Blog 19.09.2020 - GrandTerrier

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[modifier] Mémoires d'un désespéré en 1902

Billet du 19.09.2020 - La fin brutale de sa location de chambre rue du Pont-Firmin à Quimper lui ayant été signifiée, Déguignet essaie de mettre fin à ses jours, il s'explique dans le cahier manuscrit n° 22 de ses mémoires et les journaux locaux, « Le Finistère » et « Le Courrier du Finistère », en parlent.

Dans les journaux locaux on lit cet entrefilet les 12 et 19 avril 1902  : « M. le commissaire de police trouvait jeudi matin dans son courrier une lettre d'un sieur Jean-Marie Déguignet, ex-débitant, domicilié au n° 17 de la rue du Pont-Firmin l'informant de sa détermination d'en finir avec la vie » et s'ensuit la description de la découverte d'un corps inanimé et asphyxié près d'un « réchaud rempli de charbons ardents » et dans une chambre calfeutrée a priori volontairement.
Dans la relation précise des faits dans ses cahiers manuscrits, le suicidaire confirme l'existence et le contenu de la lettre écrite la veille : « Demain je vous prie de vouloir bien faire enlever mon cadavre. Vous trouverez chez moi des livres, des manuscrits et de nombreuses lettres, vous en ferez ce que vous voudrez. Je vous demande pardon des embarras que je vais vous causer, adieu Déguignet ! ...»

Et il décrit ensuite sa détermination : « Après avoir tout dispo-sé pour le départ, j'allais encore très gaiement boire quelques verres avec les amis. J'attendis vers minuit avant d'allumer mon charbon, puis je me couchais philosophiquement la tête près du fourneau. ». Sa décision est motivée par les persécutions subies depuis de nombreux années et la goutte qui fait déborder le vase : « Je viens de recevoir de mon propriétaire l'ordre de quitter mon trou dans lequel je vis depuis douze ans, sous prétexte que les voisins se sont plaints des poux lesquels, parait-il, vont de mon trou dans leur chambre ».

Mais les choses ensuite ne se passent pas exactement comme prévu. Le matin il se réveille très difficilement, constatant que le charbon (qu'il a acheté pour deux sous après avoir vendu quelques vêtements à un chiffonnier) et la chandelle ne se sont pas consumés entièrement. Se considérant comme « à moitié ressuscité », il rallume le tout, se rendort, et est ranimé par le commissaire et les agents de police qui sont rentrés en fracturant la porte de sa chambre.

Les articles de journaux explique l'acte du « malheureux / désespéré » par le diagnostic médical communiqué par le médecin hospitalier, à savoir « monomanie de la persécution » et la décision d'un internement d'office.

 
(bulle de Christophe Babonneau, BD "Mémoires d'un paysan bas-breton T. 1")

Quelques mois plus tard, depuis son lit d'hôpital, Déguignet s'insurge en adressant une lettre au docteur Koffec : « Vous avez déclaré par voie de journaux que j'étais fou et que je devais être interné. Déclarez maintenant que cela n'est pas vrai que le sieur Déguignet est plus saint d'esprit que de corps ... ».

Il défend même l'idée d'un droit au suicide de fin de vie : « Ce n'est du reste que le christianisme qui a créé ce malentendu en faisant d'un suicide un crime lorsqu'ailleurs on en fait une vertu, en déshonorant la mémoire du mort, quand ailleurs on l'honore. ».

En savoir plus : « Le suicide aux charbons ardents de Jean-Marie Déguignet en 1902 »

AVIS : Après une interruption d'une semaine les billets hebdos GT reprennent, dans le prochain nous présenterons un "général et d'armes en Bretagne" en 1754-62 .