L'essor de Lestonan (1900-1950) raconté par Jean Guéguen - GrandTerrier

L'essor de Lestonan (1900-1950) raconté par Jean Guéguen

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Catégorie : Mémoires  
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Le présent article est un article rédigée par Jean Guéguen pour la préparation du Cahier d'Arkae consacré à l'évolution du quartier de Lestonan au début du 20e siècle.

Sommaire

Autres lectures : « Mémoires des anciens de Lestonan de 1910 à 1950 (Cahier d'Arkae n° 7) » ¤ « Chronique de Ménez-Groaz par Laurent Huitric en 1998 » ¤ « L'année 1939-40 de Magdeleine Gloaguen à l'école communale de Lestonan » ¤ « Lestonan en 1838, futur chef-lieu » ¤ « Lestonan en 1838, futur chef-lieu » ¤ 


[modifier] 1 Du temps de Menez-Groas

Le recencement de 1901 dénombrait pour l'ensemble "Lestonan et Ménez-Groas" soixante dix sept habitants pour dix huit maisons. Il s'agissait de petites fermes qui possédaient trois ou quatre vaches, parfois un cheval.

On y trouvait ainsi la ferme de René Quéré, à l'actuelle "impasse de Menez-Groas", celle d'Henri Huitric dans l'actuelle "rue de Menez-Groas", celle de Jean-Pierre Quéré, qui était aussi entrepreneur de maçonnerie et avait une salle de bal, dans l'actuelle "rue de la Papeterie". La ferme de Kerhuel-Vian était dans ce qui s'appelle maintenant "l'impasse de l'école". Le café-tabac Joncour qui avait aussi deux ou trois vaches, et la ferme de Fanch Donnard, se trouvaient dans l'actuelle "avenue de Lestonan". Et enfin celle de Louis Barré, à Pen-a-garn-Kerho.

 

Jusqu'aux environs de 1930, le nom de Lestonan n'était pas utilisé pour désigner l'ensemble du village. Les gens connaissaient la partie nord-ouest de Lestonan sous le terme de "Min'ar Groes" (Menez Groas). C'est là qu'étaient implantés les commerces : la boulangerie, les deux boucheries, la crêperie et le café-tabac. Les bistrots y étaient nombreux - sept - et pratiquement tous faisaient de l'épicerie.

Ce n'est qu'au début des années 30 que, sous l'influence des enseignants, le nom de "Lestonan" prima sur celui de "Menez Groas". Il faut se rappeler que, dans les écoles, à cette époque, le fait de parler breton était interdit et puni.


[modifier] 2 Le véritable essor de Lestonan

Le véritable essor de Lestonan a commencé par la construction de la boulangerie en 1912 et la construction de Ker Anna en 1917-1918. Mais c'est surtout après le centenaire de la Papeterie en 1922 que Lestonan s'est développé.

Déjà en 1920 la famille Rannou avait bâti à l'actuel 13 de l'avenue de Lestonan une maison assez importante qui, avec ses dépendances, pouvait loger des locataires. Quelques années plus tard, en 1926, ce fut la maison de Michel Henry, au 9 actuel de l'avenue de Lestonan, et l'ouverture d'une crêperie au n° 3 en 1926.

Entre temps, M. Bolloré avait fait achever "Le Champ" en vue de le rétrocéder à ses ouvriers pour y construire leurs maisons, qui, paraît-il, poussèrent comme des champignons. C'était en 1923. Après "Le Champ", ce fut la "rue Ar Ster" qui se bâtit en 1929.

A la même époque, entre 1928 et 1931, furent construites les deux écoles libres : l'école des filles (Sainte-Marie) fut inaugurée le 28 septembre 1928 par Mgr Duparc, et celle des Garçons (Saint-Joseph) le 24 septembre 1929. L'inauguration du Patronage eut lieu en 1931.

En 1933 ce fut l'arrivée de l'électricité.

Puis pendant une dizaine d'années, jusqu'à la fin de la guerre 1939-1945, la physionomie de Lestonan ne bougea guère.

 


[modifier] 3 Lestonan et l'usine

La plupart des gens travaillant à l'usine, Lestonan vivait au rythme de la Papeterie. Il y avait ceux qui travaillaient de jour, les administratifs, la maintenance (mécaniciens, électriciens ...), l'équipe de chiffonnerie (triage et découpage des chiffons et cordes), surtout du personnel féminin. Une autre équipe féminine travaillant au façonnage du papier (découpage, bobinage, expédition) avait un horaire posté de 5h à 13h et de 13h à 21h. Ceux qui travaillaient à la fabrication, principalement des hommes (machines et autres), avaient des horaires en 3x8, et plus tard en quatre fois 8 heures.

Lestonan participait aux grandes fêtes et réjouissances organisées par et pour les Bolloré :

  • en 1927, pour les 80 ans de Mme Bolloré mère, tout le personnel fut invité, le 1er mai, à la descente de l'Odet en bateau et au repas servi à l'hôtel Kermor à Benodet.
  • le 15 septembre 1929, pour les 25 ans de patronat de M. Bolloré, celui-ci organisa un festin monstre de plus de 1.000 personnes, auquel fut convié tout le personnel.
  • en 1931, pour l'inauguration du patronage par le Vicaire Général Joncour, près de 3.000 personnes assistèrent au Festival de gymnastique de tous les patros du Sud-Finistère, organisé à cette occasion dans le cadre d'une kermesse.
  • en 1935, la mort de M. Bolloré fut ressentie douloureusement.
 
  • en 1936, à l'époque du Front Populaire, on vit débarquer à Lestonan des grèvistes de l'usine Bolloré de Cascadec. Ceux-ci, drapeau rouge en tête, le poing levé et chantant l'Internationale, défilèrent jusqu'à la Papeterie pour inciter les ouvriers d'Odet à les suivre. Cela impressionna la population des quartiers de Lestonan. Cette même année, ce furent les premiers congés payés, d'une semaine.
  • le 14 juin 1936 fut aussi organisée une grande kermesse, avec défilé de chars fleuris et personnages costumés, au profit du patronage, pour pouvoir y mettre le cinéma parlant. Jusqu'à cette époque, les films étaient seulement sous-titrés.

Une coutume qui a perduré jusqu'à la guerre de 1939 était de descendre à la Papeterie présenter ses vœux du 1er de l'an. Les enfants avaient droit aux bonbons, les dames à un petit verre de Saint-Raphael et les hommes à un petit verre de rhum ou de cognac, ainsi qu'à un cigare ou cigarillo.

Cependant à Lestonan d'autres initiatives que celles de Bolloré en matières de fêtes trouvèrent place à cette époque et on vit la création des Fêtes à Lestonan par Jean Lazou, directeur de l'école publique. Elle avait lieu chaque année et se tenait dans une ambiance bon enfant. Les anciens se souviennent encore de ces concours de sucettes pour enfants, de ces courses à l’œuf ou en sacs, et pour les grands, du jeu de casse-pôts, où plus d'un se faisait doucher ou enfariner, des courses à pied pour tous les âges, de l'épreuve des 10 km marche, où il arrivait que Jean Perrot se distingue. Parfois, cela commençait par un mini concours agricole où chacun pouvait présenter les plus beaux spécimens de ses clapiers et poulaillers.

[modifier] 4 Lestonan pendant et après guerre

Tout au début de la guerre, la Papeterie s'arrêta par manque de matières premières.

En mai 1940, on vit arriver des réfugiés du Nord fuyant l'armée allemande. Ils furent logés au Patronage, puis quelque temps plus tard, regagnèrent leur domicile, à l'exception d'une famille qui resta jusqu'à la fin des hostilités. Suite aux bombardements de plus en plus fréquents sur Brest et Lorient, on vit arriver des réfugiés de ces villes, qui avaient des attaches à Odet.

Avec les interdictions et les restrictions, la vie était devenue difficile. Aussi ce furent les démarches auprès des moulins pour obtenir un peu de farine, ainsi qu'auprès des fermes, pour avoir du beurre, des œufs ou du lait. Les déplacements étaient difficiles. La bicyclette était le seul moyen de locomotion. Bien souvent, elles étaient "rafistolés" par des moyens de fortune, comme par exemple des pneus pleins fabriqués à partir de vieux pneus de voiture.

En juillet 1943, Lestonan connut l'occupation allemande, une compagnie d'environ 150 hommes qui avait combattu à Stalingrad nous fut envoyée en repos. Fin juillet, ils durent regagner précipitamment l'Italie où Mussolini venait d'être "démissionné".

A cette époque, dès les premiers beaux jours, les bords du canal et l'écluse étaient le rendez-vous dominical de nombreux quimpérois venant chercher un peu de calme et de tranquillité. Les plages étaient alors strictement interdites par les autorités d'occupation : on y édifiait le fameux "mur de l'Atlantique".

Malgré toutes ces contraintes, la vie sportive et culturelle fut active. L’athlétisme connut un regain d'intérêt, et pour le foot, les déplacements les plus proches se faisaient à vélo ; pour les plus lointains, il fallait trouver un camion à gazogène ou aller en train. Une troupe théâtrale fut mise sur pied et donna des représentations très suivies. Des fêtes eurent lieu dans les écoles pour pouvoir venir en aide aux prisonniers de guerre très nombreux. Des chansonnettes furent créées : "A Lestonan, c'est le rendez-vous ...", "Au beau pays d'Odet".

 

En janvier 1947, le travail reprit à la Papeterie. En attendant cette reprise, en 1945 et 1946, le personnel disponible avait été employé à la construction ("à la brouette") de la route Kerho-Créac'h Ergué.

Dans les années qui suivirent, des constructions s'édifièrent encore à Ker Anna, à Bigoudic et à Lestonan même.

En 1955, Pierre Quéré agrandit sa salle de bal.

En 1961-1962, ce fut la mise en route de deux nouvelles unités de production à la Papeterie. L'embauche de nouvelles personnes amena de nouvelles constructions à Keranguéo, Stan Ven, Croas ar Gac, Quélennec, Ker Anna et Lestonan.

Mais, si jusqu'alors l'expansion de Lestonan était liée à la Papeterie, depuis, les causes en sont différentes. La proximité de la ville de Quimper, de ses hôpitaux, de ses écoles, de ses diverses administrations, ont incité beaucoup à s'installer dans les environs de Lestonan et de Quélennec. Cette expansion de Lestonan s'est faite aussi vers la route de Pen Carn. De nombreux lotissements ont vu le jour.

Dans les années 1970, ce fut la création du parking à l'emplacement de jardins, et l'ouverture de la "rue du Ménez".

L'augmentation de toute cette population amena à agrandir les écoles, à la création d'un restaurant scolaire, à la mise en place d'un réseau de transports scolaires vers les collèges et lycées de Quimper.

Un nouveau stade vit le jour pour remplacer celui de Ker Anna devenu non conforme et peu pratique.

Enfin, l'année 1972 vit l'implantation de la Safidiep : Bolloré se lançait dans la fabrication de films pour condensateurs.

(Jean Guéguen)