes pourraient vous regarder d'un mauvais œil, vous qui venez de les battre, et qui les avez empêchés de faire ce pèlerinage depuis deux ans. Je me charge du reste de vous procurer des habillements convenables. Eh bien, acceptez-vous ? » dit-il en terminant. On peut croire que nous acceptâmes avec empressement et joie. Comme avait dit l'Arménien, nous n'eûmes aucune difficulté à obtenir la permission. Quatre jours après, nous nous embarquâmes tous les trois à bord d'un vapeur russe venant d'Odessa, allant transporter un chargement de pèlerins à la Terre sainte.
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Le voyage à Jérusalem (Avril 1856) Le voyage à Jérusalem (Avril 1856)

Version du 18 mai ~ mae 2018 à 06:38

On a souvent écrit que Jean-Marie Déguignet avait perdu la foi en faisant un pèlerinage à Jérusalem en 1856. Mais ce n'est pas vraiment le cas, car son athéisme avait été nourri par ses lectures et observations préalables.

On trouvera ici les deux versions écrites de ses récits, ceux publiées en 1905 dans la Revue de Paris et l'édition intégrale de la 2e série de cahiers en 2001, qu'on comparera avec les journaux de deux autres écrivains : les notes de Gustave Flaubert en 1850 et le poème "Clarel: A Poem and Pilgrimage in the Holy Land" d'Hermann Melville en 1856.

Autres lectures : « DÉGUIGNET Jean-Marie - Jésus, fils aîné de Marie-Joachim » ¤ « Cahier de notes sur la "Vie de Jésus" d'Ernest Renan » ¤ « DÉGUIGNET Jean-Marie - Histoire de ma vie, l'Intégrale » ¤ 

St-Sépulcre de Jérusalem, A. Salzmann 1856
St-Sépulcre de Jérusalem, A. Salzmann 1856

1 Présentation

 

2 Citations

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Page 202-213 de l'Intégrale

Histoire de ma vie. L'intégrale des Mémoires d'un paysan bas-breton. An Here, 2001.

§ Un jour, ce brave Arménie, qui était aussi un chrétien ...

Le voyage à Jérusalem (Avril 1856)

Ce pèlerinage de Jérusalem est obligatoire pour tous les Russes orthodoxes, comme celui de la Mecque pour les vrais croyants. Nous étions habillés à l'européenne, et nous n'avions un peu l'air de deux gentlemen faisant notre tour du monde.

Le navire était bondé de pèlerins de toutes les parties de la Russie, gens qui n'avaient pas l'air bien riche. Ils étaient mal habillés, malpropres avec des cheveux longs et crasseux. Si les hommes eussent porté des chapeaux à larges bords, je les aurais pris pour des Bretons des montagnes d'Arez ! Nous débarquâmes à Beyrouth, et un peu au-delà, à Jaffa, nous trouvâmes une voiture, ou plutôt une charrette qui nous attendait. Là du reste, les pèlerins pouvaient choisir les moyens de transport à leur convenance. Il y avait des ânes, des mulets, des chevaux et des espèces de carrioles pouvant s'atteler des deux bouts. La nôtre avait été commandée et préparée d'avance. Celle-là n'était pas à louer. Aussi, nous n'y montâmes que nous trois. L'Arménien voulait aller en avant, car la route serait bien encombrée, et on serait aveuglés par la poussière.

À Jaffa, on montre encore aux fidèles croyants ou crédules, la maison de Simon le corroyeur [2], dans laquelle le fameux Pierre eut cette vision d'une immense nappe descendant du ciel remplie de toutes sortes de gibiers rôtis. Nous pouvions aller d'une seule traite de Jaffa à Jérusalem, mais notre bon guide voulut nous arrêter au Rameleh [3] où s'arrêtent du reste presque tous les pèlerins pour passer la nuit, car, en ce temps-là, la route de Jérusalem n'était pas encore trop sûre. On voyait roder par là des bandes de vilains types avec des pistolets et des poignards dans leurs ceintures de cuir, et qui ressemblaient fort au fils aîné de Marie, Joachim et ses compagnons bandits. Il y avait bien des gendarmes turcs, zapotiés [4], établis par poste de distance en distance pour garder les routes, mais ces curieux gendarmes faisaient autant peur aux voyageurs que les bandits qu'ils étaient chargés de surveiller.

§ Le Ramaleh n'est qu'un pauvre village ...


Chapitre XI de la Revue de Paris 1904-05

Transcription d'Ewan ar Born sur Wikisource à partir de la version Gallica.

§ Jérusalem, cette cité si célèbre où se sont accomplis les mystères ...

JÉRUSALEM

Moins d’une demi-heure après le débarquement à Jaffa, nous trottions sur la route de Jérusalem, cahotés dans cette voiture d’un genre tout particulier. De route, je ne sais pas s’il y en avait : je n’en voyais guère ; nous étions du reste aveuglés par la poussière et les rayons du soleil. J’entrevoyais cependant des champs et des jardins bien cultivés, des arbres dont le nom nous était inconnu ; l’Arménien nous donna le nom des espèces qui étaient les plus nombreuses : c’étaient des oliviers et des cactus géants. Les oliviers me rappelaient certains joncs verts de mon pays.

Nous pouvions aller à Jérusalem d’une seule traite ; mais notre Arménien préféra passer la nuit dans une espèce de bourgade appelée Ramleh, chez un ami qu’il connaissait pour un excellent hospitalier. Il y avait là un grand couvent de moines franciscains, qui logeaient les pèlerins et même les tou­ristes, moyennant finances, bien entendu. J’aurais bien voulu aller voir ce couvent et ces moines, parmi lesquels il y avait, disait notre hôte, beaucoup de Français ; mais nous étions trop fatigués, dix fois plus que si nous avions fait la route à pied et sac au dos. Nous fûmes du reste fort bien reçus chez l’ami de notre ami, qui était un musulman : on sait que la pre­mière vertu des enfants du Prophète, c’est l’hospitalité.

Nous couchâmes par terre sur des nattes, avec des couver­tures blanches pour nous envelopper. Le lendemain, nous nous mîmes en route de très bonne heure, avant tous les autres voyageurs, pour avoir moins de poussière. À quelque distance de Ramleh, le pays avait complètement changé, on ne voyait plus de champs cultivés, plus de jardins, plus d’arbres, ni même aucune espèce de verdure ; de tous côtés, des montagnes brûlées. Le ciel avait aussi à peu près la même couleur que la terre. Cela ressemblait bien au pays du pro­phète : l’abomination de la désolation.

§ Nous étions dans la Judée, le pays de Juda ...

 

Chapitre "Palestine" des Notes de Flaubert

Transcription sur Wikisource à partir de l'édition compléte L. Conard de 1910.

PALESTINE.

§ De Beyrouth à Jérusalem ...

On monte encore pendant une grande heure. Arrivée sur le plateau ; tous les terrains des montagnes ont une couleur de poudre de bois, rouge foncé, ou mieux de mortier. À chaque instant je m’attends à voir Jérusalem et je ne la vois pas. — La route (on distingue la trace d’un ancien chemin) est exécrable, il n’y a pas moyen de trotter. — Enclos de pierres sèches dans ce terrain de pierres. Enfin, au coin d’un mur, cour dans laquelle sont des oliviers ; j’aperçois un santon, c’est tout. — Je vais encore quelque temps ; des Arabes que je rencontre me font signe de me dépêcher et me crient : el Kods, el Kods ! (prononcé il m’a semblé codesse) : 27 femmes vêtues de blouses bleues, qui m’ont l’air de revenir du bazar ; au bout de trois minutes, Jérusalem.

Comme c’est propre ! les murs sont tous conservés. — Je pense à Jésus-Christ entrant et sortant pour monter au bois des Oliviers ; je l’y vois par la porte qui est devant moi, les montagnes d’Ebron derrière la ville, à ma droite, dans une transparence vaporeuse ; tout le reste est sec, dur, gris : a lumière me semble celle d’un jour d’hiver, tant elle est crue et blanche. C’est pourtant très chaud de ton, je ne sais comment cela se fait. — Max me rejoint avec le bagage, il fumait une cigarette. Piscine de Sainte-Hélène, grand carré à notre droite.

Nous touchons presque aux murs ; la voilà donc ! nous disons-nous en dedans de nous-mêmes. — M. Stephano, avec son fusil sur l’épaule, nous propose son hôtel. — Nous entrons par la porte de Jaffa et je lâche dessous un pet en franchissant le seuil, très involontairement ; j’ai même au fond été fâché de ce voltairianisme de mon anus. Nous longeons les murs du couvent grec ; ces petites rues en pente sont propres et désertes. — Hôtel. — Visite à Botta. — Couchés de bonne heure.

§ Vendredi 9, promenade dans la ville ...


"Pilgrimage in the Holy Land" de Melville

3 Annotations

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  1. Déguignet effectue son voyage organisé par l'Arménien en compagnie d'un camarade affecté comme lui au dépôt d'Ahoutpacha en Crimée : « J'y avais trouvé un bon camarade, beaucoup plus ancien que moi, bon enfant, toujours content mais sans instruction. C'était aussi un pauvre paysan comme moi. ». [Ref.↑]
  2. Bible, Acte des Apôtres, IX. 43, X. 1 et X. 76. [Ref.↑]
  3. Ville de Ramlah. [Ref.↑]
  4. Zaptié : corps de troupe de l'empire turc. [Ref.↑]


Thème de l'article : Ecrits de Jean-Marie Déguignet

Date de création : Mai 2018    Dernière modification : 18.05.2018    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]