1913 - Grève des ouvriers employés aux mines d'antimoine de Kerdévot - GrandTerrier

1913 - Grève des ouvriers employés aux mines d'antimoine de Kerdévot

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La contrepartie de ce règlement est la non reprise du travail par les deux meneurs quimpérois principaux, à savoir Villerm et Jean Riou, tous deux domiciliés à l'Eau Blanche. Quatre autres meneurs sont licenciés et « <i>réglés</i> » le 12 au matin, mais ils sont réintégrés le lendemain avec leur 36 autres collègues qui avaient déjà repris le travail. La contrepartie de ce règlement est la non reprise du travail par les deux meneurs quimpérois principaux, à savoir Villerm et Jean Riou, tous deux domiciliés à l'Eau Blanche. Quatre autres meneurs sont licenciés et « <i>réglés</i> » le 12 au matin, mais ils sont réintégrés le lendemain avec leur 36 autres collègues qui avaient déjà repris le travail.
-Il faut dire que la présence des 5 gendarmes avaient été maintenue sur place à Kerdévot jusqu'au lundi 15 décembre, et une tournée programmée est programmée pour le 24, jour de la paie (tous les 10 jours), pour éviter d'autres velléités de grève.+Il faut dire que la présence des 5 gendarmes avait été maintenue sur place à Kerdévot jusqu'au lundi 15 décembre, et une tournée programmée est programmée pour le 24, jour de la paie (tous les 10 jours), pour éviter d'autres velléités de grève.
L'évènement est relaté très brièvement dans les journaux locaux : « <i>Depuis quelques mois, la Société La Lucette exploite à Kerdévot, sur le territoire de la commune d'Ergué-Gabéric, des mines d'antimoine. Elle occupe à cet effet de 40 à 45 ouvriers payés à raison de 3 fr. 25 à 4 francs la journée, suivant leurs aptitudes. Certains d'entre eux viennent de revendiquer un tarif uniforme et le plus fort. Comme il règne dans ce milieu ouvrier une certaine effervescence, M. le préfet vient d'envoyer sur les lieux un brigadier et quatre gendarmes. </i> » (Ouest-Eclair <ref name="OuestEclair">{{OuestEclair}}</ref>) L'évènement est relaté très brièvement dans les journaux locaux : « <i>Depuis quelques mois, la Société La Lucette exploite à Kerdévot, sur le territoire de la commune d'Ergué-Gabéric, des mines d'antimoine. Elle occupe à cet effet de 40 à 45 ouvriers payés à raison de 3 fr. 25 à 4 francs la journée, suivant leurs aptitudes. Certains d'entre eux viennent de revendiquer un tarif uniforme et le plus fort. Comme il règne dans ce milieu ouvrier une certaine effervescence, M. le préfet vient d'envoyer sur les lieux un brigadier et quatre gendarmes. </i> » (Ouest-Eclair <ref name="OuestEclair">{{OuestEclair}}</ref>)

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Catégorie : Documents    
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Statut de l'article :
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§ E.D.F.
Où il est question d'une grève ouvrière d'une journée, de l'intervention de la gendarmerie sur place, de l'obtention d'une petite augmentation de salaire, d'organisation de feux pour réchauffer et sécher les mineurs, et du licenciement des deux meneurs quimpérois.

Autres lectures : « Revendication des ouvriers de la mine d'antimoine de Kerdévot, L'Ouest-Eclair 1913 » ¤ « Antimoine à Kerdévot/Niverrot en Ergué- Gabéric » ¤ « Yann-Reun Even, dindan an douar er vengleuz e Kerzevot » ¤ « 1915 - Groupe des mineurs à Kerdévot * » ¤ « 1927 - Dépôt d'explosifs à la mine d'antimoine de Kerdévot » ¤ « CHAURIS Louis - Les conflits d'intérêt à la petite mine d'antimoine de Kerdévot » ¤ « MAURIN Guillaume - Mission d'expertise en 2001 sur la concession des mines de Kerdévot » ¤ « LE GRAND Alain - Quimper-Corentin en Cornouaille » ¤ « Revendication des ouvriers de la mine d'antimoine de Kerdévot, L'Ouest-Eclair 1913 » ¤ « Accident et lockout à la mine de Kerdévot, Ouest-Eclair Finistère & Citoyen 1927 » ¤ « Rdv du ps 6 - Mine d'antimoine, OF-LQ 1986‎ » ¤ « Antimoine à Kerdévot, OF-LQ 1987 » ¤ 

1 Présentation

Joseph Chaleil [1], le préfet du Finistère est immédiatement saisi par courrier par la direction de la société minière de la Lucette lorsque démarre la grève des 42 ouvriers de la mine d'antimoine de Kerdévot : « Nous avons l'honneur de solliciter de votre haute bienveillance, d'envoyer à notre exploitation de Kerdévot quelques gendarmes pour mettre l'ordre ».

La réquisition de 4 gendarmes et leur brigadier est organisée pour le lendemain matin, l'intervention ayant pour but de « prêter le secours de quatre gendarmes et brigadier à Kerdévot commune d'Ergué-Gabéric à partir du 12 décembre à l'occasion d'un mouvement gréviste ».

Le rapport d'un « commissaire spécial » nous permet de comprendre les motivations de ceux qui ont débrayé toute la journée et la nuit du 11 décembre :

  • La première revendication est le niveau de salaire journalier : « une augmentation de 0.25 centimes par jour a été accordée, qui a paru donner satisfaction, momentanément tout au moins », la nouvelle grille passant de « 3 f 25 ... 4.25 » à « 3 f 50 ... 4.50 ».
  • Ensuite ils réclament des feux pour se réchauffer et se sécher : « qu'il leur soit fait du feu, aux heures des repas, et la nuit ... ils ont continuellement les pieds dans l'eau, et que celle-ci tombant de partout, leurs vêtements même sont vite mouillés ».
  • Enfin un peu de considération : « ainsi ils auraient besoin de soins ou d'attention qu'ils n'ont pas eus jusque-là ».

La première revendication satisfaite immédiatement, le besoin de feu le sera aussi : « sur lequel je le répète, ils peuvent compter dans un avenir très prochain, et dont ils auraient déjà joui ou bénéficié si les fournisseurs, tant d'anthracite que de bois, y avaient mis un peu plus de hâte ».

 

La contrepartie de ce règlement est la non reprise du travail par les deux meneurs quimpérois principaux, à savoir Villerm et Jean Riou, tous deux domiciliés à l'Eau Blanche. Quatre autres meneurs sont licenciés et « réglés » le 12 au matin, mais ils sont réintégrés le lendemain avec leur 36 autres collègues qui avaient déjà repris le travail.

Il faut dire que la présence des 5 gendarmes avait été maintenue sur place à Kerdévot jusqu'au lundi 15 décembre, et une tournée programmée est programmée pour le 24, jour de la paie (tous les 10 jours), pour éviter d'autres velléités de grève.

L'évènement est relaté très brièvement dans les journaux locaux : « Depuis quelques mois, la Société La Lucette exploite à Kerdévot, sur le territoire de la commune d'Ergué-Gabéric, des mines d'antimoine. Elle occupe à cet effet de 40 à 45 ouvriers payés à raison de 3 fr. 25 à 4 francs la journée, suivant leurs aptitudes. Certains d'entre eux viennent de revendiquer un tarif uniforme et le plus fort. Comme il règne dans ce milieu ouvrier une certaine effervescence, M. le préfet vient d'envoyer sur les lieux un brigadier et quatre gendarmes.  » (Ouest-Eclair [2])

Groupe des mineurs en 1915
Groupe des mineurs en 1915

2 Transcriptions

Société de la Lucette, 11 déc. 1913

Société Nouvelle des Mines de la Lucette

Le Genest, le 11 décembre 1913
Monsieur le Préfet

Nous avons l'honneur de solliciter de votre haute bienveillance, d'envoyer à notre exploitation de Kerdévot quelques gendarmes pour mettre l'ordre.

Hier soir, 10 décembre, nos ouvriers ont été payés comme à l'habitude.

Ce matin, à la reprise du travail, quelques monteurs de coup, ouvriers ayant travaillé sur les lignes de chemin de fer ou à Paris, ont persuadé à notre personnel qu'il ne fallait plus travailler pour le prix que nous leur donnons (3 f 25, 3.50, 4.00, 4.25) selon leur mérite, et qu'il fallait que nous leur donnions un minimum de 5 f par jour.

Le travail a été complètement arrêté. Nous sommes disposés à régler ceux qui ne sont pas contents, et demandons surtout pour les autres que la liberté du travail soit assurée.

Nous espérons, monsieur le Préfet, que l'effet de la gendarmerie sera suffisant.

Nous vous prions, monsieur le Préfet, de recevoir avec nos remerciements préalables, l'assurance de nos sentiments les plus respectueux.

L'Ingénieur des travaux à Kerdévot.

Signature : F Hébrard

Réquisition du préfet, 11 déc. 1913

Préfecture du Finistère. Cabinet du Préfet. République Française.

Au nom du Peuple français,
Nous, Préfet du Finistère. Chevalier de la Légion d'Honneur.

Requérons, en vertu de la loi, M. le Chef d'escadron Commandant la Gendarmerie du Finistère de nous prêter le secours de quatre gendarmes et brigadier à Kerdévot commune d'Ergué-Gabéric à partir du 12 décembre à l'occasion d'un mouvement gréviste.

Et pour la garantie dudit Commandant, nous apposons notre signature.

Fait à Quimper, le 11 décembre 1913.

Préfet du Finistère.

Commissariat spécial, 12 déc. 1913

Ministère de l'Intérieur. Commissariat spécial des chemins de fer. Quimper.

Note : Un commencement de grève aux mines d'antimoine de Kerdévot, commune d'Ergué-Gabéric.
Pièce jointe : la lettre de l'ingénieur à M. le Préfet

Quimper, le 12 décembre. Rapport.

Conformément à vos instructions, je me suis transporté hier soir et ce matin, à Kerdévot, commune d'Ergué-Gabéroc, arrondissement de Quimper, à l'occasion du conflit qui y a éclaté, à la mine d'antimoine, entre le personnel et la direction.

L'exécution de votre réquisition à la gendarmerie a eu lieu ce matin, à l'heure indiquée (5 h 3/4). La présence de ces militaires (4 hommes et un brigadier) a pu tout de suite fournir un criterium sur les réelles dispositions des ouvriers (au nombre de 42), qui, tous, hier, paraissaient être résolus à se mettre en grève : en effet, sous la protection de la gendarmerie, tout le monde, à l'exception du six ouvriers, dont quatre ont été définitivement réglés, a repris ce matin le travail, et aucune tentative en sens contraire ne s'est produite. Deux des meneurs, qui habitent Quimper, ne se sont pas présentés (note : Villerm et Jean Riou, à l'Eau Blanche).

D'ailleurs, dès ce matin, une augmentation de 0.25 centimes par jour a été accordée, qui a paru donner satisfaction, momentanément tout au moins.

Actuellement, les ouvriers de l'extérieur gagnent 3 f 25 à 3 f 50, et ceux de l'intérieur de 4 f à 4 f 25. Il est probable que les ouvriers de l'intérieur reviendront prochainement à la charge, mais pas avant la paye, qui aura lieu le 24 courant, veille de la Noël.

Il conviendrait que ce jour-là quatre ou cinq gendarmes se trouvent sur les lieux.

 

Commissaire-Suite, 12 déc. 1913

Les ouvriers demandent, au surplus, qu'il leur soit fait du feu, aux heures des repas, et la nuit. Satisfaction va leur être accordée. Il est vrai qu'ils ont continuellement les pieds dans l'eau, et que celle-ci tombant de partout, leurs vêtements même sont vite mouillés, et qu'ainsi ils auraient besoin de soins ou d'attention qu'ils n'ont pas eus jusque-là, mais sur lequel je le répète, ils peuvent compter dans un avenir très prochain, et dont ils auraient déjà joui ou bénéficié si les fournisseurs, tant d'anthracite que de bois, y avaient mis un peu plus de hâte.

En définitive, l'affaire est momentanément arrangée, grâce aux promptes mesures que vous avez bien voulu prendre. Il est certain que sans la présence des gendarmes, le travail n'aurait pas été repris ce matin.

Quoi qu'il en soit, je vous demande la permission d'émettre l'avis de maintenir à Kerdévot, jusqu'à lundi soir, ou mardi matin, les forces que vous y a avez envoyées, de manière à détourner les meneurs d'un retour offensif, qui, s'il doit se reproduire, n'aura certainement pas lieu avant le 24 août.

Le Commissaire spécial, (signature)

Maintien du Préfet, 12 déc. 1913

12 décembre 1913

Préfet à commandant de gendarmerie

Je vous prie de maintenir à Kerdévot en Ergué-Gabéric jusqu'à lundi 15 courant les 5 gendarmes qui ont fait l'objet de ma réquisition du 12 décembre.

La paie des ouvriers employés à l'exploitation d'antimoine devrait avoir lieu le 24 courant, vous voudrez bien donner des ordres pour que deux gendarmes fassent ce jour-là une tournée dans cs parages.


Écrire au commandant de gendarmerie

Laisser les gendarmes à Ergué-Gabéric jusqu'à lundi.

L'advertir que prochaine paye aura lieu le 24 courant, que 2 gendarmes fassent ce jour là une tournée dans ces parages.

Gendarmerie, 13 déc. 1913

Corps d'armée. Gendarmerie nationale. 11e légion. Compagnie du Finistère. Arrondissement de Quimper. Détachement de Kerdebot.

Objet : Cessation de la grève des mineurs à Kerdévot.

À Kerdévot, le 13 décembre 1913. Rapport du brigadier Nean commandant du détachement à Kerdévot sur la grève des ouvriers mineurs employés aux travaux de recherches à Kerdévot.

Les ouvriers travaillant aux travaux de recherches à Kerdévot et manquant hier matin à la reprise du travail, se sont présentés ce matin à l'heure de l'embauche. Trois ont été admis à travailleur, le quatrième a été réglé par M. l'ingénieur directeur des travaux.

L'équipe de nuit s'est présentée hier soir à 6 heures et a également repris le travail.

Le calme absolu règne sur les chantiers. Il ne s'est produit aucun incident depuis hier matin.

Signature : Nean

N° 267913. Lu et transmis. A Quimper, le 14 décembre 1913. Le capitaine Demange, commandant l'Arrondissement.
N° 46663 Transmis à M. le Préfet du Finistère. Quimper le 14 décembre 1913, Chef d'Escadron Saltzmnn commandant la compagnie.

Sûreté générale, 13 déc. 1913

Direction de la Sûreté générale. Grève aux mines d'antimoine de Kerdévot en Ergué-Gabéric.

13 Décembre 13. Ministre de l'Intérieur, Paris.

J'ai l'honneur de vous faire connaître que les 42 ouvriers employés à la mine d'antimoine à Kerdévot en Ergué-Gabéric, se sont mis en grève le 11 décembre courant, réclamant la révision de leur salaire et du feu aux heures de repas.

Satisfaction leur ayant été accordée, tous les ouvriers ont repris le travail le 13 courant, à l'exception de 6 grévistes dont 4 ont été définitivement réglés.

J'avais pris toutes mesures utiles pour assurer la liberté du travail en envoyant sur les lieux 5 gendarmes dont un brigadier.

Le Préfet.

3 Originaux

Lieu de conservation :

  • Archives Départementales du Finistère.
  • Cote 10 M 47.
 

Usage, droit d'image :

  • Accès privé et restreint aux abonnés inscrits.
  • Utilisation obligatoire d'un compte GrandTerrier autorisé et mot de passe valide.

4 Annotations

  1. Joseph Chaleil, né en 1865 à Montpellier, décédé en 1920 à Versailles. Député de la Corse de 1904 à 1906. Nommé préfet de la Corse en 1906, il devint préfet de l'Allier en 1909, du Finistère en 1910, de la Dordogne en 1913, de la Saône-et-Loire en 1914 et de la Seine-et-Oise en 1919. [Ref.↑]
  2. L'Ouest-Éclair est un ancien quotidien régional français, créé par deux Bretons chrétiens d'une sensibilité républicaine et sociale, l'abbé Félix Trochu, prêtre en Ille-et-Vilaine, et Emmanuel Desgrées du Lou, natif de Vannes, commissaire de la Marine, puis avocat. Les ventes décollent après la Première Guerre mondiale et, en 1930, le patron embauche son gendre, Paul Hutin, un Lorrain de 42 ans qui deviendra son gendre. Le journal rayonnait, à ses débuts, sur cinq régions, la Bretagne, la Normandie, l'Anjou, le Maine et le Poitou, comme Journal républicain du matin. En 1940, Paul Hutin, militant antinazi comme sa femme, souhaite que L'Ouest-Eclair ne paraisse pas sous le joug allemand et s'engage dans la Résistance. L'Ouest-Éclair sera interdit à la Libération pour acte de collaboration. Paul Hutin revient à Rennes, à peine libérée, le 4 août 1944 pour créer le Ouest-France. [Ref.↑]


Thème de l'article : Document d'archives sur le passé d'Ergué-Gabéric.

Date de création : Février 2017    Dernière modification : 3.04.2017    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]