Entrée triomphale du Prince Napoléon à Florence, JMD 1859 - GrandTerrier

Entrée triomphale du Prince Napoléon à Florence, JMD 1859

Un article de GrandTerrier.

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(Mémoires, Déguignet, manuscrits, p. 762-766)

Nous voyageâmes ainsi tous les jours au milieu de ces populations frémissantes au son des musiques et des cloches, couverts de poussière et de fleurs jusqu'à Florence (Firenza) la belle capitale du duché, d'où le duc autrichien venait de s'enfuir avec sa garde sans avoir voulu essayer de défendre son duché. Là, nous allâmes camper dans un grand pré justement en face du palais ducal. Nous avions donc pris le plus beau et plus riche pays de la péninsule sans tirer un coup de fusil. Le lendemain de notre arrivée, je me trouvais de planton chez le général de division qui s'était installé dans une des plus belles maisons donnant sur la grande place. Du premier étage de cette maison où je me trouvais, j'assistais à la dernière scène frémissante et délirante des Toscans ou plutôt des Toscanes car je [ne] voyais partout que des femmes, surtout de jeunes filles formant comme ailleurs des haies des deux côtés de la grande rue et de la place ; les autres femmes se tenaient sur les balcons d'où pendaient des draperies multicolores, avec des paniers de fleurs et des couronnes. Les cloches de toutes les églises sonnaient à toute volée, auxquelles se mêlaient la voix du canon et les cris ininterrompus de : « Viva la Francia ! Viva L'Italia ! Viva Napoleone ! Viva VittorioEmmanuele ! Viva gli soldati francesi et piemontesi, nostri liberatori ! ». Mais bientôt j'entendis un hourra plus formidable encore de: « Viva il principe Napoleone ! ». C'était en effet le prince Jérôme Napoléon[1], surnommé par nous le prince "Plomb Plomb", qui faisait son entrée triomphale dans la capitale toscanaise, qui fut plus tard, un instant la capitale d'Italie. De la croisée où je me trouvais, je le voyais venir sur son cheval blanc le long de la grande rue ; mais on ne pouvait l'apercevoir qu'à travers une véritable pluie de fleurs et de couronnes par lesquelles il était littéralement inondé.

Une nuée de jeunes anges moitié nus, criant, frémissant, trépignant, papillonnait autour du cheval, s'accrochaient à la bride, aux étriers, aux pieds et au manteau du cheval et du prince. Plusieurs avaient leurs crinolines démontées et déchirées par les pieds du cheval. Ca ne faisait rien. Jamais je ne vis un spectacle aussi grandiose et si émouvant.

Notes :

  1. Jérôme Napoléon : Fils de Jérôme, frère de Napoléon (1822-1891). Il commandait le 5e corps d'armée, au sein duquel servait Jean-Marie Déguignet. [Ref.↑]