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[modifier] Corn-boud pour faire braire les paesles

Billet du 01.06.2019 - On sonnait du corn boud ... Non, je n'ai vu nulle part, quoique j'aie vu bien des musiques, une semblable à celle-là. Le Dieu Triton, le trompette de Neptune, ne savait pas faire de la musique semblable. » Jean-Marie Déguignet, Mémoires d'un paysan bas-breton, Intégrale page 119.

Jean-Marie Déguignet (1834-1905) a bien décrit dans ses mémoires comment se passaient les fêtes villageoises de la Saint-Jean (24 juin) et de Saint-Pierre (29 juin) dans les campagnes de Basse-Bretagne au 19e siècle.

Jean-Marie Déguignet s'oppose à là l'idée qu'il n'y avait qu'un feu unique à la Saint-Jean, ce « Tantad », feu du 24 juin autour duquel quelques paysans se rassemblaient pour dire des grâces.

Pour lui « c'était au contraire une des plus grandes réjouissances des paysans bretons, où tout le monde d'un même village se trouvait depuis les plus vieux jusqu'aux nourrissons. Il y avait deux feux et par conséquent deux fêtes nocturnes, et non un ; le premier s'appelait non Tantad, mais bien Tan San Yan en l'honneur duquel on l'allumait et l'autre, quatre ou cinq jours après s'appelait Tan San Per. »

Tout le monde participait au feu : « On y brûlait des charretées de lande, de ronces et d'épines ; et chaque habitant, grands et petits, pauvres et riches, était obligé d'y apporter un fagot ou une brassée d'épines en s'y rendant sous peine d'amende ou d'avoir un doigt coupé. »

Le début des réjouissances était annoncé de façon à être entendu de très loin : « On annonçait la fête par des coups de fusil, puis de grands coups frappés sur de grandes bassines en cuivre et on sonnait du corn boud. Et on y jouait une musique que je n'ai jamais vu jouer nulle part ailleurs. »

La pratique du corn-boud était la suivante :

Image:Right.gifImage:Space.jpg«Image:Space.jpgOn posait une bassine sur un trépied puis un individu prenait deux joncs de pré très longs et résistants et les posait en travers sur la bassine au fond de laquelle on mettait de l'eau ; »

Image:Right.gifImage:Space.jpg«Image:Space.jpgalors, une femme qui avait l'habitude de traire les vaches prenait ces joncs que le premier tenait appuyés sur le bord de la bassine, se mettait à tirer sur ces joncs en faisant [glisser] ses doigts tout le long, absolument comme si elle eût tiré sur les trayons d'une vache. »

Image:Right.gifImage:Space.jpg«Image:Space.jpgAlors, comme chez les spirites et mieux sans doute, la bassine se mettait à trembler et à danser sur le trépied »

Image:Right.gifImage:Space.jpg«Image:Space.jpgpuis deux ou trois autres femmes ou enfants tenant des clefs suspendues à des fils les mettaient en contact avec l'intérieur de la bassine. Ces clefs de différentes grosseurs faisaient des notes différentes par leur trépidation sur le bord de la bassine en mouvement. »

Image:Right.gifImage:Space.jpg«Image:Space.jpgcela faisait une musique extraordinaire qui s'entendait d'un bout de la commune à l'autre, surtout quand, dans les grands villages on employait plusieurs bassines de grandeur et d'épaisseur différentes. »

  Ensuite « les jeunes gâs s'essayaient au saut du feu, jeu assez dangereux car il y en avait qui s'y brûlaient les pieds. Il s'agissait de sauter par dessus le feu qui avait plusieurs mètres de largeur, et lorsque la flamme était à sa plus grande hauteur. »

Vidéo Youtube dans laquelle on voit des amis s'essayer au tirage de joncs (attendez les séquences 1:47 ou 2:20 pour entendre le son grave) :

Extrait de l'album « Mamalasecska » du groupe de fest-noz du Pays de Dol-de-Bretagne Rozaroun, plage n° 12 Laridé, le paesle est joué par Cécile Louyer :

À Jersey on faisait aussi "braire les peiles" comme l'atteste ce texte en vieille langue Jèrriaise (Wikipedia) :

Faithe braithe les peîles est eune couôteunme qué nou soulait pratitchi l'travèrs d'la Nouormandie et la Brétangne. Nou l'fait acouo par des bords en Brétangne, et nou-s'a ravigoté la bachinn'nie en Jèrri à ches drein. Nou fait braithe les peîles à la St. Jean pouor chasser les mauvais esprits. I' faut un bachîn, un ros (du jonc) et dé l'ieau. Deux pèrsonnes peuvent faithe braithe la peîle: iun tchi tcheint l'ros sus l'bord du bachîn, l'aut' à traithe lé ros auve de mains mouoillies. La tressonn'nie du ros fait tressonner tout l'bachîn et nou vait coumme tchi qu'l'ieau bouort et danse. La braithie fait eune manniéthe dé mûsique.


En savoir plus : « Les deux fêtes des feux de Saint-Jean et de Saint-Pierre selon Jean-Marie Déguignet »