Blog 28.12.2019 - GrandTerrier

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[modifier] Une lettre remerciant la providence

Billet du 28.12.2019 - Folio 111 du registre des délibérations de 1851 à 1879 conservé aux Archives Municipales d'Ergué-Gabéric : délibération du conseil du 23.06.1867 incluant la lettre envoyée à Napoléon III (cf fac-similé ci-dessous) suite à la tentative d'attentat à son encontre et celle du tsar Alexandre II.

L'attentat eut lieu au bois de Boulogne, un coup de feu contre le landau découvert impérial ayant été tiré par un dénommé Antoni Berezowski, fils de nobles polonais. Un placard est publié par la préfecture de police : « Personne n'a été atteint. L'assassin a été arrêté immédiatement ». Comme il est coutumier à cette époque, une lettre de soutien politique et citoyenne est rédigée en mairie d'Ergué-Gabéric et transmise à l'Empereur.

L'importance politique du soutien du conseil municipal à l'Empereur est telle que la lettre est publiée dans le registre de ses délibérations. Cette adresse collective s'adresse personnellement à Napoléon III qui est 3 fois apostrophé par le titre de « Sire ! », et par ailleurs par les termes « l'élu de la nation française » et « l'Empereur des Français ».

Le texte démarre pompeusement par cette phrase : « La divine providence qui veille sur tout a encore voulu dans ces derniers jours montrer sa puissance en Vous sauvant si miraculeusement ». Cette providence, une fois de plus, « a prouvé au monde entier que l'élu de la nation française est bien celui qu'elle a choisi et entre les mains duquel elle désirait mettre les destinées de la france ».

La salutation finale de la lettre est : « Vive l'Empereur ! Vive l'Impératrice ! Vive le Prince Impérial ». Le souverain russe, qui est la vraie cible du terroriste patriote polonais, est désigné par les mentions de « votre souverain hôte » et « vos augustes personnes » au premier paragraphe.

Alexandre II est en visite en France, car cette année-là la France accueille une section russe pour la première fois dans une Exposition universelle parisienne. Le Tsar est invité par Napoléon III à visiter l’Exposition universelle de Paris, avec également l'objectif de renouer une alliance entre les deux États. Mais l'attentat au bois de Boulogne va faire capoter les discussions de rapprochements.

 

Ceci malgré le fait que l'assassin ne fut pas chanceux avec son pistolet à deux coups. C'est le cheval qui reçoit la première balle. Le second canon de l’arme lui éclate dans la main, et il est sérieusement blessé à la main droite, il veut crier « vive la Pologne » mais un agent le réduit au silence ; on évacue alors le blessé qui échappe de peu à un lynchage par la foule.

Dans leur lettre, les gabéricois l'accusent en ces termes : « ces hommes méchants qui n'aspirent qu'au mal, qui veulent tout détruire et qui ne désirent que la guerre civile ».

Cette allusion à la guerre civile est sans doute une interprétation des conditions de l’insurrection en Pologne, alors dans l’empire de Russie, qu'Alexandre II a réussi à mater, et que le patriote polonais a voulu venger.

Berezowski échappe à la peine de mort, mais est seulement condamné à un emprisonnement au bagne de Nouvelle-Calédonie, ceci grâce à une brillante plaidoirie de son avocat Emmanuel Arago. Cette clémence entraîne une aggravation des tensions entre la France et la Russie.

Berezowski fait l'objet d'une demande d'amnistie en 1906, mais son état d'aliénation ne permet pas sa libération, et il meurt en 1916 à l’hôpital du Marais de l’île Nou.

En savoir plus : « 1867 - Lettre à l'Empereur Napoléon III suite à l'attentat du 6 juin »