1908 - Un scandale clérical à Ergué-Gabéric dévoilé par le commissaire Judic - GrandTerrier

1908 - Un scandale clérical à Ergué-Gabéric dévoilé par le commissaire Judic

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Catégorie : Archives    
Site : GrandTerrier

Statut de l'article :
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§ E.D.F.
L'enquête du commissaire quimpérois Pierre Judic [1] sur une scène bucolique et scandaleuse qui se passa dans un champ d'Ergué-Gabéric et qui défraya les conversations.

Même à cette époque, on traitait très sérieusement les affaires et les écarts sexuels d'un religieux, frère des écoles chrétiennes de surcroit, avec un(e) mineur(e).

Autres lectures : « Judic aux Archives Municipales de Quimper » ¤ « Résistance contre l'inventaire des biens religieux à Ergué-Gabéric, journaux divers 1906 » ¤ « La gwerz de l'Inventaire des biens de l'Eglise en 1906 à Ergué-Gabéric » ¤ « 1907 - Rapport de police sur la campagne d'un crocheteur socialiste » ¤ « 1791 - Requête municipale contre une fille de mauvaise vie » ¤ « Jean-Marie Déguignet et le sexe » ¤ 

[modifier] 1 Présentation

Présentée brièvement sur le site Internet Quimper.Bzh dans la rubrique Mémoires des Archives Départementales de Quimper, cette pièce [2] extraite des comptes rendus d’enquête du commissaire Judic est un véritable morceau d'anthologie.

On y découvre les détails d'une affaire de mœurs qui, s'il ne s'agissait pas d'un religieux, n'aurait peut-être pas constitué un délit d'outrage public: « Le mardi 21 avril, dans l'après-midi le sieur Sergent, Frère des Écoles Chrétiennes, est allé se promener dans la commune d'Ergué-Gabéric en compagnie de la jeune Pxxx Jeanne, âgée de 16 ans ...Ils se couchèrent l'un près de l'autre dans un champ. Le bon Frère dégrafa le corsage de la jeune fille, lui retira son corset pour être plus à l'aise et se mit en devoir de l'embrasser. Ce qui se passa ensuite, on le devine. »

Les frères des écoles chrétiennes ou lasalliens formaient un institut religieux laïc de vie consacrée, de droit pontifical, fondé à Reims en 1680 par saint Jean-Baptiste de La Salle, et voué à l'enseignement et à la formation des jeunes, en particulier des plus défavorisés. Bien qu'ayant formulé les vœux traditionnels de pauvreté, de chasteté et d'obéissance, les Frères n'avaient pas le statut de prêtres, mais portaient néanmoins une soutane noire non boutonnée avec un large rabat blanc, et ils étaient familièrement surnommés les « Frères quatre bras » à cause de leur grand manteau à manches flottantes. Hormis le collège Saint Jean de La Salle à Guidel, deux établissements quimpérois étaient lassaliens : le collège et lycée le Likès (fondé en 1838) et l'école primaire Saint-Corentin.

Le lendemain un des trois vicaires [3] de la paroisse d'Ergué-Gabéric alla rencontrer le témoin principal de l'affaire, à savoir le charron et débitant de boisson Yaouanc, et lui déclara qu'il « s'agissait certainement d'un civil déguisé en Frère ».

 

Avec sans doute l'intention de supprimer les preuves, le vicaire récupéra un des objets subtilisés par les témoins avant la fuite des amoureux, le chapeau du frère. Les autres pièces à conviction furent conservées pour l'enquête : « le parapluie du Frère, le chapeau, le corset, le tour de cou et le parapluie de la jeune fille ». Et cette dernière avoua les faits lorsqu'elle fut interrogée par le commissaire Judic.

Le commissaire Pierre Judic [1] était une véritable personnalité connue de tous les quimpérois de cette période 1906-1922, comme le montre les nombreuses coupures de presse locale relatant ses enquêtes. Il était de toutes les affaires en région cornouaillaise, accompagnant les forces de l'ordre lors des opérations d'inventaire des biens de l'Église, interrogeant tous les accusés et témoins, et parlant même couramment la langue bretonne, ce qui lui était bien utile pour comprendre les dessous de certains faits divers.

Contrairement aux deux autres affaires cléricales concernant les abbés Thomas [4] et Bulot [5], aumôniers du lycée de la Tour d'Auvergne, qui firent sensation quelques semaines auparavant, aucun journal, pas même le « Réveil du Finistère » qui fit sa une des affaires précédentes, ne couvrit le troisième scandale clérical du frère des Écoles Chrétiennes.

Que devint le frère Sergent ? Sans doute fut-il muté loin du lieu de ses méfaits, ou alors il préféra « jeter sa soutane aux orties » [6] ...

[modifier] 2 Transcription

Page 1

Affaire de meurs. Nouveau scandale clérical près de Quimper à Ergué-Gabéric.

1er mai 8

Le Directeur de la Sureté Générale.

J'ai l'honneur de vous faire connaitre qu'un troisième scandale clérical va éclater.

Ayant appris qu'un Frère des Écoles Chrétiennes avait été surpris, dans un champ, en conversation intime avec une jeune fille, j'ai ouvert une enquête dont voici les résultats :

Le mardi 21 avril, dans l'après-midi le sieur Sergent, Frère des Écoles Chrétiennes à Guidel (Morbihan), est allé se promener dans la commune d'Ergué-Gabéric en compagnie de la jeune Pxxx Jeanne, âgée de 16 ans, demeurant à Quimper rue Rouzeau. Ils se couchèrent l'un

Page 2

près de l'autre dans un champ. Le bon Frère dégrafa le corsage de la jeune fille, lui retira son corset pour être plus à l'aise et se mit en devoir de l'embrasser. Ce qui se passa ensuite, on le devine. Malheureusement pour les deux amoureux, cette scène, qui dura fort longtemps, a eu un témoin caché derrière un talus, le nommé Yaouang, charron et débitant de boissons sur la route d'Ergué-Gabéric. Celui-ci eut le temps d'aller chercher dans un champ voisin un autre témoin. Tous les deux, après s'être rendu compte de ce qui se passait, sautèrent par dessus le talus et mirent en fuite les deux amoureux.

 

Suite page 2

Comme pièces à conviction, ils cachèrent et emportèrent le chapeau et le parapluie du Frère, le chapeau, le corset, le tour de cou et le parapluie de la jeune fille.

Un vicaire d'Ergué-Gabéric, saisi de l'affaire, alla trouver les témoins, leur dit qu'il s'agissait certainement d'un civil déguisé en Frère, et finit par obtenir qu'on lui rendit le chapeau de ce dernier.

Page 3

Cette aventure défrayait les conversations, aux dépens du clergé, à Ergué-Gabéric et dans les communes voisines ; mais personne ne songeait à s'adresser au Parquet.

J'ai fait venir la jeune fille à mon bureau. C'est d'elle que je tiens la plupart des détails précis que je viens d'indiquer.

J'ai adressé hier à M. le Procureur de la République un rapport très détaillé sur cette affaire, avec les noms à l'appui.

D'après les ordres du Parquet, la gendarmerie a ouvert dès aujourd'hui une enquête officielle. Elle a entendu à Ergué-Gabéric les 2 témoins, qui ont été très affirmatifs. Le délit d'outrage public à la pudeur serait nettement caractérisé.

Le Frère inculpé ne saurait tarder d'être emmené devant le Parquet de Quimper.

Ce nouveau scandale, qui suit de si près l'arrestation du chanoine Thomas [4] et le suicide de l'abbé Buchot [5], va compléter le désarroi du parti clérical du Finistère et de toute la Bretagne.

Le Commissaire de police, P. Judic.


[modifier] 3 Originaux

 

Lieu de conservation : Archives Municipales de Quimper.

Série / cote : 1 I QUI 50

Droit d'image : Protégé.

Usage : Accès privé et restreint aux abonnés inscrits

Accès : Connexion obligatoire sur un compte nominatif d'adhérent GrandTerrier.

[modifier] 4 Annotations

  1. Né en 1862, après avoir été commissaire des chemins de fer à Dieppe, le commissaire Pierre Judic accepte en 1904 un poste de commissaire de 3e classe à Concarneau, avant d'être muté en 1906 à Quimper, est nommée à Maubeuge en 1911, puis Saint-Brieuc, et revient à Quimper de 1913 à 1922. Avant son entrée dans la police, le fin limier était instituteur public et répétiteur de lycée. À ses début à Quimper il est très sollicité lors des inventaires des bien de l'église. Hormis les enquêtes pour vols et de délinquances ordinaires, il intervient sur quelques affaires de mœurs impliquant des ecclésiastiques. Le maire de Quimper, Théodore Le Hars, le présente comme « un agent très instruit, très actif, et très dévoué ». Il parle également le breton, avantage appréciable dans une ville qui est encore dans ses couches populaires largement bretonnante. [Ref.↑ 1,0 1,1]
  2. Information et document communiqués par Pierrick Chuto, passionné d'histoire régionale, auteur de nombreux articles (Le Lien du CGF, La Gazette d'Histoire-Genealogie.com ... ) et de livres sur les pays de Quimper et du Pays bigouden : § [ses publications] . La dernière parution est « Bien-aimée Marie-Anne avec de belles lettres d'amour de son arrière-grand-père à sa promise. [Ref.↑]
  3. En 1908 la paroisse d'Ergué-Gabéric compte trois vicaires : Jean-Baptiste Boussard, Gabriel Cabon et Henri Le Roux, vicaire [Ref.↑]
  4. L'abbé Thomas, chanoine du chapitre cathédral, aumônier du lycée de La Tour d'Auvergne, âgé de 64 ans est arrêté pour « excitation » de mineurs à la débauche. Les faits avaient lieu dans la sacristie du lycée où le prêtre attirait par une porte dérobée « des jeunes gens de la classe ouvrière » : Image:RéveilFinistère-04041908.jpg. [Ref.↑ 4,0 4,1]
  5. L'abbé Bulot, lui aussi ancien aumônier du lycée, se livrait sur des mineurs aux mêmes pratiques criminelles que l'abbé Thomas. Se sachant surveillé par la police et à la veille d'être convoqué pour interrogatoire, le prêtre préféra mettre fin à ses jours. [Ref.↑ 5,0 5,1]
  6. « jeter la soutane aux orties », exp. : renoncer, abandonner par inconstance au départ, signifiait abandonner scandaleusement l'état monacal, puis par extension, abandonner l'état ecclésiastique , par extension encore abandonner par inconstance (source : dictionnaire en ligne Reverso). [Ref.↑]


Thème de l'article : Document d'archives sur le passé d'Ergué-Gabéric.

Date de création : Novembre 2014    Dernière modification : 31.05.2023    Avancement : Image:Bullorange.gif [Développé]