BERNARD Daniel - Propagande en langue bretonne en janvier 1789 - GrandTerrier

BERNARD Daniel - Propagande en langue bretonne en janvier 1789

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BERNARD (Daniel), « Deux écrits de propagande en langue bretonne - janvier 1789 », dans Annales de Bretagne, Faculté des Lettres de Rennes, Rennes, 9
Titre : Deux écrits de propagande en langue bretonne - janvier 1789
Auteur : BERNARD Daniel Type : Article
Edition : Faculté des Lettres de Rennes Publication : Annales de Bretagne
Impression : Rennes Année : 1911, t. 27 n. 4
Pages : 9 Référence : -

[modifier] Notice bibliographique

Annales

Doléances EG

Ces 9 pages rédigées par Daniel Bernard [1] donne la traduction en breton de la déclaration de la Noblesse en et dévoile surtout l'existence d'une circulaire rédigée en breton, diffusée auprès des paroisses rurales de Basse-Bretagne début 1789 pour leur donner de bonnes raisons d'envoyer leurs propres doléances au roi.

Elle est présentée ainsi : « Circulaire aux Bas-Bretons des environs de Quimper sur les demandes à soumettre dans l'intérêt du peuple. Factum imprimé, 5 p., sans lieu ni date et sans nom d'imprimeur (Bibliothèque des Archives du Finistère) ». Elle est rédigée par des représentants du tiers-état aux Etats de Bretagne : « Nous sommes beaucoup de gens de cette province, réunis et assemblés, par permission du Roi, pour changer et soulager le peuple qui est trop opprimé par les gentilshommes. ».

En guise d'introduction, les rédacteurs mettent en avant leur volonté de contraindre la noblesse à l'effort national et leur attachement à l'autorité royale : « Ils ont beaucoup d'honneurs (droits honorifiques) ; nous ne leur disputons pas cela ; mais ils ne paient pas selon leurs biens ce qu'ils doivent contribuer vis-à-vis de nous. » ; « le Roi vient à notre secours ; il nous permet de demander justice et vérité. »

Les rédacteurs du tract proposent ensuite une trame pour rédiger 9 articles d'un cahier de doléances (« goulennou ») du tiers-état (« Trede-Stad » ) :

1. Réfection des chemins par des volontaires, aux frais du Clergé, de la Noblesse et du Tiers-Etat

2. Volontariat pour les gardes-cotes, à frais partagés également.

3. Frais des transports de troupes, aux frais et dépens des trois ordres.

4. Tailles dans un rôle pour les 3 ordres, sans dîme et rattachement aux paroisses.

5. Capitation pour le clergé, notamment pour les gros bénéfices. .

6. Augmentation de capitation pour la noblesse et rattachement aux paroisses.

7. Représentation doublé du Tiers-Etat dans les parlements pour la défense des droits.

8. Article omis.

9. Pension pour le clergé de paroisses.

10. Représentation des recteurs des paroisses pour défendre le peuple.

Le contenu de la circulaire a influencé les habitants des environs de Quimper, car les 9 articles reformulés de leur cahier présenté le 12 avril à Ergué-Gabéric en sont issus d'une certaine manière. Seules les propositions 2 (gardes-cotes) et 10 (Représentation des recteurs) n'ont pas été intégrées à leurs doléances :

1. (fidélité au roi) : introduction de la circulaire.

2. (contribution dette nationale) : introduction de la circulaire.

3. (tous ordres tous impôts selon moyens) : propositions 4, 5 et 6 de la circulaire.

4. (rémunération de tout le clergé) : proposition 9

5. (entretien des chemins publics) : proposition 1

6. (abandon du franc-fief de défense armée) : extension de la proposition 3

7. (justice royale et de proximité) : reformulation de la proposition 7

8. (abandon des coutumes et du domaine congéable) : initiative locale

9. (solidarité vis-à-vis des doléances du tiers-état) : introduction et conclusion de la circulaire

Autres lectures : « 1789 - Le cahier de doléances du Tiers-Etat d'Ergué-Gabéric » ¤ « 1789 à 1799 - Les dates clefs de la Révolution à Ergué-Gabé » ¤ « SAVINA Jean & BERNARD Daniel - Cahiers de doléances des sénéchaussées de Quimper » ¤ « MACÉ DE VAUDORÉ Jean-François (de) - Noblesse de Bretagne et du Comté Nantais » ¤ « 1789 - Séances de la sénéchaussée de Quimper pour les cahiers de doléances » ¤ 

[modifier] Transcription et pages imprimées

Va Breudeur, va Mignonet,

Mes Frères, mes Amis,

Ni a so cals tud er brovinç-man daspunet hac assamblet dre bermission ar Roue evit cench ha soulagi ar bobl a so re goasquet gant an dud-gentil.

Nous sommes beaucoup de gens de cette province, réunis et assemblés, par permission du Roi, pour changer et soulager le peuple qui est trop opprimé par les gentilshommes.

Cals a enoriou o deus ; ne disputomp quetan dra-se dezo, maes ne baeont quet bervez o madou ar pez a dleont contribui vis-à-vis deomp.

Ils ont beaucoup d'honneurs (droits honorifiques) ; nous ne leur disputons pas cela ; mais ils ne paient pas selon leurs biens ce qu'ils doivent contribuer vis-à-vis de nous.

A bell so e collomp cals ganto voar an taxou public pe guiriou ar Roue. Lod anezo a baeomp hon-unan toutafaet, ha ne baeont tam eus al lod-se ; haa diouz al loden-all ne baeont quet menes ar bevare.

Depuis longtemps nous perdons beaucoup avec eux sur les taxes publiques ou droits du Roi. Nous en payons une partie nous-mêmes tout à fait, et ils ne paient rien de cette partie-là ; et de l'autre partie ils ne paient même pas le quart.

An dra-se so caus penaus ni tud quelennet mad hac a so eus ar memes Stadt eveldoc'h, hon eus goulennet digant ar Roue sicour evet ma vize an oll guiriou ingalet.

Cela est cause que nous, gens bien instruits et du même état que vous, nous avons demandé secours au Roi pour que tous les droits soient égalisés.

Clevet omp bet ; dont a ra ar Roue d'hor sicour ; permeti a ra deomp goulen justiç ha guirione.

Nous avons été entendus ; le Roi vient à notre secours ; il nous permet de demander justice et vérité.

Assamblet eo bet ar Stadou an navet varnuguent a vis querzu. Assamblet omp bet eiz dez hep gallout en em gleout ; ne falle quet d'an Noblanç permeti e vize lennet hor goulennou. Ni an Trede-Stadt, en hon hano hac en hoc'h hini, hon eus reüsset ober al labour comun d'an tri Urz eus ar Stadou, quen na vize gret justiç d'ar bobl. En em adresset omp an eil hac eguile ac'hanomp d'ar Roue, hac e Vajeste sacr ha mignon d'ar bobl e deus ordrenet e vize separet ar Stadou ahan d'an teirvet a vis c'huevreur.

Les Etats ont été assemblé le 29 du mois de décembre. Nous avons été assemblés huit jours sans pouvoir nous entendre ; la Noblesse ne voulait pas permettre la lecture de nos demandes. Nous, le Tiers-Etat, en notre nom et au vôtre, nous avons refusé de faire le travail commun aux trois ordres des Etats, jusqu'à ce qu'il fût fait justice au peuple. Nous nous sommes adressés, l'un et l'autre de nous, au Roi, et sa Majesté sacrée et amie du peuple a ordonné que les Etats seraient séparés d'ici au 3 février.

Ordrenet eo deomp ahan d'an amser-se d'en em pleout tout da c'hout mar dalc'homp mat d'hor goulennou.

Il nous a été ordonné d'ici là de nous entendre tous pour savoir si nous tiendrons bon à nos demandes.

Chetu petra c'houlennomp.

Voici ce que nous demandons.

Da guenta, goulen a reomp ne yalo mui den, na divar ar meas na diouz quear, da labourat dre gontraign var an henchou bras, pere a vezo raparet gant tud a volonte vad var misou ar C'hlerge, an Noblanç, hac an Trede-Stad.

Premièrement, nous demandons qu'il n'aille plus personne, ni de la campagne ni de la ville, travailler, par contrainte sur les grands chemins, qui seront réparés par des gens de bonne volonté, aux frais du Clergé, de la Noblesse et du Tiers-Etat.

D'an eil, goulen a reomp penaus ne vo quet tennet d'ar billet, nac evit ar gardecot, nac evit martolodet, hac e vo paet tud a volonte vad var misou d'an oll, quen a Ilis, quen a Noblanç, quen a Bobl.

Deuxièmement, nous demandons qu'il ne soit pas tiré au sort, ni pour les garde-côtes, ni pour les matelots, et qu'il soit payé des gens de bonne volonté, à frais communs, tant de la Noblesse, tant du Peuple.

D'an drede, goulen a reomp penaus e vo graet charrea an troupou dre varc'hat, gant nep a so boaset, voar misou ha coust an tri urz.

Troisièmement, nous demandons que les troupes soient transportées par ceux qui y sont habitués, par marché, aux frais et dépens des trois ordres.

D'ar bevare, goulen a reomp penaus an taillou a vo laquet en ur roll elec'h ma paeo ar Veleyen, an Noblanç hac an Trede-Stad, hervez o madou foncier. Ar Veleyen ne baeeint quet evit an deog, an Nonlanç a baeo evit e renchou e peb parres.

Quatrièmement, nous demandons que les tailles soient mises en un rôle où paieront les Prêtres, la Noblesse et le Tiers-Etat selon leurs biens fonciers. Les prêtres ne paieront pas pour la dîme. La noblesse paiera pour ses rentes dans chaque paroisse.

D'ar bempet, goulen a reomp penaus ar veleyen a bep stat, pere a baë deja cals d'ar Roue, ispicial ar bersonnet hac ar chepeliou, a baeo a vreman ar gabitation aguis ar rest eus ar rouantelez ; ar pez a soulageo ar beleyen divar meas, hac a allo crisqui ar pez a baë nep o deveus beneiçou bras ; ha decimou ne vezo mui paet.

Cinquièmement, nous demandons que les prêtres de tous états, qui déjà paient beaucoup au Roi, et spécialement les recteurs et les chapelles, paient désormais la capitation comme le reste du royaume ; ce qui soulagera les prêtres de la campagne et pourra augmenter ce que paient ceux qui ont de gros bénéfices ; et il ne sera plus payé de décimes.

D'ar c'huec'hvet, goulen a reomp penaus an Noblanç, pehini n'en deus paet bete breman nemet an trivec'hvet eus an taxpen, pe ar gabita-

 


tion, a baeo en amser da zont hervez o madou, er memes roll gant ar bobl, ar pez a ziminuo ho contributionou ; ha penaus e vo gret an taxou er Barresiou hervez anaoudeguez an oll, quen var an dud a Iliz, quen var an Noblanç, quen var ar Bobl.

Sixièmement, nous demandons que la noblesse, qui n'a payé jusqu'ici que le dix-huitième de la taxe par tête ou la capitation, paie dans le temps à venir selon ses biens, dans le même rôle que le peuple, ce qui diminuera leurs contributions ; et que les taxes soient faites dans les paroisses, à la connaissance de tout le monde, tant sur les gens d'église, tant sur la noblesse, tant sur le peuple.

D'ar seizvet, goulen a reomp penaus en do an Drede-Stad hac ar Bobl quement a zud da zifen o guiriou e Stadou ar Brovinç hac er Stadou ar Rouantelez, evel ma o devezo an dud a Iliz hac an Noblanç assambles.

Septièmement, nous demandons que le Tiers-Etat et le peuple aient autant de gens pour défendre leurs droits aux Etats de la province et aux Etats du royaume, qui nous sont accordés par la bonté du Roi, que les gens d'église et la noblesse réunis.

D'an navet, goulen a reomp penaus ar bersonet, pere n'o deus quet an deog en o barresiou, ma o devezo en amser da zont ar meme pansiou(n) evel ma o deus ar bersonnet-all er rest eus ar rouantelez, hac evit ma vo ordrenet d'ar Parlament receo lezen ar Roue var ar poent-se.

Neuvièmement, nous demandons que les recteurs qui n'ont pas de dîmes dans leurs paroisses, aient, dans le temps à venir, la même pension que les autres recteurs du reste du royaume ; et qu'il soit ordonné au Parlement de recevoir la loi du Roi sur ce point-là.

D'an decvet, goulen a reomp penaus e vo quemeret lod a bersonet da zont d'ar Stadou eguis an esquybien, ar chaloniet hac an abadet, evit ma allint expliqua ezom ab bopl divar ae meas.

Dixièmement, nous demandons qu'il soit pris une partie des recteurs pour aller aux Etats, comme les évêques, les chanoines et les abbés, pour qu'ils puissent expliquer le besoin du peuple de la campagne.

An dra-man a expliquomp d'eoc'h e brezonec, hervez al lizer laquet e gallec gant an deputet diouz an oll guaeriou ha pobl eus ar brovinç, pehini a so cacet d'an oll paresiou a Vreiz, ha pehini a receffot ive e Gallec. Quememâ oll a so autoriset dre lezen ar Roue deus ar rempet devez a viz gouere diveza, hac a so bet accordet dija gant ar Brincet, an Duket, ha meur a Brivinç.

Nous vous expliquons ceci en breton, suivant la lettre mise en français par les députés de toutes les villes et de tout le peuple de la province, laquelle est envoyée à toutes les paroisses de Bretagne et que vous recevrez aussi en français. Tout ceci est autorisé par la loi du Roi du cinq juillet dernier et qui a déjà été accordé par les princes, les ducs et plusieurs provinces.

Quemerit un deliberation da expliqua ho santimant var an dra-màn, ha cacit-hi d'an Aotrou Mer e Guemper, pehini e lacaï gant deliberationou quaer dirac ar Roue ha dirac ar Stadou.

Prenez une délibération pour expliquer votre sentiment sur ceci, et envoyez-la à Monsieur le Maire de Quimper, qui la mettra avec la délibération de la ville, devant le Roi et devant les Etats.

N'eus forz a belec'h e teui paperiou deoc'h d'ho tistrei, ne fiet quet dezo ; na gredet nemet d'ar pez a deuei deoc'h a berz ho preudeur ha mignonet eus an Trede-Stad.

N'importe d'où vous viendront des papiers pour vous détourner, ne vous fiez pas à eux ; ne croyez que ce qui vous viendra de la part de vos frères et amis du Tiers Etat.

[modifier] Annotations

  1. Daniel Bernard (1883-1971) est un historien et archéologue breton spécialisé dans la bibliographie bretonne et dans l'histoire de la Révolution en Basse-Bretagne. Rédacteur puis inspecteur des PTT, il a publié un mémoire intitulé « Histoire de la poste aux lettres en Bretagne du XVe siècle à la Révolution ». Autres publications : « Bibliiographie de l'histoire de la Révolution », « Bibliographie des articles et mémoires publiés sur l'île de Sein », « Quelques lettres inédites de Guy Autret », « Le clergé régulier et le clergé séculier dans le Finistère sous la Révolution et le Directoire », « Monographie de Cleden-Cap Sizun », « Les cahiers de doléances des sénéchaussées de Quimper et de Concarneau ». Il a donné sa bibliothèque à la Faculté des Lettres de brest, et ses archives aux Archives départementales du Finistère. [Ref.↑]


Thème de l'article : Fiche bibliographique d'un livre ou article couvrant un aspect du passé d'Ergué-Gabéric

Date de création : juillet 2018    Dernière modification : 11.10.2018    Avancement : Image:Bullgreen.gif [Fignolé]